Faysal Hanneche et Sofia Aouine sont aujourd'hui parrains, marraines, ambassadeurs du CNEAMO. Il nous a paru important de mettre en avant la parole des personnes qui ont été accompagnées. Nous leur demandons d'expliquer la manière dont ils ont vécu leur parcours en protection de l'enfance, tant négativement que positivement. Je ne crois pas en des parcours entièrement négatifs ou positifs. Faysal Hanneche est aujourd'hui un explorateur qui habite en Norvège. Sofia Aouine est auteur, écrivain et a été, à un moment donné, journaliste sur France Inter.
Pour Sofia Aouine, il a été intéressant de nous dire comment, à 39 ans, elle a vécu son retour en arrière et la consultation de son dossier. Elle a souligné le peu de traces, de photos, etc. Les écoles de formation forment à toujours plus d'écrits. Les photos sont plus nombreuses dans le cadre d'un hébergement, d'un foyer, mais quasi inexistantes en milieu ouvert. Sofia Aouine a raconté son histoire devant 1 100 personnes lors de nos assises annuelles, ce qui a été un choc pour tous les participants. Je travaille dans le secteur depuis 20 ans, l'absence de photos en milieu ouvert n'est pas de notre volonté, mais je crois que nous n'y avons même pas pensé. Cette phrase qu'elle a dite aux Assises a valu les dix interventions précédentes sur différents sujets. Ses propos ont une valeur tout à fait intéressante. Nous avons commencé à réfléchir, dans le service que je dirige et dans les formations, sur la trace que nous pouvons laisser. Les photos permettent de dire les endroits fréquentés de tel âge à tel âge. Dans son dossier épais, elle n'a trouvé que des écrits et des éléments très peu positifs et rien sur la manière dont elle a évolué, etc. Elle a exprimé ce manque de manière forte.
Faysal Hanneche, qui était intervenu également aux Assises l'année précédente, a eu un parcours très complexe, aux frontières de la protection de l'enfance, de la délinquance et de la santé mentale. Il parle simplement de la rencontre qu'il a eue avec deux travailleurs sociaux qui l'ont, pour lui, sauvé. Il dit qu'il n'était pas bon à l'école, qu'un certain nombre de choses se passaient mal dans sa vie, mais que deux travailleurs sociaux lui ont appris à faire du sport. Ces deux figures l'ont conduit à développer des compétences sportives jusqu'à réaliser un exploit mondial puisqu'il est le seul au monde, aujourd'hui, à avoir visité le pôle nord et le pôle, la même année, sans assistance. Il explique très bien pourquoi il a réalisé ce voyage, le désir de reconnaissance et d'être quelqu'un d'autre par rapport à son histoire personnelle. Il explique qu'il a rencontré de très nombreuses personnes avec lesquelles les relations n'étaient pas bonnes et que grâce à cette rencontre, il a pu avancer.
Ce sont deux histoires différentes. Elles restent des témoignages et chaque témoignage est unique. Il faut veiller à ne pas en faire de généralités, mais ces témoignages sont importants. Faysal Hanneche souhaite faire de la transmission, être régulièrement associé à des professionnels, rencontrer certains jeunes pour leur transmettre une expérience. Un jeune peut être, à un moment donné, au fond du trou et se raccrocher à quelque chose. Faysal Hanneche s'est raccroché au sport.