Intervention de Christophe Castaner

Réunion du mardi 16 juillet 2019 à 16h35
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Christophe Castaner, ministre de l'Intérieur :

Nous sommes habitués à vos tirades d'accusateur public, à la Fouquier-Tinville. Mais monsieur l'accusateur public, veillez à l'exactitude de vos propos et évitez les amalgames. Votre leader avait traité Bernard Cazeneuve d'assassin, avant de s'en excuser ; je n'ai toujours pas entendu vos excuses.

Les forces de l'ordre et les manifestants ne sont pas deux bandes rivales, entre lesquelles il faudrait choisir. Vous estimez que l'envahissement du Panthéon est une bonne chose et qu'il ne faut pas que les forces de l'ordre interviennent pour évacuer sans brutalité ceux qui l'occupent, c'est votre choix. C'est aussi votre choix de penser que les manifestants présents sur le site de Bure de façon illégale doivent être protégés et ne doivent pas être surveillés ; que les leaders des gilets jaunes puissent revenir sur les Champs-Élysées dès 14 heures pour brûler deux poubelles et des sanisettes ; que des policiers et des gendarmes soient sifflés pendant le défilé de nos forces dimanche matin. Et vos propos constituent un encouragement.

Mais, monsieur le député, vous et moi sommes fondamentalement différents. Je n'ai jamais cherché à poser avec une tenue de gendarme et des armes. Je suis juste ministre de l'Intérieur ; je ne fais pas semblant. Je tourne avec la Brigade anticriminalité (BAC), avec police secours, avec les pompiers, sans gilet ni signe distinctif, car il est important qu'un ministre de l'Intérieur passe du temps avec les hommes qui travaillent pour son ministère. Contrairement à vous, je n'ai pas besoin de les dénoncer et de les stigmatiser systématiquement !

Monsieur Molac, vous avez d'abord salué la police de sécurité du quotidien. Vous avez raison, c'est la police du lien. C'est particulièrement vrai dans les zones gérées par la gendarmerie, qui a cette culture du lien dans son ADN. Les élus ruraux connaissent sa capacité à bien travailler avec eux – la gendarmerie est maligne – et à faire vivre la relation comme une évidence.

Vous avez salué la hausse des effectifs sous François Hollande. Je l'ai dit dans mon propos liminaire, c'est vrai après 2015. Reste que les arbitrages sont toujours difficiles et qu'il faudra s'interroger sur le renforcement des forces mobiles. Nous ne l'avons fait ni pendant cette législature, ni pendant la précédente – nous étions ensemble dans la majorité –, alors même que les forces mobiles avaient perdu 2 000 emplois au cours de l'antépénultième législature.

Vous m'interrogez sur des « erreurs d'interprétation » et le rôle du maintien de l'ordre dans les tensions avec les gilets jaunes. Je ne crois pas que la cause se trouve là. Je me souviens, sans doute comme vous, comment le mouvement de la Manif pour tous a duré, et que les déplacements de ministres ont longtemps été perturbés. Il y a des phénomènes d'enkystement autour d'un petit noyau – 3 500 personnes manifestaient encore en France samedi dernier, ce qui est extrêmement faible. Mais le mouvement social, la contestation, la grogne peuvent s'exprimer sous d'autres formes. Quoi qu'il en soit, quand le maintien de l'ordre intervient, c'est déjà un échec. Son rôle n'est pas d'intervenir dans une émeute urbaine – dans cette phase, le maintien de l'ordre intervient après sommation, comme cela a été le cas dimanche encore sur les Champs-Élysées, en début d'après-midi. À Paris, nous avons tous connu des manifestations regroupant un million de personnes qui se passaient bien. En ce moment, tous les samedis, avant même le début de la manifestation et alors que 100 à 200 personnes seulement sont arrivées, des violences sont lancées contre les policiers. Telle est la réalité. Ce n'est pas l'affaire d'une bande contre une autre bande !

Je souhaite que chaque suspicion de violence ou de manquement soit soumise à une enquête – c'est presque toujours une enquête judiciaire. C'est une garantie citoyenne et une responsabilité pour nos policiers et nos gendarmes. Ils savent que cela pèse sur eux. Quant aux parlementaires qui vont devant le Panthéon soutenir ceux qui l'occupent, ils savent qu'ils seront toujours protégés par l'immunité parlementaire !

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