Intervention de Richard Panquiault

Réunion du mercredi 29 mai 2019 à 9h00
Commission d'enquête sur la situation et les pratiques de la grande distribution et de ses groupements dans leurs relations commerciales avec les fournisseurs

Richard Panquiault, directeur général de l'Institut de liaison et d'études des industries de consommation (ILEC) :

Nous avons coutume de dire que le point de départ de la négociation, c'est le tarif ou les conditions générales de vente (CGV). Mais le vrai débat n'est pas celui-là. Le premier sujet est celui de la protection du tarif. Aujourd'hui, on se fiche de votre tarif. On vous indique simplement qu'on veut acheter « à moins 2 » ou « à moins 3 », pour de multiples raisons. Le problème est donc celui-là : vous partez de la demande d'un distributeur qui chercher à acheter moins cher et à systématiquement s'aligner sur le prix du voisin. Cela biaise d'entrée de jeu la négociation. Il faudrait partir du tarif et décomposer les éléments qui permettent d'arriver à un prix net, avec de véritables contreparties équilibrées. Dans ces conditions, nous n'aurions pas ce débat.

Je vous le disais tout à l'heure, les MDD redeviennent stratégiques pour les distributeurs. Je le comprends parfaitement. Je ne conteste pas de tels choix stratégiques. Mais quand on vous dit qu'il va baisser de 15 % votre assortiment tout en restant « à moins 2 », il y a un vrai problème. C'est ce que j'appelle un déséquilibre significatif. C'est la double peine. Aujourd'hui, pour un industriel, la perspective de perdre est tellement importante que vous préférez signer « à moins 2 » et « à moins 15 % » d'assortiment que de vous faire sortir et de perdre 3 !

La nature même de la relation biaise le discours et la négociation, laquelle est de plus en plus fictive du fait du déséquilibre initial. Tout industriel vous dira qu'il préfère signer un mauvais accord plutôt que ne pas signer d'accord du tout. Et pour cause, les industriels travaillent avec la distribution. Un marché de la concurrence devrait permettre de refuser de travailler avec un untel pour passer un accord ailleurs. Mais il n'y a plus d'ailleurs. La négociation est donc nécessairement biaisée d'entrée de jeu.

Il existe des cas de figure où cela peut aller très loin. Ce n'est pas systématique, mais je le constate dans les verbatim de négociations. Nous en discutons avec les enseignes concernées, ou nous le ferons. Il ressort qu'il y a des intimidations, des menaces, des attaques personnelles. Cela peut aller très loin. C'est inacceptable ! Les acteurs subissent une telle pression que certains comportements peuvent aller très loin. Il existe des cas de burn-out tant du côté des acheteurs que de celui des industriels. Je connais chez les industriels des personnes qui préfèrent démissionner plutôt que retourner chez tel ou tel acteur. Cela va jusque-là, même si ce n'est pas la majorité des cas. Or les sujets en question ne méritent pas qu'on aille jusque-là.

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