Je commencerai par répondre à la dernière question, même si M. Villeneuve, lors de son audition devant le groupe d'études sur le patrimoine, a dû donner un certain nombre d'éléments relatifs à l'état de la cathédrale. Je n'ai pas pu assister à cette audition, hélas, mais j'ai une idée de ce qu'il a dit.
L'état des lieux de la cathédrale est déjà très détaillé, même si du travail reste à faire. Il est important de savoir que, dès le lendemain de l'incendie, l'architecte en chef et ses collègues – ils sont quatre à travailler sur la cathédrale – ont réalisé un premier diagnostic. Celui-ci a bien sûr concerné les voûtes, qui ont été sévèrement touchées par l'incendie – plusieurs parties en ont été détruites. Ensuite, les piliers de la nef ont été expertisés. En effet, comme vous le savez, après qu'elle est tombée dans la nef, la flèche a continué à se consumer et a touché deux piliers ; ces derniers ont été cerclés par sécurité. Les pignons ont eux aussi été tout de suite expertisés et consolidés, car les craintes étaient fortes de les voir s'écrouler. Vous avez également entendu parler, naturellement, de la première expertise conduite sur les grandes orgues, lesquelles ont été, a priori, relativement épargnées. Des vitraux ont par ailleurs été déposés, non parce qu'ils auraient été abîmés, mais pour éviter qu'ils ne soient endommagés au cours du chantier. Le mobilier et les objets précieux de la cathédrale et du trésor avaient quant à eux été évacués pendant l'incendie.
Tous ces désordres constatés ont fait l'objet d'interventions immédiates afin de stopper toute aggravation et de sécuriser le monument. Des travaux ont depuis lors été réalisés : la consolidation des pignons des croisillons nord et ouest ; le bâchage des voûtes hautes, qui a été mené rapidement, par crainte de la pluie qui aurait pu abîmer encore plus la cathédrale ; la dépose de la Vierge du pilier, qui a été un moment important ; la pose de filets au-dessus de la nef – nous les avons vus quand nous avons visité la cathédrale –, pour éviter des risques liés à la chute de pierres de la voûte. Sont en cours la consolidation du pignon du croisillon sud et l'enlèvement des gravois au sol dans la nef, qui n'étaient pas encore terminés lorsque nous nous étions rendus sur place – il y a deux semaines, me semble-t-il –, mais avaient déjà beaucoup avancé. Un certain nombre de capteurs ont été installés pour vérifier que le bâtiment ne bouge pas. Concomitamment, bien sûr, l'enquête sur la cause de l'incendie se poursuit.
Les étapes suivantes sont la pose de planchers hauts et bas au-dessus et au-dessous des voûtes – car l'expertise la plus importante à mener à ce stade est bien sûr celle des voûtes, pour voir à quel point leur solidité a été éprouvée par l'incendie ; la pose d'un parapluie pour protéger la cathédrale ; enfin, et c'est là un problème délicat, la dépose de l'échafaudage du chantier de la flèche, qui est resté en place malgré l'incendie. C'est seulement à l'issue de ces travaux que l'on pourra considérer que la phase des travaux revêtant un caractère d'urgence impérieuse a pris fin.
Lorsque ces étapes essentielles pour garantir notamment la stabilité du bâtiment auront été franchies, on pourra considérer que l'édifice est protégé et stabilisé. Alors, et alors seulement, le bâtiment sera prêt pour le diagnostic et, bien sûr, les travaux de restauration.
En ce qui concerne la promotion des métiers, madame Calvez, plusieurs collègues avaient souhaité inclure dans l'article 2 le financement de la promotion des métiers d'art et des métiers rares nécessaires au chantier. Cela n'a pas été fait. Toutefois, il est clair que le chantier sera très suivi – en tout cas, nous l'espérons tous –, et un certain nombre d'idées émanant des architectes des monuments historiques sont déjà à l'étude pour en faire une vitrine de l'excellence française. C'est ainsi que sera assurée la promotion des métiers d'art et des métiers rares.
Madame Granjus, je comprends tout à fait que vous nous interrogiez à propos de l'utilisation des dons. Il est vrai qu'en France le mécénat est développé et que les donateurs ont l'habitude – et c'est une bonne chose – de recevoir régulièrement des informations relatives à l'utilisation de leurs dons et à leur répartition entre différentes dépenses. Nous avons inscrit dans le texte, en première lecture, deux rapports destinés à garantir la transparence de la collecte des dons et de leur utilisation. À l'article 7, notamment, nous avons prévu la réalisation d'un rapport sur l'utilisation des fonds par l'établissement public ou l'État qui sera en charge du chantier. Les donateurs pourront ainsi contrôler la bonne utilisation de leurs dons.
Pour répondre à Mme Anthoine et à Mme Bazin-Malgras, qui m'ont interrogée de concert à la fois sur l'article 9 et sur les dérogations au code du patrimoine, j'entends bien sûr leurs remarques. Nous avons déjà débattu de l'article 9 en première lecture. Nous en avons également parlé avec les sénateurs lors de la commission mixte paritaire, bien entendu. En évoquant l'article 9, vous abordez systématiquement la question du délai, de l'objectif des cinq ans – d'ailleurs assorti de multiples adjectifs, que j'ai de nouveau tous entendus ce matin. Je voudrais juste vous rappeler que cet objectif de cinq ans est un marqueur pour un chantier qui nécessitera une organisation titanesque car il est extrêmement ambitieux. J'insiste également sur le fait que si nous fixons cet objectif, c'est aussi pour la cathédrale elle-même. Je ne sais pas si vous en connaissez des exemples mais, pour ma part, j'ai en mémoire des bâtiments historiques qui se sont abîmés parce que le chantier n'avançait pas : ils ont été abîmés par le temps – celui qui passe et celui qu'il fait. Si nous nous fixons pour objectif d'aller le plus vite possible, quoique de manière raisonnable, c'est aussi pour mieux préserver la cathédrale. Or telle est bien, quand même, la raison pour laquelle nous sommes ici : faire en sorte que la cathédrale soit conservée et restaurée le plus rapidement possible. La vision des voûtes percées et des pierres en bordure de voûte – peut-être pourrons-nous organiser de nouvelles visites – est assez inquiétante. Aucun d'entre nous n'a envie, me semble-t-il, que la consolidation prenne du retard. Bien sûr, j'entends la crainte selon laquelle les dérogations pourraient ne pas aller dans le bon sens au regard du respect du code du patrimoine. Toutefois, ces dérogations ne sont pas avérées : il ne s'agit que d'ouvrir la possibilité.
Depuis le début, avec ce projet de loi, se pose le problème d'une conciliation entre ce qui est urgent et ce qui nécessite du temps. Nous sommes tout à fait conscients que la réalisation des travaux de consolidation et de restauration revêt une certaine urgence, mais que la préservation du patrimoine se fait sur le temps long. Je pense que nous sommes capables de faire les deux en même temps car nous avons des professionnels qui savent extrêmement bien gérer cette difficulté d'aller vite tout en prenant le temps nécessaire. Quant aux dérogations au code du patrimoine, le ministre de la culture s'est déjà exprimé sur la question et je pense qu'il le fera à nouveau en séance.