Comme la question de la restauration à l'identique reviendra plusieurs fois au cours de l'examen du texte, je vais m'y attarder un peu. La formulation a d'ailleurs été modifiée dans certains amendements, qui tendent à imposer une restauration « dans son dernier état connu » ou « dans le dernier état visuel connu avant le sinistre ».
Il est normal que chacun ait un avis à ce sujet, qui a fait couler beaucoup d'encre et que nous avons déjà longuement évoqué lors de la première lecture et en commission.
Les architectes et les spécialistes de la restauration du patrimoine que nous avons auditionnés ont déclaré qu'une restauration à l'identique était impossible, pour plusieurs raisons. Il est impossible de trouver les mêmes matériaux, vous en conviendrez, et les méthodes ont évolué. Le plus important reste l'état de l'édifice. Le diagnostic n'est pas encore établi : nous ne savons pas à quel point la structure a été abîmée ; nous ignorons si elle pourra supporter une nouvelle charpente – reste à savoir en quels matériaux – ou une nouvelle toiture – là encore, en quels matériaux ? Enfin, il faudra sûrement adapter le bâtiment à une nouvelle sécurité incendie.
J'ai retenu de ces auditions que, pour rénover un monument historique, il convient à chaque fois d'étudier son histoire, le sens de sa construction, son environnement. Il est d'ailleurs notable que, lors des travaux de restauration des églises bombardées pendant la guerre, les architectes et les professionnels du patrimoine ont souvent fait des choix très différents d'une église à l'autre : parfois celui d'une restauration à l'identique ou dans l'aspect le plus proche possible de l'état antérieur ; parfois celui d'une reconstruction moderne ; parfois celui de laisser l'église dans l'état où elle se trouvait. Parce que professionnels du patrimoine, ils l'ont fait dans chaque cas en toute connaissance de cause.
L'émoi provoqué par l'incendie de Notre-Dame de Paris suscite probablement ce désir de la retrouver telle qu'on la connaissait ; les Français sont très attachés à cette cathédrale, nous le savons. Néanmoins, je considère qu'il ne revient pas aux parlementaires de décider des modalités de sa restauration. Nous avons la chance, en France, de disposer de professionnels pour cela. Laissons faire les experts. J'émets donc un avis défavorable sur ces amendements.