Après un examen approfondi, notre assemblée est sur le point de se prononcer définitivement sur ce texte relatif à Notre-Dame de Paris. Nous pouvons nous réjouir de quelques-unes de ses dispositions. En effet, à l'issue de nombreux débats, en commission et en séance publique, plusieurs clarifications ont été apportées. Elles étaient visiblement nécessaires.
Nous n'étions pas favorables à la création de l'établissement public prévue par l'article 8, mais la discussion à ce sujet a été constructive, et l'établissement possède désormais des contours bien mieux définis que dans le texte initial. Néanmoins, le groupe Libertés et territoires continue à s'interroger sur l'opportunité même de créer une telle structure.
Nos inquiétudes portaient également sur les nombreuses dérogations prévues à l'article 9, notamment en matière d'urbanisme et d'environnement. Là aussi, l'examen du texte a permis d'encadrer un peu mieux ces dérogations. Nous étions inquiets ; nous sommes aujourd'hui partiellement rassurés.
Nos réticences relatives à l'urgence ayant présidé à l'examen de ce texte, quant à elles, ne sont pas levées. Le débat sur ce projet de loi a révélé une forme d'impréparation de la part de la majorité. Je ne citerai qu'un exemple : la suppression de l'article 5 à la fois par la commission des finances et par la commission des affaires culturelles. Dois-je rappeler qu'il s'agissait d'un article clé du texte, puisqu'il définissait le cadre fiscal de la souscription nationale ? La majorité s'est justifiée en invoquant une « erreur de vote », puis s'est rattrapée, si j'ose dire, en rétablissant l'article en séance publique.
Nous l'avons répété depuis le début de l'examen de ce projet de loi, ne nous précipitons pas ! Restaurer la cathédrale ? Oui, bien sûr, c'est un impératif auquel nous souscrivons. En cinq ans ? Le groupe Libertés et territoires n'en fait pas une finalité, loin de là ; l'important est ailleurs.
L'examen de ce texte l'a montré : il faut du temps pour discuter de ces questions. Pour preuve, trois mois après l'incendie du 15 avril, nous exprimons encore des doutes sur certaines dispositions du texte qui est sur le point d'être définitivement adopté. Le déroulement de la collecte des dons nous invite également à prendre du recul, à accepter d'être patients. Cela a été dit, seulement 9 % des dons promis ont été recueillis jusqu'à présent, soit environ 80 millions d'euros.
Nous sommes évidemment favorables à la restauration de la cathédrale. Toutefois, nous regrettons que, malgré nos alertes, ce texte prenne les contours d'une loi d'exception. Certes, le symbole est fort, pour les gens d'ici et d'ailleurs, pour les touristes du monde entier, pour les amoureux de la littérature, pour les catholiques ou pour les passionnés d'architecture, mais cet incendie doit nous donner l'occasion de faire appel à notre créativité. Artisans, architectes, ingénieurs sont prêts à mettre leur expertise, leur talent et leur ingéniosité au service de la restauration de Notre-Dame.
En outre, pourquoi ne pas avoir répondu à cet accident en élargissant notre champ de réflexion, en nous interrogeant sur la restauration et la préservation des châteaux, des églises et de tous les monuments de nos régions, de nos villes, de nos villages, de nos territoires tout simplement ? Nous ressentons un léger goût d'inachevé, celui d'une occasion manquée, car nous aurions dû inclure l'ensemble de notre patrimoine dans notre étude.
Notre-Dame a été un exemple emblématique de ce qui touche le patrimoine sur tout le territoire. Les moyens manquent, et nous devons entendre ce cri d'alerte ; nous espérons que vous saurez l'entendre, monsieur le ministre. Nous continuons à croire, comme nous l'avions formulé en présentant un amendement en nouvelle lecture, que le surplus de dons, s'il existe, doit être redirigé vers la restauration de monuments dans d'autres régions.
Il convient de rappeler ici un chiffre frappant, attestant la fracture territoriale en la matière : 65 % des crédits du patrimoine sont destinés à l'Île-de-France, le reste du territoire étant contraint de se partager le tiers restant. Cette situation est éminemment discutable.
Nous avons la conviction que les réalités quotidiennes relaient notre discours : les sites historiques, religieux et architecturaux suscitent partout un intérêt majeur, surtout en pleine période estivale. Par leur affluence et par leurs dons, ces visiteurs témoignent de la nécessité de préserver le patrimoine. Avec ce texte, à nos yeux, nous ne les accompagnons pas assez en ce sens.
Nous avons donc de ce texte une vision contrastée. Le fond, à savoir la restauration de la cathédrale, ne pose, bien sûr, pas de problème. La forme, c'est-à-dire la rédaction qui nous est proposée, en pose un peu plus.