Nous sommes entre gens de bonne compagnie et je resterai courtoise. Mais laissez-moi vous dire le grand décalage qui existe entre ce que vous nous dites et ce que vivent les travailleurs sociaux et les professionnels sur le terrain.
Autrefois, il existait un « mandat PMI ». Dès le quatrième mois de grossesse, les services sociaux étaient informés par la CAF et ils se rendaient systématiquement dans les familles pour prendre connaissance de la situation environnementale, du milieu familial, des difficultés sociales et financières. Des réunions pluridisciplinaires, avec l'ASE, le médecin de PMI, les psychiatres – de permanence – permettaient d'évoquer les cas problématiques. Il existait toute une organisation territoriale, avec des pédopsychiatres dans les circonscriptions, dans les dispensaires, que vous semblez décrire aujourd'hui lorsque vous parlez d'expérimentations. Mais pourquoi expérimenter des choses qui ont déjà fonctionné ? Peut-être la donne a-t-elle changé ? La priorité des priorités n'est-elle pas de changer de politique publique et de remettre les professionnels sur le terrain, dans les familles, plutôt que d'attendre que les gens se rendent dans les permanences ? Peut-être cela n'est-il pas politiquement correct, trop intrusif ? Je pense que si nous en sommes là, c'est que les choses demeurent trop dans le flou !
Il y a, dans les foyers, des actes de violence inacceptables. Comment un gamin de 10 ans qui a tout cassé et a été emmené à l'hôpital psychiatrique par la police peut-il revenir dès le lendemain avec des médicaments ? C'est au point que certains départements se demandent s'il ne faut pas du personnel médical dans les foyers, en plus des éducateurs ! Il y a des déviances, et elles débouchent sur des situations insolubles, qui de surcroît alimentent la presse.
Vous parlez beaucoup d'interdisciplinarité. Ne faudrait-il pas, déjà, que vous l'exerciez au niveau des ministères, plutôt que de vous retrouver dans des silos ? Un service général pourrait ainsi regrouper la DGS, la DGOS et la médecine scolaire. C'est une proposition, mais je sais bien que la décision ne vous appartient pas !