Intervention de Michel-Edouard Leclerc

Réunion du mercredi 24 juillet 2019 à 15h00
Commission d'enquête sur la situation et les pratiques de la grande distribution et de ses groupements dans leurs relations commerciales avec les fournisseurs

Michel-Edouard Leclerc :

Non, elle est très simple. Il n'y a aucune rétention de profit dans aucun des outils. Aucun acheteur n'est rémunéré au pourcentage de gains sur l'achat de biens ou de services vendus. Notre modèle est vraiment coopératif. Comme mon père l'a voulu, ce sont les patrons des magasins qui s'organisent en groupes de travail – cela pourrait être les agriculteurs dans une coopérative. La famille Leclerc n'intervient pas.

Les propriétaires de magasins s'organisent en groupes de travail et fonctionnent par délégation, par mandat. Quel que soit le produit référencé – ils achètent, par exemple, du pétrole par l'intermédiaire de la société Siplec –, tout va au point de vente. Tous les outils sont transparents ; ils ne fonctionnent que par adoption d'un budget. Avant chaque exercice, nous votons sur un budget : salariés, investissements, etc. À la fin, nous redistribuons tout et il ne reste rien. En fait, la redistribution s'effectue de plus en plus en temps réel, car l'informatique le permet. Tout est transparent pour nos adhérents. Il n'y a pas de ponction en cours de route.

Mon rôle actuel est celui d'un influenceur. Je ne supporterais pas de partir à la retraite alors que le nom ne nous appartiendrait plus. C'est une marque collective. Je n'aimerais pas qu'elle soit dézinguée. Je n'arriverais pas à rester à la pointe de Trévignon, à regarder la mer, si le groupe ne respectait pas la charte.

Par convention, les centres Leclerc me demandent de les guider, de les inspirer, de prendre des initiatives et de fédérer les hommes afin de réaliser nos projets. Au passage, vous allez voir que je ne crache pas sur les États généraux de l'alimentation !

Nous voulons, dès 2022, mettre les centres Leclerc sur le podium des enseignes les « mieux-disantes » en matière de responsabilité sociétale des entreprises – RSE – et de développement durable. J'y insiste et vous pourrez me convoquer si vous me prenez en défaut. Nous nous engageons à réduire l'usage des plastiques, à lutter contre le gaspillage et à développer les énergies renouvelables. J'ai signé un accord avec M. Lecornu et je vais en signer un autre avec Mme Poirson sur le Nutri-Score. Je souhaite que Leclerc soit une marque d'excellence dans ce domaine.

Je n'ai pas parlé de prix, mais je vais y venir : il faut que le beau, le bon et le bien-être soient accessibles.

Comme certains d'entre vous, je pense qu'il ne suffit pas de soutenir le pouvoir d'achat par le biais des transferts sociaux et qu'il faut revoir collectivement la rémunération du travail. Certains ne voient pas d'augmentation de salaire depuis cinq ans et il faut répondre à leur aspiration en rémunérant mieux le travail. Les centres Leclerc joueront sur la participation et l'intéressement, qui font partie de la RSE.

S'agissant de l'organisation, je vous ai entendu émettre des critiques ou des réserves sur le modèle coopératif, notamment sur le mien. Pour ma part, je souhaite que les centres Leclerc puissent rivaliser avec les plateformes logistiques, avec Amazon, Alibaba et autres, tout en restant des coopérateurs ancrés dans leur territoire local, régional, national. En bon Breton, je veux que les impôts, les emplois, les salaires et les investissements restent en France.

Les centres Leclerc ont investi près de 1 milliard d'euros en trois ans dans des bases logistiques qui vont pouvoir faire des livraisons à domicile, développer les Drives, rivaliser avec le commerce digital. C'est très important. Du coup, j'ai l'impression que nos adhérents sont complètement dans le mouvement que vous avez voulu initier, monsieur le ministre, lors des États généraux de l'alimentation et que M. Guillaume reprend aujourd'hui.

C'est pourquoi je ne voudrais pas que l'on fasse la part belle aux grandes sociétés multinationales, par une critique systématique de nos métiers de négociation et de distribution, par la négation par avance de la valeur ajoutée et du service que nous créons. Je voudrais que l'on reste consumériste, que l'on pense au consommateur. Je voudrais que l'on arrête d'opposer l'intérêt du consommateur à celui des agriculteurs.

C'est un vaste débat. Monsieur le rapporteur, je ne vous ai pas facilité la tâche si vous vouliez faire une conclusion courte. Les centres Leclerc m'ont mandaté pour vous dire cela. Nous pouvons certainement mieux faire, mais ne nous faites pas passer pour les plus mauvais de la classe ! En tout cas, nous sommes volontaires.

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