Finalement, si je puis me permettre, nos débats sur la PMA étaient beaucoup plus simples ! Sans doute pointaient-ils moins les tensions entre ce qui est possible et ce qui est souhaitable.
Je remercie mon collègue Marc Delatte pour son témoignage, pour avoir parlé de ces enfants et de la façon dont ils peuvent grandir et vivre.
Voilà deux ans que nous parlons de société inclusive, laquelle est pour moi substantiellement liée à cette question dont je pense, contrairement à M. Berta, qu'elle est très différente de celle du DPNI et du diagnostic prénatal. Avant même l'implantation, nous déciderions donc de ce qui est ou non acceptable au sein d'une société ? Lorsque les parents seront confrontés à ce choix : « Voulez-vous un embryon sain ou un embryon qui l'est moins ? », j'imagine que la décision ira dans un sens plutôt que dans l'autre.
Cela n'a rien à voir avec le fait d'être enceinte, d'être déjà dans un processus de grossesse ! Les sensations ne sont pas les mêmes, ni la réalité. En l'occurrence, nous déciderions des maladies acceptables et de celles qui ne le sont pas ce qui, comme disait ma collègue Coralie Dubost, nous place face à deux questions fondamentales : jusqu'où va-t-on, quelles sont les maladies acceptables ou pas ? Par principe, la trisomie doit-elle être refusée ? Que dire, dès lors, à ces enfants et à ces adultes trisomiques qui vivent et grandissent ? Quel message leur envoie-t-on, ainsi qu'à leur famille ? J'en suis profondément inquiète. Quelles autres maladies devraient-elles être éliminées a priori au lieu de les combattre et d'imaginer leurs impacts sur des programmes de recherche ?
À mes yeux, c'est la question du curseur et de qui est habilité à le placer qui est donc fondamentale. En tant que législateur, je ne me sens pas habilité à le faire, ni à dire aujourd'hui, en commission, ou demain, dans l'hémicycle, quelles sont les maladies acceptables et celles qui ne le sont pas.
Serait-ce à la Haute autorité de santé de le dire ? Vous nous avez dit vous-même, madame la ministre de la santé, qu'en tant que présidente vous n'auriez pas accepté de prendre cette responsabilité-là, que vous estimiez bien trop lourde.
Qui peut donc décider ? Aujourd'hui, nous n'avons pas la réponse, elle n'est pas suffisamment étayée pour que nous puissions la donner ici. J'invite donc à faire preuve de la plus grande prudence en la matière et je pense que ce serait l'honneur de notre loi bioéthique, en 2019, de poser un interdit plutôt que d'accepter et d'encourager cette nouvelle pratique.