Je vais apporter deux réponses rapides à vos interrogations sur la continuité funéraire, pour vous dire que les décrets d'application avaient été pris tardivement, en septembre 2018, suite aux annonces précédemment faites. À ce jour, on me dit qu'il y a peu de demandes. Il y a peut-être un problème d'information sur la possibilité d'avoir accès à ce type d'aides. On peut améliorer la communication sur toutes les petites questions techniques. Permettez-moi de vous adresser ensuite une réponse sur ce sujet. Sur la mobilité, et notamment les jeunes que vous avez reçus tout à l'heure. Nous avons tous la volonté que ces jeunes aient envie de revenir dans les territoires d'outre-mer et ensuite puissent trouver leur place professionnellement dans le territoire. Je disais au député Mathiasin pendant les assises des outre-mer que 82 % des parents déclaraient dire à leurs enfants d'aller chercher un avenir ailleurs, sans doute un avenir meilleur, en estimant que l'attractivité dans leur territoire, la vie dans leur territoire, ne donnait pas les mêmes chances qu'en métropole. On va se dire les choses clairement. C'est cela qu'il faut inverser. Sur le volet attractivité, et pas obligatoirement un débat ici tout de suite, sur le volet attractivité on touche à énormément de choses dans nos territoires d'outre-mer.
Sur la question de l'accompagnement des jeunes en formation pour partir et pour revenir, sachez qu'aujourd'hui il y a la volonté de pouvoir aussi faire des formations chacun dans son bassin maritime, de manière à rester en lien avec les préoccupations de son territoire, rester en lien avec celles de l'ensemble du bassin, et en ville parce que c'est plus proche, de rester dans le bassin. Soyons très clairs : quand les jeunes viennent deux ans, quatre ans, cinq ans, six ans, voire sept ans en métropole pour des études ou pour une première expérience, généralement, le début de la famille se fait, l'implantation est là. C'est beaucoup plus compliqué après de revenir. Comment les accompagner au mieux ? C'est une vraie question. Imaginons qu'un jeune agriculteur, demain, veuille effectivement partir se former sur des spécialités qu'il n'y aurait pas en métropole. Comment, dans son contrat d'accompagnement, si on parle effectivement de l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité (ADOM), peut-on définir qu'on part avec un vrai projet, y compris un projet de retour ? Quand on part, on a analysé le projet et on sait qu'au retour, un accompagnement sera fait et que des aides sont déjà prévues. On prépare à la fois la formation et le retour. On fait un package de l'ensemble du parcours du jeune, jusqu'à son retour. C'est peut-être comme cela qu'il faut repenser l'ADOM. Quelle est aujourd'hui la plus-value de l'ADOM par rapport aux régions qui investissent beaucoup dans la formation ? Ce qui est important, pour l'ADOM, c'est de dire que si des régions n'investissent pas suffisamment dans les outre-mer, dans leur jeunesse, est-ce qu'il faut malgré tout un équilibre de l'État ? Est-ce la responsabilité de l'État de dire : il y a des compétences dans les territoires, dans certains territoires il y a des formations qui sont prises, dans d'autres il y a moins d'efforts dans ces domaines, donc l'État régule selon les différents territoires ? C'est une vraie question que je me pose. Faut-il maintenir l'ADOM sur cet objectif ? Quelle est la plus-value qu'on apporte aux régions qui ont déjà des programmes bien précis ? Comment avoir un accompagnement renforcé des jeunes jusqu'au retour ? Je ne crois pas en une agence du retour, je crois à un travail en amont d'une préparation du retour. Je crois à des dispositifs que l'on pourrait porter. Je pense que les « Réunionnais du monde », c'est une vraie réussite. Il y a un autre exemple de réussite qui s'appelle les « talents des outre-mer ». Que peut-on faire ensemble, qui donne envie aux jeunes de revenir ?
Sur les questions concernant Saint-Martin, chère Claire : depuis 2018, nous nous sommes entièrement consacrés à la reconstruction de Saint-Martin. Il y a eu des mobilisations financières, européennes, avec 49 millions d'euros, dont trois pour la Guadeloupe, puisque rappelez-vous que la Guadeloupe avait aussi été touchée par ces cyclones, et 46 millions d'euros pour Saint-Martin. C'est la partie européenne. La totalité des crédits ne sont pas aujourd'hui consommés. Lors de mon dernier passage à Saint-Martin, j'ai prolongé la possibilité d'utiliser ces crédits jusqu'à fin juillet, je crois. L'idée est effectivement de faire le point en septembre, de ne perdre aucun crédit, et de faire en sorte que tous ceux qui ont investi dans la reconstruction, et je parle de l'ensemble des ministères, puissent avoir un retour de leurs dépenses, si Saint-Martin ne consomme pas la totalité de l'enveloppe européenne. C'est important que ce soit fait de cette manière-là. Je ne peux pas donner plus qu'août, parce qu'après il faut le temps de faire remonter les crédits, et l'État, de toute façon, serait mis à défaut par l'Europe si nous ne fonctionnions pas de cette manière-là. Il y a eu un protocole signé entre le Premier ministre et le président de la collectivité, d'un montant de 50 millions d'euros par année, pour venir aider la collectivité, à partir du moment où un certain nombre de critères et d'indicateurs étaient remplis. La première année, en 2017, 25 millions d'euros ont été apportés. Cette année, en 2018 : 25 millions également. Nous sommes donc sur l'avenant. Pourquoi ? Parce que les recettes de la collectivité ont été beaucoup plus importantes qu'elles n'avaient été prévues. Il était clair dans le protocole que c'était un équilibre budgétaire. Pourquoi les recettes de la collectivité ont-elles été bien meilleures ? C'est que l'activité énorme de reconstruction dans le territoire provoque des recettes importantes pour la collectivité. La collectivité a aujourd'hui davantage de moyens pour assumer son fonctionnement et ses investissements. Nous avons donné deux fois 25 millions d'euros. Nous avons un avenant prévu pour l'année 2019, de manière à pouvoir aller plus loin, c'est-à-dire qu'on ne soit plus dans l'équilibre, cela avait été indiqué dans ce protocole. On ne serait plus dans l'équilibre, mais plutôt dans l'équilibre plus un complément pour des investissements. Voilà ce sur quoi on travaille actuellement. Je voudrais qu'on aille plus vite, je suis très heureuse que les parlementaires soient associés. Je voudrais dire qu'effectivement nous aurons le comité interministériel à la reconstruction de Saint-Martin qui sera programmé. Ce sera l'un des derniers.
Passons maintenant au développement de Saint-Martin au sens plus large, et non pas lié uniquement à la reconstruction. Il faut que la dynamique reprenne dans les territoires et c'est extrêmement important qu'on puisse le faire. Je rappelle aussi que pour aller plus vite, nous avons mis des équivalents temps plein (ETP) à disposition de la collectivité, dont 5 ETP qui viennent de l'AFD. Il s'agit d'ingénierie, parce que c'est de cela que nous avions besoin, aux côtés de la collectivité, pour pouvoir aller plus vite.
Sur les cinquante pas géométriques, je souhaite redire qu'il y avait le projet de transfert de compétences aux collectivités. C'était prévu au départ. Et ce dossier a été renvoyé à plusieurs reprises, à la fois parce qu'il est complexe et à la fois parce qu'il n'y a pas non plus une véritable volonté de reprendre le bébé par quiconque. Soyons très clairs. Il y a aussi le fait d'avoir tellement traîné que l'habilitation qui nous avait été donnée et les dates qui ont été données pour le transfert sont terminées. Vous avez raison de nous dire : et alors ? Et alors, j'ai vu qu'on avait dépassé la date, parce que je ne le savais pas. Je me suis engagée, après avoir vu avec François de Rugy, Jacqueline Gourault et Sébastien Lecornu. Dans le cadre de la loi sur les risques majeurs outre-mer, il faut qu'on puisse remettre ce projet à l'ordre du jour, ou alors très clairement, les collectivités disent définitivement que ce n'est pas leur souhait. On ne va pas tous se remettre à travailler s'il n'y a pas cette volonté. Il faut qu'on se pose des questions et il faut qu'on soit au rendez-vous de cette loi qui sera portée.
Sur la question des effectifs de police et de gendarmerie : je l'ai dit tout à l'heure, ils ont été renforcés. Cela a été prévu dans le cadre du Livre Bleu. Il y a eu des améliorations de chiffres, mais quand on est frappé par des évènements dans nos territoires, on estime toujours qu'il ne devrait plus y en avoir. Malheureusement, on a des comportements dans les territoires d'outre-mer, comme souvent en métropole, qui deviennent de plus en plus violents. C'est inacceptable. On doit mettre les moyens de pouvoir répondre à ce type de questions, mais on doit le faire aussi par l'éducation, par l'accompagnement des familles, et par la répression. Il ne faut pas oublier non plus les autres volets de ce qu'on appelle la prévention en matière de violence et de délinquance. C'est extrêmement important. Il y a un gros travail qui doit être réalisé. Max Mathiasin demandait que la conférence régionale sur la jeunesse se passe pour qu'il y ait une meilleure coordination des acteurs locaux dans les territoires. Il s'avère que le législateur a prévu que ce soit la région qui soit pilote en la matière. Je l'ai dit, si les régions souhaitent avancer sur ces questions, mettre en action ce groupe de coordination, bien sûr, l'État sera au centre de ce jeu et pourra mettre ses moyens à disposition.
Sur La Réunion. Cher Jean-Hugues, il y avait plusieurs questions. D'abord, la dernière, sur le sucre de canne. C'est une vraie problématique. C'est une vraie question et une vraie difficulté. On ne va pas revenir sur le nombre d'emplois directs, indirects, etc. : tout le monde le connaît. Je ne vais pas revenir sur la réponse que j'ai apporté à Huguette Bello, qui a été en détail et qui a démontré qu'il y avait le soutien du POSEI, avec 69 millions, le soutien des aides nationales, 90 millions d'euros, mais il y avait eu aussi, et c'est ça qui est important, c'est ça qui est en cause, à la fin des quotas sucriers, un soutien supplémentaire apporté à la fois à La Réunion et en Guadeloupe. Ce sont deux territoires qui avaient bénéficié de 114 millions d'euros sur trois ans, aides d'État que nous avions déclarées à l'Europe pour trois années. Cette aide d'État de trois années a été mise en place à la fois pour répondre, mais aussi pour exprimer la nécessité de l'adaptation de cette filière dans les deux territoires pour pouvoir répondre à une situation qui est toujours présente et qui connaîtra, avec la fin des quotas, une concurrence internationale. D'ailleurs, en France, les sucriers sont aussi très frappés par cette crise. On est au bout des trois ans pour La Réunion, pas pour la Guadeloupe. La Réunion l'a touchée une année avant. Je pense que cela a été un souhait, à l'époque, de l'organiser ça. La question se posait et se pose de réinscrire et de poursuivre cette aide. Donc moi, j'ai deux remarques. Ce sont des crédits du ministère de l'Agriculture et de la Pêche. On est en plein échange entre nous sur le budget, l'arbitrage. Ce sujet est effectivement une des questions de l'arbitrage. J'ai avoué avoir été prévenue un peu tard, mais cela n'empêche pas que je suis mobilisée sur le sujet avec l'ensemble de mon cabinet, et avec le ministre de l'Agriculture et de la Pêche, nous avons des échanges qui se font actuellement. Le Président de la République et le Premier ministre ont bien sûr été sensibilisés à vos questions, mais aussi par moi. Je pense que, par contre, on a loupé l'adaptation. C'est-à-dire qu'on avait trois ans d'aides d'État déclarées à l'Europe pour prévoir une adaptation. Franchement, cette adaptation, on ne s'en est pas complètement occupé. On a donc vécu cette aide comme une aide structurelle. Je ne suis pas critique quand je dis cela, parce que c'est comme cela que ça a été vécu. Du coup, arrêter brutalement, c'est quelque chose qui pour moi est difficilement concevable. Et c'est ce que je défends. En revanche, je crois que si cette aide devait être renouvelée, il faudrait qu'elle soit renouvelée avec des conditions d'adaptation et un travail en partenariat, avec notamment, à La Réunion, le département qui est très investi sur la question de l'agriculture. Cela me semble indispensable. Au moment où je vous parle, je ne suis pas capable de vous répondre par oui ou par non. Comme vous le savez, je me bats jusqu'au dernier moment. Nous verrons bien quelle sera la réponse qui vous sera apportée. Ce qui est clair, c'est que tout le monde les connaît.
Sur les autres questions. Vous avez parlé de l'emploi à La Réunion. La crise qui a frappé La Réunion a montré un territoire qui avait besoin, très certainement, de travailler sur sa cohésion. J'ai connu La Réunion comme le territoire où la cohésion sociale était sans doute la plus organisée, la plus apaisée. Ce n'est plus le cas aujourd'hui, pour diverses raisons. D'abord, comme la Guyane et comme Mayotte, c'est un territoire qui aujourd'hui connaît une démographie importante ainsi qu'un ralentissement du développement, comme vous l'avez montré avec vos chiffres. Il faut effectivement qu'on puisse travailler sur l'ensemble des sujets. La trajectoire 5.0, je pense que La Réunion peut s'en saisir immédiatement, créer de la dynamique et pouvoir avoir des financements supplémentaires nationaux et européens pour pouvoir y aller. Dans les 5.0, c'est l'exclusion, c'est la transition énergétique. Vous avez raison, il y a des emplois dans ce domaine. Il faut qu'on puisse les développer. La Réunion a une vraie carte à jouer dans son bassin maritime. La Réunion peut être pilote dans son bassin maritime, sur des trajectoires « développement durable », parce qu'elle est et peut être pilote en la matière dans l'océan Indien avec Mayotte, mais aussi avec l'ensemble des partenaires de la région. L'emploi doit être au centre de nos actions. On ne doit pas en perdre. Il faut se battre sur les questions de sucre canne. Nous devons en développer, notamment avec le logement, et vous avez raison : la suppression de l'APL accession a été un énorme frein à La Réunion, et on le savait parce qu'il y avait un développement enclenché avec un soutien de la collectivité. Cela a été un frein au logement. Nous le voyons aujourd'hui dans la consommation complète des crédits logements, la ligne budgétaire unique (LBU). Elle n'est pas à la hauteur de ce qu'elle pourrait être. On voit bien qu'on a cette possibilité de le faire. On travaille actuellement, vous le savez, à la mi-juillet, à la conférence logement, et j'espère qu'on sera à la hauteur des besoins dans les annonces qui seront faites des territoires d'outre-mer et notamment la cherté de la vie à La Réunion. C'est une vraie préoccupation. La Réunion reste le territoire, non pas le plus pauvre, puisque c'est Mayotte, mais sans doute celui où il y a le plus d'inégalités. On a vraiment un vrai trou dans la raquette. Il y a des gens qui sont sous le seuil de la pauvreté, ou à la limite. D'ailleurs, ça ne veut pas dire grand-chose quand on sait que le seuil de pauvreté dans les territoires d'outre-mer n'est pas le même qu'au plan national, donc j'ai toujours des difficultés à prendre ces pourcentages et ces taux. On a une grosse masse de la population qui vit dans la pauvreté, et on a des gens qui vivent très bien. Il y a un juste partage qui doit se faire sur ce territoire aussi. Ce n'est pas là uniquement le rôle de l'État. Je l'ai bien senti. Si nous voulons plus de cohésion, il faut qu'on puisse y travailler tous ensemble, et là aussi de manière apaisée. Je veux remercier tous ceux qui, pendant la crise à La Réunion, ont pu contribuer à apaiser les choses. C'était indispensable, il faut apporter davantage de réponses. J'espère avoir répondu à toutes vos questions.