Je vous remercie donc d'avoir permis ce débat important et approfondi.
L'examen du prélèvement sur recettes par notre assemblée souligne d'emblée le caractère insatisfaisant du financement de l'Union européenne. En effet – et cela n'est pas mince – le budget européen n'a, hélas, d'européen que le nom. Les ressources propres traditionnelles sont totalement marginales : 90 % de ce budget provient en réalité des États membres à travers les contributions dites TVA et revenu national brut. Si c'est le Parlement européen qui se prononce sur les dépenses, ce sont les parlements nationaux qui se prononcent sur les recettes.
En ce qui concerne les dépenses du budget européen, 80 % repartent vers les États membres sous forme de subventions agricoles ou d'aides à la cohésion et, sur les 20 % restant, 6 % sont affectés à l'administration européenne. Voilà qui ne laisse que 14 % du budget pour les actions véritablement supranationales telles que Erasmus, la recherche européenne ou l'action de l'Union européenne dans le monde. Ce cadre inadapté limite en particulier la capacité de réaction de l'Union face à la crise des migrations.
Dans ce contexte, il me semble que la préparation du cadre financier pluriannuel post-2020, qui devra tenir compte du retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne, doit être l'occasion d'une remise à plat ambitieuse des dépenses et des ressources propres de l'Union – je suis heureux que l'orateur précédent l'ait également souligné.
Je tiens à observer, par exemple, que le temps budgétaire n'est pas aligné sur le temps démocratique puisque le cadre financier pluriannuel est établi pour sept années alors que les élections européennes ont lieu tous les cinq ans. Avec des moyens modestes – 1% du PIB de l'ensemble des pays de l'Union – , le cadre financier pluriannuel tente de conforter les priorités que sont la recherche, l'emploi et la croissance, la politique agricole commune ou encore la politique extérieure. Il intègre, en outre, la solidarité envers les nouveaux États membres à travers la politique de cohésion et tente de s'adapter aux urgences auxquelles l'Union est confrontée, en particulier l'évolution de la situation migratoire.
Stimuler la croissance, l'emploi et l'investissement : en 2018, la Commission propose en particulier d'allouer une contribution supplémentaire de 2 milliards d'euros au fonds de garantie du Fonds européen pour les investissements stratégiques, 55,4 milliards au fonds structurel d'investissement en faveur des régions et des États membres et environ 59,6 milliards d'euros aux agriculteurs et au développement rural.
Après un démarrage lent au cours des premières années qui pose d'ailleurs de nombreuses questions, les programmes structurels et d'investissement de l'Union européenne pour la période 2014-2020 devraient atteindre leur vitesse de croisière en 2018, ce qui explique – vous l'avez souligné, madame la ministre – l'augmentation importante des crédits de paiement par rapport au budget 2017. Le nouveau Fonds européen de développement durable devrait également mobiliser des fonds supplémentaires. Le budget 2018 s'inscrit donc très largement dans la continuité des précédents, sans impact du Brexit cette année. Je le répète du haut de cette tribune avec une grande solennité : le contexte du Brexit est une occasion unique, madame la ministre, de réformer profondément le budget de l'Union européenne.
La contribution française est estimée à 20,2 milliards d'euros contre 19 milliards en 2017 : cette augmentation importante s'explique par la montée en charge très tardive de la politique de cohésion. J'invite, comme nous l'avons fait en commission, nos collègues eurosceptiques à sortir de la vision, à mon sens trop partielle, qui consiste à ne voir dans le prélèvement européen qu'un coût. Je les invite à mieux appréhender et mesurer la valeur ajoutée de l'Union européenne pour la France.
J'insiste volontairement, madame la ministre, sur la chance historique que nous avons de réviser de manière ambitieuse le mode de financement du budget de l'Union européenne…