Intervention de Yves Puget

Réunion du jeudi 23 mai 2019 à 9h00
Commission d'enquête sur la situation et les pratiques de la grande distribution et de ses groupements dans leurs relations commerciales avec les fournisseurs

Yves Puget, directeur de la rédaction de LSA Conso :

Le rêve de tous les hypermarchés n'est surtout pas d'ouvrir tous les dimanches, cela coûterait trop cher et ne serait pas rentable. En revanche, d'ouvrir plus simplement et plus souvent, certainement. En face, Internet se développe. Sur l'alimentaire, sur ce que l'on appelle les produits de grande consommation, Amazon pèse 400 millions d'euros de chiffre d'affaires, ce qui n'est pas énorme. Pour vous donner une idée, cela correspond au chiffre d'affaires des deux plus gros hypermarchés en France. Mais ce chiffre progresse très fortement.

Concernant le dimanche, pour de l'égalité de concurrence, les distributeurs parlent à juste titre d'égalité fiscale face à l'e-commerce mais il y a aussi l'égalité des pratiques du métier qui comprennent les heures d'ouverture. Nous parlions de déréférencement. Pourquoi peut-on déréférencer en une seconde sur Internet alors que très justement, il y a des procédures dans les magasins. Voilà en quoi consiste l'égalité.

Pour terminer sur les ouvertures, il serait bon de les simplifier. Un patron de magasin voit bien qu'il ne sert à rien d'ouvrir certains dimanches, alors que c'est réellement utile dans d'autres lieux. Aller expliquer à certains commerces parisiens de proximité qu'ils ne peuvent pas ouvrir en nocturne est dramatique pour eux. Je ne suis pas pour une ouverture généralisée, cela n'a aucun sens humain, social et économique, mais je suis pour plus de facilité pour des commerçants qui sont tout simplement près de la ligne rouge.

Les investissements constituent un point très important. La France était un modèle. Nous avons en France un très large choix, avec beaucoup de références. C'est un pays où historiquement, beaucoup de marques anglaises, hollandaises ou américaines testaient des produits. Or aujourd'hui, on voit des grands groupes, des multinationales de l'agroalimentaire ou de l'hygiène, la beauté et l'entretien qui ont envie de désinvestir en France car le marché est trop compliqué au niveau de la grande distribution, nous sommes d'accord, mais aussi au niveau des lois et des taxes. On voit que de grands groupes industriels se posent des questions et je trouverais très dommage de voir cette R&D partir de la France.

Au passage, car je tiens à « l'égalité » entre industries et commerces, qui sont tous deux mes lecteurs, je me pose la question : sans la grande distribution, pensez-vous qu'on aurait l'Oréal, Pernod Ricard, Danone ? Ils ont connu de la croissance ensemble, c'est ce qui a permis le départ de l'Oréal, de Pernod, etc. à l'international pour vivre sans la France. Malheureusement, rester en France leur coûte plus que cela leur rapporte car le marché français est très dur. Mais la grande distribution a aussi permis l'éclosion de géants français et il reste de belles PME. Vous êtes en Loire-Atlantique. Si vous descendez un peu plus bas en Vendée, allez du côté de Sodebo, il va très bien. Fleury Michon va un peu moins bien mais il y a encore de belles entreprises.

L'investissement est une vraie préoccupation car les marchés qui n'innovent pas sont forcément des marchés qui régressent.

Pour terminer, j'ai pris cet exemple du lait un peu en souriant sur l'innovation mais le marché du lait allait très mal au début des années 1990 et c'est l'innovation qui, à cette époque, a permis au lait de rebondir. Les marchés où le leader n'innove pas sont des marchés qui régressent. Si on ne donne pas les capacités au leader d'innover, on va droit dans le mur.

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