Intervention de Yves Puget

Réunion du jeudi 23 mai 2019 à 9h00
Commission d'enquête sur la situation et les pratiques de la grande distribution et de ses groupements dans leurs relations commerciales avec les fournisseurs

Yves Puget, directeur de la rédaction de LSA Conso :

Les difficultés sont réelles pour les PME, je suis d'accord, et même pour un grand groupe. C'était le cas récemment pour certaines multinationales qui ont été déréférencées.

Pensez-vous que quelqu'un qui perd le marché des micros à l'Assemblée Nationale va être content ? C'est la vie des affaires, c'est dur, nous sommes dans un monde très dur ; pourquoi ? Car il est hyper réactif et hyper compliqué. C'est un secteur avec beaucoup de fournisseurs et avec de faibles marges. Quand j'étais petit, je faisais mes courses chez Montlaur, Rallye, Euromarché, Félix Potin… ils ont fermé leurs portes et ce n'est pas propre à Internet. Je pouvais faire mes courses chez Telemarket et chez Grosbill ; ils ont fermé leurs portes. Si vous allez aux États-Unis, vous verrez le nombre de faillites de distributeurs. Je ne suis pas du tout en train de les plaindre. Oui, ils ont fait de grosses fortunes dans les années 1970 et 1980 mais aujourd'hui, croyez-vous sérieusement qu'un jeune qui sort d'une école de commerce va vous dire : « Moi, mon rêve, c'est d'ouvrir un magasin » ? Malheureusement, de moins en moins. C'était le cas car oui, il y a eu une grosse fortune de faite. La difficulté est totalement partagée : regardez le nombre de magasins qui ferment aujourd'hui ou qui sont à vendre, regardez les résultats publiés récemment par le groupe Auchan. Encore une fois, je ne suis pas en train de dire qu'ils sont à la rue mais les fondamentaux du commerce étaient, en périphérie, l'immobilier très faible. C'est terminé. Les délais de paiement très importants ont été, à juste titre, réglementés. La consommation était forte et il n'y avait pas de chômage, ce qui n'est plus le cas. Les fondamentaux ont quelque peu disparu.

Je crois encore aux magasins et il faut espérer qu'ils vont perdurer. Ils ont des arguments pour mais c'est plus compliqué pour tout le monde et la grande distribution correspond à une faible marge sur un gros chiffre d'affaires. Quand la croissance est assurée, c'est très bien pour eux car une faible marge sur un très gros chiffre d'affaires rapporte beaucoup. Mais d'une faible marge, on peut très vite passer à une marge négative.

Concernant l'autre question, comme je l'ai dit, LSA a été créée en 1958. D'abord, merci de lire LSA. Nos revenus sont multiples ; nous sommes vendus uniquement sur abonnement (nous étions vendus en kiosque pendant quelques années mais nous avons arrêté), nous avons 15 000 abonnés et une diffusion d'à peu près 20 000 exemplaires. Majoritairement, nos deux profils d'abonnement sont les distributeurs et les industriels. Nos revenus proviennent de la publicité, d'abonnements et d'événements. Nous tenons un grand colloque sur les négociations commerciales tous les ans début octobre, nous faisons des remises de prix, nous vendons des données : la base LSA Expert permet de référencer toute l'évolution du nombre de mètres carrés ; c'est ce qui me permet de vous dire qu'il y a 11 millions de mètres carrés d'hypermarchés en France. LSA est un titre qui se porte bien et sur notre site Internet, environ 120 à 130 000 pages sont vues chaque jour, ce qui pour de la presse professionnelle nous place largement leaders du secteur. Il y a davantage de papiers sur les négociations commerciales que vous ne le dites : nous en rédigeons un quasiment toutes les trois semaines. Mais vous avez raison, c'est très compliqué pour nous d'avoir des informations.

Je suis à LSA depuis plus de vingt ans et je n'ai jamais pu assister à une négociation. Je vois les excès de verbe quand on croit qu'un box est en sous-sol et qu'il faut monter le chauffage. Pour ceux qui ne l'ont pas déjà fait, allez voir des box. Système U, à Rungis, en a un pas très loin de nos bureaux à Antony. Il s'agit simplement de petites salles avec des fenêtres et des portes en verre, tout ce qu'il y a de plus classique.

Mais il faut être honnête, nous avons quand même du mal à obtenir des informations sur cette thématique car c'est le secret des affaires. Les distributeurs comme les industriels ne veulent pas vraiment témoigner sur les conditions. Seules les fédérations témoignent fortement.

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