Vous avez raison, puisque nous parlons d'offre et demande et que la concurrence est plutôt restreinte dans la filière bovine.
Pour qu'un produit soit vendu à un bon prix, il doit faire l'objet d'une demande. Or, je vous puis vous garantir que, dans un magasin, il y a très peu de produits sur lesquels le consommateur se jette en disant : « C'est celui-là que je veux ». Les consommateurs sont livrés à eux-mêmes, et personne n'est là pour les conseiller. Les professionnels ont disparu du circuit ; nous n'avons plus de boucher.
Je suis, bien évidemment, favorable aux circuits courts – les éleveurs se sont transformés en bouchers. Ils ne sont pas tous bons, mais quand ils le sont, il y a la queue devant leur magasin. Je connais des éleveurs qui tuent cinq, six, sept porcs en trois jours, à savoir la quantité pour trois boucheries. Ce qui démontre bien qu'un professionnel, du conseil, de la sécurité et de la qualité sont indispensables.
En France, manque de chance, la consommatrice a un médecin qui lui conseille de manger de la viande maigre, nous avons donc dû éliminer le gras ; et elle a oublié la couleur et la tendreté. Une viande, nous devons la manger mûre, naturelle, légèrement persillée et rouge.
De fait, nous avons dû vendre – c'est le système qui est comme cela – de jeunes bovins, non castrés, à l'âge de dix-huit mois, pour couvrir les besoins de la grande distribution – 30 % à 40 % de la consommation française. La moitié sont donc des bêtes un peu âgées, et les bonnes génisses sont gardées pour la reproduction ou exportées en Italie – les Italiens en sont friands.
Et le fameux boeuf traditionnel, car tout le monde mange du boeuf, représente 4 % de la consommation ; demain, ce sera 3 %, plus personne ne voudra manger de boeuf…
Depuis vingt ans, nous avons pris un mauvais chemin et oublié de regarder ailleurs. C'est-à-dire en Amérique du Sud. Les producteurs se déplacent en Argentine, en Uruguay, au Brésil… Tous les animaux sont castrés, la viande est grasse et bonne ! Des critères que nous avions en France et que nous avons oubliés.
Après avoir mené quelques campagnes, aujourd'hui le persillé peut à nouveau faire partie de l'interprofession, un grand bonheur ! Notamment parce que des multinationales ont fait pression. Avant, il fallait bannir la viande, aujourd'hui, c'est le sucre, et manger un peu de viande grasse revient à la mode.