Monsieur Ledoux, vous avez notamment cité le rapport de Samantha Cazebonne. À la suite de sa publication, nous avons enclenché un processus de consultation et de concertation avec l'ensemble des parties prenantes. Il a eu lieu les 6 et 9 mai, en associant d'ailleurs aussi les parlementaires représentant les Français établis hors de France et les rapporteurs de la commission des finances.
Un séminaire a également eu lieu le 20 mai avec l'ensemble des parties prenantes, regroupant une centaine de personnes : parents d'élèves, représentants des personnels, des enseignants... C'était un exercice très important, au moment où nous voulions arrêter une véritable feuille de route. Car nous avons un but, but qui a été clairement fixé par le Président de la République : doubler les effectifs à l'échéance de 2030. Avec la croissance de la classe moyenne au niveau mondial, nous constatons une envie accrue de France et une envie accrue de scolarisation dans le système français, reconnu pour sa qualité, mais aussi pour les valeurs qu'il permet de partager.
En ce qui concerne la mutualisation éventuelle sur des fonctions support, peut-on imaginer de progresser entre les postes, ambassades ou consulats, et des établissements ? Il s'avère que, juridiquement et comptablement, ce n'est pas une voie que l'on peut poursuivre. Il y a eu un gros travail, au sein du réseau extérieur de l'État, sur la rationalisation des fonctions support. Cela s'est d'ailleurs traduit par le transfert d'un certain nombre de personnels et de crédits depuis différents ministères vers le Quai d'Orsay, pour rendre la gestion la plus rationnelle possible. Mais, s'agissant du cas particulier des établissements scolaires, de par leur différence de statut, une mutualisation ne s'avère pas possible.
Nous pouvons en revanche diversifier la forme de notre présence, et pour ce faire à la fois favoriser l'émergence de nouveaux établissements et l'extension des établissements existants. En ce domaine, un rôle de pilotage particulièrement fort est dévolu à nos postes et à nos ambassadeurs. Une crainte existe en effet, qui est celle de la cannibalisation d'établissements existants par de nouveaux établissements. J'ai en tête Bruxelles, Bucarest ou la Tunisie... À chaque fois, nos ambassadeurs ont été particulièrement actifs pour réunir l'ensemble des partenaires et éviter effectivement ce phénomène, lorsque de nouveaux établissements se sont créés. À l'avenir, il convient de maintenir cette méthode et cette procédure, pour que nous ayons une croissance harmonieuse du réseau.
L'AEFE est toujours plus proactive en ce qui concerne l'accompagnement des nouveaux projets. Vous avez évoqué le service de l'appui et du développement du réseau : on peut se réjouir de son action. Quand on regarde son organigramme, on peut aussi penser que cette structure doit être étoffée. Elle compte aujourd'hui trois personnes alors qu'il faudrait une arborescence beaucoup plus importante, avec des établissements présents partout dans le monde.
J'en viens à la question des moyens supplémentaires. Il y a, d'une part, ceux liés au coût résultant de l'homologation des établissements, de son suivi et de son renouvellement, mais aussi de la formation de nouveaux enseignants recrutés localement, parce qu'il faut être au rendez-vous de la qualité – c'est une demande très forte des parents d'élèves et des anciens élèves. Ces coûts ont été chiffrés à environ 3,3 millions d'euros par an. D'autre part, il y a la nécessité de réaliser un véritable rebasage budgétaire, qui a été demandé à compter de 2020 pour un montant de 31 millions d'euros, dont 12 millions afin de compenser le retour à un taux de 6 % pour la participation financière complémentaire – il était prévu, en effet, qu'elle passe de 9 % à 7,5 %, puis à 6 %. Il nous semble que ce rebasage est indispensable pour réaliser l'expansion du réseau dans de bonnes conditions. C'est d'ailleurs une recommandation figurant dans les rapports d'inspection, qui ont été transmis aux personnes consultées.
En ce qui concerne le COM, vous avez relevé qu'il est surtout un contrat d'objectifs, et un peu moins un contrat de moyens. Lorsque l'État prévoit des moyens dans un COM, il est vrai que la trajectoire est décroissante la plupart du temps. Je pense à Business France, par exemple. Sans préjudice de l'annualité budgétaire, je pense qu'il faut donner de la visibilité et de la prévisibilité : vous avez raison. Néanmoins, graver des moyens dans le marbre pourrait aussi conduire à revoir l'ambition à la baisse, ce que nous ne souhaitons pas.
Vous avez évoqué un certain nombre de verrous budgétaires, notamment sur le plan immobilier. Le fait de pouvoir procéder à des extensions ou à des constructions est une clef pour le succès du programme de développement de l'enseignement français à l'étranger. Nonobstant les remarques de la Cour des comptes et d'un certain nombre d'organismes, l'ANEFE a fait la preuve de son efficience. Il faut travailler, d'une façon ou d'une autre, sur un dispositif qui aurait le même effet, à savoir apporter une garantie. Des réunions interministérielles continuent à se dérouler pour « designer », si vous me permettez cet anglicisme, le nouvel outil. C'est indispensable en matière de développement. Des dossiers ont eu du mal à aboutir, vous l'avez dit, à cause de l'arrêt de la garantie. Nous devons donc trouver de nouvelles solutions.
M. Petit a évoqué des mesures qui viseraient à changer d'approche en matière budgétaire, par exemple en intégrant des opérateurs tels que le CNED et le CIEP au programme 185 ou dans le cadre d'un nouveau programme spécifique. Il est vrai que ces opérateurs jouent un rôle en ce qui concerne l'enseignement français à l'étranger, mais leur activité sur le territoire national est prédominante. Pour ce qui est du CNED, la part des personnes qui suivent ces questions sur le sol français est très importante. Il y a vraiment une fluidité totale, en particulier avec le CIEP. Je veux vraiment saluer l'action conduite par son directeur, Pierre-François Mourier. Le travail se fait dans l'harmonie.
Vous avez ensuite évoqué l'idée de soumettre la nomination d'un certain nombre de présidents de conseils d'administration à la validation du Parlement, en faisant référence à l'article 13 de la Constitution. Or cette disposition vise à encadrer le pouvoir de nomination du Président de la République pour des postes qui ont trait à la « garantie des droits et libertés » ou à la « vie économique et sociale de la Nation ». On peut avoir une vision extensive des choses, mais le cadre est quand même un peu différent. Je rejoins néanmoins vos préoccupations sur un point : pour avoir été président de conseils d'administration, même si c'était dans d'autres sphères, je sais que de tels organismes ne vivent que s'il y a une impulsion, si on sort de la liturgie et du rituel. C'est une telle impulsion, avec une feuille de route, que nous souhaitons donner aux présidents des conseils d'administration. Pascal Cagni, qui a été nommé il y a deux ans à la tête du conseil d'administration de Business France, a ainsi à coeur d'avoir une vraie discussion de board. Lorsque nous serons amenés à renouveler la présidence du conseil d'administration de l'AEFE – pour l'instant, c'est un fonctionnaire qui en est chargé, le directeur général de la mondialisation –, nous pensons qu'il pourrait être intéressant de nommer une personnalité qualifiée, afin d'avoir la dynamique que j'ai évoquée. Il ne faut pas que la messe soit déjà dite quand on se présente au conseil d'administration, c'est-à-dire que tout soit bouclé d'avance. C'est un lieu qui doit véritablement vivre, en tant qu'espace de débat pour préparer les décisions.
En ce qui concerne l'implication des parlementaires dans l'élaboration des COP et des COM, je ne verrais que des avantages, et je le dis publiquement, à ce que vous soyez, en tout cas, écoutés en amont. Comme vous assurez un suivi d'un certain nombre d'opérateurs, vous pouvez avoir des idées : il faut que l'on puisse s'en imprégner et s'en inspirer, sans que cela fasse nécessairement l'objet d'une procédure formelle.
Merci à Anne Genetet d'avoir signalé la part particulièrement modeste de la mission Action extérieure de l'État dans le budget. Je le vois à l'occasion de mes nombreux déplacements dans nos postes à l'étranger : nous travaillons quand même souvent avec des moyens qui restent ultra-raisonnables, y compris par rapport à ce qui existe chez certains de nos partenaires européens et occidentaux. Il est de bon ton de brocarder les effectifs ou le train de vie de la diplomatie, mais il faut rappeler ce qu'est l'action des ambassadeurs qui sont à la tête de ce qu'on appelle les postes à présence diplomatique. En Asie centrale, où je me suis rendu il y a quelques semaines, on en trouve au Turkménistan, où il existe des enjeux particulièrement importants en termes de diplomatie économique, au Tadjikistan, qui a une frontière avec l'Afghanistan et présente des enjeux de sécurité non nuls, ou encore au Kirghizstan, qui est frontalier de la Chine. Nos équipes réalisent un important travail avec seulement deux à trois personnes par poste.
En ce qui concerne le taux d'exécution des crédits du titre 2, qui s'est élevé à environ 103 %, je ne parlerais pas de sous-budgétisation, mais il est vrai que nous avons subi un double effet : celui du taux de change et celui de l'inflation mondiale, qui a été supérieure à ce qui était attendu. Il y a un impact, vous avez raison, sur la vie quotidienne d'un certain nombre d'agents. J'ai en tête des demandes concernant les États-Unis, en raison du coût de la vie. Nous sommes particulièrement vigilants sur cette question.
S'agissant des postes non reconduits, le ministère de l'Europe et des affaires étrangères a « rendu » 2 154 équivalents temps plein (ETP) depuis 2007, les effectifs à l'étranger ayant notamment été réduits de 20 %. Dans le cadre d'Action publique 2022, les arbitrages ont conduit à une trajectoire de réduction de 7,9 % de la masse salariale pour les ministères et les opérateurs employant des agents à l'étranger, la baisse étant d'environ 5,7 % pour le ministère de l'Europe et des affaires étrangères. Un effort particulier sera réalisé par notre réseau en Europe, dans les Amériques et au Maghreb. Si l'on raisonne par zones, la baisse des effectifs atteindra 22 % pour les Amériques depuis 2007, et 32 % pour l'Afrique et l'océan Indien. Nous ne manquerons pas de vous communiquer des éléments par missions et par fonctions.
Les crédits du programme 347 portent sur le G7, comme l'a rappelé le rapporteur général. Les 36 millions d'euros concernés représentent entre deux et trois fois moins que ce qu'avaient budgété les présidences italienne et canadienne en 2017 et 2018. On est donc dans une épure tout à fait raisonnable. Cela ne comprend pas les dépenses des réunions ministérielles, qui sont prises en charge par les missions des ministères concernés, ni les dépenses liées à la sécurité, qui relèvent du ministère de l'intérieur, dans le cadre de ses crédits. S'il y a eu peu de dépenses engagées en 2018 – c'est une litote – c'est parce que l'essentiel de la préparation et des décisions pour l'organisation du G7 ont eu lieu en 2019. Les dépenses sont liées à la logistique et à la mise en place de l'équipe pour le projet. Je peux vous rassurer : un groupe de travail interministériel est piloté par le secrétariat général du G7. Il a été créé pour suivre les coûts globaux qui sont liés à l'organisation du sommet et pour éviter les dérapages que vous avez évoqués.
Pour ce qui est de la fondation Alliance française, il y a eu 1 million d'euros de subvention exceptionnelle, en effet, en lien avec le protocole transactionnel entre cette fondation et l'Alliance française Paris Île-de-France. Vous savez qu'il y avait un lourd passif juridique entre ces deux institutions. Par ailleurs, il s'agissait de couvrir un plan social engagé en 2018. Au total, nous avons dressé un bilan positif à la fin de l'année 2018 : la situation était en cours d'assainissement. Nous attendons très clairement une gestion rigoureuse, notamment pour la masse salariale. Le travail se fait désormais en bonne harmonie alors que le climat était auparavant délétère.
En ce qui concerne les questions de sécurité, les dépenses se sont élevées à environ 29 millions d'euros en 2017 et 2018, ce qui correspond à un peu plus de 14 millions d'euros par an. Fin 2018, 95,5 % de la dotation de sécurité a été engagée, ce qui représente un bon niveau. Quant au financement par un CAS, je ne suis pas sûr, en effet, que ce soit le dispositif le plus adapté, et je crois d'ailleurs que c'est reconnu. Nous travaillons sur ce sujet.
Vous avez évoqué, monsieur le président, la politique immobilière de l'État à l'étranger. Il y a eu une vague de cessions assez importantes il y a quelques années. Jean-Yves Le Drian a souhaité qu'un certain nombre de pépites restent dans notre parc immobilier, ce qui n'empêche pas de réaliser des économies. La résidence de l'ambassadeur de France à Londres a potentiellement une valeur, par exemple, mais c'est aussi un outil majeur pour notre attractivité et pour l'organisation de certains événements. Nous avons néanmoins le souci de bien utiliser l'argent public. Certains ambassadeurs ont déménagé leurs bureaux et leur résidence pour avoir des outils parfois plus fonctionnels. En ce qui concerne les rapprochements des ambassades, des consulats ou des instituts avec ceux d'autres pays européens, le Président de la République et la chancelière fédérale d'Allemagne ont souhaité qu'il y ait trois initiatives pilotes d'hébergement conjoint des services culturels, de mémoire au Brésil, au Kirghizstan et au Bangladesh. Un retour d'expérience sera réalisé avant d'aller plus loin, peut-être.