Intervention de Danièle Obono

Séance en hémicycle du mercredi 18 septembre 2019 à 15h00
Accords avec le tchad et l'angola relatifs aux services aériens — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanièle Obono :

Oui, c'est le Tchad. Nous pourrions parler de l'Angola, puisque la volonté de favoriser le trafic aérien avec ce pays n'est pas sans lien avec le développement actuel de l'exploitation pétrolière. Mais c'est un autre sujet et, faute de temps, je me concentrerai ici sur le Tchad.

Ce pays est dirigé depuis 1990 par un président de la République, M. Idriss Déby, qui a été surnommé « pire dictateur du continent » par le magazine The Economist. C'est un honneur, étant donné le choix qu'il y a, malheureusement, en la matière.

Les organisations de défense des droits de l'homme ont unanimement condamné son régime pour ses atteintes répétées aux droits et aux libertés. En 2018, une réforme constitutionnelle, qui supprime le poste de premier ministre et empêche la création d'un poste de vice-président, lui a permis de concentrer tous les pouvoirs entre ses mains.

Idriss Déby a également mis un point d'honneur à réprimer toute opposition, pratiquant la détention arbitraire et les exécutions extra-judiciaires. Cela n'est point non plus le fruit de l'imagination, à moins de considérer que l'exécution, en 2016, de quarante militaires coupables d'avoir voté pour un autre candidat à l'élection présidentielle est un fait sorti de l'imagination fantasque des organisations de défense des droits humains. Rappelons que le vote s'effectue, dans ce pays, sans isoloir.

À l'occasion de cette élection, les dirigeants et dirigeantes de la société civile, dont le secrétaire général de la Convention tchadienne pour la défense des droits de l'homme, M. Mahamat Nour Ibédou, ont été arbitrairement – et non pas imaginairement – arrêtés et détenus sans inculpation pendant d'interminables semaines.

À l'heure actuelle, une répression très réelle est en cours contre les populations du nord du pays, coupables d'avoir réclamé leur dû : une part des profits tirés de l'exploitation de l'or dont regorgent les sous-sols de leur région, le Tibesti. C'est là le résultat d'une captation systématique par l'élite au pouvoir de la richesse produite, au détriment de l'immense majorité de la population.

Rappelons que ce pays, riche en ressources naturelles et en matières premières, est classé 186e sur 189 si l'on regarde l'indice de développement humain de l'ONU. Pendant la quasi-totalité de l'année 2018, une grève générale a secoué le pays, les fonctionnaires protestant contre la réduction de leur salaire de 10 % à 40 % et contre la corruption endémique.

Or, pour reprendre l'expression du chercheur Thomas Dietrich : « Le Tchad a toujours été le laboratoire de la Françafrique. » Depuis les années 1980, l'État français a soutenu sans réserve ses dirigeants successifs, y compris les uns contre les autres. La France a soutenu Hissène Habré, le prédécesseur de M. Déby, dans sa guerre contre la Libye, se rendant complice des exactions de masse que ce dictateur faisait subir à sa propre population. Les services de la DGSE ont favorisé l'accession au pouvoir d'Idriss Déby en 1990 via un coup d'État contre Hissène Habré.

Depuis lors, M. Déby est soutenu par la France. Ainsi, à deux reprises, en 2006 et en 2008, les hélicoptères de l'armée française sont intervenus pour mettre en déroute des rebelles qui menaçaient le palais présidentiel.

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