Samedi dernier, le corps d'un jeune homme, pendu, a été retrouvé dans le square Charles Hermite, dans le 18e arrondissement de Paris, dans ma circonscription. Cette personne vivait dans la rue, comme beaucoup d'autres aujourd'hui, sans solution d'hébergement, sans espoir d'une issue favorable, sans le droit au refuge et à l'accueil digne que nous devrions leur permettre d'obtenir. Début avril, c'est une femme dont le corps avait été retrouvé dans la boue à la Porte de la Chapelle, sur un trottoir de la « ville Lumière ». Ces personnes relevaient, avant leur mort, de votre ministère, puisqu'elles étaient étrangères sur le territoire français et que leur hébergement – ou non – dépend en grande partie de votre administration.
Je vous ai adressé deux courriers cette année, le 21 janvier puis le 20 juin, à propos de la crise de l'accueil et du nombre de personnes sans abri qui sont laissées sans solution dans ma circonscription. Je ne suis pas la seule à l'avoir fait : de nombreuses associations vous interpellent depuis des mois sur le problème de l'hébergement, en particulier dans les structures qui sont chargées de celui des demandeurs et des demandeuses d'asile et des personnes migrantes, et sur le fait que le remplacement de l'hébergement inconditionnel des personnes à la rue par une logique de tri entre le bon et le mauvais migrant, le bon réfugié et la mauvaise personne sans domicile fixe (SDF), multiplie les difficultés, y compris pour les personnes censées leur venir en aide. Cela va à l'encontre, non seulement de ce à quoi nous sommes tenus par le droit international et par nos principes, mais aussi d'une politique d'accueil un tant soit peu raisonnable, rationnelle, à défaut d'être digne et humaine. Mes deux courriers, comme les interpellations des associations, sont restés sans réponse.
Le 25 juin, le Gouvernement a annoncé sa volonté de faire ficher par le 115 les personnes accueillies, selon leur statut administratif. Vos politiques mettent les gens à la rue, et vous vous occupez de les chasser, de les ficher et de les laisser mourir. Un nombre glaçant de personnes mortes pèse sur votre ministère. Nous n'oublions pas Zineb Redouane, et nous demandons toujours où est Steve... À cela s'ajoutent les personnes qui sont mortes à la Chapelle, et il y en aura certainement d'autres demain.
Le constat est effrayant. Je suis fière, monsieur le ministre, d'être aux côtés des organisations non gouvernementales (ONG) que vous considérez comme des complices des passeurs, de Carola Rackete, à qui le Gouvernement a refusé son aide alors qu'elle sauvait des vies, et de toutes celles et ceux qui se battent pour leur dignité et pour leurs droits. Êtes-vous fier d'être aux côtés des xénophobes, des anti-migrants, de Trump et de Salvini ? Combien de personnes allez-vous encore laisser mourir ?
Je n'attends pas véritablement de réponse de votre part, de même que je n'ai pas eu de réponse à mes courriers. Voilà en tout cas ce qu'est votre bilan, et je ne crois pas qu'il y ait de quoi être fier.