Intervention de Sébastien Monié

Réunion du mardi 7 mai 2019 à 17h30
Commission d'enquête sur l'inclusion des élèves handicapés dans l'école et l'université de la république, quatorze ans après la loi du 11 février

Sébastien Monié, membre du Collectif AESH en action :

Je serai beaucoup plus bref. Je propose de témoigner de mon expérience, mais aussi de rapporter le témoignage de collègues sur notre réalité quotidienne – pas seulement des anecdotes, mais bien des situations et des usages qui sont devenus la norme. Je répondrai donc à vos questions en m'appuyant sur mon expérience et mon vécu, mais aussi en allant piocher dans celui de mes collègues un peu partout en France, qui est arrivé jusqu'à moi par différents canaux, notamment par le Collectif AESH en action ! que je représente aujourd'hui. Ce groupe Facebook créé il y a cinq ans réunit un petit peu plus de 10 000 personnes : des AESH, des enseignants, des parents, mais aussi parfois d'autres collègues comme des agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (ATSEM) ou des assistants d'éducation (AED) – puisqu'il y a encore peu, nous étions tous sous le même statut.

À travers cette diversité d'expériences, je peux vous dessiner qui sont, en grande majorité, les AESH : des femmes, quadragénaires, diplômées au moins du baccalauréat, sans nécessairement d'expérience antérieure avec le handicap, qui effectuent souvent ce métier par nécessité et pour un salaire de moins de 730 euros par mois, ce qui correspond à une quotité horaire de 60 % bien que ce métier requière l'équivalent d'un temps plein. Certaines ont un complément d'activité, mais sacrifient plus de temps encore et parviennent rarement à dépasser le seuil de pauvreté. Bien sûr, il y a des exceptions. J'en suis une moi-même puisque je suis un homme, je travaille à 80 %, je m'en sors assez bien et c'est mon expérience antérieure dans le handicap qui m'a précisément amené à exercer ce métier depuis onze ans. Pour autant, elles sont ce qu'elles sont : des exceptions. Il ne faut donc pas nécessairement les prendre en considération, mais tenter au contraire d'appréhender la réalité de la masse.

La question est simple et la réponse l'est tout autant. Le métier d'AESH se suffit-il à lui-même pour avoir une vie décente ? Non. Pas de formation réelle pour être efficace ; pas de statut suffisamment protecteur – ce qui nous rend vulnérables à des situations illégales aujourd'hui courantes ; une manière de comptabiliser les heures trompeuse et tronquée ; un salaire miséreux pour récompense : c'est le triste constat qu'il nous faut faire. L'école inclusive a créé non pas un professionnel compétent pour accompagner des élèves en situation de handicap, mais exploité et entretenu une précarité dont souffrent bien évidemment le personnel, mais plus encore les enfants avec qui nous ne sommes pas en concurrence, mais bien dans le même bateau. Aujourd'hui, ne pas considérer les AESH, c'est ne pas considérer les enfants. Et sans vouloir jouer les Cassandre, avec la mutualisation forcée, les PIAL, les classes surchargées, qui sont également un problème, et d'une manière générale la loi sur l'école de la confiance qui ne répond pas aux besoins et va même peut-être renforcer des contextes problématiques, la situation risque d'empirer.

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