Intervention de Olivier Huet

Réunion du jeudi 11 juillet 2019 à 9h00
Commission d'enquête sur la situation et les pratiques de la grande distribution et de ses groupements dans leurs relations commerciales avec les fournisseurs

Olivier Huet, président du Directoire :

Je souhaiterais, si vous permettez avant d'aborder les questions immobilières, revenir sur quelques points.

Tout d'abord, sur les lois que vous avez citées en parlant de la loi « Galland », la LME, etc. Je voudrais quand même vous dire que cette incertitude juridique permanente qui existe en France favorise les grands groupes, notamment Amazon.

Vous avez peut-être un peu de mal à l'entendre mais je vous le dis quand même. Il faut s'adapter en permanence et cela permet à des entreprises qui sont hors territoire français de pouvoir venir vendre sur notre territoire sans aucune contrainte.

Ensuite, sur le bio et en particulier sur le prix du lait bio, je ne suis pas d'accord pour dire que nous vendons un lait bio moins cher que le lait conventionnel. Cela a pu arriver dans un magasin, mais ce n'est pas une volonté. Ce qui est sûr, c'est que sur le lait demi-écrémé bio, nous avons souhaité avoir un prix sur lequel nous avons limité le niveau de marge, parce que nous considérons que le lait bio, c'est pour les clients, pour les jeunes enfants, un accès à un produit bio de bonne qualité. Nous ne l'avons fait que sur le lait bio.

Pour le reste des produits, il y a un écart entre le bio et les produits conventionnels qui doit être de l'ordre – de tête – de 30 %. Il ne faut pas non plus que le lait bio soit l'arbre qui cache la forêt. Ce n'est pas une démarche globale de destruction de valeur. Nous ne sommes pas idiots à vouloir écraser toute la valeur sur le bio, dans un intérêt d'ailleurs que je ne verrais pas bien. C'est toutefois vrai que nous avons fait du lait bio une sorte d'étendard.

Je peux vous dire aussi qu'il y a une étude qui dit que les Français sont capables de payer 11 % plus cher le bio. Nous sommes quand même dans un environnement économique aujourd'hui où le pouvoir d'achat des gens est compliqué.

Concernant votre remarque sur le petit commerce, mon grand-père était épicier à Sancheville en Eure-et-Loir. Je vous passe la Seconde Guerre mondiale, l'épicerie qui a été pillée. Mon père et mon grand-père se sont retrouvés à livrer chez nous les agriculteurs en descendant au fond des caves les « cubis » de vin et des matières premières. Progressivement, le magasin a connu des difficultés.

Vous dites – si j'ai bien compris – que l'arrivée de la distribution a accéléré la chute de ces commerces. Il n'en est absolument rien. Ce n'est pas le cas. Ce qui s'est passé, c'est que les agriculteurs se sont automatisés. Nous avions des fermes dans lesquelles il y avait une vingtaine de personnes qui tous les midis déjeunaient au sein de la ferme pour faire la moisson, le labour, enfin tout ce qui est fait dans une ferme. L'automatisation a conduit ces fermes à n'avoir plus qu'un ou deux salariés, ce qui a balayé la totalité du commerce rural, mais pas que les épiceries : les coiffeurs, les bars et tout le tissu économique rural.

C'est cela la réalité. Ces gens qui travaillaient dans les fermes sont allés vers les villes. À ce moment, nous avons eu un développement des commerces, des supermarchés, parce que nous étions plutôt – pardonnez-moi le mot –face à des travailleurs pauvres qui avaient besoin d'avoir accès à une offre la moins chère possible. C'est comme cela que le tissu économique de la grande distribution s'est développé, mais surtout pas en tuant le commerce de proximité. En tout cas, ce n'est pas cela qui dans ma famille a condamné l'épicerie familiale.

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