Vous avez raison, madame la députée, l'innovation, la montée en gamme, la transition alimentaire pour tous sont l'affaire de tous les acteurs, évidemment pas la grande distribution toute seule, pas Carrefour tout seul. Cela impose que l'agriculteur opère et qu'on l'aide à opérer cette conversion au bio et que les industriels jouent leur rôle d'innovateur sur le marché et ils le font bien sûr. On a la chance d'avoir des industriels partout dans le monde qui ont conscience de cette aspiration-là, qui ont conscience de son potentiel économique et qui mènent ce combat-là, d'ailleurs parfois pour des raisons de responsabilité d'entreprise. Prenons une entreprise française comme Danone, qui a mis vraiment ce sujet au coeur de son modèle.
Là où je ne suis pas totalement de votre avis, c'est que l'innovation, et c'est bien naturel, nous sommes prêts à la financer, à la payer. C'est plus cher, un produit d'innovation. Je vais vous donner un chiffre, la part de marché de Carrefour sur les innovations est supérieure de 30 à 40 % à sa part de marché naturel. Faites-moi confiance, si vous parlez aux acteurs industriels et vous leur dites : « Quand vous faites de l'innovation, quel est l'endroit où vous la présentez de manière préférentielle ? Quelle est l'entreprise qui l'accueille le plus facilement ? » C'est le groupe Carrefour. Nous sommes l'enseigne de l'innovation produit, nous l'avons toujours été. C'est la marque de fabrique. Cela l'est encore plus, à travers la transition alimentaire, et cela a un coût, cela veut dire des prix un peu supérieurs.
Après, j'ai une deuxième mission. Mon objectif est que la transition alimentaire ne soit pas un phénomène de bobos parisiens, qu'elle soit accessible à tous. Cela veut dire que mon travail – et cela rejoint votre question sur la déflation ou l'inflation – consiste à ce que les prix soient certes plus élevés que le prix conventionnel, que le prix biologique soit toujours plus élevé que le prix conventionnel, mais pas trop élevé pour que le plus grand nombre des clients aient accès à ces produits.
Pour répondre, monsieur le rapporteur, à votre question, quand je regarde L'Oréal, quand je regarde, Procter & Gamble, quand je regarde ces groupes-là qui sont censés souffrir de la déflation, je vous assure, j'ai l'impression qu'elles ont encore des capacités d'investissement en R&D – et je m'en félicite, ce sont des partenaires –, des capacités à faire du développement économique, à ouvrir partout dans le monde, etc., absolument exceptionnelles. Il n'y a aucun de ces acteurs-là qui se retrouvent fragilisés parce qu'éventuellement les équipes achats auraient fait un - 0,5 % sur une catégorie.