Intervention de Agnès Buzyn

Réunion du mercredi 10 juillet 2019 à 16h35
Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé :

Concernant les femmes âgées et la réforme du grand âge, un travail est en cours afin d'élaborer, pour la fin de l'année, un projet de loi dans lequel cette question de l'intergénérationnel sera posée. Elle abordera notamment la question de la diversification des lieux d'hébergement, car nous souhaitons sortir du « tout EHPAD » (établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes). Même si le maintien à domicile reste clairement la priorité, nous voulons développer nombre d'offres intermédiaires dans lesquelles l'hébergement inclusif, donc intergénérationnel, trouvera toute sa place, permettant de changer de regard sur les personnes âgées et les femmes âgées. Par ailleurs, le Premier ministre a confié à la députée Audrey Dufeu Schubert, une mission sur l'âgisme dont j'attends les conclusions pour voir comment ce changement de regard pourrait s'opérer ; l'inclusion et l'intergénérationnel permettent un vrai changement de regard, cela ne se décrète pas mais se met en oeuvre dans la vie quotidienne. Nous verrons si nous pouvons nous emparer des conclusions de cette mission pour promouvoir des mesures spécifiques dans le projet de loi Grand âge et perte d'autonomie.

Dans ce projet de loi, un axe sera dédié à la question des proches aidants. Il comportera des mesures auxquelles nous travaillons avec Sophie Cluzel car il ne s'agit pas seulement des aidants des personnes âgées, mais aussi des aidants familiaux ou proches de personnes handicapées ou malades. Nous présenterons une feuille de route en septembre sur cette question. J'ai déjà dit qu'avant même le projet de loi, des mesures figureront dans le prochain PLFSS, dont l'une relative à un congé proche aidant, pris en charge par la sécurité sociale. La question du répit des aidants sera traitée dans la feuille de route et dans le projet de loi grand âge.

Comment prendre en compte, dans la réforme des retraites, les inégalités en termes de pension qui sont souvent le reflet des inégalités de carrière ? Il est clair que notre système actuel favorise les carrières longues, homogènes, ascendantes, et essentiellement masculines, et défavorise les carrières hachées, plates, c'est-à-dire souvent celles de femmes avec enfants. Tout le projet de loi que prépare le Haut commissaire à la réforme des retraites vise à gommer ces inégalités de carrière et à rendre à l'avenir notre système de retraite plus juste, plus équitable, donc à gommer ce différentiel. Cela correspond aussi aux nouveaux défis de la société de demain : nous savons que les carrières seront moins linéaires et nous avons besoin d'adapter notre système de retraite par répartition aux profils de carrière des futures générations. Il gommera ces inégalités en tenant compte des congés rémunérés dus aux grossesses et il revisitera aussi les droits familiaux. Les droits familiaux sont aujourd'hui multiples ; l'un d'entre eux, notamment, accorde une surrémunération de 10 % dès le troisième enfant. Les pensions de retraite des hommes étant souvent plus importantes, ce sont en pratique les hommes qui bénéficient de ces 10 %. Tout un travail a été effectué dans le champ de la solidarité de notre futur régime de retraite pour requestionner ces droits familiaux et les adapter aux réalités du XXIe siècle. Le Haut commissaire présentera sa réforme et son système cible aux partenaires sociaux le 18 juillet prochain. Je le laisse dévoiler ses pistes, mais elles répondent à vos préoccupations concernant la retraite des femmes.

Nous sommes de plus en plus attentifs à la question des statistiques genrées et à la place des femmes dans les politiques publiques. Il est vrai que l'on dispose souvent de statistiques datant d'une période où la question du genre était moins prégnante, mais dans les travaux de la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES), nous sommes désormais très attentifs à disposer de ce type d'indicateurs. Cela bénéficiera aux travaux qui seront publiés à l'avenir.

En ce qui concerne l'invisibilité des femmes ménopausées et la lutte contre les stéréotypes, je vais prendre connaissance de votre rapport pour voir comment nous pouvons intégrer les recommandations que vous avez faites, mais je comprends bien la problématique que vous pointez du doigt.

S'agissant des composés toxiques dans les protections hygiéniques des femmes, il y a deux sujets qu'il faut séparer : celui de la sécurité sanitaire concerne les chocs toxiques qui ont été clairement identifiés dans des cas d'endotoxines bactériennes avec des tampons contaminés. Des mesures correctives ont été prises lors de la production des produits. Mais on a aussi souvent observé que ces chocs étaient liés à une mauvaise utilisation des protections et il convient donc de mieux informer les femmes sur les règles d'utilisation de ces produits.

Le deuxième sujet concerne les contaminations par des composés chimiques ou toxiques dans les protections hygiéniques. À la suite d'une saisine, l'ANSES a pu constater la présence de produits toxiques, mais à des doses faibles. Eu égard à notre connaissance de la contamination par la peau, l'Anses considère qu'il n'y a pas de risque sanitaire identifié. En fait, les doses toxiques le sont en cas d'ingestion. Il n'y a donc pas de risque sanitaire identifié, même si nous souhaitons tous, à l'avenir, voir diminuer la présence de produits chimiques dans les produits que nous utilisons, à condition, bien sûr, qu'on n'expose pas, à l'inverse, ces protections hygiéniques à un risque de prolifération bactérienne, parce qu'il n'y aurait plus les produits qui empêchent justement cette prolifération. Aujourd'hui, les taux de substances retrouvées sont faibles et il n'y a pas d'alerte spécifique même si leur impact sur les muqueuses vaginales nécessite des travaux complémentaires.

La précarité menstruelle des femmes précaires est un sujet plus spécifiquement suivi par Christelle Dubos. Nous nous sommes engagées sur cette question parce que c'est évidemment le coeur des préoccupations de ce ministère et nous travaillons avec les partenaires associatifs qui nous alertent en permanence. Nous attendons les résultats de votre mission pour savoir comment nous pouvons faire mieux pour ces femmes. Une mission a également été confiée à la sénatrice Patricia Schillinger, qui va nous permettre de travailler sur les questions d'accès matériel aux protections hygiéniques pour faire évoluer les mentalités. Nous travaillons également avec Julien Denormandie, qui est en charge de l'hébergement d'urgence – c'est dans ces lieux qu'on peut aussi apporter une solution –, et avec toutes les associations de terrain auprès des personnes précaires pour faciliter la collecte et la distribution de protections hygiéniques. Nous travaillons aussi aux moyens de les soutenir financièrement. Agnès Pannier-Runacher est aussi très sensibilisée : elle étudie comment mobiliser les industries qui produisent ces protections.

Sur l'endométriose, nous sommes en train de décliner la feuille de route. Dès cette année, des modules de formation figureront dans le développement personnel continu des professionnels. Cela apparaîtra dans la nouvelle maquette, dans le cadre de la réforme des 2e et 3e cycles des études de médecine. C'est un engagement des enseignants et des doyens. Et nous faisons le même travail pour les formations des sages-femmes.

En termes de détection, il y a la consultation obligatoire des 11-13 ans, celle des 15-16 ans, et la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM) a d'ores et déjà complété son site internet avec un volet sur l'endométriose qui figure dans le volet professionnel des référentiels qui correspondent à ces consultations. Elle a également ajouté le mot « endométriose » dans le mèl qui est adressé aux assurés. Et une consultation santé sexuelle est en train de se mettre en place à l'âge de 16-17 ans.

En termes de recherche, une journée de mise au point scientifique a été organisée par l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM). Nous avons, grâce au travail des chercheurs, un bilan des axes de recherche à promouvoir sur ce thème. Un projet hospitalier de recherche clinique a été sélectionné cette année sur le thème de l'endométriose. Un numéro spécial de la revue Médecinesciences sur ce thème est également prévu.

S'agissant enfin de l'information, nous travaillons avec les associations afin de les rendre plus visibles.

Je suis ce dossier de très près parce que je veux des résultats clairement identifiés au bout d'un an.

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