Je suis enseignante référente depuis l'entrée en application de la loi de 2005. J'étais auparavant secrétaire de commission de circonscription pour l'enseignement préélémentaire et élémentaire (CCPE). En vingt ans de travail dans l'adaptation scolaire et la scolarisation des élèves handicapés (ASH), je suis passée de la convention d'intégration à l'inclusion.
Les missions de l'enseignant référent handicap (ERH) sont des missions d'accueil, d'information, d'accompagnement et de liaison, d'animation, de mémoire et de garant de la mise en oeuvre du projet personnalisé de scolarisation (PPS). À ce titre, il est l'interlocuteur privilégié des parents et de tous les professionnels qui travaillent auprès des élèves.
Nous sommes 32 enseignants référents handicap dans le département de Seine-Maritime et nous suivons les élèves qui bénéficient d'une compensation notifiée par la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) au titre de la scolarité : aide humaine, dispositifs unité localisée pour l'inclusion scolaire (ULIS), enseignement général et professionnel adapté (EGPA), établissements médico-sociaux (EMS), matériel pédagogique adapté (MPA), service d'éducation spéciale et de soins à domicile (SESSAD), etc.
Au 6 mai 2019, je suis le parcours de 240 élèves répartis sur les 26 communes de mon secteur. D'autres collègues du département suivent plus de 350 élèves.
Les partenaires privilégiés de l'enseignant référent sont les familles, la MDPH, l'Éducation nationale, les partenaires de soins et les partenaires sociaux.
Pour les familles, l'enseignant référent est désormais un interlocuteur bien identifié, notamment pour : faire état des dysfonctionnements, comme ce fut le cas pour ceux relatifs à l'affectation des auxiliaires de vie scolaire (AVS) à la rentrée 2018 ; exprimer leur mécontentement face aux délais de traitement des dossiers par la MDPH et aux listes d'attente pour mettre en place des soins, avec de nombreuses inégalités territoriales ; évoquer leurs difficultés face aux nouveaux imprimés, notamment les vingt pages du formulaire de demande, ou exprimer leur incompréhension et même leur colère quand elles doivent faire une nouvelle demande de prolongation de séjour IME ou SESSAD, alors que leur enfant est toujours en liste d'attente – dans mon secteur, 38 élèves sont en liste d'attente SESSAD sur les 77 notifiés.
Mais les familles nous interpellent aussi pour nous dire qu'elles ont « de la chance » quand l'AVS a été affecté rapidement ou que leur enfant a été affecté rapidement sur un dispositif ULIS. De la chance !
Dans l'exercice des missions de l'enseignant référent, si des pans entiers fonctionnent et sont bien rodés, d'autres mériteraient d'être améliorés pour une meilleure efficacité. Je les énumérerai sans les hiérarchiser.
Tout au long de l'année, l'enseignant référent complète des tableaux dont la forme varie souvent au fil des ans, occasionnant un travail fastidieux de saisie. Ainsi, à la rentrée, on nous a demandé de remplir un tableau de 90 colonnes pour, en ce qui me concerne, 240 élèves. L'ERH doit répondre à une enquête ministérielle, compléter des tableaux divers et variés pour différents partenaires, car nous avons besoin de mutualiser nos données.
Nous avons besoin d'une transmission fiable des notifications des élèves, à défaut d'avoir un PPS formalisé. Le nouveau système d'information de la MDPH nous met en difficulté pour assurer nos missions. Des noms d'élèves ne figurent pas dans les tableaux qui nous sont transmis. Comment les affecter en ULIS ou affecter un AVS si nous n'avons pas cette information ?
Nous avons besoin de plus de réactivité de la MDPH. Le retard dans le traitement des dossiers devient difficile à défendre auprès des familles. Réclamer des justificatifs de domicile ou d'identité parce que les dossiers ont été envoyés avant la mise en place des nouveaux formulaires fait perdre beaucoup de temps. Nous arrivons à la période de l'année scolaire où ont lieu les affectations en ULIS et en SEGPA pour la rentrée prochaine, sans disposer des notifications.
Nous avons besoin de fluidifier la communication entre professionnels. Je parle bien de communication et non de tableaux. Joindre par téléphone les services de la MDPH ou les services de l'Éducation nationale relève parfois du parcours du combattant, autant pour les familles que pour nous, professionnels. Il conviendrait de réinitier les réunions en présentiel à la MDPH qui n'ont plus lieu depuis deux ans.
Nous avons besoin de conditions de travail satisfaisantes. Nous suivons un grand nombre de situations de plus en plus complexes. Pour répondre aux besoins d'accompagnement des enseignants, qui sont très demandeurs, les enseignants référents doivent être plus disponibles. Le suivi de 240 élèves ne permet pas d'avoir beaucoup de disponibilité. Nous souhaitons un enseignant référent pour 100 élèves. Nous formulons aussi des demandes plus matérielles. Nous ne voudrions plus avoir à batailler tous les ans pour obtenir le versement des frais de déplacement et que la dotation annuelle de 35 euros pour les fournitures de bureau, y compris les ramettes de papier, soit revue à la hausse.
Il faudrait aussi rendre effectives les compensations notifiées. Il existe des listes d'attente pour à peu près tous les types de notification : AVS, ULIS, EMS. De même, le matériel pédagogique adapté n'est pas attribué rapidement.
Il faudrait rendre la participation des membres de l'équipe de suivi de la scolarisation effective. Il est difficile d'avoir une équipe au complet. Au mieux, il manque un professionnel, au pire, il n'y a qu'un professionnel. Beaucoup de travail reste à faire en ce domaine, notamment dans le second degré. La présence des responsables des centres de soins, hors SESSAD, et des professionnels en libéral est assez irrégulière.
Enfin, les enseignants nous disent régulièrement qu'ils souhaitent davantage de formation pour être en mesure d'apporter des réponses adaptées aux compétences et aux besoins des élèves. Les AVS sont également demandeurs.