Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la bioéthique

Réunion du vendredi 13 septembre 2019 à 14h30

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • bioéthique
  • cellule
  • cellules souches
  • couple
  • embryon
  • humain
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  • souches embryonnaires
  • éthique

La réunion

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Vendredi 13 septembre 2019

La séance est ouverte à quatorze heures.

Présidence de Mme Agnès Firmin Le Bodo, présidente

La commission spéciale procède à la suite de l'examen des articles du projet de loi relatif à la bioéthique (n° 2187) (M. Jean-Louis Touraine, rapporteur des articles 1 et 2, Mme Coralie Dubost, rapporteure des articles 3 et 4, M. Hervé Saulignac, rapporteur du titre II, M. Philippe Berta, rapporteur des titres III et IV, M. Jean-François Eliaou, rapporteur du titre V, et Mme Laetitia Romeiro Dias, rapporteure des titres VI et VII).

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Mes chers collègues, nous abordons l'examen du titre IV.

Titre IV Soutenir une recherche libre et responsable au service de la santé humaine

CHAPITRE PREMIER Aménager le régime actuel de recherches sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires

Article 14 : Différenciation des régimes juridiques d'autorisation s'appliquant à l'embryon et aux cellules souches embryonnaires

La commission examine les amendements identiques n° 69 de M. Xavier Breton, n° 256 de M. Patrick Hetzel et n° 700 de M. Thibault Bazin.

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Cet article vise à distinguer les recherches menées sur les embryons humains et celles sur les cellules souches embryonnaires. Il prévoit de soumettre la recherche sur dernières non plus à un régime d'autorisation encadrée mais à un simple régime de déclaration auprès de l'Agence de la biomédecine.

Si une cellule souche embryonnaire n'est pas un embryon humain en soi, le législateur ne peut oublier qu'elle en émane et que son prélèvement en provoque la destruction : tel est l'objet de l'amendement n° 69.

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L'amendement n° 256 vise à rappeler un certain nombre de principes qui ont été développés au cours des différentes lois relatives à la bioéthique, parmi lesquels figure évidemment le respect de la vie et de l'humain.

Nous sommes par conséquent extrêmement attentifs à ce que dans les différentes dispositions du projet de loi cette spécificité, qui a toujours marqué les différentes lois bioéthiques françaises, soit maintenue, et à ce que l'on ne franchisse pas les lignes rouges.

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L'article 14 de ce projet de loi opère stratégiquement et tactiquement une distinction philosophique entre les embryons humains et les cellules souches embryonnaires. On voit bien dans quel but : il s'agit de justifier un assouplissement de la législation qui rendra plus faciles les recherches sur les cellules souches embryonnaires. Or cela ne me semble pas éthique. Si une cellule souche embryonnaire ne constitue pas en soi un embryon humain – c'est incontestable – le législateur ne peut pas pour autant oublier qu'elle en a émané, fût-ce plusieurs années auparavant, et que son prélèvement en provoque la destruction.

C'est la raison pour laquelle nous vous proposons de supprimer, au travers de cet amendement n° 700, l'article 14 afin d'en rester à un régime d'autorisation encadré.

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Je vais faire une réponse globale sur tous les amendements de suppression, soit de l'article 14 lui-même, soit de certains de ses alinéas, ou tendant à en proposer une nouvelle rédaction, afin de lever certains doutes et de rappeler quelques éléments relatifs aux embryons et aux cellules souches.

L'article 14 vise à clarifier le régime juridique des recherches portant d'une part sur l'embryon, et d'autre part sur les cellules souches embryonnaires. Il identifie en premier lieu, dans un nouvel article du code de la santé publique, le régime juridique des recherches portant sur les gamètes destinés à constituer un embryon ou sur un embryon destiné à naître. Ces derniers relèvent effectivement du régime de recherche impliquant la personne humaine, le fameux RIPH, qui nécessite une autorisation de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l'ANSM, ainsi que l'avis d'un comité de protection des personnes, un CPP.

Ces recherches sont réalisées au bénéfice de l'embryon et n'ont pas vocation à lui porter atteinte : j'insiste sur ce point car ce régime juridique issu de la loi du 6 août 2004, dite loi Jardé, n'a pas été compris. Dans la mesure où l'embryon est destiné à naître, il n'y a pas destruction ni atteinte à son intégrité, ni bien sûr à celle de sa mère.

Cet article procède par ailleurs à la distinction des régimes juridiques applicables à la recherche d'une part sur les embryons et d'autre part sur les cellules souches embryonnaires, dites CSE. Aujourd'hui soumises à autorisation de l'Agence de la biomédecine, ces recherches feront l'objet d'une autorisation s'agissant des premières, et d'une simple déclaration s'agissant des secondes.

Leurs interrogations éthiques ne sont effectivement pas du tout les mêmes : je rappelle que les cellules souches embryonnaires sont des cellules qui ont été dérivées — il y a peut-être un, dix ou vingt ans — d'embryons, et ce dans le monde entier. Ces cellules ont la capacité de se multiplier : on établit donc des lignées cellulaires que les laboratoires s'échangent depuis bien longtemps.

Nous sommes donc bien loin dans leur cas de l'embryon, d'autant plus que ces CSE ont perdu des caractéristiques : elles ne sont plus — j'insiste sur ce mot — que pluripotentes, c'est-à-dire qu'elles ont la capacité de produire quelques tissus qui sont bien sûr extrêmement précieux en termes de thérapie.

Si elles ont donc conservé la pluripotence, elles ont en revanche perdu la totipotence, c'est-à-dire qu'elles n'ont plus, depuis l'origine, c'est-à-dire depuis bien longtemps, aucune capacité à reformer un embryon complet.

Je rappelle que les recherches sur les embryons sont autorisées par l'Agence de la biomédecine et qu'elles doivent donc répondre à des critères précis, qui sont rappelés à l'article 14, ainsi qu'à la nécessité de ne recourir à l'embryon que si l'état des connaissances scientifiques le justife.

Ces recherches sont totalement encadrées et contrôlées : elles peuvent d'ailleurs être suspendues si elles ne respectent pas les interdits fixés tant par le code civil que par celui de la santé publique. Mon commentaire d'article en dresse d'ailleurs la liste précise.

En résumé, je le rappelle, ces CSE représentent aujourd'hui une chance unique. Je vous renvoie à l'édition de l'hebdomadaire L'Express en date du 11 septembre dernier, qui vous permettra de comprendre le sens de mes propos.

Aujourd'hui en effet, les visées et actions thérapeutiques d'ores et déjà en cours, qui font l'objet de 400 essais cliniques avec déjà de grands succès, ne doivent surtout pas être remises en cause. Pour prendre un fait d'actualité, je ne pense pas qu'un célèbre pilote de Formule 1 soit actuellement à l'hôpital européen Georges Pompidou pour une autre raison…

Il ne faut donc en aucun cas interdire ces progrès majeurs de la thérapie cellulaire qui s'offrent à nous. Les demandes faites ces dernières années auprès de l'Agence de la biomédecine afin d'avoir accès à des embryons surnuméraires sont au nombre de quatre. C'est nécessaire parce que lorsqu'on cultive des cellules en culture, et ce quel que soit le type de lignée cellulaire, elles vont avoir tendance, au fil des années, à évoluer. Cela signifie qu'elles subissent des arrangements chromosomiques, des pertes de chromosomes, ou qu'elles développent des chromosomes surnuméraires : il faut donc pouvoir faire appel – passez-moi l'expression – à des lignées fraîches. Voilà pourquoi nous sommes encore obligés de faire appel à des embryons surnuméraires, dont je rappelle qu'ils sont sans cela voués à être détruits.

En résumé, j'émets un avis défavorable sur ces amendements identiques de suppression de l'article, car ils remettent en question ces évolutions majeures en termes de santé humaine, aujourd'hui et plus encore demain.

Je serai également défavorable aux amendements proposant une rédaction globale de l'article, en tant qu'ils imposent des mesures plus que contraignantes, ainsi qu'aux amendements portant suppression de divers alinéas traitant de ces recherches parce que la communauté — qu'elle soit médicale ou scientifique — que je représente ici sait qu'elle dispose en la matière d'un outil simplement exceptionnel.

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Il me semble important de rappeler que la recherche sur l'embryon en France n'est autorisée que sur des embryons dont la seule autre destination est la destruction : on ne génère en effet jamais d'embryons à des fins de recherche. C'est d'ailleurs pour cette raison que lorsqu'on pose la question du projet parental ou de son absence, le choix se porte très souvent sur l'utilisation possible, dans le cadre de la recherche.

Il faut également rappeler que l'éthique dont font preuve les chercheurs qui mènent ce type de recherches est démontrée par les chiffres : alors qu'actuellement 19 000 embryons sont congelés à des fins de recherche, 3 000 seulement ont été utilisés depuis que ce type de recherche est autorisé. Ces scientifiques sont tout à fait conscients qu'ils utilisent un matériel humain.

La recherche sur les cellules souches embryonnaires s'effectue sur des cellules dérivées d'embryons. Certes, elle nécessite la destruction de l'embryon pour produire de telles cellules mais, pour donner un exemple, la plus vieille lignée cellulaire existant en laboratoire, issue d'un cancer de l'utérus, a aujourd'hui plus de soixante-dix ans. Et personne ne conteste le fait que cette même lignée est encore extrêmement utile. C'est le cas de la plupart des lignées de cellules souches embryonnaires, qui, pour leur très grande majorité, ont été dérivées au moment où ce type de recherche a été autorisé pour la première fois.

Les cellules souches embryonnaires donnent lieu chaque année en France à une quinzaine de publications scientifiques qui témoignent, toutes, d'avancées majeures. Ce nombre est comparable à celui observé dans d'autres pays dans lesquels il existe, pourtant, une liberté totale de recherche sur ces mêmes cellules. Cela montre, là encore, qu'elles sont toujours utilisées à bon escient par nos chercheurs.

Comme cela a été rappelé, la recherche sur ces cellules souches embryonnaires a engendré de très grandes avancées scientifiques et médicales. Au regard du fait que ces cellules sont maintenant, pour certaines d'entre elles, utilisées depuis plusieurs années dans les laboratoires, y compris dans des laboratoires qui n'ont jamais vu un embryon humain, il nous paraît rationnel de pouvoir distinguer le régime d'utilisation des cellules souches embryonnaires et celui des embryons humains. Il ne s'agit pas de ne plus faire de demande ou de ne plus indiquer à quoi vont servir ces cellules, mais de le faire de manière simplifiée.

Pour que les choses soient très claires, je souligne que cette nouvelle modalité de déclaration de l'usage des cellules embryonnaires à des fins de recherche ne s'applique pas à celles qui seraient issues de nouveau d'un embryon, c'est-à-dire qu'à chaque fois que des nouvelles lignées de CSE seront fabriquées, elles seront soumises au même régime d'autorisation que celui applicable à l'embryon.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est également défavorable à ces amendements de suppression.

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Il est effectivement important d'avoir un débat à propos de l'article 14, car un certain nombre de questions se posent.

Les deux premiers alinéas de l'article avaient été adoptés dans le cadre de la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé de Mme Marisol Touraine, au détour d'un amendement gouvernemental. Ils formaient alors un titre V au sein de l'article 2151-5 du code de la santé publique qui encadre précisément la recherche sur l'embryon. Ils sont aujourd'hui déplacés au sein du titre consacré à l'assistance médicale à la procréation, l'AMP, dans ce qui va être appelé les dispositions générales tout en étant toilettés, comme cela a été expliqué dans l'étude d'impact fournie par le Gouvernement.

On ne parle plus de recherche biomédicale mais de recherche en général : pourquoi ? Pourquoi surtout avoir supprimé les termes in vitro ? Dès lors on peut s'interroger : ces recherches pourront-elles être menées in vivo ?

Je me pose ces questions parce qu'à l'heure où la Chine a confirmé la naissance d'un bébé « génétiquement modifié » au moyen de la méthode CRISPR-Cas9, pour Clustered Regularly Interspaced Short Palindromic Repeat, les conditions d'encadrement des recherches autorisées sur, selon la rédaction de l'alinéa 2, « les gamètes destinés à constituer un embryon ou sur l'embryon in vitro avant ou après son transfert à des fins de gestation », sont quasi nulles.

Je trouve dommage que nous ne disposions d'aucune précision concernant le but de ces recherches ni aucune garantie sur le fait qu'elles soient menées sans porter atteinte à l'embryon et au bénéfice de celui-ci.

Nous ne disposons pas de plus de précisions concernant les conditions dans lesquelles est recueilli le consentement du couple, alors que sur un sujet aussi sensible, et considérant les risques potentiels, il devrait au minimum être éclairé et formalisé par écrit.

Alors qu'on nous propose d'apporter de nouvelles modifications, il serait a minima intéressant de savoir quelles sont les véritables recherches qui ont été menées en France depuis l'adoption de ces deux alinéas, ce que ne précise pas l'étude d'impact.

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Nous avons la chance que le rapporteur soit issu de la communauté scientifique, mais nous représentons tous ici la nation.

Vous avez évoqué un célèbre pilote de Formule 1. J'espère, bien sûr, que le traitement anti-inflammatoire dispensé à celui qui a marqué notre enfance par ses performances lui réussira. Mais rien ne dit qu'il s'agit dans ce cas de cellules souches embryonnaires. À ma connaissance, en effet, aucune thérapie n'est validée à ce jour à partir de cellules souches embryonnaires humaines et aucun essai clinique n'est en cours – mais vous êtes plus à même que moi de le savoir. Il est plus probable qu'il s'agisse de cellules souches adultes, qui constituent une belle alternative. Elles sont d'ailleurs couramment utilisées notamment pour produire cet effet anti-inflammatoire. Peut-être pourrez-vous, monsieur le rapporteur, nous apporter des précisions à ce sujet.

Aujourd'hui, les recherches menées sur les CSE humaines sont prévues par la loi de 2011 : elles ne sont donc pas interdites. Le débat porte sur les modifications que vous voulez apporter, c'est-à-dire passer d'un régime d'autorisation à un régime de déclaration. Pourquoi souhaitez-vous un tel assouplissement ? Pourquoi la considération éthique est-elle différente en 2019 de ce qui avait été imaginé en 2011 ?

Cela m'amène à m'interroger : les besoins de la recherche sont-ils aujourd'hui différents ? Faut-il désormais aller plus vite parce que d'autres mènent de telles recherches ou procèdent à des essais ailleurs, ou notre réflexion éthique a-t-elle changé depuis 2011, époque où les lois relatives à la bioéthique étaient conçues de manière très consensuelle ?

S'agissant de la destination des embryons, le consentement doit être éclairé. Certains choisissent la destruction, d'autres la recherche. Or il y a recherche et recherche – tant sur les embryons que sur les CSE – et cela peut conduire à des choses très différentes.

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Il est effectivement important que nous puissions avoir ce débat. Sur votre dernière interrogation portant sur l'évolution entre 2011 et 2019, les techniques, et notamment la calibration des milieux de culture, font que nous sommes aujourd'hui capables d'utiliser des lignées en laboratoires sans qu'elles dérivent. En 2011, lorsque l'on voulait utiliser des cellules souches embryonnaires, on se trouvait bien souvent dans un système où l'on dérivait ces mêmes cellules.

Par ailleurs, vous avez raison, les travaux sur les CSE ont démarré en France plus tard que dans un certain nombre d'autres pays. Mais, aujourd'hui, la qualité des publications françaises – au total 136 publications émanant d'équipes françaises ont été recensées – fait référence dans le monde.

Ces publications ont porté sur des avancées majeures, et notamment un essai clinique portant sur le traitement de l'insuffisance cardiaque. Début 2019, un essai clinique a été autorisé sur le traitement de la rétine pigmentaire : il est actuellement en cours de recrutement. Deux projets, qui ont par ailleurs conduit au développement de produits de thérapie cellulaire, vont faire l'objet de demandes d'essais cliniques : ils portent, d'une part, sur le traitement de maladies graves de la peau liées à la drépanocytose et, d'autre part, sur le traitement des maladies métaboliques du foie. Deux autres projets ont permis l'identification de molécules, qui ont récemment été utilisées dans le cadre d'essais cliniques, notamment avec pour indication des formes génétiques de l'autisme et de la myotonie de Steinert. Enfin, deux projets visent à élucider des mécanismes qui permettent la mise en place de la pluripotence.

Vous le voyez, il s'agit d'avancées scientifiques réelles menées dans un laps de temps court, au regard du temps de la recherche dont il ne faut jamais oublier, en effet, qu'il est long. Il est donc essentiel d'encourager nos chercheurs, qui font partie des meilleurs chercheurs au monde, à continuer à accumuler des connaissances qui pourront être utilisées au bénéfice de l'ensemble de la société, notamment dans le traitement de maladies rares comme la myotonie de Steinert.

Au-delà de potentiels traitements, la simple accumulation de connaissances sur la façon dont les choses fonctionnent est intéressante car elles pourront, un jour ou l'autre, être reprises et utilisées. Il n'est pas nécessaire de rappeler ici que l'acquisition de connaissances que permet la recherche est ce qui fait d'un pays un grand pays.

Comme toujours dans les lois relatives à la bioéthique, il s'agit de prendre en compte ce que nous sommes capables de faire aujourd'hui et d'évaluer si cela percute les sujets d'éthique. Eh bien, nous considérons qu'un régime différent de celui applicable à la recherche sur l'embryon peut être prévu lorsque des laboratoires souhaitent mettre en place des protocoles de recherche portant sur des cellules souches embryonnaires qu'ils obtiennent d'autres laboratoires sans qu'eux-mêmes n'aient à dériver ces cellules à partir d'embryons.

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Je vais reprendre trois points, dont deux plus anecdotiques, voire presque people, puisque nous avons évoqué le cas d'un ancien champion de Formule 1. Il est précisément hospitalisé, au sein de l'hôpital Georges Pompidou, dans le service du professeur Philippe Menasché, qui a été à l'origine de notre première success story en matière d'utilisation de cellules souches embryonnaires.

Le deuxième point est moins anecdotique que pathétique, puisqu'il s'agit des embryons chinois : deux petites filles ont effectivement été l'objet d'une manipulation par édition du génome au moyen de la technique CRISPR-Cas9. Ces chercheurs, qui ont été mis au ban de la communauté scientifique, ont en effet trouvé judicieux de provoquer des mutations sur le gène CCR5, dont on sait que certains hommes et certaines femmes – très peu nombreux – qui en sont naturellement porteurs, sont résistants au virus du SIDA. Il s'agissait d'un exercice de style débile – je n'ai pas honte de le dire –, au demeurant rigoureusement interdit dans tous les pays et en tout cas très clairement en France, puisqu'il n'a jamais été question de réimplantation d'embryons après édition et manipulation.

Bien sûr, nous souhaiterions utiliser ces fameuses cellules adultes redifférenciées en cellules souches, c'est-à-dire les cellules dites iPS, pour Induced pluripotent stem cells. Malheureusement, nous en sommes aujourd'hui encore bien incapables ! Ne leur attribuez pas des vertus qu'elles ne possèdent pas à ce stade : ce sont des cellules qu'il a fallu modifier génétiquement en introduisant quatre gènes qui, si vous voulez tout savoir, codent des facteurs de transcription du développement. Elles sont loin aujourd'hui de la caractérisation souhaitée et leur utilisation à des fins thérapeutiques semble bien lointaine, ne serait-ce que pour obtenir un label GMP – Good Manufacturing Practice – permettant de les utiliser en clinique. J'espère comme vous que nous y parviendrons un jour.

Nous sommes donc contraints pour le moment de nous cantonner aux CSE, que nous utilisons également pour faire progresser nos connaissances sur ces fameuses cellules iPS. Nous avons en effet besoin d'un gold standard afin de contrôler en permanence ce à quoi nous avons affaire. J'espère que cela changera un jour. Une telle évolution permettra notamment d'utiliser nos propres cellules et faire donc ainsi fi de toute barrière immunologique.

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

En 2016, c'est effectivement au travers d'un amendement qu'a été adoptée dans cette partie du texte la possibilité d'utiliser des embryons dans le cadre de la recherche sur la procréation médicalement assistée. Or nous avons estimé que cette décision pouvait générer des ambiguïtés. Intégrer les recherches en AMP dans le cadre de la RIPH nous a semblé beaucoup plus protecteur.

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Notre groupe approuve l'article 14, qui favorisera la recherche tout en responsabilisant les chercheurs. Que les choses aient évolué depuis 2011 est une excellente nouvelle puisque cela montre que nos laboratoires et nos chercheurs sont encore dans la course et font partie de l'élite de la recherche.

Le régime déclaratif n'est pas synonyme de laisser-faire. Ce n'est pas un blanc-seing donné aux équipes. Il s'agit de conforter une avancée. L'Agence de la biomédecine peut à tout moment reprendre la main, notamment au travers de son conseil d'orientation qui est composé d'éminents experts et scientifiques. Tout est donc balisé : la recherche doit être fondamentale, avoir une pertinence scientifique, une finalité médicale et respecter les principes fondamentaux de la recherche à la fois sur les plans méthodologique et éthique.

L'article 14 a donc été travaillé en conscience et en responsabilité tant pour ce qui s'est déjà fait hier, ce qui se fait aujourd'hui et ce qui se fera demain en vue de favoriser les pluripotentialités de la recherche sur ces cellules.

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Je ne voudrais pas que l'on croie que nous voulons supprimer l'article 14 parce que nous serions opposés à la recherche de manière générale : ce n'est pas le cas. Nous espérons bien que la recherche progressera en matière d'insuffisance cardiaque ou de rétine pigmentaire.

La question n'est pas en soi de pouvoir on non conduire ces recherches. Puisque le régime d'autorisation ne les rend pas impossibles, pourquoi donner ce signal d'une baisse du niveau d'exigences ? Nous ne nous situons pas dans la perspective d'une interdiction, mais d'un changement de paradigme puisque l'on passerait d'un régime d'autorisation à un régime déclaratif. Certes, et comme je l'ai rappelé, une disposition a été votée dans un texte en 2016, mais il ne s'agissait pas d'une loi de bioéthique. Puisque nous sommes aujourd'hui dans ce cadre, interrogeons-nous : quelle est la considération éthique qui doit s'appliquer à ces recherches ? Existe-t-il des alternatives ? Nous comprenons bien les besoins de la recherche mais pourquoi passer d'un régime d'autorisation à un régime de déclaration ? Cette évolution pourrait envoyer un signal de moindre considération éthique de la recherche. Si le bien-fondé de la recherche ne se discute pas, la question du comment et du quoi se pose : c'est l'objet des lois de bioéthique.

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Sans partager toutes les interrogations exprimées par M. Thibault Bazin, la question qui m'est évidemment venue à l'esprit en lisant le projet de loi est la même : pourquoi cette modification ?

Je constate en effet dans d'autres domaines – le champ social, par exemple – qu'à chaque fois qu'on passe du régime de l'autorisation à celui de la déclaration, c'est peut-être pour accélérer un certain nombre de processus, mais aussi parce que l'on juge que la puissance publique tarde trop à répondre. La lenteur justifierait ce passage au régime déclaratif, quitte à procéder ensuite à des vérifications. Or si la deuxième raison était prédominante dans le choix opéré ici, cela serait assez problématique. La modification envisagée pose donc la question des moyens accordés à nos instances pour leur permettre d'effectuer leur travail. En la matière, je ne crois pas à la légèreté mais une validation, d'une manière ou d'une autre, par des institutions républicaines est absolument décisive. J'insiste sur ce point pour être bien sûr de comprendre les raisons qui ont conduit à cette modification.

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Je suis désolé si mes explications vous ont semblé confuses : la raison fondamentale de cette évolution est que nous souhaitons, au travers de cet article, distinguer les situations dans lesquelles on détruit des embryons en vue d'obtenir des cellules souches embryonnaires et de mener des recherches, des situations dans lesquelles on ne détruit pas d'embryons afin de mener des recherches sur ces mêmes cellules.

Cette distinction est liée au fait que les équipes de recherche concernées ne sont pas les mêmes : certaines travaillent à la fois sur des questions d'embryon, d'implantation, de début d'embryogénèse et de fertilité, alors que d'autres s'attachent aux problèmes de différenciation cellulaire et de recréation de nouveaux tissus. Nous considérons que les deux régimes doivent être distincts parce que les recherches menées ne portent pas sur les mêmes sujets scientifiques, qu'elles ne sont pas conduites par le même type de laboratoire et qu'elles ne correspondent pas aux mêmes situations.

Nous le verrons un peu plus tard dans l'analyse du projet de loi, et notamment à l'article 15 : une telle évolution permet ensuite de distinguer ce qui est faisable en matière de destination ou d'enjeux puisque les cellules souches embryonnaires ne sont plus assimilées à un embryon, comme c'était le cas jusqu'à présent.

Une telle évolution s'impose pour des raisons tenant au type de recherche mené, sachant que dans mon esprit il n'existe pas de recherche supérieure à une autre. Quant à la suppression de l'adjectif « biomédicale », elle s'est imposée car beaucoup de recherches en sciences humaines et sociales s'appuient également sur ces sujets. La recherche fondamentale ne se réduit pas à de la recherche biomédicale.

On distingue donc des situations dans lesquelles on détruit un embryon afin de faire de la recherche de celles dans lesquelles on travaille sur des cellules qui peuvent être utilisées dans des laboratoires qui ne posent pas de questions scientifiques autour de la fertilité.

Marc Delatte. Les enjeux éthiques sont également différents selon que l'on traite de recherche sur l'embryon ou sur les cellules souches, qu'elles soient de type CSE, c'est-à-dire qu'il s'agisse de cellules souches embryonnaires humaines, ou iPS.

La commission rejette les amendements identiques n° 69, n° 256 et n° 700.

La commission est ensuite saisie, en discussion commune, des amendements identiques n° 71 de M. Xavier Breton et n° 258 de M. Patrick Hetzel, de l'amendement n° 702 de M. Thibault Bazin, des amendements identiques n° 72 de M. Xavier Breton, n° 259 de M. Patrick Hetzel et n° 703 de M. Thibault Bazin, ainsi que des amendements identiques n° 318 de M. Patrick Hetzel, n° 791 de M. Alain Ramadier et n° 844 de M. Thibault Bazin.

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Avec votre permission, madame la présidente, je vais défendre en même l'amendement n° 258 et l'amendement n° 259, qui est un amendement de repli. L'amendement n° 258 vise à récrire l'article 14.

Madame la ministre, vous n'avez pas répondu à ma question : pourquoi veut-on apporter une modification à la loi alors que nous ne disposons d'aucune étude documentée depuis 2016 permettant de la justifier ?

L'étude d'impact nous apprend que depuis 1998, plusieurs centaines de lignées de cellules souches embryonnaires ont été dérivées et caractérisées dans le monde : elles sont utilisées dans de très nombreux laboratoires. Nous en avons eu confirmation lors des auditions et M. le rapporteur vient d'y faire référence. Mais pourquoi ne ferions-nous pas comme en Allemagne, où une grande coalition a pris un certain nombre de mesures ? Or l'Allemagne ne me semble pas être un pays attardé en matière de recherche, y compris en matière génétique. Pourquoi donc n'utiliserions-nous pas les cellules souches embryonnaires d'embryons déjà détruits et ne ferions-nous pas comme nos voisins d'outre-Rhin en interdisant a priori la recherche sur l'embryon ?

Puisque la transgression a déjà eu lieu en détruisant des embryons humains à des fins de recherche, faisons-la cesser, puisque la recherche n'a plus besoin a priori de détruire de nouveaux embryons.

Il existe d'ailleurs un réel paradoxe à propos duquel, madame la ministre, j'aimerais vous entendre : l'étude d'impact communiquée par le Gouvernement nous apprend, à la page 332, que le nombre d'embryons humains fournis chaque année à la recherche est quasiment équivalent au nombre d'embryons humains effectivement inclus dans un protocole de recherche la même année. Je reprends l'exemple du Gouvernement : en 2016, cela représentait 2 855 embryons humains. Pourquoi la recherche a-t-elle besoin aujourd'hui d'un si grand nombre d'embryons humains alors que l'on nous explique que les chercheurs travaillent sur les cellules souches humaines dérivées d'embryons humains et qu'il en existe des centaines de disponibles, comme l'a indiqué le rapporteur ?

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Avec votre permission, madame la présidente, je défendrai en même temps les amendements n° 702 et n° 703.

Si je vous suis bien, Madame la ministre, les laboratoires mènent des recherches différentes, certaines portent sur l'embryon, d'autres sur les cellules souches embryonnaires, sur lesquelles le regard éthique serait différent, compte tenu du fait que celles-ci sont disponibles. M. Pierre Sabatier nous a cependant indiqué, au cours de son audition, que de nouvelles lignées étaient nécessaires. N'y a-t-il pas de considération éthique entre les CSE existantes, dont les laboratoires ont besoin, et les CSE nouvelles, qui vont nécessiter la destruction d'embryons ?

Certes, nous ne destinons pas d'embryons spécifiquement à la recherche, conformément à la convention d'Oviedo. Mais lorsque nous aurons besoin de nouvelles cellules souches embryonnaires, il faudra bien détruire des embryons afin de les prélever. Le régime que nous prévoyons d'appliquer à ces mêmes cellules ne devrait-il donc pas être identique à celui que nous prévoyons d'appliquer aux embryons ? Je pose la question car ce point mérite d'être précisé, même si à titre personnel je suis en désaccord avec cet assouplissement de notre droit positif en la matière.

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L'amendement n° 72 est un amendement de repli.

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L'amendement n° 318 vise à suspendre les recherches portant sur l'embryon ainsi que sur les cellules souches embryonnaires humaines pendant un délai d'un an afin de permettre à l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) de dresser un bilan. Je regrette en effet que l'on n'ait pas attendu que cet office parlementaire commun à l'Assemblée nationale et au Sénat, qui essaie en général de dégager un consensus sur certaines questions, accomplisse un tel travail avant de légiférer.

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Lors de chaque modification législative portant sur le régime de la recherche sur les embryons humains ainsi que sur les cellules souches embryonnaires humaines sont annoncés des résultats probants qui seraient à portée de main, ce qui a conduit le Parlement à accorder des dérogations de recherche, puis à autoriser la recherche sur les embryons et les cellules souches.

Où en sommes-nous aujourd'hui ? Quel bilan peut-on dresser de ces dérogations et autorisations ? La loi prévoit que la recherche sur l'embryon doit être « susceptible de produire des progrès thérapeutiques majeurs ». Or, selon M. Alain Fisher, professeur d'immunologie pédiatrique et titulaire de la chaire de médecine expérimentale au Collège de France, « on n'a pas encore constaté beaucoup de bénéfices pour les patients des essais cliniques menés actuellement ».

Avant d'aller plus loin, je vous propose donc, mes chers collègues, la voie de la sagesse en donnant à une autorité compétente, c'est-à-dire l'OPECST, le soin d'établir un premier état des lieux en la matière.

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Sans être passionné par la rétine pigmentaire, je ne peux pas ne pas m'interroger alors que d'autres acteurs empruntent d'autres voies : je pense notamment aux fameuses cellules iPS. Il me semble en effet que le professeur Takahashi, qui illustre les efforts menés par le Japon en la matière, tente de trouver des solutions thérapeutiques sur la rétine. Madame la ministre, si les Japonais obtiennent des résultats, ne vaudrait-il pas mieux, à terme, privilégier les iPS plutôt que les cellules souches embryonnaires humaines ? Ne doit-on pas favoriser le moyen le plus éthique possible ?

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J'émets un avis globalement défavorable sur tous ces amendements.

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Je précise un point : il ne s'agit pas de modifier la loi, mais de mettre en cohérence la recherche sur l'embryon avec les règles de la recherche portant sur la personne humaine.

Lorsque des nouvelles lignées sont nécessaires, nous nous situons bien entendu dans le cadre de la recherche sur l'embryon. Lorsque l'on dérive de nouvelles lignées de cellules souches embryonnaires à partir d'embryons, on reste dans le cadre du régime déclaratif applicable à l'utilisation d'embryons. C'est la raison pour laquelle on distingue les recherches menées sur des cellules nécessitant la destruction de l'embryon de celles conduites sur des cellules n'impliquant pas une telle destruction. Telle est la base de la distinction que nous proposons entre les deux régimes.

Je ne reviendrais pas sur la proposition d'arrêter toute recherche pendant un an, qui, eu égard à l'importance de ces questions ne me paraît pas très raisonnable.

Alors qu'avons-nous obtenu grâce à ces recherches ? La recherche sur l'embryon a débouché sur 19 publications dans des revues de portée internationale, qui font référence, issues d'équipes dont la renommée est incontestable.

Par exemple, nos équipes ont été capables de mettre en évidence ce que l'on appelle des marqueurs de la qualité embryonnaire ou des marqueurs prédictifs d'une meilleure implantation, ce qui peut être utile pour les fécondations in vitro et l'AMP en général.

Elles ont également identifié une petite molécule, qu'on appelle un peptide, qui, ajoutée au milieu permettant de créer des embryons dans le cadre de l'AMP, améliore la qualité de ces embryons. Quand on sait à quel point le processus de l'AMP est compliqué, tout élément de nature à le faciliter revêt une grande importance.

Elles ont encore identifié des mécanismes conduisant à l'inactivation du chromosome X chez l'homme : il est en effet très important qu'une partie du chromosome X soit inactivée pour éviter des maladies génétiques graves.

Elles ont aussi obtenu des informations sur l'impact des mutations mitochondriales, qui sont précieuses pour la compréhension d'un nombre très important de maladies musculaires ou neurodégénératives.

Bref, il y a de réelles avancées, dont certaines vont déboucher sur des essais cliniques, afin de vérifier la pertinence du traitement élaboré à partir des connaissances acquises. Là encore, il importe de raisonner sur le temps long, puisqu'il s'agit de découvertes qui sont, de fait, extrêmement récentes.

Sur les iPS, il faut bien comprendre que ce sont, dès le départ, des cellules génétiquement modifiées : on part de cellules adultes que l'on modifie génétiquement pour qu'elles retrouvent un comportement s'approchant de celui des cellules embryonnaires.

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Pour une cellule, un tel processus est extrêmement violent. Or rien ne garantit aujourd'hui que les modifications génétiques, dont on voit a priori le premier effet, qui est de retrouver des capacités assez semblables à celles de cellules embryonnaires, n'ont pas induit d'autres phénomènes.

Pour la DMLA, par exemple, il est donc important que des essais cliniques soient menés en parallèle à partir des iPS et des cellules souches embryonnaires. Ce sont eux qui permettront de confirmer, ou non – la méthodologie est essentielle – si le résultat bénéfique est identique pour les deux types de lignées cellulaires. Si tel est le cas, nous privilégierons évidemment pour cette indication, dans ce contexte et avec cette méthodologie, les cellules iPS par rapport aux cellules souches embryonnaires, ne serait que parce que dans le cas des premières, la fabrication de tissus somatiques ne requiert pas d'autorisation.

C'est ainsi que se construisent les protocoles de recherche. Il ne faut pas attribuer aux cellules iPS des potentialités que nous ne mesurons pas véritablement aujourd'hui. Il ne vous aura évidemment pas échappé que c'est la personne qui a mis en place le protocole permettant d'obtenir ces iPS qui fait débuter les essais cliniques les utilisant. Il le fait cependant en même temps que la communauté mondiale : tout le monde est en effet très impatient de savoir si, dans le cadre de ce protocole, pour cette indication et dans le cadre de cet essai clinique, les résultats sont ou non parfaitement comparables.

La commission rejette successivement les amendements n° 71, n° 258, n° 702, n° 72, n° 259, n° 703, n° 318, n° 791 et n° 844.

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Chers collègues, je vous propose une présentation commune de tous les amendements concernant les recherches interventionnelles sur personne humaine.

La commission examine en présentation commune les amendements n° 70 de M. Xavier Breton, n° 257 de M. Patrick Hetzel, n° 701 de M. Thibault Bazin, n° 785 de M. Alain Ramadier, n° 73 de M. Xavier Breton, n° 260 de M. Patrick Hetzel, n° 704 de M. Thibault Bazin, n° 312 de M. Patrick Hetzel, n° 838 de M. Thibault Bazin, n° 624 de Mme Annie Genevard, n° 74 de M. Xavier Breton, n° 261 de M. Patrick Hetzel, n° 705 de M. Thibault Bazin et n° 1389 de Mme Agnès Thill.

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Nos discussions sont intéressantes pour fixer le cap en matière de bioéthique. Un argument revient assez régulièrement : la recherche française serait en retard par rapport à celle d'autres nations – ce qui ne manque pas d'inquiéter nos concitoyens… À l'occasion de chaque révision des lois de bioéthique, on auditionne systématiquement le professeur Peschanski. À chaque fois, et avec tout le respect qu'on lui doit, il déclare que d'ici à la prochaine révision, la recherche aura mis sur le marché de nouveaux traitements. On nous fait miroiter des avancées thérapeutiques… que nous attendons toujours.

Madame la ministre, vous avez mis en avant les dix-neuf publications de recherches d'équipes françaises dans des revues scientifiques de premier plan, mais la dimension thérapeutique reste un point faible. Vous me répondrez que cela nécessite du temps ; j'en ai parfaitement conscience. Reconnaissez cependant qu'il existe un énorme décalage entre les annonces et les réalisations.

On nous dit qu'on est en retard, mais veut-on vraiment suivre le modèle chinois ? Je ne le pense pas. J'ai cité l'Allemagne. Soyons prudents : certains pays au premier plan international en matière de recherche sont plus restrictifs que nous. Pourtant, leurs citoyens sont soignés et cela n'empêche pas les avancées. J'ai parfaitement conscience qu'en Allemagne, l'histoire est à l'origine de l'interdiction de la recherche sur l'embryon. Il reste que ce pays dote d'importants moyens la recherche utilisant des lignées anciennes de cellules souches embryonnaires. Pourquoi notre communauté scientifique ne travaille-t-elle pas davantage dans cette direction ? Que je sache, les publications allemandes ne sont pas à la traîne. On peut donc s'interroger : les modifications législatives sont-elles seules à l'origine de nouvelles thérapies ?

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Madame la ministre, j'aimerais vous faire confiance, vous croire sur paroles, mais en préparant notre réunion, j'ai relu les débats des précédentes révisions des lois de bioéthique et je suis inquiet. À chaque nouvel assouplissement, le ou la ministre au banc annonce, en effet, l'imminence d'essais cliniques et des résultats rapides…

Notre collègue Dharréville a soulevé un point important : quels sont les moyens humains et financiers de l'Agence de la biomédecine pour délivrer les autorisations ? Pourquoi baisser nos standards éthiques ? Si l'on souhaite que les autorisations soient délivrées rapidement, donnons-lui les moyens de les traiter, en conservant le même standard éthique. Ce n'est pas une question technique ou juridique, mais bien éthique, comme le soulignait M. Jean Leonetti dans son rapport en 2011.

Je tiens à rendre hommage au Gouvernement concernant la veille scientifique et technologique effectuée par le ministère des affaires étrangères. En la parcourant, je suis tombé sur une publication du 22 avril 2019 qui me laisse perplexe : « Chirurgie de la rétine, les patients transplantés en 2017 [au Japon] avec des cellules souches pluripotentes induites (iPS) se portent bien ». Vous nous avez dit que la chirurgie de la rétine pouvait justement justifier un assouplissement pour permettre les recherches. Et j'ai été rassuré par vos déclarations, indiquant qu'il fallait privilégier le moyen le plus éthique quand on était capable d'y arriver. Pourquoi ne le fait-on pas, si tel est le cas ? Nos équipes de recherche donnent-elles la priorité à ces recherches sur les cellules iPS ou attendent-elles, en observatrices, les résultats japonais ? C'est aussi une question éthique.

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Les amendements n° 785 et n° 73 visent à souligner une incohérence juridique. Selon l'alinéa 2 de l'article 14, « des recherches menées dans le cadre de l'assistance médicale à la procréation peuvent être réalisées sur l'embryon, avant ou après son transfert à des fins de gestation ». Cette disposition est en contradiction avec l'alinéa 16 du même article qui dispose que les embryons sur lesquels une recherche a été conduite ne peuvent être transférés à des fins de gestation. On ne peut pas interdire le transfert d'un embryon sur lequel des recherches ont été menées tout en l'autorisant dans d'autres cas.

En outre, le régime de recherche proposé dans cet article n'offre aucune garantie quant au fait que les embryons manipulés ne seront ni abîmés, ni détruits. Il n'est pas précisé, comme le régime des études le faisait avant 2013, que ces recherches doivent être menées « au bénéfice de l'embryon » et « sans lui porter atteinte ».

M. Jacques Testart l'indiquait lors des auditions de la mission d'information, il s'agit à la fois de la création d'embryons pour la recherche et de la possibilité de transfert in utero des embryons après recherche. Un tel régime viendrait transgresser un principe fondateur du droit français et international, celui de l'article 18 de la convention d'Oviedo.

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L'amendement n° 1389 vise à supprimer l'autorisation de mener des recherches sur l'embryon, avant ou après son transfert à des fins de gestation.

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J'ai déjà répondu globalement. Les points qui vous interpellent – c'est parfaitement légitime – ont été largement explicités dans l'argumentaire que vous avez reçu sur l'article 14. J'y réponds point par point à toutes les questions. Mon avis est défavorable à tous ces amendements.

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

M. Hetzel, et d'autres, m'ont interpellée sur les avancées thérapeutiques. Si vous entendez des chercheurs, ils vous parleront sans doute de production de connaissances – c'est un fait ; les publications sont là pour le prouver. Et je vous rappelle que nous examinons actuellement les dispositions du projet de loi relatives à la recherche. S'agissant d'avancées thérapeutiques, et c'est aussi ce qui fait la réputation qualitative de la France, nous ne souhaitons pas en obtenir à tout prix. C'est le rôle des phases I à IV des essais cliniques. Nous ne testons jamais directement sur des êtres humains un protocole qui semble fonctionner, comme cela peut se produire dans d'autres pays. Je sais que ce n'est pas ce que vous sous-entendiez, mais il faut être prudent : la connaissance ne peut se résumer à son utilité à court terme ou à son impact immédiat sur la santé. En ma qualité de ministre de la recherche, il me paraît très important de le rappeler. La production de la connaissance est ce qui fait qu'un pays reste un grand pays.

Vous avez évoqué l'Allemagne et sa capacité à investir dans la recherche. Je vous entends avec bonheur : au moment de l'examen du projet de loi de programmation sur la recherche, je serai ravie que nous partagions cette préoccupation de soutenir financièrement la recherche. L'Allemagne dépense 3 % de son PIB pour la recherche, et s'est fixé un objectif de 3,5 %. Quand nous en serons là par des choix collectifs, je ne doute pas que nous consacrerons plus de moyens aux cellules iPS, comme sur tous les sujets de recherche, en vue de produire de la connaissance.

Nos débats sont vraiment passionnants et de très haut niveau, et je vous en remercie. En réalité, nous traitons les questions de bioéthique comme elles se posent au moment où les projets de loi de bioéthique sont débattus… Vous faisiez référence au bon travail de veille scientifique et technologique du ministère de l'Europe et des affaires étrangères ; je ne manquerai pas de le leur faire savoir. Pour autant, même si, deux ans après, les patients se portent bien, cela ne valide ni ne sécurise ces recherches, extrêmement complexes – ces cellules adultes ont connu quatre modifications majeures de gènes afin de les rapprocher de cellules embryonnaires. Le temps de la recherche est plus long et il ne s'agit pas d'essais cliniques massifs. C'est une bonne nouvelle si les choses se passent bien, mais cela ne nous dispense pas de continuer à observer.

En outre, il s'agit de thérapie : lorsqu'elle sera accessible sur le marché, avec tout ce que cela nécessite d'autorisations et de contrôles pour qu'on puisse la considérer comme un véritable médicament, ce sujet n'intéressera plus la ministre de la recherche.

Monsieur Bazin, vous vous inquiétez que les équipes de recherche puissent attendre de constater que les autres se trompent et refuser d'exprimer elles-mêmes une curiosité scientifique. Je ne connais pas de chercheurs qui fonctionnent ainsi ! La curiosité est le moteur de la recherche.

Vous avez tous soulevé ce qui vous paraît être une ambiguïté : dans un cas, on autoriserait la réimplantation d'embryons sur lesquels on aurait effectué des recherches ; dans l'autre, on l'interdirait. Je le répète : il est formellement interdit dans tous les cas de fabriquer des embryons à des fins de recherche. C'est proscrit à la fois par la convention d'Oviedo et les lois de bioéthique. Mais, dans un contexte d'assistance médicale à la procréation (AMP), on produit des embryons pour, in fine, les implanter. Dans ce cas, si le couple est porteur d'une anomalie génétique qui s'est manifestée chez un enfant, il est heureux que l'on puisse vérifier si l'embryon qui va être implanté est porteur, ou non, de la même anomalie génétique. C'est le principe du diagnostic préimplantatoire (DPI).

Il faut donc distinguer ce qui relève de la recherche – encore une fois, il est totalement interdit de fabriquer un embryon à des fins de recherche – et le fait que nous fabriquons des embryons en vue de les implanter. Dans ce dernier cas, il est heureux que les médecins soient autorisés à les examiner à la loupe, afin de vérifier qu'ils se divisent correctement et, éventuellement, faire des tests. C'est la raison pour laquelle la recherche sur l'embryon dans un contexte d'AMP a été transférée dans les dispositions de la loi relatives aux recherches sur la personne. L'intention de réimplantation est alors flagrante et les lois de bioéthique doivent distinguer ce cas de figure : c'est pourquoi les dispositions relatives aux embryons à vocation de procréation médicalement assistée doivent être transférées dans celles de la loi qui relèvent de la protection des personnes. J'espère que mes explications sont claires. Je peux y revenir autant de fois qu'il le faudra

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Madame la ministre, je ne peux que vous soutenir quand vous plaidez pour que nous donnions les moyens à la recherche de faire son travail. Considérer qu'il faut tout arrêter parce qu'on n'a pas eu de résultat n'est pas pertinent, d'autant que ce type de décision revient à celles et ceux qui cherchent – ils sont mieux à même d'en juger.

Je reste cependant troublé par la possibilité de faire des recherches sur des embryons qui vont être implantés et deviendront des personnes. Je vous ai écoutée attentivement et j'ai saisi les objectifs. À la première lecture du projet de loi, je ne l'avais pas compris ainsi, mais je vous ai entendue. Quoi qu'il en soit, il faudrait en rester à un principe et analyser la destination. Il faut clairement interdire les recherches sur les embryons qui ont vocation à être implantés. Vous nous dites que c'est le cas, tant mieux. Je rappellerai les propos de M. Lucien Sève, philosophe, membre du premier comité d'éthique : « notre respect pour l'embryon va à son présent dans la mesure où nous considérons son avenir ». C'est à cet avenir qu'il faut penser, en continuant à réfléchir et à oeuvrer.

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Il est important de distinguer recherches et études sur l'embryon. Cela ne figure pas dans la loi du 6 août 2013, mais dans la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé. Les « recherches biomédicales non interventionnelles » ne doivent pas porter pas atteinte à l'intégrité de l'embryon, mais elles favorisent l'amélioration des techniques d'AMP. Il s'agit par exemple de techniques pharmacologiques visant à la maturation avant l'implantation de l'embryon in utero, qui relèvent de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM).

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Les débats sont importants sur ces questions car la France a toujours eu une certaine vision de la bioéthique. C'est plus largement le cas en Europe, où la consolidation de ce droit est le fruit du code de Nuremberg. Nous en avons tiré certaines conséquences, notamment le respect du vivant et la non-marchandisation du corps.

Peut-être n'avons-nous pas été assez clairs, Madame la ministre, mais les évolutions que vous proposez à travers le régime déclaratif nous inquiètent à deux titres : comment garantirez-vous le respect du vivant ? Est-on sûr qu'il n'y aura pas marchandisation ? Au Japon, certains produits cosmétiques sont ainsi fabriqués à partir de placenta. Nous ne souhaitons pas que cela se développe en Europe. Est-on sûr que le régime déclaratif ne va pas faciliter la réalisation de profits par les industriels ?

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Seules les dispositions concernant le diagnostic et la recherche clinique en vue de comprendre et d'améliorer les processus d'AMP – doit-on implanter l'embryon après deux ou trois jours ? l'ajout d'un peptide dans le milieu favorise-t-il le processus ? – sont transférées dans les dispositions de la loi relatives à la personne humaine. S'agissant de la recherche sur l'embryon, l'interdiction perdure. Ces trois dispositifs différents sont toujours, improprement, appelés « recherches ».

La commission rejette successivement les amendements n° 70, n° 257, n° 701, n° 785, n° 73, n° 260, n° 704, n° 312, n° 838, n° 624, n° 74, n° 261, n° 705 et n° 1389.

Puis elle adopte l'amendement rédactionnel n° 2222 du rapporteur.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission rejette successivement les amendements identiques n° 75 de M. Xavier Breton, n° 262 de M. Patrick Hetzel et n° 706 de M. Thibault Bazin, puis l'amendement n° 2117 de Mme Agnès Thill.

Les amendements n° 2005 et n° 2045 sont retirés.

La commission examine, dans le cadre d'une présentation commune, les amendements identiques n° 127 de M. Xavier Breton, n° 314 de M. Patrick Hetzel, n° 786 de M. Alain Ramadier et n° 840 de M. Thibault Bazin, les amendements identiques n° 128 de M. Xavier Breton, n° 315 de M. Patrick Hetzel et n° 841 de M. Thibault Bazin, les amendements identiques n° 316 de M. Patrick Hetzel et n° 842 de M. Thibault Bazin, l'amendement n° 129 de M. Xavier Breton, ainsi que les amendements identiques n° 317 de M. Patrick Hetzel, n° 788 de M. Alain Ramadier et n° 843 de M. Thibault Bazin.

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Les amendements n° 127 et n° 786 visent à calquer notre droit sur nos engagements internationaux, en l'occurrence la convention d'Oviedo, dont le contenu a été fortement inspiré par les lois de bioéthique françaises de 1994 et que la France a ratifiée en 2011. L'article 18 de la convention interdit de créer des embryons pour la recherche. Or, depuis 2013, ce régime juridique de protection de l'embryon n'existe plus en France. Il convient de le réanimer, non pas en vue d'interdire les recherches, mais de s'assurer qu'elles poursuivent des finalités objectivement conformes à nos principes éthiques.

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Madame la ministre, je vous ai posé des questions sur le risque de marchandisation et il est regrettable que vous n'ayez pas souhaité y apporter de réponse.

Les amendements n° 314 et n° 315 visent à répondre à une autre de nos interrogations. Le Gouvernement semble dans une position très jésuitique – si vous me permettez cette comparaison. Vous évoquez des fins thérapeutiques. Certes, mais si, à un moment donné, au cours des manipulations sur l'embryon, on l'endommage, il ne sera pas implanté, et la finalité thérapeutique se transformera en finalité de recherche. La frontière est ténue et on ne peut évacuer si facilement le sujet quand on se situe aux frontières du vivant. C'est l'intérêt de nos lois de bioéthique. Soyons vigilants afin de maintenir ces garde-fous qui ont été une chance pour notre pays.

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Essayons d'appréhender le principe éthique que vous posez, madame la ministre – on ne crée pas d'embryons pour la recherche, notamment par le biais de l'AMP. Cela signifie-t-il que les avancées de la science, par exemple la vitrification ovocytaire, nous permettront de produire moins d'embryons surnuméraires ? Nous n'avons pas tous l'ambition de fonder une famille très nombreuse – peut-être serait-ce le cas si la politique familiale était plus généreuse…

Le régime actuel empêche-t-il la production de connaissances ? Pas forcément. Vous observez ce qui se passe à l'étranger, mais l'étranger observe-t-il aussi ce que nous faisons ? La recherche française est à l'origine de publications : comment la communauté internationale les perçoit-elle ? Deux directions différentes sont prises. Laquelle est le mieux à même de soigner des patients ?

Notre collègue Dharréville l'a souligné, il s'agit de recherches sur de futures personnes : que se passe-t-il si on abîme l'embryon et qu'on ne peut plus l'implanter ? L'embryon aura bien alors été indirectement produit pour la recherche… C'est l'objet de l'amendement n° 840.

L'amendement n° 841 fait suite à une décision du Conseil constitutionnel sur la loi du 26 janvier 2016, dans laquelle il distingue les recherches interventionnelles et les recherches observationnelles dans le cadre de l'AMP, en validant uniquement ces dernières. Mais le décret d'application du 4 mars 2016 étend les recherches aux recherches interventionnelles… Or nous souhaitons éviter toute manipulation génétique inappropriée.

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Les scientifiques, que j'essaie humblement de représenter, sont tout à fait capables d'agir en responsabilité. Chaque fois que je participe à un débat de bioéthique en région, je suis heureux de voir qu'ils sont tous présents. Vous pouvez être certains qu'ils savent parfaitement jusqu'où ils peuvent aller et comment poser les garde-fous nécessaires.

Les demandes formulées dans vos amendements sont parfaitement expliquées dans tous les rapports de l'Agence de la biomédecine. Mon avis est défavorable sur tous les amendements.

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Par souci de simplification, je n'emploie sans doute pas toujours les termes exacts. Je vais donc le redire : on ne produit jamais des embryons pour la recherche. Quel est le processus ? Lorsqu'un couple a un projet parental qui nécessite une procréation médicalement assistée, le plus important est évidemment que ce projet aboutisse. Pour cela, on génère des embryons surnuméraires, comme le prévoit le protocole médical. Lorsque le couple a réalisé son projet parental, ou lorsqu'il n'y a plus de projet parental, les embryons sont détruits, proposés à d'autres couples ou pour la recherche.

La recherche visant à améliorer l'AMP revient ainsi à diminuer le nombre d'embryons surnuméraires nécessaires au succès de la procréation médicalement assistée. Autoriser les recherches cliniques pour améliorer la procréation médicalement assistée ne signifie pas que l'on touche l'embryon : il s'agit d'analyser s'il est préférable d'implanter deux ou trois jours après la fécondation, par exemple. Soyons clairs : il n'y a pas de manipulation génétique possible sur des embryons ensuite réimplantés. Pour autant, les risques – et les bénéfices – sont inhérents à tout protocole.

Enfin, le transfert de ces dispositions permettra d'appliquer celles relatives aux recherches impliquant la personne humaine (RIPH).

La commission rejette successivement les amendements identiques n° 127, n° 314, n° 786 et n° 840, les amendements identiques n° 128, n° 315 et n° 841, les amendements identiques n° 316 et n° 842, l'amendement n° 129 et les amendements identiques n° 317, n° 788 et n° 843.

Elle rejette ensuite les amendements identiques n° 76 de M. Xavier Breton et n° 263 de M. Patrick Hetzel.

Elle en vient à l'amendement n° 707 de M. Thibault Bazin.

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Monsieur le rapporteur, je ne remets absolument pas en cause le discernement éthique des chercheurs. En tant que parlementaires, il nous arrive de participer à des soirées-débats avec des professeurs qui sont très investis et qui se posent eux-mêmes des questions. Partager leurs réflexions éthiques est très intéressant.

Pour autant, la communauté scientifique doit-elle décider en autonomie ? La France doit conserver son modèle, dans lequel le Parlement fixe certaines règles. D'ailleurs, une fois que les règles sont fixées, les chercheurs sont plus libres car ils sont protégés et connaissent leurs limites. Vous plaidez pour une loi de confiance, et plus d'interdits. Mais les interdits qui caractérisent le modèle français libèrent aussi les chercheurs. Au-delà de toute caricature, les règles communes permettent de s'épanouir et se développer ! Est-ce au Parlement et à la société de s'approprier ces questions ou à un comité de scientifiques d'établir ses propres règles ? Notre modèle est en jeu ; il est donc important de se poser ces questions.

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Vous venez de nous expliquer le rôle du Comité consultatif national d'éthique (CCNE)… Je suis défavorable à l'amendement.

La commission rejette l'amendement n° 707.

Elle en vient à l'examen, dans le cadre d'une présentation commune, des amendements identiques n° 77 de M. Xavier Breton, n° 264 de M. Patrick Hetzel et n° 708 de M. Thibault Bazin, et des amendements identiques n° 78 de M. Xavier Breton, n° 265 de M. Patrick Hetzel et n° 709 de M. Thibault Bazin.

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L'amendement n° 264 est une modification rédactionnelle. En l'état actuel de la rédaction de l'article 14, la notion de recherche sur l'embryon humain laisse à penser que l'objet de la recherche est l'étude de l'embryon humain. Or il ne s'agit que d'un moyen. C'est pourquoi je propose que l'on parle de recherche « avec » un embryon humain et « avec » des cellules souches embryonnaires. Ce serait plus respectueux et plus conforme à l'esprit de ces recherches.

La commission rejette successivement les amendements n° identiques n° 77, n° 264 et n° 708 et les amendements identiques n° 78, n° 265 et n° 709.

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Chers collègues, je vous propose une présentation commune des très nombreux amendements concernant les conditions d'autorisation d'un protocole qui vont de l'amendement n° 1209 à l'amendement n° 720.

La commission examine, dans le cadre d'une présentation commune, les amendements identiques n° 266 de M. Patrick Hetzel et n° 710 de M. Thibault Bazin, les amendements n° 79 de M. Xavier Breton et n° 525 de M. Patrick Hetzel, les amendements identiques n° 80 de M. Xavier Breton et n° 267 de M. Patrick Hetzel, les amendements identiques n° 81 de M. Xavier Breton, n° 268 de M. Patrick Hetzel et n° 712 de M. Thibault Bazin, les amendements identiques n° 82 de M. Xavier Breton, n° 269 de M. Patrick Hetzel et n° 713 de M. Thibault Bazin, l'amendement n° 711 de M. Thibault Bazin, les amendements identiques n° 83 de M. Xavier Breton, n° 270 de M. Patrick Hetzel et n° 714 de M. Thibault Bazin, les amendements identiques n° 84 de M. Xavier Breton, n° 271 de M. Patrick Hetzel et n° 715 de M. Thibault Bazin, les amendements identiques n° 85 de M. Xavier Breton, n° 272 de M. Patrick Hetzel et n° 716 de M. Thibault Bazin, les amendements n° 2169 et n° 2170 du rapporteur, les amendements identiques n° 86 de M. Xavier Breton, n° 273 de M. Patrick Hetzel et n° 717 de M. Thibault Bazin, les amendements identiques n° 87 de M. Xavier Breton et n° 274 de M. Patrick Hetzel, l'amendement n° 718 de M. Thibault Bazin, les amendements identiques n° 88 de M. Xavier Breton, n° 275 de M. Patrick Hetzel et n° 719 de M. Thibault Bazin, ainsi que les amendements identiques n° 89 de M. Xavier Breton, n° 276 de M. Patrick Hetzel et n° 720 de M. Thibault Bazin.

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L'amendement n° 266 vise à modifier la rédaction de l'alinéa 7. Le bien-fondé scientifique et médical de la recherche doit être intelligible pour tous les acteurs du processus d'autorisation du protocole de recherche.

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Les amendements n° 710 et n° 712 visent à préciser que la recherche appliquée ou fondamentale doit permettre des progrès médicaux majeurs identifiés ou identifiables.

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L'amendement n° 267 vise à ajouter la notion d'impératif thérapeutique absolu, afin de maintenir des garde-fous.

L'amendement n° 269 vise quant à lui à préciser que la recherche fondamentale ou appliquée sur l'embryon humain doit permettre des progrès thérapeutiques majeurs. Comme exposé précédemment, on nous les annonce depuis plusieurs décennies, mai il y a un décalage entre les discours et la réalité.

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L'amendement n° 711 vise, par prudence, à compléter l'alinéa 8 en inscrivant ces recherches dans un impératif thérapeutique absolu, présentant un caractère d'urgence et pour lesquelles aucune solution alternative n'est connue.

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L'amendement n° 270 vise à préciser que, lorsque l'on effectue des recherches en recourant à des embryons humains ou à des cellules souches embryonnaires, la nécessité doit en être expressément établie, aucune autre voie n'étant envisageable. Les Allemands comme les Japonais nous ont montré que des voies différentes existaient.

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La nécessité de ces recherches doit être expressément établie. L'amendement n° 714 vise à modifier la charge de la preuve.

La formulation actuelle de l'alinéa 7 étant trop imprécise, l'amendement n° 716 propose de la remplacer par « il est impossible de mener cette recherche ».

L'amendement n° 717 précise quant à lui que la recherche envisagée ne doit présenter aucun risque pour l'intégrité physique de l'embryon humain.

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Un certain nombre de prérequis de l'expérimentation, respectés en pratique, n'ont pas été inscrits dans la loi. Ne pourrait-on pas, cette fois, les préciser ? Tel est l'objet de l'amendement n° 274.

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Je vous propose de préciser, par l'amendement n° 718, que « l'autorisation de toute recherche effectuée dans les conditions de l'alinéa précédent n'est accordée qu'après vérification préalable par l'Agence de la biomédecine qu'une expérimentation sur l'animal a eu lieu précédemment et a été suffisamment concluante. »

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L'amendement n° 275 vise à énoncer qu'« aucune recherche sur l'embryon humain ne peut être autorisée pour l'exécution de travaux de recherche portant sur la modélisation des pathologies et sur le criblage des molécules. »

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La loi ne doit être ni trop bavarde, ni trop précise. L'emploi des mots a un sens. Il n'est pas certain que les ajouts proposés soient de nature à sécuriser les recherches, tant les mots utilisés dans ces amendements sont dénués de portée pratique. Par ailleurs, qu'il me soit permis de rappeler les critères permettant d'autoriser un protocole de recherche. Des conditions scientifiques et éthiques sont posées par le I de l'article L. 2151-5 du code de la santé publique. La pertinence scientifique doit tout d'abord être établie et validée par les structures de contrôle ad hoc. La recherche doit par ailleurs viser une finalité médicale, cette condition étant posée depuis la loi du 6 août 2013. L'absence de méthode alternative constitue une troisième condition, même si ce terme n'est plus expressément utilisé depuis la loi précitée : il s'agit de démontrer qu'« en l'état des connaissances scientifiques, cette recherche ne peut être menée sans recourir à ces embryons ou ces cellules souches embryonnaires ». Sur ce fondement, sont donc privilégiées les recherches sur les animaux ou leurs embryons avant les études sur l'être humain, même au stade potentiel attaché à l'embryon.

Les projets doivent en outre respecter les principes fondamentaux attachés à l'embryon. Non revêtus de la personnalité morale, les embryons n'en sont pas moins appréhendés comme des personnes humaines potentielles, à qui le respect est dû. C'est pourquoi le législateur a décidé que les recherches portant sur ceux-ci ne peuvent viser certaines finalités.

En résumé, j'émets un avis défavorable sur tous les amendements ajoutant de nouveaux critères ou restreignant le champ des recherches, portant sur les alinéas 6 à après l'alinéa 10.

La commission adopte les amendements rédactionnels n° 2169 et n° 2170 du rapporteur.

Puis, suivant l'avis défavorable du rapporteur, elle rejette successivement les amendements identiques n° 266 et n° 710, les amendements n° 79 puis n° 525, les amendements identiques n° 80 et n° 267, les amendements identiques n° 81, n° 268 et n° 712, les amendements identiques n° 82, n° 269 et n° 713, l'amendement n° 711, les amendements identiques n° 83, n° 270 et n° 714, les amendements identiques n° 84, n° 271 et n° 715, les amendements identiques n° 85, n° 272 et n° 716, les amendements identiques n° 86, n° 273 et n° 717, les amendements identiques n° 87 et n° 274, l'amendement n° 718, les amendements identiques n° 88, n° 275 et n° 719, ainsi que les amendements identiques n° 89, n° 276 et n° 720.

Suivant le même avis, elle rejette ensuite les amendements identiques n° 132 de M. Xavier Breton, n° 319 de M. Patrick Hetzel et n° 846 de M. Thibault Bazin, les amendements identiques n° 90 de M. Xavier Breton, n° 277 de M. Patrick Hetzel et n° 721 de M. Thibault Bazin, ainsi que les amendements identiques n° 93 de M. Xavier Breton, n° 280 de M. Patrick Hetzel et n° 724 de M. Thibault Bazin.

La commission passe à l'examen des amendements identiques n°°91 de M. Xavier Breton, n° 278 de M. Patrick Hetzel et n° 722 de M. Thibault Bazin.

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Je vous propose, par l'amendement n° 722, de compléter l'alinéa 11 de l'article 14 par les mots : « ces derniers sont informés de la nature des recherches. »

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission rejette les amendements n° 91, n° 278 et n° 722.

Elle est ensuite saisie des amendements identiques n° 92 de M. Xavier Breton, n° 279 de M. Patrick Hetzel et n° 723 de M. Thibault Bazin.

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L'amendement n° 279 vise à compléter l'alinéa 11 par la phrase suivante : « Aucune autorisation ne peut être donnée si l'un des deux membres du couple ne donne pas son consentement exprès. »

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Ces amendements sont satisfaits par l'article L. 2141-4 du code de la santé publique, dans sa version issue de l'article 16, donc avis défavorable.

Les amendements n° 92, n° 279 et n° 723 sont retirés.

La commission adopte ensuite successivement les amendements rédactionnels n° 2174, n° 2173 et n° 2172 du rapporteur.

Elle examine les amendements identiques n° 94 de M. Xavier Breton, n° 281 de M. Patrick Hetzel et n° 725 de M. Thibault Bazin.

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Si une autorisation de recherche viole la loi, le règlement ou les conditions de l'autorisation, tous édictés pour préserver, en particulier, l'éthique et la dignité humaine, il n'y a aucune raison de se contenter de la suspendre : il faut, à mes yeux, l'annuler immédiatement. Tel est l'objet de l'amendement n° 725.

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Vous proposez de supprimer la possibilité de suspendre l'autorisation de recherche et souhaitez que le retrait soit prononcé d'emblée. Cette suspension peut être mise en place pour diligenter des inspections, vérifier le respect du droit et assurer l'application du principe du contradictoire. Le retrait de l'autorisation pourrait intervenir, mais n'allons pas trop vite en besogne ; il faut pouvoir permettre une inspection. Avis défavorable.

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Je relis l'alinéa 15 : « En cas de violation des prescriptions législatives et réglementaires ou de celles fixées par l'autorisation, l'agence suspend l'autorisation de la recherche ou la retire. […] » Peut-être suis-je excessivement rigoureux, mais il me semble que le texte vise la violation et non la suspicion de violation, laquelle pourrait justifier les contrôles que vous évoquez.

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Vous ne serez jamais aussi rigoureux que l'Agence de la biomédecine. La violation en question peut consister en l'absence d'un formulaire ou un problème de cette nature, conduisant à une suspension provisoire.

La commission rejette les amendements n° 94, n° 281 et n° 725.

Elle adopte ensuite l'amendement rédactionnel n° 2171 du rapporteur.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, elle rejette l'amendement n° 282 de M. Patrick Hetzel.

Elle passe ensuite à l'examen des amendements identiques n° 95 de M. Xavier Breton et n° 726 de M. Thibault Bazin.

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Le projet de loi opère un véritable choix en autorisant la culture de l'embryon humain jusqu'au quatorzième – au lieu du septième – jour dans le cadre d'un protocole de recherche. Le septième jour, le bouton embryonnaire se compose de deux catégories de cellules, constituant deux feuillets : l'ectoblaste et l'endoblaste. Au quatorzième jour, il n'en va plus du tout de même, puisque la taille de l'embryon a été multipliée par quatre par rapport au septième jour. Le quatorzième jour correspond à la formation de l'ébauche du tube neural, le système nerveux primitif. Si l'on accepte, aujourd'hui, la recherche sur l'embryon humain in vitro jusqu'à quatorze jours, et que, demain, on réussit à maintenir en vie l'embryon humain in vitro au-delà de cette durée, à quel titre refusera-t-on de mener des recherches sur un être humain de plus de quatorze jours ? La science permet actuellement d'aller jusqu'à quatorze jours, ce qui explique que cette limite soit ainsi fixée. À quel moment mène-t-on une réflexion éthique sur le stade de développement de l'embryon ?

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On fixe une limite qui n'existait pas dans les textes préexistants. À quatorze jours, la masse cellulaire interne de l'embryon conduit à l'apparition de trois feuillets : l'ectoderme, l'endoderme et le mésoderme. La limite de quatorze jours est retenue dans la quasi-totalité des autres pays. Avis défavorable.

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Contrairement à ce qu'on entend régulièrement, la précédente loi ne fixait aucune limite. Il nous a paru important d'en déterminer une. D'autres amendements ont pour objet d'étendre la durée de la recherche, mais il nous a semblé qu'en s'arrêtant au moment de l'apparition des trois feuillets, on adoptait une position équilibrée.

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Puisqu'il n'existe pas, à l'heure actuelle, de limite légale, quelle était, en pratique, la limite que les chercheurs se fixaient ?

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Longtemps, cette règle a résulté de la capacité à maintenir l'embryon en observation. Ensuite, comme l'a indiqué votre rapporteur, la règle généralement admise était quatorze jours.

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Il me semble que le projet de loi est plus protecteur que les amendements, car il fixe une limite qui n'existait pas. Si nous adoptions votre amendement, nous protégerions moins bien l'embryon. Nous posons des bornes éthiques, ce qui me semble essentiel.

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Mieux vaut en effet fixer une limite. Je suis d'accord avec vous sur le fond. Je retire donc mon amendement, tout en continuant à m'interroger sur l'évolution à venir.

Les amendements n° 95 et n° 726 sont retirés.

La commission adopte ensuite l'amendement rédactionnel n° 2175 du rapporteur.

Elle est saisie de l'amendement n° 1846 de Mme Sylvia Pinel.

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Le projet de loi prévoit qu'il soit mis fin au développement in vitro des embryons sur lesquels une recherche a été conduite, au plus tard au quatorzième jour de leur constitution. L'amendement n° 1846 vise à allonger ce délai à vingt et un jours. En effet, entre le premier et le quatorzième jour de gestation, le développement embryonnaire consiste avant tout en la formation des futures annexes embryonnaires. L'embryon proprement dit, c'est-à-dire la structure qui donnera le futur foetus, est seulement composé d'un ensemble de cellules pluripotentes indifférenciées. C'est seulement à partir du quinzième ou du seizième jour de développement que ces cellules immatures commencent à se différencier dans les trois lignages embryonnaires à l'origine des différents organes. C'est à ce stade que les premières étapes du développement de l'embryon commencent véritablement. Comprendre les mécanismes de ces premières étapes nous paraît crucial. Nous estimons important de ne mettre un terme au développement in vitro des embryons sur lesquels une recherche a été conduite qu'au vingt et unième jour de leur constitution. Les positions des professionnels nous ont d'ailleurs rassurés. Sans aucunement porter atteinte au principe de la dignité humaine, nous entendons accompagner la recherche et les progrès scientifiques. De nombreux pays réfléchissent d'ailleurs à l'opportunité de passer de quatorze jours à trois semaines.

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Finalement, cela prouve qu'avec quatorze jours, nous nous situons à un âge d'équilibre. C'est une limite qui paraîtra suffisante, me semble-t-il, à la communauté scientifique. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement n° 1846.

Elle adopte ensuite l'amendement rédactionnel n° 2176 du rapporteur.

Elle en vient aux amendements identiques n° 320 de M. Patrick Hetzel, n° 789 de M. Alain Ramadier et n° 847 de M. Thibault Bazin.

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Comme cela a été dit lors des débats et comme nous avons pu l'entendre au cours des auditions que nous avons menées, il faut se garder de franchir un certain nombre de lignes rouges, ce qui suppose d'énoncer explicitement des principes dans la loi. L'amendement n° 320 vise ainsi à préciser que « L'expérimentation de l'utérus artificiel est interdite. » On voit bien, en effet, dans quelles directions on risque de s'orienter. Jusqu'à présent, les lois de bioéthique, en France, n'ont pas franchi certaines limites. Plus que jamais, il faut être cohérent et ne pas hésiter à rappeler les spécificités de cette matière. J'ai bien conscience que, dans d'autres pays, on est en train de mener des recherches dans ce sens mais ce qui nous honore, c'est que la communauté scientifique ne franchisse pas cette ligne rouge. C'est le rôle du législateur de s'en assurer.

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L'amendement n° 789 vise à interdire l'expérimentation – j'insiste sur ce mot – de l'utérus artificiel. Bien que celle-ci ne transparaisse pas dans le projet de loi, elle est aujourd'hui techniquement possible et même envisagée en Angleterre et aux États-Unis. Lors d'une audition à l'Assemblée nationale, dans le cadre de la mission d'information sur la bioéthique, le président du Comité consultatif national d'éthique (CCNE), M. Jean-François Delfraissy, confirmait la mise au point à venir de cette technique procréative. Profitons de l'occasion qui nous est donnée pour dire que la France, sans aucune ambiguïté, refuse de s'engager dans cette voie, qui la conduirait à faire fi de toute considération éthique.

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J'avoue ne pas savoir exactement ce qu'est un utérus artificiel. Je ferai deux observations. Premièrement, les embryons dont nous parlons ne sont pas destinés à être réimplantés. Deuxièmement, gardons-nous de nous interdire, par cette disposition, de faire progresser nos techniques, en l'occurrence pour les grands prématurés. Avis défavorable.

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Il n'existe pas de publications qui définissent réellement ce qu'est un utérus artificiel. On peut identifier plusieurs modèles de recherche s'orientant dans cette direction, mais ce n'est pas le cas du nôtre. Il paraît difficile de voter un amendement sur quelque chose qui n'est pas encore très bien défini.

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Il faudrait préciser qu'il s'agit d'un utérus artificiel humain, puisque des recherches instructives ont atteint un stade avancé sur le développement embryono-foetal de l'agneau. Il serait néfaste de se priver de ces connaissances. Par ailleurs, comme l'a rappelé le rapporteur, l'utérus artificiel, d'une certaine façon, n'est rien d'autre qu'une couveuse. Si, actuellement, la limite de viabilité des grands prématurés est de vingt-trois semaines, avec des séquelles importantes, on peut imaginer que les progrès qui seront effectués pour assurer le maintien en couveuse permettront d'avancer la viabilité à vingt-deux semaines, voire avant, avec très peu ou pas de séquelles. Il serait très malvenu de se priver de ces bénéfices pour les grands prématurés. Il convient donc, soit d'être beaucoup plus spécifique et prudent dans l'énoncé, soit d'attendre que la science sache définir précisément ce que vous voulez restreindre. Il ne faut pas, en tout état de cause, empêcher – ce qui n'est assurément pas votre intention – de mieux soigner les grands prématurés.

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Je remercie le professeur Touraine pour ces précisions. Il a évidemment raison. Il faudrait sous-amender, en précisant qu'il est bien question d'un utérus humain, pour éviter toute ambiguïté par rapport à d'autres travaux. Par ailleurs, ce qu'il s'agit d'empêcher, ce sont les expérimentations entre zéro et vingt-trois semaines. Il faudra peut-être prendre un décret, en fonction des évolutions de la science, pour préciser ce point. Il n'est évidemment pas question d'interrompre les travaux sur les grands prématurés : ce n'est nullement l'objet de l'amendement, comme vous vous en doutez. Tout ce qui peut être fait pour le développement de la vie doit être favorisé.

La commission rejette les amendements n° 320, n° 789 et n° 847.

Elle passe à l'examen de l'amendement n° 2223 du rapporteur.

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Cet amendement vise à prévoir des recherches permettant d'identifier les causes de l'infertilité. Cela fait écho à notre débat d'hier. De nombreuses publications scientifiques, un grand nombre d'experts alertent les pouvoirs publics sur l'augmentation notable des cas d'infertilité, en particulier dans les pays développés. La France dispose d'équipes de recherche de très haut niveau sur les questions liées à la fertilité, dans toutes les disciplines concernées. Une coordination de ces équipes, à l'image de celle qu'a réalisée l'Institut national du cancer (INCa) concernant les équipes travaillant sur le cancer, permettrait de stimuler la recherche sur les causes de l'infertilité et sur les actions à entreprendre pour y remédier.

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Je donne un avis de sagesse puisque, effectivement, la recherche peut porter sur les causes de l'infertilité, comme sur de nombreux autres domaines. C'est une précision qui paraît importante.

La commission adopte l'amendement n° 2223.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, elle rejette les amendements identiques n° 124 de M. Xavier Breton, n° 311 de M. Patrick Hetzel et n° 837 de M. Thibault Bazin, ainsi que les amendements identiques n° 134 de M. Xavier Breton, n° 321 de M. Patrick Hetzel et n° 848 de M. Thibault Bazin.

Elle est ensuite saisie des amendements identiques n° 322 de M. Patrick Hetzel, n° 790 de M. Alain Ramadier et n° 849 de M. Thibault Bazin

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Il s'agit, par l'amendement n° 322, de modifier la rédaction de l'alinéa 17 pour y apporter la précision suivante : « L'importation de cellules souches embryonnaires ne peut être autorisée que lorsque ces cellules souches ont été obtenues dans un pays signataire de la convention d'Oviedo. » Cela nous permettrait de nous conformer à nos exigences éthiques, dans la mesure où cette convention internationale garantit le respect de certains principes. Il faut évidemment éviter de travailler avec des pays qui, sur ces questions, proposent un moins-disant éthique.

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L'amendement n° 790 est défendu au moyen des mêmes arguments.

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Je ne suis pas tout à fait d'accord. On peut fort bien être signataire de la convention d'Oviedo et ne pas produire de cellules souches dans le respect des principes éthiques du droit français. À l'inverse, on peut être issu d'un pays qui ne l'a pas signée tout en respectant les règles relatives aux cellules souches importées en France. La rédaction du projet de loi me paraît la plus appropriée, car elle fixe nos critères, qui sont, à mon sens, clairement identifiés.

La commission rejette les amendements n° 322, n° 790 et n° 849.

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Chers collègues, je vous propose une présentation commune de tous les amendements portant sur les recherches sur les cellules souches, qui vont de l'amendement n° 136 à l'amendement n° 729.

La commission examine, dans le cadre d'une présentation commune, les amendements identiques n° 136 de M. Xavier Breton, n° 323 de M. Patrick Hetzel et n° 850 de M. Thibault Bazin, les amendements identiques n° 137 de M. Xavier Breton, n° 324 de M. Patrick Hetzel et n° 851 de M. Thibault Bazin, l'amendement n° 2177 du rapporteur, les amendements identiques n° 138 de M. Xavier Breton, n° 325 de M. Patrick Hetzel et n° 852 de M. Thibault Bazin, les amendements identiques n° 140 de M. Xavier Breton, n° 327 de M. Patrick Hetzel et n° 854 de M. Thibault Bazin, les amendements identiques n° 283 de M. Patrick Hetzel, n° 727 de M. Thibault Bazin et n° 1390 de Mme Agnès Thill, les amendements identiques n° 139 de M. Xavier Breton, n° 326 de M. Patrick Hetzel et n° 853 de M. Thibault Bazin, l'amendement n° 954 de M. Thibault Bazin, les amendements identiques n° 97 de M. Xavier Breton, n° 284 de M. Patrick Hetzel et n° 728 de M. Thibault Bazin, l'amendement n° 955 de M. Thibault Bazin, les amendements n° 2178 et n° 2179 du rapporteur, les amendements identiques n° 141 de M. Xavier Breton, n° 328 de M. Patrick Hetzel et n° 855 de M. Thibault Bazin, les amendements identiques n° 142 de M. Xavier Breton, n° 329 de M. Patrick Hetzel et n° 856 de M. Thibault Bazin, les amendements identiques n° 2224 du rapporteur et n° 2027 de M. Marc Delatte, l'amendement n° 2181 du rapporteur, les amendements identiques n° 330 de M. Patrick Hetzel et n° 857 de M. Thibault Bazin, l'amendement n° 2180 du rapporteur, les amendements identiques n° 286 de M. Patrick Hetzel et n° 730 de M. Thibault Bazin, et les amendements identiques n° 285 de M. Patrick Hetzel et n° 729 de M. Thibault Bazin.

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L'amendement n° 136 vise à supprimer les alinéas 18 à 33, lesquels prévoient de créer un régime de recherche sur les cellules souches embryonnaires distinct du régime de recherche sur l'embryon humain. La loi fera ainsi échapper ces cellules au régime légal de la recherche sur l'embryon et soumettra ce type de recherches à une simple déclaration, ce qui empêchera de les contrôler et les livrera à l'industrialisation.

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Je me fonde sur les mêmes arguments pour défendre l'amendement n° 323.

L'objet de l'amendement n° 324 est de maintenir le principe de l'autorisation des protocoles de recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines. Nous ne souhaitons pas, en effet, qu'elles soient soumises à une simple déclaration.

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Par l'amendement n° 852, nous souhaitons limiter la recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines, d'une part, aux lignées de cellules souches établies et existantes sur le territoire français avant la promulgation de la présente loi, d'autre part, aux lignées de cellules souches établies et existantes à l'étranger, dans le respect des principes éthiques et ayant fait l'objet d'une autorisation d'importation, avec le visa de l'Agence de la biomédecine.

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Par l'amendement n° 326, je propose d'insérer, après l'alinéa 22, les mots : « La liste des lignées de cellules souches embryonnaires dérivées en France ou susceptibles d'être importées de l'étranger, existantes au jour de la promulgation de la loi, et sur lesquelles des recherches peuvent être menées en France, dans le respect des principes éthiques des articles 16 à 16-8 du code civil, est établie par décret du ministère de la recherche. » Il s'agit, madame la ministre, que vous puissiez exercer un contrôle en la matière.

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Par l'amendement n° 853, nous entendons être force de proposition et vous permettre de résoudre le conflit éthique lié à la distinction entre les lignées de cellules souches embryonnaires humaines.

L'amendement n° 728 a pour objet de préciser que l'Agence de la biomédecine s'oppose aux recherches sur les cellules souches embryonnaires humaines « si, en l'état des connaissances scientifiques, cette recherche ne peut être menée sans recourir à ces embryons humains ». L'amendement n° 955 vise à prévoir cette opposition « si, en l'état des connaissances scientifiques, cette recherche ne peut être menée sans recourir à des cellules souches embryonnaires humaines. »

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Puisque, me semble-t-il, nous partageons les mêmes principes éthiques, je vous propose, par l'amendement n° 855, que l'on vérifie que les protocoles de recherche n'aient pas pour objet la « modélisation de pathologies et le criblage de molécules ».

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L'amendement n° 329 vise à supprimer l'alinéa 24, lequel revient à autoriser la création de gamètes artificiels à partir de cellules souches embryonnaires humaines. La création de gamètes artificiels humains n'a jamais été autorisée en France jusqu'à présent. Ses conséquences seraient vertigineuses. Les chercheurs nous disent que le risque majeur – c'est le coeur du débat sur l'article 14 – est la création d'embryons pour la recherche, comme l'illustrent les protocoles conduits au Japon. Évidemment, nos principes éthiques ne sont pas les mêmes mais, compte tenu de la rédaction de l'article, on pourrait s'en inquiéter.

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Nous sommes tout à fait favorables aux dispositions du projet de loi interdisant la création de gamètes à partir de cellules iPS. Nous vous proposons, par l'amendement n° 856, d'agir de même avec les cellules souches embryonnaires humaines.

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Toute utilisation de cellules souches embryonnaires humaines en recherche est soumise à déclaration à l'Agence de la biomédecine, selon le nouveau régime instauré à l'article 14. S'agissant des recherches nécessitant une attention particulière – différenciation des cellules souches embryonnaires en gamètes, agrégation de ces cellules avec des cellules précurseurs de tissus extra-embryonnaires –, l'avis du conseil d'orientation de l'Agence de la biomédecine est requis avant toute décision d'opposition de celle-ci.

Des recherches récentes menées chez l'embryon animal consistant à explorer la possibilité d'obtenir des organes humains développés à partir de cellules souches pluripotentes humaines chez l'animal ouvrent une voie de recherche d'intérêt, quand on connaît les difficultés à trouver des organes à greffer dans notre pays. Ces recherches soulèvent néanmoins des interrogations éthiques, tenant notamment au franchissement de la barrière d'espèces.

En conséquence, il est proposé, par l'amendement n° 2224, que ces recherches soient examinées dans les mêmes conditions que les autres voies de recherche nécessitant une attention particulière si elles ont pour but le transfert chez la femelle – étant entendu que, si l'expérimentation ne conduit pas au développement in utero d'un embryon, il n'y a aucun risque à faire naître un animal porteur de cellules, de tissus ou d'organes humains.

Des dispositions équivalentes sont proposées par l'amendement n° 2226, à l'article 15, s'agissant des cellules souches pluripotentes induites, dites « IPS ».

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Les dispositions de la loi de 2011 concernant les approches expérimentales ne sont plus interprétables, dans le contexte scientifique actuel, pour les recherches sur l'embryon. Il est donc important de les repréciser, en lien avec l'avis n° 129 du Comité consultatif national d'éthique et le rapport du Conseil d'État. Tel est l'objet de l'amendement n° 2027.

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Le Gouvernement donne un avis favorable aux amendements n° 2224 et n° 2027, qui apportent une précision utile et correspondent à la philosophie du texte.

Pour en revenir aux débats précédents, j'insiste sur le fait qu'on ne peut pas – il serait malhonnête de le faire croire à nos concitoyens – considérer, aujourd'hui, que les cellules iPS sont identiques aux cellules souches embryonnaires. Refuser la modélisation et le criblage de molécules, s'empêcher de comprendre des pathologies serait extrêmement dangereux pour les Français. Quand on crible des molécules, il faut être sûr que les modifications génétiques induites dans les iPS n'entraînent pas des réponses à ces molécules qui ne sont pas les vraies réponses. On parle d'OGM – organismes génétiquement modifiés : les IPS sont, de fait, des cellules génétiquement modifiées. Personne ne peut dire, aujourd'hui, si le fait de cribler des molécules sur des cellules comportant des gènes modifiés offrira les mêmes résultats que ceux obtenus sur des cellules non génétiquement modifiées. Il serait dangereux d'interdire toute modélisation et tout criblage sur des cellules souches embryonnaires, au prétexte que les iPS les remplaceraient.

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Insérer des cellules embryonnaires humaines dans un embryon animal, qui sera transféré chez une femelle, pose de vraies questions.

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Actuellement, aucune législation n'existe au sujet de ce type d'expérimentation. L'objectif est de faire des recherches pour voir si l'implantation de cellules embryonnaires humaines dans des animaux – en l'occurrence souvent des cochons, qui sont le plus proche de nous sur le plan immunologique – pourrait nous permettre d'obtenir des organes qui nous font aujourd'hui cruellement défaut pour les greffes.

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C'est ce que j'avais compris : vous ajoutez cette précision à l'alinéa 24. Nous parlons bien d'insérer des cellules embryonnaires humaines dans l'embryon animal, et traitons dans l'article 14 de ce qui est soumis à autorisation ou à déclaration. J'entends votre argument selon lequel il faut traiter ce sujet dans la loi. Mais à quel niveau cela doit-il se faire ? Pourriez-vous nous préciser votre intention ?

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Le projet est d'abord soumis à une autorisation du ministère de la recherche, puis à une déclaration, de sorte qu'il existera un double contrôle.

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

La loi en vigueur traite seulement de la question des chimères formées par l'implantation de cellules animales dans des embryons humains. Nous apportons cette précision pour réguler l'usage des chimères composées de cellules humaines dans des embryons animaux.

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À partir du moment où nous autoriserons le transfert de cellules embryonnaires humaines dans un embryon animal, jusqu'où laissera-t-on se développer l'embryon à des fins de recherche thérapeutique ? Autrement dit, pourrons-nous, sous couvert de recherche, faire naître des animaux qui comporteront des cellules embryonnaires humaines ?

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Madame la ministre, pourriez-vous nous apporter quelques précisions sur ce que vous nous avez dit tout à l'heure ? Dans les rapports de l'Inserm ou de l'Académie des sciences, les cellules iPS semblent équivalentes aux cellules souches embryonnaires humaines en matière de modélisation des pathologies. Votre proposition respecte-t-elle réellement les principes éthiques ? Vous ne pouvez pas les balayer d'un simple revers de la main.

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Sommes-nous bien en train de parler des embryons hybrides destinés aux greffes ?

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Monsieur Hetzel, je ne nie pas que les cellules iPS et les cellules souches embryonnaires se ressemblent : elles sont équivalentes, ce qui ne signifie pas pour autant qu'elles soient identiques. Il ne faut pas laisser croire que les cellules iPS sont la même chose que les cellules souches embryonnaires.

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De nouvelles données relatives à l'épigénétique devraient nous permettre d'aller plus loin dans la comparaison entre ces deux types de cellules. En dédifférenciant une cellule adulte, vous changez complètement son épigénèse. Or, aujourd'hui, nous ne sommes pas capables de suivre l'épigénèse de façon globale. Nous avons besoin d'études pour comprendre si la cellule iPS, que nous souhaitons tous utiliser à terme, possède la même caractéristique épigénétique qu'une cellule souche embryonnaire. Nous avons besoin de poursuivre le comparatif.

Par ailleurs, n'allez pas dire que la France est particulièrement en retard sur les Japonais ! Je connais beaucoup d'équipes, même à Montpellier, qui travaillent sur les cellules iPS au quotidien.

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Comment cela, « même à Montpellier » ? Surtout à Montpellier ! (Sourires.)

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Si je comprends bien votre amendement, monsieur le rapporteur, vous ajoutez un cran supplémentaire, afin de mettre l'Agence de la biomédecine dans la boucle. Si c'est le cas, j'y suis extrêmement favorable. Le débat entre cellules iPS et cellules souches embryonnaires ne relève pas exactement du même sujet, et biaise son approche, à mon sens. Les rapports reconnaissent que ce n'est pas exactement la même chose et qu'elles n'ont pas le même usage. Mais nous devons aussi regarder les besoins, notamment pour ce qui est des modélisations ou de l'industrie. C'est, à mon sens, biaiser l'examen de l'article 14 que de le résumer aux cellules iPS.

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Vous avez entièrement raison, Monsieur Bazin, mais comme M. Hetzel m'avait interpellée sur ce sujet, je lui ai répondu, sans faire attention à la cohérence du débat. Comme vous l'avez dit, il s'agit de définir un cran supplémentaire en mettant l'ABM dans la boucle.

Madame Thill, nous sommes en réalité encore très loin de ces greffes potentielles. Personne ne peut préjuger de ce qui sera possible ou non de faire à l'avenir.

Je me répète : l'objectif de la recherche n'est pas obligatoirement de servir la santé humaine. De nombreuses recherches permettent de produire de la connaissance, qui sera sans nul doute un jour utile, sans que l'on ne sache encore à quoi – cela n'a d'ailleurs pas beaucoup de sens d'essayer de le prévoir. J'ai souvent rappelé à mes étudiants que ce sont des chercheurs qui étudiaient les geysers qui ont permis de découvrir l'enzyme utilisée aujourd'hui dans tous les tests génétiques.

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Une équipe britannique a récemment montré la capacité de pluripotence des cellules iPS, en en injectant à des embryons murins au stade de la gastrula. Voilà un exemple de la recherche actuelle.

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Les propos de la ministre légitiment le fait que l'on ne borne pas la recherche dans un domaine pourtant bien particulier, puisqu'il s'agit tout de même de mélanger entre elles différentes espèces du règne animal. Cela a des incidences éthiques importantes. Au nom de la capacité de la recherche à trouver demain peut-être des solutions pour la médecine humaine, on fait sauter des bornes. Quelles sont les limites éthiques de ces mélanges ? Je n'ai pas de jugement de valeur sur le transfert d'une cellule, fût-elle embryonnaire humaine, vers un animal, mais jusqu'à un certain point. Que se passerait-il si l'on faisait naître un animal doté de cellules humaines ? Même si nous ne connaissons pas aujourd'hui les avancées possibles de la science sur le sujet, il me semble que nous devrions borner ces expériences, pour éviter de créer des chimères vivantes.

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Même si nous savons qu'il y a une pénurie d'organes, nous devrons nous interroger sur l'aspect psychologique de l'implantation d'un organe provenant d'un cochon. Science sans conscience n'est que ruine de l'âme… Quelle conscience définissons-nous, en tant que législateur, pour la communauté scientifique qui espère sincèrement trouver pour soigner ensuite ? Parfois se cachent aussi des intérêts financiers que nous ne pouvons pas négliger. Nous devons poser des barrières éthiques pour nous prémunir contre les dérives que nous avons pu constater dans d'autres pays. Même si nous pouvons nous accorder sur les finalités, les moyens d'y parvenir peuvent se révéler non éthiques.

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Nous disons exactement tous la même chose. Cela fait longtemps que, dans les boîtes de culture, nous savons mélanger des cellules humaines avec des cellules animales. Alors que rien n'existait sur ce sujet éthique, je remercie le rapporteur pour son amendement, parce qu'il me semble important d'être capable de borner la question, en demandant à l'ABM et à son comité d'orientation de jeter un regard sur ce qui doit se faire et ce qui ne le doit pas.

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On peut effectivement saluer la proposition du rapporteur, qui pose le tout premier cadre sur cette question. Cela étant, ne cachons pas le sujet de fond, qui est un point de divergence majeur avec vous. Vous faites évoluer le texte, en passant d'une demande d'autorisation à une simple déclaration.

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Nous poursuivons l'examen des amendements dans cette longue présentation commune.

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L'amendement n° 330 vise à proposer une autre rédaction à la fin de l'alinéa 24, afin de maintenir un certain nombre de lignes rouges.

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Quant à l'amendement n° 285, il vise à insérer, après l'alinéa 24, l'alinéa suivant : « Les gamètes ainsi créés ne peuvent en aucune façon servir à féconder un autre gamète, issu du même procédé ou obtenu par don, pour constituer un embryon humain. »

La commission adopte successivement les cinq amendements rédactionnels n° 2177, n° 2178, n° 2179, n° 2181 et n° 2180 du rapporteur, ainsi que les amendements identiques n° 2224 et n° 2027.

Suivant les différents avis défavorables du rapporteur, elle rejette successivement les amendements identiques n° 136, n° 323 et n° 850, les amendements identiques n° 137, n° 324 et n° 851, les amendements identiques n° 138, n° 325 et n° 852, les amendements identiques n° 140, n° 327 et n° 854, les amendements identiques n° 283, n° 727 et n° 1390, les amendements identiques n° 139, n° 326 et n° 853, l'amendement n° 954, les amendements identiques n° 97, n° 284 et n° 728, l'amendement n° 955, les amendements identiques n° 141, n° 328 et n° 855, les amendements identiques n° 142, n° 329 et n° 856, les amendements identiques n° 330 et n° 857, les amendements identiques n° 286 et n° 730, et les amendements identiques n° 285 et n° 729.

Puis elle passe à l'examen, en discussion commune, des amendements identiques n° 2252 du rapporteur et n° 2028 de Mme Caroline Janvier, ainsi que de l'amendement n° 1744 de M. Jean-Louis Touraine.

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L'amendement n° 2252 vise à instaurer un régime déclaratoire relatif à la conservation des cellules souches embryonnaires, afin de rester cohérents avec le nouveau régime de recherche que nous avons instauré dans le projet de loi. La recherche sur ces cellules n'appelle pas les mêmes interrogations éthiques que celle qui porte sur l'embryon. C'est pourquoi nous regroupons sous le régime déclaratif tout ce qui concerne la cellule souche embryonnaire.

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Le groupe La République en Marche a déposé un amendement n° 2028 identique à celui du rapporteur.

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L'amendement n° 1744 vise à proposer que les règles applicables à la conservation des lignées de cellules souches embryonnaires, qui ont été entièrement produites, relèvent d'un régime déclaratif auprès de l'ABM et non d'un régime d'autorisation, lequel perdure bien sûr pour la recherche sur les embryons.

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Puisqu'il s'agit d'amendements quasiment identiques, je suggère à M. Touraine de retirer le sien.

L'amendement n° 1744 est retiré.

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Je suis défavorable à ces amendements, parce que je pense que nous devons conserver, pour la conservation, un régime d'autorisation, seul à même de garantir un haut niveau d'exigence éthique.

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Il est extrêmement important que la majorité, qui manifestement souhaite aller dans ce sens, assume que, sur ce point précis, c'est du moins-disant éthique.

La commission adopte les amendements identiques n° 2252 et n° 2028.

Puis elle examine l'amendement n° 1845 de Mme Sylvia Pinel.

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L'amendement vise à corriger une incohérence. Le projet de loi introduit une nouveauté, en distinguant le régime juridique s'appliquant à l'embryon de celui s'appliquant aux cellules souches. La recherche sur ces dernières ne sera plus soumise qu'à une déclaration auprès de l'Agence de biomédecine. Pourtant, alors que les programmes de recherche sur les cellules souches embryonnaires sont déclaratifs, leur conservation dépend d'une autorisation. Maintenir ce double régime pour les programmes de recherche est incohérent et peut porter atteinte à la viabilité de ces programmes plusieurs années après leur commencement. En effet, l'obtention d'une autorisation induit une possibilité de contestation en justice, qui pourrait mettre un terme à un programme en cours. L'amendement vise donc à ne pas maintenir les protocoles de recherche sur les cellules souches embryonnaires dans un système d'autorisation pour la conservation. Un régime déclaratif suffit à nos yeux.

L'amendement n° 1845 est retiré.

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels nos 2182, 2183, 2184, 2185 et 2186 du rapporteur.

Elle examine ensuite l'amendement n° 2033 de Mme Sereine Mauborgne.

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Il me semble que les médecins choisissant de transgresser les règles établies dans cette loi méritent de subir des sanctions plus lourdes que celles qui sont prévues. Madame Buzyn, je me permets de vous reposer la question : est-ce la voie réglementaire qui prévoit les sanctions ordinales en cas de manquement à une responsabilité éthique ?

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Dans la mesure où il faut respecter la proportionnalité des peines, avis défavorable.

La commission rejette l'amendement n° 2033.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels nos 2188 et 2189 du rapporteur.

Elle examine l'amendement n° 787 de M. Alain Ramadier.

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Seules les recherches biomédicales en assistance médicale à la procréation ayant un caractère interventionnel sont autorisées par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). Or, ces autorisations n'étant pas publiées au Journal officiel, elles ne peuvent être contestées. Pis encore, on ne connaît ni la nature des travaux qui ont pu être menés depuis trois ans, ni leur finalité, ni leurs résultats. L'amendement vise à lever cette opacité, surtout à l'heure où le but serait d'adapter nos lois de bioéthique aux « avancées de la science ». Mais, pour s'y adapter, encore faut-il les connaître.

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Je vous propose de vous en référer aux multiples rapports publiés très régulièrement par l'Agence de la biomédecine. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement n° 787.

Elle adopte ensuite l'article 14 modifié.

La réunion est suspendue de seize heures quarante-cinq à dix-sept heures cinq.

Après l'article 14

La commission examine les amendements identiques n° 175 de M. Xavier Breton, n° 363 de M. Patrick Hetzel et n° 927 de M. Thibault Bazin.

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C'est une nécessité de mettre l'accent sur l'objectif avant tout curatif des diagnostics anténataux, en suggérant à cette fin aux pouvoirs publics d'inciter les grands instituts de recherche et les structures hospitalières à faire de la médecine foetale et embryonnaire l'une des priorités de leurs activités.

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Cette demande de rapport sur l'état de la recherche portant sur les « maladies particulièrement graves » me laisse un peu circonspect. Où est le curseur de la gravité ? Par ailleurs, on ne peut pas contraindre l'ordre du jour des assemblées parlementaires. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements n° 175, n° 363 et n° 927.

Puis elle examine les amendements identiques n° 176 de M. Xavier Breton, n° 364 de M. Patrick Hetzel et n° 928 de M. Thibault Bazin.

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Tandis que tous les moyens sont orientés vers le dépistage de la trisomie avant la naissance, aucun effort n'est fait dans la recherche de traitements pour accompagner, soigner, voire guérir un jour les personnes handicapées.

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C'est une question qui mérite en effet un éclairage plus important.

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Je profite de ces amendements pour dire à Mme la ministre Agnès Buzyn que son intervention sur la trisomie 21, lundi soir, m'a beaucoup touché et qu'elle fera date. Il est important d'être cohérents, dans une société qui se veut la plus inclusive possible, et de veiller, quand on fait une loi, à être incitatifs, de sorte que notre recherche puisse accompagner, plutôt qu'éviter, les personnes atteintes d'un handicap.

J'ai eu la chance d'être maire d'une commune qui comptait cinq cents personnes handicapées pour trois mille habitants, grâce à l'enracinement d'établissements médico-sociaux depuis plus de huit cent soixante ans. J'ai vu avec quel bonheur elles s'épanouissaient – notamment les personnes atteintes d'une trisomie 21 – et qu'elles apportaient un surplus d'humanité, disaient bonjour dans la rue, ce que nous n'entendons pas beaucoup à Paris. À Rosières-aux-Salines, beaucoup disent bonjour, et cela rend heureux.

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Il est faux de dire qu'il n'existe pas de recherche sur la trisomie 21. Elle est forcément très complexe, puisqu'il s'agit d'éliminer l'expression d'un chromosome. Il faudrait intégrer dans toutes les cellules de l'organisme un élément dont on sait qu'il existe sur le chromosome X, qui éteindrait le chromosome 21. C'est, malheureusement, encore de l'ordre de l'utopie.

S'agissant de vos commentaires sur la trisomie 21, je pense savoir de quoi je parle et il n'y a pas plus pléiotropique, en matière de phénotype, que celle-ci. Certains enfants atteints de trisomie 21 peuvent mener une vie presque normale, même si l'on sait statistiquement qu'ils déclencheront un syndrome d'Alzheimer précoce, étant donné que l'un des principaux gènes responsables de cette maladie est sur le chromosome 21, dont ils ont trois copies, tandis que d'autres enfants sont pratiquement des légumes – je n'ai pas peur du terme, c'est une situation personnelle. On ne peut pas résumer le syndrome de Down : c'est une multidiversité. Certains enfants pourront rejoindre des établissements et services d'aide par le travail (ESAT) et mener une activité quasi professionnelle, alors que d'autres iront dans des maisons d'accueil spécialisées (MAS) et seront seulement là, et pas grand-chose d'autre.

La commission rejette les amendements n° 176, n° 364 et n° 928.

Article 15 : Régulation, en recherche fondamentale, de certaines utilisations des cellules souches pluripotentes induites

La commission examine les amendements identiques n° 148 de M. Xavier Breton, n° 335 de M. Patrick Hetzel et n° 862 de M. Thibault Bazin.

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Il est regrettable que l'utilisation des cellules souches pluripotentes induites soit envisagée uniquement dans le projet de loi pour une manipulation qui n'est pas éthique, à savoir la création de gamètes artificiels. C'est pourquoi je propose de supprimer les alinéas 1 à 9.

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J'ai un doute concernant l'article 15. Pourriez-vous me confirmer, mesdames les ministres, monsieur le rapporteur, que la création de gamètes artificiels à partir de cellules iPS est bien interdite, pour ne pas ouvrir la porte à de nouvelles techniques de reproduction ?

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S'agissant des cellules iPS, nous avons fait le tour de la question. C'est un outil de recherche, dont nous espérons qu'il devienne un jour, encore lointain sans doute, un outil thérapeutique

La commission rejette les amendements n° 148, n° 335 et n° 862.

Puis elle adopte l'amendement rédactionnel n° 2190 du rapporteur.

Elle examine ensuite les amendements identiques n° 144 de M. Xavier Breton, n° 331 de M. Patrick Hetzel et n° 858 de M. Thibault Bazin.

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La recherche pharmacologique a pour principal objectif la mise au point de médicaments. Elle consiste notamment à cribler des molécules, modéliser des pathologies et tester la toxicité des médicaments. Il est acté de façon consensuelle aujourd'hui que, pour la recherche de l'industrie pharmaceutique, les cellules souches embryonnaires humaines peuvent être remplacées. Les cellules souches pluripotentes induites sont une alternative reconnue et effective, dans ce domaine. Il n'y a plus aucun débat sur ce point.

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Dans le prolongement de ce que vient de dire M. Alain Ramadier, l'amendement n° 331 vise à insérer, après l'alinéa 3 : « Les cellules souches pluripotentes induites sont utilisées pour la recherche pharmacologique. »

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission rejette les amendements n° 144, n° 331 et n° 858.

Puis elle passe à l'examen, en discussion commune, des amendements identiques n° 145 de M. Xavier Breton et n° 332 de M. Patrick Hetzel, et des amendements identiques n° 792 de M. Alain Ramadier et n° 859 de M. Thibault Bazin.

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L'amendement n° 332 vise à demander à l'ABM la remise d'un rapport sur les recherches en matière de cellules souches pluripotentes induites.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission rejette les amendements identiques n° 145 et n° 332, puis les amendements identiques n° 792 et n° 859.

Elle examine les amendements identiques n° 146 de M. Xavier Breton, n° 333 de M. Patrick Hetzel et n° 860 de M. Thibault Bazin.

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L'alinéa 4 revient à autoriser la création de gamètes artificiels à partir de cellules souches pluripotentes induites. La création de gamètes artificiels n'a jamais été autorisée en France. Ses conséquences sont vertigineuses. Elle entraînerait notamment la création d'embryons pour la recherche, comme en témoignent les recherches menées par des scientifiques japonais.

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Si cet alinéa est maintenu et si l'interprétation que nous en faisons est confirmée, cela revient bien à dire que nous entrons dans un processus de moins-disant éthique.

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Je tiens à rappeler que nous avons souhaité un contrôle et un encadrement de l'usage des cellules iPS, lesquels n'existent actuellement pas dans notre loi de bioéthique. Nous savons qu'il est possible, aujourd'hui, de faire un certain nombre de choses à partir des cellules iPS. Nous souhaitons inscrire dans la loi que, si d'aventure, il devenait possible de générer des gamètes à partir de cellules iPS, il y ait une déclaration à l'ABM. Nous contraignons une recherche sur les cellules iPS, qui aujourd'hui n'est soumise à aucune règle.

Il nous paraît néanmoins pertinent d'autoriser cette recherche, parce que beaucoup de questions se posent sur la fertilité. Comprendre comment se créent des gamètes, c'est aussi comprendre les mécanismes à l'oeuvre et, potentiellement, être capables d'apporter des connaissances à la gamétogenèse.

Enfin, je rappelle que cette loi de bioéthique, comme les précédentes, comme la convention d'Oviedo, interdit de fabriquer des embryons, quelle que soit la façon dont on le fait, pour la recherche. Nous ajoutons un point de vigilance, ce qui est tout le sens d'une loi de bioéthique : interroger le faisable au regard de l'éthique.

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Je suis d'accord avec vous, madame la ministre : il faut traiter ce sujet qui ne l'était pas jusqu'alors. Mais tout dépend de la façon dont il l'est. Le fil qui peut être tiré m'inquiète. J'ai bien compris que vous posiez un verrou. Mais, souvent, face à une porte, la tentation c'est de l'ouvrir. En autorisant, sous un bon prétexte, celui de comprendre la gamétogenèse, la création de gamètes artificiels, ne voudra-t-on pas, ensuite, aller un peu plus loin et créer un embryon, sans néanmoins dépasser le délai des quatorze jours, seulement pour comprendre ? Cet argument du « pour comprendre » peut, en réalité, être tiré encore un peu plus loin. La prochaine loi de bioéthique ne nous fera-t-elle pas franchir une nouvelle étape dans ce domaine ? Certains amendements d'appel semblent d'ailleurs l'annoncer. S'agit-il, madame la ministre, d'un vrai terminus ? D'autres pays ont déjà cédé à la tentation…

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

On peut toujours tout imaginer, Monsieur Bazin, mais cela signifierait que nous déciderions de violer la convention d'Oviedo et la loi de bioéthique… Laissez-moi reprendre votre argument. Aujourd'hui, nous réglons une partie des problèmes d'infertilité en allant chercher des cellules, qui ne sont pas des gamètes, et en prélevant leurs noyaux pour les injecter dans des ovocytes uniquement en vue d'une procréation médicalement assistée. Je pense qu'il est très important d'encadrer les recherches sur les cellules iPS, même si leur origine n'est pas embryonnaire, si la recherche a vocation à comprendre et à essayer de faire des gamètes avec ces cellules. Cela n'a strictement rien à voir avec le fait d'autoriser à utiliser des gamètes pour créer des embryons à des fins de recherche, ce qui reste parfaitement interdit.

Néanmoins, puisque nous acceptons aujourd'hui de faire des ICSI, c'est-à-dire de partir de cellules qui ne sont pas encore des gamètes, de prendre des noyaux et de les injecter dans les ovocytes des femmes, dans le cadre d'une PMA, pourquoi, si un jour il devait exister une autre façon d'aller chercher le noyau d'une cellule, de le mettre dans un ovocyte et de permettre à des couples stériles d'avoir des enfants, nous priver de faire de la recherche, pour comprendre comment se fait la différenciation ? Une fois que l'on a compris les mécanismes, il est aussi plus facile de comprendre pourquoi certaines causes de stérilité sont liées à des blocages dans la différenciation des spermatozoïdes.

Une fois de plus, comprendre les choses et produire de la connaissance, c'est le rôle de la recherche. Savoir à partir de la connaissance produite ce que l'on autorise sur des sujets éthiques, c'est le rôle de la loi de bioéthique. Elle doit veiller à encadrer, de sorte à éviter de laisser faire des choses qui ne correspondent pas à nos principes éthiques, et non à empêcher.

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Monsieur Bazin, c'est bien parce qu'il existe une multitude de portes que nous sommes réunis pour réviser la loi de bioéthique. La question est bien de savoir si nous les ouvrons ou non et de mettre le curseur entre ce que la science peut permettre et ce que la loi autorise. Il ne faut pas avoir peur de cette porte qu'en l'occurrence nous n'autorisons pas à ouvrir.

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Madame la ministre, vous avez évoqué plusieurs limites. Mais nous avons vu que les Japonais ont pris une certaine direction avec les cellules iPS, puisqu'ils ont réussi à créer une souris à partir d'une cellule de peau transformée en cellule iPS. Il faut des garde-fous un peu plus précis, pour éviter toute dérive. Les Japonais, qui sont très en pointe sur les cellules iPS, n'ont pas les mêmes garde-fous que nous, et nous avons vu où cela les a menés… Nous devons absolument éviter de prendre la même direction. Or la rédaction actuelle n'est pas suffisamment claire ni précise. Il faut encadrer davantage que vous ne le faites.

La commission rejette les amendements n° 146, n° 333 et n° 860.

Elle examine ensuite l'amendement n° 625 de Mme Annie Genevard.

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Cet amendement propose une rédaction claire et précise de l'alinéa 4 de l'article 15, de telle sorte que l'on interdise les recherches destinées à créer des gamètes ou des embryons à partir de cellules iPS. Contrairement à ce que vous dites, vous êtes en train d'ouvrir la porte.

La commission rejette l'amendement n° 625.

Puis, suivant l'avis défavorable du rapporteur, elle rejette les amendements identiques n° 147 de M. Xavier Breton, n° 334 de M. Patrick Hetzel et n° 861 de M. Thibault Bazin.

La commission étudie les amendements identiques n° 2226 du rapporteur et n° 2029 de M. Marc Delatte.

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Il s'agit de reprendre l'esprit d'un amendement précédent que nous avons adopté sur la création de chimères, mais en utilisant des cellules iPS et non des cellules embryonnaires. Nous verrouillons ce type de recherche pour pouvoir les soumettre à habilitation.

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Mêmes arguments que M. le rapporteur, dans le même esprit que les amendements n° 2224 et n° 2027 adoptés à l'article 14.

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Favorable.

La commission adopte les amendements n° 2226 et n° 2029.

Puis elle adopte l'amendement rédactionnel n° 2191 du rapporteur.

La commission est saisie des amendements identiques n° 100 de M. Xavier Breton, n° 287 de M. Patrick Hetzel et n° 731 de M. Thibault Bazin.

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Je propose d'indiquer clairement que la dérivation de cellules somatiques en gamètes est interdite.

La commission rejette les amendements n° 100, n° 287 et n° 731.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements identiques n° 102 de M. Xavier Breton, n° 289 de M. Patrick Hetzel et n° 814 de M. Thibault Bazin, ainsi que les amendements identiques n° 101 de M. Xavier Breton, n° 288 de M. Patrick Hetzel et n° 813 de M. Thibault Bazin.

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L'amendement n° 289, qui est un amendement de repli, vise à préciser qu'en aucune façon les gamètes dérivés de cellules souches pluripotentes induites ne peuvent être fécondés ou fécondables.

Madame la ministre, si vous vous opposez à cet amendement, cela veut dire qu'en réalité, la loi permettra de le faire. Cela montrerait bien qu'il existe une ambiguïté, ce que je n'imagine à aucun moment.

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Cela fait bien longtemps qu'aucun de nos amendements n'a été adopté… Y être favorable serait l'occasion pour nous d'augmenter le pourcentage de nos amendements retenus.

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L'amendement n° 288, qui est également un amendement de repli, précise qu'en aucune façon les gamètes dérivés de cellules souches pluripotentes induites humaines ne peuvent être fécondés en vue de recevoir un embryon humain. Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement. Il convient d'expliciter désormais ces choses-là dans la loi.

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Nous vous faisons de nombreuses propositions de rédaction. Certaines sont plus ou moins bavardes et ont plus ou moins un impact. Faites votre choix : il y en a pour tous les goûts ! Si on pouvait en adopter un, ce serait bien…

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Je remercie M. Bazin pour le choix qu'il nous offre. (Sourires.)

Madame la ministre, j'ai reçu une série d'articles m'informant que l'on a réussi à imprimer des ovaires avec une imprimante 3D, en tout cas qu'une souris a pu naître avec ce type de technologie. Avez-vous connaissance de cela ? Cela pourrait poser autant de problèmes éthiques que de filiation. (Sourires.)

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Je n'ai rien lu sur le sujet. Si l'on parle d'organoïdes, c'est-à-dire de choses simplifiées, alors effectivement on sait faire. Mais s'il s'agit d'ovaires, on ne sait pas faire.

En fait, il existe des possibilités, y compris au travers des imprimantes 3D, de recréer des interfaces entre certains tissus cellulaires pour regarder comment les cellules communiquent les unes avec les autres. Ce dont vous parlez est probablement encore de la science-fiction, mais je vérifierai.

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Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

Nombreux sont ceux qui parlent d'organes au lieu d'organoïdes. Créer un organe avec une imprimante 3D relève de la science-fiction. Il existe en effet des choses qui ressemblent à des tissus superposés et qui permettent de faire certains types de recherche, notamment sur le médicament. Tout ce qui permet de modéliser et de se rapprocher au plus près d'un organe est utile et permettra, par exemple, de faire moins de recherches sur l'animal. On essaie donc de développer des substituts, mais on ne crée pas des ovaires par imprimante 3D. C'est une façon très contractée de dire ce que font les scientifiques.

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Cette discussion permet de rebondir sur des propos tenus par M. Jean-Louis Touraine en début de semaine, à la suite d'une question de Mme Annie Genevard qui demandait si des gamètes artificiels seraient susceptibles d'être utilisés pour l'AMP. Il avait affirmé que ce n'était pas le cas. Si j'ai bien compris ce que vous venez de dire, madame la ministre, vous évoquez cette hypothèse d'utilisation de gamètes artificiels pour l'AMP. Confirmez-vous ou infirmez-vous cela ? C'est un sujet éminemment sensible par rapport à l'article 15 dont nous débattons.

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Je suis partie de ce qui existe actuellement quand on fait de l'AMP. On peut faire une AMP par fécondation in vitro classique, ou en prenant des noyaux de cellules et en les injectant dans des ovocytes de manière à générer des embryons. C'est la technique des ICSI.

Le processus de différenciation jusqu'aux spermatozoïdes capables de mobilité et de fertilisation est extrêmement difficile à analyser et à étudier. Partir de cellules, quelles qu'elles soient, et essayer de reproduire le processus de méiose, c'est comprendre quelles sont les étapes qui permettent à ce processus d'avoir lieu. C'est donc potentiellement faire en sorte de proposer aux couples d'utiliser une fécondation spermatozoïdeovule et pas une injection. Plus on se rapproche d'une fécondation spermatozoïdeovule et moins on génère de risques dans le cadre d'une AMP.

La commission rejette successivement les amendements identiques n° 102, n° 289 et n° 814, ainsi que les amendements identiques n° 101, n° 288 et n° 813.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels n° 2192, n° 2193, n° 2195, n° 2196, n° 2197, n° 2198, n° 2199, n° 2200, n° 2201, n° 2202, n° 2203, n° 2204, n° 2205 et n° 2206 du rapporteur.

Elle adopte ensuite l'article 15 modifié

Article 16 : Limite de conservation des embryons proposés à la recherche et non inclus dans un protocole après cinq ans

La commission examine les amendements identiques n° 103 de M. Xavier Breton, n° 290 de M. Patrick Hetzel et n° 815 de M. Thibault Bazin.

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L'article 16 a pour objet de mettre fin à la conservation des embryons humains qui ne font plus l'objet d'un projet parental et sont proposés par les couples concernés à la recherche, mais ne sont pas inclus dans un protocole de recherche après un délai de cinq ans de conservation. Si cet article met fin à une situation indigne de conservation d'embryons surnuméraires, il contribue à révéler la réification de l'embryon humain.

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Je souhaite faire un commentaire général sur l'étude d'impact de l'article 16. En fait, je ne vois pas quel est le rapport entre cet article et les pages 333 à 336 de ce document. Nous avons déjà débattu avec Mme Buzyn au début de la semaine de ce sujet sensible qu'est le nombre d'embryons congelés à ce jour – quelque 223 000 embryons congelés pour 74 000 couples. En 2016, un total de 19 354 embryons était conservé en attente de faire l'objet d'une recherche puisqu'ils ont été donnés par les couples dont ils sont issus. L'étude d'impact nous apprend aussi que le nombre d'embryons humains donnés chaque année à la recherche est quasiment équivalent au nombre d'embryons humains effectivement inclus dans un protocole de recherche. On nous a dit à plusieurs reprises qu'il fallait modifier certains critères concernant ces recherches parce que nos équipes étaient bridées. Or, en France, moins de dix équipes de recherche travaillent sur l'embryon. Je souhaiterais que le Gouvernement s'exprime davantage sur cette question et que l'on fixe une limite de conservation.

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L'article 16 que vous voulez supprimer vise à modifier l'article L. 2141-4 du code de la santé publique qui régit les conditions de conservation des embryons surnuméraires qui ont été conçus en vue d'une PMA. Il prévoit aussi la destruction du stock d'embryons destinés à la recherche qui n'ont pas été intégrés dans un protocole de coopération sauf s'ils présentent un intérêt particulier pour la recherche. Je rappelle que la conservation a un coût important puisque l'on parle de 20 000 embryons. Avis défavorable.

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

J'insiste à nouveau sur le fait qu'on ne crée pas d'embryons pour faire de la recherche. Il est question ici d'embryons qui sont donnés à la recherche par des couples qui ont renoncé à un projet parental et consenti à ce que ces embryons soient utilisés par le monde de la recherche, détruits ou confiés à d'autres couples. On n'a jamais dit qu'il y avait des problèmes d'approvisionnement d'embryons. J'ai même répété qu'il y avait un stock de 19 000 embryons qui ne font plus l'objet d'un projet parental et qui ont été donnés à la recherche. La question est de savoir combien de temps les conserver. Le projet de loi propose de fixer une date limite et une durée limite à leur conservation.

Le couple a donc le choix soit d'offrir ses embryons à d'autres couples – les chiffres qui vous ont été donnés lors de l'audition des représentants de l'Institut national d'études démographiques (INED) montrent une assez faible demande de la part d'autres couples –, soit de demander directement leur destruction, soit d'autoriser leur conservation à des fins de recherche avant d'être détruits. Fixer un délai de conservation de cinq ans nous a semblé raisonnable.

Monsieur Raphan, comme Mme Buzyn et moi-même avons des habitudes de scientifiques, nous avons fait des recherches. C'est bien une matrice en 3D qui a été conçue et qui permet à des follicules embryonnaires de se loger à l'intérieur. Ce n'est absolument pas l'organe complet, même si le titre peut prêter à confusion.

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Nous sommes maintenant au fait des destinations possibles des embryons congelés lorsqu'il n'y a plus de projet parental. Comme une loi a potentiellement un aspect incitatif et un aspect dissuasif, avez-vous une considération éthique différente en fonction de la destination de ces embryons surnuméraires une fois qu'ils ne font plus l'objet de projets parentaux ? Le don est-il à considérer différemment en termes éthiques ? Les trois possibilités d'utilisation sont-elles identiques ou avez-vous une préférence éthique ? Y a-t-il, dans le projet de loi, une incitation pour une utilisation plutôt qu'une autre ?

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Pour moi, le bon choix, c'est celui que fait le couple.

Dès lors qu'il n'y a plus de projet parental pour les embryons surnuméraires, c'est au couple de décider et il n'y a pas de jugement de valeur à porter sur leur choix.

La commission rejette les amendements n° 103, n° 290 et n° 815.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission rejette l'amendement n° 1391 de Mme Agnès Thill.

Les amendements n° 1995 et n° 2046 de M. Didier Martin sont retirés.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission rejette successivement les amendements n° 1392 et n° 1393 de Mme Agnès Thill, l'amendement n° 620 de Mme Annie Genevard, et les amendements identiques n° 186 de M. Xavier Breton, n° 374 de M. Patrick Hetzel et n° 938 de M. Thibault Bazin.

Puis elle adopte l'amendement rédactionnel n° 2207 du rapporteur.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission rejette l'amendement n° 949 de M. Thibault Bazin.

Elle est saisie des amendements identiques n° 187 de M. Xavier Breton, n° 375 de M. Patrick Hetzel et n° 939 de M. Thibault Bazin.

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Nous avons insisté à plusieurs reprises sur la question du consentement. On nous explique que tout se fait dans la transparence, que tout le monde est informé, que tout est sécurisé. L'amendement n° 375 vise précisément à compléter l'alinéa 5 de l'article 16 par la phrase suivante : « Le consentement est joint au protocole de recherche autorisé par l'Agence de la biomédecine. »

La commission rejette les amendements n° 187, n° 375 et n° 939.

Puis elle examine l'amendement n° 1331 de Mme Bénédicte Pételle.

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L'article 16 prévoit qu'en cas de décès, le membre survivant peut faire trois choix que vous avez énumérés, et il fixe un délai de réflexion à compter du décès avant la consultation du membre survivant.

Une décision aussi importante que le devenir des embryons conçus du temps du vivant de son partenaire ne saurait être prise sereinement à un moment où la personne se trouve fragilisée psychologiquement par le deuil qu'elle traverse. Le délai d'un an ne devrait donc pas souffrir d'exception. La lenteur est parfois signe de sagesse.

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La loi n'oblige pas à prendre une décision avant le délai d'un an. Elle ne prévoit qu'une initiative anticipée du membre du couple survivant. Ce n'est qu'une possibilité offerte. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement n° 1331.

Puis elle examine les amendements identiques n° 376 de M. Patrick Hetzel et n° 940 de M. Thibault Bazin.

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Si l'Agence de la biomédecine n'a pas la preuve du consentement écrit et préalable du couple géniteur selon lequel il donne son embryon à la recherche, elle ne peut autoriser le protocole de recherche sans contrevenir aux principes éthiques qui s'y appliquent, dans le respect des articles 16 à 16-8 du code civil.

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Cette précision qui figure à l'article 14 du projet de loi définit les responsabilités respectives des centres d'AMP et de l'Agence de la biomédecine. La responsabilité de la vérification effective des consentements incombe en effet aux premiers. L'Agence doit par contre s'assurer, lors de l'autorisation de la recherche, des conditions dans lesquelles les consentements sont ou seront obtenus, notamment en utilisant des formulaires types. Avis défavorable.

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M. Berta a raison : cet amendement a été rédigé alors que nous disposions d'une autre version de l'article 14. Cela dit, la disposition que je propose permettrait malgré tout de sécuriser les choses. C'est la raison pour laquelle il faut parfois être très explicite.

La commission rejette les amendements n° 376 et n° 940.

Puis elle adopte les amendements rédactionnels nos 2208 à 2212 du rapporteur.

La commission est saisie des amendements identiques n° 104 de M. Xavier Breton, n° 291 de M. Patrick Hetzel et n° 816 de M. Thibault Bazin.

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L'amendement n° 104 vise à réaffirmer l'objectif de diminution du nombre des embryons humains conservés, compte tenu de leur augmentation régulière.

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Il convient en effet de faire les choses de façon parcimonieuse. Nous sommes dans le domaine du vivant et il faut procéder avec précaution. La ministre nous avait indiqué que le Gouvernement souhaitait aller dans ce sens. C'est le rôle du Parlement de vérifier que c'est bien le cas.

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On le voit, la science évolue et la vitrification des ovocytes permet d'envisager une diminution du nombre d'embryons surnuméraires. Vous avez indiqué que des recherches étaient en cours pour faire en sorte qu'il y en ait moins. Au-delà des clauses de révision habituelles dont il sera question lorsque nous aborderons l'article relatif au suivi des travaux de bioéthique, il convient que le Parlement puisse disposer d'un rapport annuel sur un enjeu important pour notre société.

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Nous partageons cet objectif. Toutefois, il faut laisser du temps à la recherche, car c'est elle qui nous donnera la réponse. Avis défavorable.

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

L'Agence de la biomédecine a la mission légale d'assurer le suivi de l'application de la loi. Elle s'acquitte de cette mission dans le cadre d'un rapport annuel d'activité, ainsi que par l'intermédiaire de son rapport médical et scientifique qui établit tous les ans un état complet de l'activité d'AMP. Il me semble donc que votre demande est satisfaite.

La commission rejette les amendements n° 104 , n° 291 et n° 816.

Puis elle adopte l'article 16 modifié.

Chapitre II Favoriser une recherche responsable en lien avec la médecine générale

Article 17 : Utilisation des outils de modification ciblée du génome en recherche fondamentale

La commission est saisie des amendements identiques n° 149 de M. Xavier Breton, n° 336 de M. Patrick Hetzel et n° 864 de M. Thibault Bazin.

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Les alinéas 1 et 2 de l'article 17 prévoient la suppression du second alinéa de l'article L. 2151-2 du code de la santé publique qui dispose que : « La création d'embryons transgéniques ou chimériques est interdite. »

La suppression de l'interdiction de créer des embryons transgéniques ou chimériques signifie a contrario que les chercheurs pourront créer en laboratoire des embryons transgéniques et chimériques.

Il convient donc de s'interroger sur les motivations de la suppression de cet interdit fondateur du droit de la bioéthique française.

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L'article 17 porte sur un sujet qui mérite également une attention toute particulière. Comment se fait-il qu'on lève, au travers de la nouvelle rédaction, l'interdiction de créer des embryons chimériques ?

Dans son dernier avis sur la révision des lois de bioéthique, le CCNE indique ceci : « Le potentiel pluripotent offre d'autres possibilités d'application considérées comme sensibles en ce qu'elles soulèvent des questions éthiques inédites » et il développe bien évidemment les problèmes éthiques qui sont posés.

Ce qui a fait jusqu'à présent la particularité des lois de bioéthique françaises, c'est qu'elles avaient une vraie vision sur la question de l'humain et de la vie. Même si celles-ci, bien évidemment, peuvent donner lieu à des débats car il n'y a pas de vision unilatérale ou unique en la matière. Or au fur et à mesure qu'on avance dans le texte, on note un moins-disant éthique, qui sera source de problèmes. Comme l'a rappelé Mme Annie Genevard, ce n'est pas parce que les débats sont courtois que nous n'avons pas une opinion différente de la vôtre sur ces questions. Nous estimons en effet qu'il faut s'interroger sur le type de monde que nous voulons demain.

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Madame la ministre, je vais avoir besoin que vous me rassuriez. Vous prévoyez, aux alinéas 1 et 2 de l'article 17, de supprimer le second alinéa de l'article L. 2151-2 du code de la santé publique qui dispose que « La création d'embryons transgéniques ou chimériques est interdite » et de le remplacer par : « La modification d'un embryon humain par adjonction de cellules provenant d'autres espèces est interdite. » Or je ne comprends pas pourquoi vous remplacez une phrase très claire par une autre qui me paraît l'être un peu moins.

Cela signifie-t-il que l'on pourrait envisager demain de créer des embryons transgéniques avec l'expérimentation de la technique CRISPR-Cas 9 dite du ciseau moléculaire ? Cela signifie-t-il que l'on pourrait expérimenter sur l'embryon in vitro la technique de la FIV à trois parents ? Si on est capable de supprimer le critère pathologique, dès lors que l'on veut peut-être créer un lien biologique de deux femmes qui ont un projet parental, on pourrait imaginer finalement une FIV à trois parents. Cela semble techniquement possible ailleurs. La modification de l'article L. 2151-2 du code de la santé publique ouvre-t-elle cette possibilité ? Je ne comprends pas pourquoi vous proposez de supprimer la phrase : « La création d'embryons transgéniques ou chimériques est interdite. »

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Monsieur Bazin, à chaque fois que je vous entends parler de FIV à trois parents, cela me fait sursauter.

Vous faites allusion à des pathologies génétiques mitochondriales, c'est-à-dire au cas d'un couple pour lequel tout va bien sur la partie chromosomique et génomique, mais dont la femme présente, au niveau de ses mitochondries – ce sont des petits organites présents en plusieurs milliers de copies dans chaque cellule – une mutation qui va avoir une incidence sur la respiration de la cellule. Il s'agit donc de permettre à ces couples – cela a été fait à l'hôpital Necker chez le professeur Arnold Munnich – d'avoir un enfant qui sera bien le fruit de leur génome et de leurs chromosomes, et aux futures cellules de respirer, donc de se multiplier, et à l'embryon d'exister. Il ne s'agit nullement de trois parents. La composante génomique est apportée par les chromosomes du père et de la mère. Il s'agit seulement de substituer un petit chromosome circulaire qui comporte quelques gènes de respiration mitochondriale, qui sont d'ailleurs d'origine bactérienne.

J'en viens aux amendements qui visent à supprimer les alinéas 1 et 2 de l'article 17.

En supprimant l'interdiction de conception d'embryons transgéniques et chimériques, l'article 17 poursuit deux objectifs.

Premièrement, il sécurise les recherches effectuées dans un cadre in vitro impliquant une modification ciblée du génome. Toutefois, demeurent totalement interdites les recherches effectuées dans le cadre de la PMA et qui sont susceptibles de donner naissance à un enfant.

Le rapport explicatif de la convention d'Oviedo que vous citez souvent donne quelques indications sur la portée de l'interdiction à terme énoncée à l'article 13. S'il rappelle que des modifications génétiques ne peuvent être opérées sur des spermatozoïdes ou des ovules destinés à la fécondation, il admet que des recherches médicales puissent être admises à la double condition qu'elles soient effectuées strictement in vitro et avec la promulgation d'un comité d'éthique ou de toute autre instance compétente.

Deuxièmement, il explicite que la modification d'un embryon humain par adjonction de cellules provenant d'autres espèces reste interdite.

Le code de la santé publique interdit la création d'embryons chimériques sans apporter de définition précise. L'étude du Conseil d'État comme le rapport d'information relatif à la révision de la loi de bioéthique plaident en faveur d'une clarification juridique.

L'article 17 propose donc une définition de l'embryon chimérique et apporte les clarifications nécessaires. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements n° 149, n° 336 et n° 864.

Puis elle en vient à l'amendement n° 513 de M. Patrick Hetzel.

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Si l'on veut rassurer tout le monde, il suffit, à l'alinéa 1, de substituer aux mots : « remplacé par les dispositions suivantes », les mots : « complété par une phrase ainsi rédigée ». Cela éviterait, comme l'a indiqué M. Bazin, de rayer d'un trait de plume la phrase suivante du code de la santé publique qui est très claire : « La création d'embryons transgéniques ou chimériques est interdite. »

Ce que je vous propose est dans la philosophie du « en même temps » de la République en Marche, puisqu'il s'agit de maintenir ce qui existe et de le compléter avec la formulation que vous avez prévue à l'article 17.

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Vous globalisez chimérique et transgénique, ce qui est totalement différent. Il faut poursuivre la recherche in vitro sur des embryons qui n'ont bien sûr aucun devenir d'implantation. On ne va pas s'interdire d'essayer de réaliser l'édition des génomes avec la technique CRISPR-Cas9. Avis défavorable.

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Il n'y a aucune ambiguïté s'agissant de l'interdiction de la création d'embryons chimériques, que l'on réaffirme en explicitant sa portée précise. Le Conseil d'État a lui-même expliqué qu'il fallait apporter des clarifications. C'est pourquoi nous précisons que la modification d'un embryon humain par adjonction de cellules – sans préciser ce que sont ces cellules – provenant d'autres espèces – sans préciser non plus quelles sont ces espèces – est interdite.

En ce qui concerne les embryons transgéniques, sans objet de réimplantation, conservés à des fins de recherche avec destruction à quatorze jours, il s'agit de savoir comment donner aux chercheurs la possibilité d'utiliser notamment la technique CRISPR-Cas9 tout en maintenant l'interdiction formelle de manipulations génétiques au travers de l'édition du génome sur des embryons qui ont vocation à être réimplantés. Cela est garanti par la convention d'Oviedo et le code civil, lequel dispose que « La transmission à la descendance d'un génome modifié est interdite ». On ne peut donc pas générer d'embryons transgéniques humains en vue de réimplantation.

Si vous demandez si l'objectif est d'autoriser l'édition du génome pour la recherche, la réponse est très clairement oui.

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Je vous remercie, madame la ministre, monsieur le rapporteur, pour votre franchise. Actuellement, il est interdit de créer des embryons transgéniques. Mais la technique CRISPR-Cas9 permettra de faire des recherches dans les autres conditions prévues dans le code civil. Là encore, c'est une évolution qui est proposée et non un maintien de nos interdits au niveau transgénique. On commence donc potentiellement et même s'il y a des garde-fous, à avancer vers le transhumanisme, certes sous de bons prétextes. Je le répète, la tentation est toujours d'ouvrir les portes. Vous proposez de passer d'une interdiction à une autorisation encadrée. Là encore, on abaisse d'une certaine manière notre standard éthique. C'est votre choix. Pour ma part, je pense qu'il y a peut-être un risque. C'est pourquoi je voterai l'amendement n° 513 de M. Hetzel.

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Monsieur Bazin, si on en reste à la loi de bioéthique votée il y a huit ans, sans prendre en compte les progrès de la science accomplis depuis lors, il ne sert à rien de se réunir. C'est le fondement des lois de bioéthique successives. Certes, le cadre bioéthique français est très spécifique et on peut en discuter, mais il faut pouvoir progresser en réfléchissant à toutes les dérives possibles. On ne peut pas en rester au statu quo ante.

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Je remercie M. Bazin de nous avoir enjoints à la prudence, nous y veillons tous. Faire attention est même notre principal réflexe dans ce débat depuis le début de la semaine. Mais une éthique au rabais, visant à conserver à l'identique le référentiel de raisonnement et d'interdits, alors que les pratiques scientifiques changent, fait courir le risque que ces pratiques ne dépassent celui-ci.

Dans le monde, de nombreuses équipes travaillent sur des chimères créées en injectant des cellules humaines dans des embryons d'animaux. Il y a quelques semaines, les Japonais viennent précisément d'autoriser des chercheurs à laisser les embryons aller jusqu'à leur terme. L'enjeu, en France, est d'arriver à un niveau similaire de recherche tout en établissant des cadres protecteurs très précis, qui sont décrits dans ce projet de loi. Il n'y a donc pas de dérive possible. Interdire des pratiques qui existent ailleurs, c'est nous mettre en situation de défaut.

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Ces éléments d'avancées, qui questionnent aussi la finalité de ce débat et ses retombées, doivent être pris en compte ou du moins participer à une démarche intégrative afin de remplir le cadre que l'on crée avec l'éthique.

Si une commission bioéthique avait vu le jour au XIXe siècle, elle aurait également comporté des opposants aux vaccins antirabiques. Or ces thérapeutiques, que les scientifiques commençaient à utiliser à l'époque, nous ont conduits à soigner, à prévenir voire à éliminer bon nombre de maladies.

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Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

Je comprends tout à fait votre questionnement car nous voulons à présent mener une recherche sur le génome lors du développement embryonnaire alors que les embryons transgéniques étaient interdits il y a une dizaine d'années. Comme l'a dit M. Jean-François Eliaou, les techniques ont changé. Il y a dix ou quinze ans, la transgénèse consistait à injecter un gène tout en ignorant l'endroit où il se logerait. Avec les techniques assez grossières de l'époque, nous ne maîtrisions absolument pas l'effet que ce gène pouvait avoir dans la cellule.

Avec la technique Crispr-Cas9 dite des « ciseaux moléculaires », il est aujourd'hui possible de désactiver un gène ou de le remplacer par un autre. Il est très important de faire ces études sur les amas de cellules embryonnaires en cours de développement, que l'on suit jusqu'à quatorze jours avant de les détruire, car quantité de gènes s'allument lors de l'embryogénèse, qui ne jouent plus aucun rôle dans les tissus adultes.

Or les anomalies moléculaires que l'on retrouve dans les cancers des enfants touchent des gènes du développement. C'est la raison pour laquelle les signatures moléculaires des cancers des enfants n'ont rien à voir avec celles des cancers adultes. De ce fait, les traitements ciblés que l'on utilise chez l'adulte n'ont pas beaucoup d'intérêt chez l'enfant.

Les cancers des enfants suscitent donc l'embarras des chercheurs, qui découvrent des anomalies moléculaires du gène du développement embryonnaire. Ils tentent en conséquence de mieux connaître l'impact de ces gènes qui s'allument au cours du développement sur la façon dont les tissus se fabriquent, et de mieux cerner la signification même de ces gènes pour comprendre les maladies qui surviennent chez les enfants.

Aujourd'hui, nous disposons de techniques très précises, qui permettent d'éteindre un gène ou de le remplacer par une autre forme de gène, et de mieux comprendre comment les tissus se développent. Ce champ de recherche est considérable. Nous ne sommes pas en train de construire des embryons transgéniques, ni de développer le transhumanisme : nous sommes dans la compréhension très précise du développement embryonnaire et de la façon dont les gènes seront utilisés à certains stades du développement. Ce type de recherche fondamentale, foncièrement utile, ne doit pas prêter à autant de fantasmes.

Telle est mon opinion, et j'espère avoir exprimé le plus clairement possible pourquoi il est nécessaire de transformer la loi en matière de recherche et pourquoi les questions ne se posaient pas de la même façon il y a dix ans.

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Lorsqu'une telle question se pose, nous devons l'interroger au regard de nos principes éthiques. Ce n'est pas parce que des techniques sont utilisées ailleurs qu'elles doivent l'être en France. L'argument qui a été avancé précédemment – mais pas par vous, madame la ministre, qui me rassurez à chaque fois par vos réponses – m'interpelle car, justement, nous avons une éthique à la française. Nous ne pouvons pas dire que nous devons atteindre le même niveau de recherche qu'ailleurs car une des forces de la France, qui peut nous valoriser et faire notre grandeur, est justement ce questionnement éthique, qui nous conduit à ne pas forcément faire tout ce qui se pratique ailleurs.

Crispr-Cas9 est une véritable révolution, mais l'outil peut être utilisé à de bonnes comme de moins bonnes fins. Si nous promouvons les finalités positives, je souhaite vérifier avec vous qu'en levant cet interdit, ce qui existe par ailleurs est bien suffisant. Comme vous, je ne veux pas que, grâce à Crispr-Cas9, nous nous retrouvions dans la situation, qui s'est produite ailleurs, de faire naître deux bébés génétiquement modifiés.

Les études sur le développement embryonnaire sont déjà passées de sept à quatorze jours, au motif que les techniques avaient évolué. Dont acte, mais il faut faire attention car si la majorité a une conscience éthique similaire à la nôtre, des déviances peuvent exister. De plus, sur certains sujets, nous passons d'un régime d'autorisation à un régime de déclaration. En l'occurrence, nous allons permettre une nouvelle technique : veillons à ce qu'il n'y ait pas de tentation d'augmenter des personnes, au lieu de soigner et de mieux accompagner des enfants.

Il est intéressant de noter que le CCNE n'a pas enjolivé cette technique, mais a invité à la questionner. Alors qu'on lève un interdit, les deux premiers alinéas de l'article 17, qui est très court, interpellent. Suffiront-ils, bien que je sache que la loi ne doit pas être bavarde ? J'aimerais vous faire confiance, mais je suis inquiet.

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La loi n'est peut-être pas la seule à être bavarde. (Sourires.)

La commission rejette l'amendement n° 513.

Puis elle examine les amendements identiques n° 105 de M. Xavier Breton, n° 292 de M. Patrick Hetzel et n° 817 de M. Thibault Bazin.

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Avis défavorable. Nous avons déjà largement débattu des problèmes que posent les chimères.

La commission rejette les amendements n° 105, n° 292 et n° 817.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission rejette ensuite les amendements identiques n° 106 de M. Xavier Breton, n° 293 de M. Patrick Hetzel et n° 818 de M. Thibault Bazin.

La commission est saisie des amendements identiques n° 107 de M. Xavier Breton, n° 294 de M. Patrick Hetzel et n° 820 de M. Thibault Bazin.

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Il convient de préciser que toute pratique eugénique visant à modifier les caractéristiques génétiques est interdite.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission rejette les amendements n° 107, n° 294 et n° 820.

Elle examine les amendements identiques n° 151 de M. Xavier Breton, n° 338 de M. Patrick Hetzel et n° 904 de M. Thibault Bazin.

La commission rejette les amendements n° 151, n° 338 et n° 904.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission rejette les amendements identiques n° 152 de M. Xavier Breton, n° 339 de M. Patrick Hetzel et n° 905 de M. Thibault Bazin.

La commission est saisie des amendements identiques n° 153 de M. Xavier Breton, n° 340 de M. Patrick Hetzel et n° 906 de M. Thibault Bazin.

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La discussion a déjà eu lieu pour les articles 14 et 15. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements n° 153, n° 340 et n° 906.

Elle examine, en discussion commune, les amendements identiques n° 337 de M. Patrick Hetzel, n° 793 de M. Alain Ramadier et n° 865 de M. Thibault Bazin, ainsi que l'amendement n° 2075 de M. Arnaud Viala.

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L'expression « génétiquement modifié » s'entend plus largement que le terme « transgénique ». C'est pourquoi l'amendement n° 337 vise à ajouter, après l'alinéa 2, la phrase suivante : « La création d'embryons génétiquement modifiés est interdite. »

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Argument identique pour l'amendement n° 793.

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Par souci de cohérence avec ce que nous avons dit, nous voulons nous assurer avec tous les garde-fous possibles. C'est l'objet de l'amendement n° 865.

Quant à l'amendement n° 2075, il vise à ajouter la phrase suivante après l'alinéa 2 : « La modification, par l'usage des nouvelles technologies, de caractéristiques physiques d'un embryon humain est interdite. »

La commission rejette successivement les amendements identiques n° 337, n° 793 et n° 865, ainsi que l'amendement n° 2075.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, elle rejette les amendements identiques n° 108 de M. Xavier Breton, n° 295 de M. Patrick Hetzel et n° 821 de M. Thibault Bazin.

La commission est saisie de l'amendement n° 1006 de M. Thibault Bazin.

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La rédaction des trois derniers alinéas de ce court article 17 m'inquiète. Lors des auditions, leur compréhension a d'ailleurs fait l'objet de débats.

Tout le monde convient qu'en matière de bioéthique, il convient d'être prudent et précis. Je propose donc une rédaction claire du dernier alinéa de l'article 16-4 du code civil, selon laquelle « aucune modification ne peut être apportée aux caractères génétiques d'une personne dès lors que le but ou les conséquences, directes ou indirectes, prévues ou fortuites, ont pour effet de modifier les caractères génétiques de la descendance de la personne. »

La rédaction actuelle peut laisser croire en effet que l'on pourrait, de manière indirecte ou fortuite, modifier les caractéristiques de la personne. Cet amendement me semble très important.

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M. Bazin fait référence aux modifications des cellules germinales dans le cadre de la thérapie germinale. Ce point est satisfait par le droit actuel car je ne connais personne qui ne s'y oppose pas.

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Je le dis très clairement : nous partageons absolument votre position sur le fond. L'article 16-4 du code civil prévoit qu'« aucune transformation ne peut être apportée aux caractères génétiques dans le but de modifier la descendance de la personne ». En revanche, s'agissant de votre amendement, la loi ne peut pas nous prémunir d'un risque qui, éventuellement, pourrait se réaliser.

Une fois de plus, aucun doute ne doit subsister sur la volonté du Gouvernement. Il ne s'agit pas d'autoriser des modifications génétiques transmissibles à la descendance. L'article 16-4 est rédigé de la manière la plus claire et la plus protectrice possible.

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Comme précédemment, je m'interroge sur les raisons qui poussent le Gouvernement à modifier l'alinéa 4 de l'article 16-4 du code civil, si celui-ci est considéré comme clair.

L'alinéa 5 de l'article 17 du projet de loi vise en effet à supprimer l'adjectif « génétiques » dans « maladies génétiques », entraînant une ambiguïté, voulue ou non. Si elle n'est pas voulue, clarifions-la sur le fond, si vous en êtes d'accord. J'y tiens vraiment.

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

En supprimant le qualificatif « génétiques », on étend la protection à toute maladie et on rejoint les termes de la convention d'Oviedo.

Il est important que nous ayons cet échange car je ne voudrais pas qu'un doute subsiste sur la volonté du Gouvernement à ce sujet.

La commission rejette l'amendement n° 1006.

La commission examine l'amendement n° 1288 de Mme Annie Genevard.

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Dans sa rédaction actuelle, l'article 16-4 du code civil, qui interdit les thérapies géniques germinales, réserve cependant la possibilité que des transformations soient apportées aux caractères génétiques dans le but de modifier la descendance de la personne dès lors que celles-ci relèvent de « recherches tendant à la prévention et au traitement des maladies génétiques ».

L'amendement vise à supprimer cette possibilité exceptionnelle dont pourrait résulter la constitution d'embryons génétiquement modifiés. En effet, dans sa rédaction actuelle, et, plus encore, dans celle que souhaite lui donner le projet de loi, cette exception prive l'interdiction prétendument posée par le texte d'une réelle effectivité.

S'il suffit de s'inscrire dans le cadre d'une recherche tendant à la prévention et au traitement des maladies génétiques, ou plus largement encore, de toute maladie, comme Mme Vidal vient de le dire, il est en réalité fort simple de pouvoir apporter de telles modifications transmises à la descendance. Nous franchissons là une nouvelle ligne rouge. Pour nous en prémunir, cet amendement prévoit une rédaction plus protectrice.

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Cette rédaction est peut-être un peu trop protectrice car, prise au pied de la lettre, elle interdit les thérapies géniques somatiques, ce qui serait extrêmement dommage. Je vous invite d'ailleurs au colloque qui, mardi prochain, présentera les résultats des thérapies géniques actuelles, que je ne voudrais surtout pas que nous nous interdisions. Avis défavorable.

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Je partage l'avis du rapporteur. Mais ce débat montre que vous avez l'impression que certains points ne sont pas clarifiés.

Votre amendement interdirait en effet toute recherche sur les maladies génétiques, ce qui n'est pas acceptable. Je vous propose cependant de retravailler pour aboutir à une formulation qui vous sécurise. Le Gouvernement n'a aucunement la volonté de générer des embryons transgéniques à des fins de naissance. Bien que, de mon point de vue, le dispositif soit déjà doté d'une ceinture et de bretelles, je suis prête à y ajouter un parachute pour vous sécuriser ! (Sourires.) Nous n'avons aucune envie que quiconque tombe.

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Je ne prendrai pas la responsabilité de retirer l'amendement, dans la mesure où il a été déposé par Mme Annie Genevard.

Nous avons cependant entendu les propos apaisants de Mme la ministre, qui a compris la problématique. Vous n'interdisez donc pas d'avoir recours à de telles modifications pour la recherche. Nous resterons donc attentifs à un amendement gouvernemental, qui permette de nous rassurer.

La commission rejette l'amendement n° 1288.

La commission examine l'amendement n° 582 de Mme Annie Genevard.

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Cet amendement vise à remplacer les mots « dans le but » par « susceptibles d'avoir pour effet » dans l'alinéa 4 de l'article 16-4 du code civil. La rédaction actuelle nous semble trop ambiguë.

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C'est toujours le même sujet. J'en profiterai cependant pour défendre la communauté scientifique, dont les membres ne cherchent pas à jouer les apprentis sorciers. Il n'a jamais été question pour aucun d'entre eux de réfléchir à une modification d'ordre germinal.

Nous vous proposons donc à nouveau de réfléchir à une rédaction qui, à aucun instant, ne doit mettre en danger des thérapies qui sont en train de commencer à soigner enfin les 3 millions d'enfants qui n'attendent que cela. Avis défavorable.

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J'espère que personne n'imagine que nous fassions ce procès à la communauté scientifique, d'autant que certains d'entre nous sont membres de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST). Nous sommes attachés à la communauté scientifique. Ne nous envoyons pas ce type d'argument.

La commission rejette l'amendement n° 582.

La commission examine, en discussion commune, les amendements identiques n° 109 de M. Xavier Breton, n° 296 de M. Patrick Hetzel et n° 822 de M. Thibault Bazin, ainsi que l'amendement n° 1281 de Mme Annie Genevard.

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Cet article ouvre à la transformation des caractères génétiques d'une personne, si elle n'a pas pour but de modifier la descendance. Cette modification pouvant être une conséquence non voulue, il convient donc de le préciser et d'ajouter après les mots « dans le but » les mots « ou ayant pour conséquence ».

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L'amendement n° 1281, déposé par Annie Genevard, vise à remplacer les mots « dans le but » par « susceptibles d'avoir pour effet » dans l'alinéa 4 de l'article 16-4 du code civil.

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Nous en avons amplement discuté. L'avis est toujours défavorable.

La commission rejette successivement les amendements identiques n° 109, n° 296 et n° 822, ainsi que l'amendement n° 1281.

La commission examine l'amendement n° 1008 de M. Thibault Bazin.

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Cet amendement complète l'article 16-4 du code civil par l'alinéa suivant : « Est interdite toute modification des caractères génétiques d'une personne née ou potentielle ayant pour objectif ou pour effet d'améliorer ses capacités ou ses performances naturelles, inhérentes à son appartenance à l'espèce humaine. »

Il vise à interdire toute tentative transhumaniste en évoquant les personnes nées ou potentielles.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission rejette l'amendement n° 1008.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, elle rejette l'amendement n° 1289 de Mme Annie Genevard.

La commission adopte ensuite l'article 17 modifié.

Article 18 : Développement des « passerelles soinrecherches » par l'utilisation facilitée d'échantillons conservés à d'autres fins

La commission examine, en discussion commune, les amendements n° 970 et n° 969 de M. Thibault Bazin.

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L'article 18 a pour objet de faciliter la recherche nécessitant des examens de génétique sur des collections d'échantillons biologiques conservés à des fins médicales. Nous avons mené certaines auditions sur ce sujet, qui modifie l'expression du consentement.

L'amendement n° 970 vise à préserver la liberté de choix du patient, lequel doit consentir à l'intervention.

Quant à l'amendement n° 969, il ajoute « l'autorise expressément » à la fin de l'alinéa 2. Nous entendons ainsi permettre à la personne d'exprimer son opposition après avoir été informée du programme de recherche, qui d'ailleurs recouvre une réalité plus large que le « projet de recherche ». Cela donnera d'autant plus de valeur au consentement, un principe fondamental de notre bioéthique à la française.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission rejette successivement les amendements n° 970 et 969.

La commission examine l'amendement n° 971 de M. Thibault Bazin.

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Il s'agit d'ajouter qu'« un décret précise la forme de l'information délivrée à la personne. » À l'heure actuelle, il subsiste un flou sur ce point, car la personne pourrait recevoir un mail ou un courrier. Si la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) évoque un délai théorique d'un mois, il faut toutefois s'assurer que la personne a bien reçu l'information.

Nous allons passer d'un système où l'on recueillait le consentement, à un dispositif où il est présumé, si la personne ne s'oppose pas, après avoir été dûment informée. Il serait donc prudent de préciser au moins la forme de l'information délivrée.

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L'amendement est satisfait par l'alinéa 11 de l'article 18. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement n° 971.

La commission examine l'amendement n° 1667 de M. Thibault Bazin.

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Cet amendement est le fruit des auditions menées et des préconisations de la CNIL. Afin de respecter le règlement général sur la protection des données (RGPD), il convient de prévoir le droit de s'opposer non seulement à l'examen mais aussi à l'utilisation des données après le prélèvement.

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Il s'agit d'un cas typique où le RGPD s'applique. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement n° 1667.

La commission est saisie de l'amendement n° 516 de M. Patrick Hetzel.

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Cet amendement prévoit plusieurs modifications à la fin de l'alinéa 3.

L'expression juridique « par tout moyen » permet tout d'abord de clarifier le texte et nous semble préférable à « sans forme ».

Il importe aussi de préciser une durée après laquelle le responsable de la recherche peut estimer que la personne ne s'est pas opposée. Dans le domaine de la protection des données, on le sait – M. Bazin y faisait référence –, la CNIL préconise un mois pour laisser à la personne la possibilité d'exprimer son opposition.

Enfin, le mot « intervention » peut être sujet à plusieurs interprétations. Si le simple fait de conserver l'échantillon est une intervention, le droit d'opposition est réduit à néant. Il est donc préférable de se référer à « l'examen prévu ».

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L'expression « sans forme » me posant également problème, je demanderai l'avis de la ministre.

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Il s'agit ici de réutiliser des éléments qui ont été prélevés à d'autres fins, alors que le délai entre le prélèvement et son utilisation peut être long.

Nous avons voulu prévoir la façon dont la personne est informée du programme de recherche. Celle-ci peut faire valoir son droit d'opposition à tout moment. Il n'est donc pas souhaitable de prévoir un délai au-delà duquel elle ne pourrait plus retirer son consentement, alors que la recherche n'aurait pas débuté.

S'agissant de remplacer « sans forme » par « par tout moyen », je fais confiance aux juristes qui ont rédigé l'article. La rédaction actuelle me semble correcte car les deux expressions sont de sens équivalent.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission rejette l'amendement n° 516.

La commission examine l'amendement n° 973 de M. Thibault Bazin.

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Cet amendement de repli vise à ajouter le délai d'un mois préconisé par la CNIL.

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La mention d'un tel délai ressort du décret d'application. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement n° 973.

La commission examine l'amendement n° 972 de M. Thibault Bazin.

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La notion d'intervention, évoquée lors des auditions, peut en effet être interprétée comme l'intervention pour la conservation du prélèvement. L'amendement vise donc, à l'alinéa 3, à substituer aux mots « tant qu'il n'y a pas eu d' » les mots « avant chaque ».

Je proposerai d'autres rédactions dans les amendements suivants afin de clarifier ce que l'on considère comme une intervention et à partir de quand court le consentement.

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La CNIL, qui aura naturellement un droit de regard sur le décret, lorsqu'il aura été rédigé, interviendra sur sa rédaction. Je ne vois donc pas l'intérêt de modifier la rédaction actuelle. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement n° 972.

La commission examine l'amendement n° 974 de M. Thibault Bazin.

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Je ne désespère pas qu'un de mes amendements soit adopté. (Sourires.) Celui-ci vise justement à ce qu'un décret définisse les interventions possibles. Je pense donc qu'il sera adopté.

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Ce point est satisfait par l'alinéa 11 de l'article 18. Je suis désolé de donner un nouvel avis défavorable.

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Mais le décret mentionné ne porte pas sur les mêmes éléments !

La commission rejette l'amendement n° 974.

La commission adopte l'amendement rédactionnel n° 2213 du rapporteur.

La commission est saisie des amendements identiques n° 2227 du rapporteur et n° 517 de M. Patrick Hetzel.

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À la différence du médecin, le responsable du programme de recherche ne détient pas l'identité du patient. Il s'agit souvent d'un scientifique, un chercheur, qui n'est pas médecin.

Il ne peut donc pas procéder à l'information du patient lors de la découverte d'une information médicale le concernant. En revanche, comme le prévoit déjà le texte, il lui incombe de prévenir le médecin détenteur de l'identité.

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Je m'appuie sur les excellents arguments développés par le rapporteur pour défendre l'amendement n° 517.

La commission adopte les amendements n° 2227 et n° 517.

La commission examine l'amendement n° 975 de M. Thibault Bazin.

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L'amendement vise à compléter l'alinéa 6 par les mots « et des risques qui lui sont associés ».

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission rejette l'amendement n° 975.

La commission examine l'amendement n° 1394 de Mme Agnès Thill.

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Cet amendement vise à insérer après le mot « mineur » les mots « de moins de 13 ans », afin de donner un droit consultatif au mineur entre 13 et 18 ans dans le cadre d'un programme de recherche de ses caractéristiques génétiques.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission rejette l'amendement n° 1394.

La commission est saisie de l'amendement n° 583 de Mme Annie Genevard.

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Compte tenu des explications données hier, je suis conduit à retirer l'amendement.

L'amendement n° 583 est retiré.

La commission est saisie de l'amendement n° 518 de M. Patrick Hetzel.

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Il s'agit d'apporter une précision : des « moyens raisonnables » doivent être mis en place pour retrouver une personne.

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Ces précisions ne me semblent pas utiles en tant que l'alinéa 9 prévoit qu'il appartient aux comités de protection des personnes (CPP) d'évaluer les éléments justifiant de la possibilité de procéder à l'information.

La commission rejette l'amendement n° 518.

La commission examine l'amendement n° 1004 de M. Thibault Bazin.

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Je ne désespère pas et continue de vous faire des propositions, notamment celle-ci, qui reprend une préconisation du CCNE.

Il s'agit d'ajouter à l'alinéa 9, après le mot « décédée » les mots «, sauf si un refus a été exprimé de son vivant ».

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission rejette l'amendement n° 1004.

La commission examine l'amendement n° 519 de M. Patrick Hetzel.

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Cet amendement a pour objectif de faire en sorte que le décret veille aussi « à l'utilisation de leurs échantillons et au traitement de leurs données à caractère personnel associé ». Il renforce donc la protection des individus.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission rejette l'amendement n° 519.

La commission est saisie de l'amendement n° 1670 de M. Thibault Bazin.

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Je propose que la CNIL soit saisie pour élaborer le décret, qui revêt une grande importance en ce qui concerne les données personnelles.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission rejette l'amendement n° 1670.

La commission examine l'amendement n° 1395 de Mme Agnès Thill.

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Il s'agit de supprimer les mots « ou en assurant la promotion » à la fin de l'alinéa 14. Il paraît en effet nécessaire d'exclure les organismes qui feraient uniquement la promotion de programmes de recherche, notamment les agences publicitaires, qui n'ont pas de lien avec des activités de recherche proprement dites.

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Vous confondez « promotion » et « publicité ». Dans le domaine scientifique, ces termes n'ont pas du tout la même signification. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement n° 1395.

La commission examine l'amendement n° 976 de M. Thibault Bazin.

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Même si le « programme » de recherche se veut plus large que le « projet » de recherche – c'est l'un des changements qu'opère l'article –, il doit être suffisamment explicite, tout en restant imprécis. Les chercheurs auditionnés en table ronde lors de la première semaine d'auditions ont d'ailleurs exprimé à ce sujet un questionnement éthique.

Cet amendement vise donc à assurer une meilleure information du patient en ajoutant l'alinéa suivant : « Ces activités de recherche doivent être énoncées de manière suffisamment claire avec leurs objectifs et leurs enjeux ainsi que leurs limites éventuelles, pour que le patient puisse exprimer un consentement libre et éclairé en toute connaissance de cause ». Son adoption permettra aux chercheurs de travailler en toute quiétude.

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Avis défavorable. L'amendement est satisfait par l'alinéa 11 de l'article 18.

La commission rejette l'amendement n° 976.

La commission adopte l'amendement rédactionnel n° 2219 du rapporteur.

Puis elle adopte l'article 18 modifié.

Après l'article 18

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission rejette les amendements n° 1600 et n° 1602 de M. Pierre-Alain Raphan.

Puis elle examine l'amendement n° 1112 de M. Cyrille Isaac-Sibille.

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Le présent amendement vise à faciliter l'enrichissement des bases de données de santé en promouvant un mécanisme de présomption du consentement s'il existe un intérêt public pour la santé.

Il apparaît nécessaire de trouver un juste équilibre entre une action à la fois individuelle et collective, où le patient, tout en se soignant, participe à la recherche. Deux risques sont en effet identifiables. D'une part, le nécessaire consentement, qui est de rigueur actuellement, pourrait restreindre l'accès à certaines données utiles pour la recherche médicale. À l'inverse, la perspective que le consentement d'un individu puisse être biaisé en raison d'éventuelles pressions liées à l'intérêt de la recherche de disposer de ses données suscite des craintes.

Cet amendement, qui s'appuie sur la recommandation du rapport Touraine, vise donc à passer d'un consentement explicite à un droit d'opposition à la collecte et à l'utilisation des données de santé. Ce même mécanisme a été mis en oeuvre dans le cadre de la stratégie « Ma santé 2022 », avec l'ouverture automatique du dossier médical partagé.

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Avis défavorable. L'amendement est satisfait par le droit en vigueur.

La commission rejette l'amendement n° 1112.

La réunion, suspendue à dix-huit heures cinquante-cinq, est reprise à dix-neuf heures.

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Nous abordons l'examen du titre V du projet de loi, dont M. Jean-François Eliaou est le rapporteur.

Titre V Poursuivre l'amélioration de la qualité et de la sécurité des pratiques du domaine bioéthique

CHAPITRE PREMIER Renforcer la qualité et la sécurité des pratiques

Article 19 : Rénovation du régime du diagnostic prénatal permettant de reconnaître la médecine foetale et de renforcer l'information de la femme enceinte et du couple et prévoyant des recommandations de bonnes pratiques

La commission examine l'amendement n° 2254 du rapporteur.

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Cet amendement propose une nouvelle définition de la médecine foetale. Jusqu'à présent, il s'agissait de diagnostic ; nous préférons une définition plus large et plus précise : « La médecine foetale s'entend des pratiques médicales, y compris cliniques, biologiques et d'imagerie, ayant pour but d'assurer, chez l'embryon ou le foetus, le dépistage, le diagnostic, l'évaluation pronostique et, lorsque cela est possible, les soins obstétricaux et chirurgicaux d'une affection d'une particulière gravité chez l'embryon ou le foetus. »

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Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

En rénovant la définition du diagnostic prénatal, nous avons voulu rester au plus près de la définition actuelle, tout en la modifiant pour la rééquilibrer avec le volet prise en charge et soins. Vous considérez que le but du diagnostic prénatal est le dépistage, or nous ne sommes pas en situation de dépistage : si c'était le cas, ce serait de l'eugénisme.

La femme enceinte est informée de la possibilité de recourir à des examens permettant d'évaluer le risque que l'embryon ou le foetus présente une affection susceptible de modifier le déroulement ou le suivi de la grossesse. Si elle le souhaite, elle demande des examens, mais il ne s'agit ni d'un dépistage, ni même d'une proposition systématique du médecin. Nous souhaitons garder cet équilibre. Voilà pourquoi nous préférerions que vous retiriez votre amendement.

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Proposez-vous une nouvelle rédaction ou bien conservez-vous cette définition en l'état ?

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Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

Nous ne souhaitons pas modifier le projet de loi : nous préférons le mot « détecter » à celui de « dépistage ».

L'amendement n° 2254 est retiré.

La commission examine les amendements identiques n° 110 de M. Xavier Breton, n° 299 de M. Patrick Hetzel et n° 823 de M. Thibault Bazin.

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Aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne. Nous proposons donc qu'une information soit donnée tout au long des différentes étapes du dépistage prénatal, afin que la femme enceinte y consente en toute connaissance de cause.

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Votre intention est doublement satisfaite. Les principes généraux du consentement libre et éclairé figurent déjà à l'article L. 1110-4 du code de la santé publique. En outre, le II de l'article L. 2131-1, relatif au diagnostic prénatal, dispose que la femme enceinte reçoit « une information loyale, claire et adaptée à sa situation. » Avis défavorable.

La commission rejette les amendements n° 110, n° 299 et n° 823.

Puis elle examine, en discussion commune, l'amendement n° 2214 du rapporteur et l'amendement n° 950 de M. Thibault Bazin.

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À la suite d'échanges avec les praticiens recevant des femmes enceintes, je me demande pourquoi obliger le prescripteur, médecin ou sage-femme, à communiquer les résultats des examens au deuxième membre du couple. Dans le droit actuel, la femme enceinte décide si l'autre membre de son couple doit également être informé. L'alinéa 7 lui ferait perdre ce droit, ce qui serait étonnant au regard des droits accordés à l'article 1er – vous voyez à quoi je fais référence.

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La rédaction actuelle est convenable dans la mesure où il s'agit d'un projet commun. Si la femme enceinte est au coeur de la décision, il est important que le couple soit informé. À ce stade, c'est l'information qui compte, évidemment pour la femme enceinte mais aussi, le cas échéant, pour l'autre membre du couple ; cela sera différent pour les étapes suivantes.

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Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

Je comprends le souci de cohérence de M. Bazin. Jusqu'où aller dans l'information des couples ? Cela mérite que l'on en discute et, en y réfléchissant bien, je suis assez favorable à l'amendement de M. Bazin.

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Dans le parcours d'une femme enceinte, où les rendez-vous médicaux peuvent être assez nombreux, s'il faut que les deux membres soient présents à chaque fois qu'une information doit être communiquée, cela compliquerait clairement le parcours. Par ailleurs, les médecins qui suivent les femmes enceintes sont très interrogatifs sur cette obligation d'informer le deuxième membre du couple : cela serait vraiment problématique. C'est pourquoi j'insiste pour que l'on adopte l'amendement n° 950.

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L'article 19 prévoit plusieurs étapes relatives à l'annonce et à la prise en charge. Les professionnels que nous avons interrogés nous disent que cela peut poser des problèmes dans la prise en charge, lorsque des couples sont en difficulté et que le conjoint est absent au moment de prendre une décision. Nous pouvons discuter d'une nouvelle rédaction consensuelle en vue de la séance, mais il est normal que l'autre membre du couple soit informé au moment de l'annonce. S'il ne l'est pas, il pourra, dans la suite du processus, ne jamais être là et mettre en difficulté la prise en charge par les médecins. S'il y a un souci, il faut l'annoncer au couple ; ensuite, les choses seront un peu différentes parce que la femme enceinte est au centre du processus.

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Je suis d'accord avec la liberté laissée à la femme, mais peut-être cela peut-il se faire dans le même temps : une fois l'annonce faite à la femme, le médecin ou la sage-femme lui demande si elle veut bien que l'on fasse entrer son compagnon ou sa compagne pour l'en informer. C'est à la femme enceinte de décider de partager ou non l'information.

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Je souhaite que l'on réfléchisse à la cohérence de l'ensemble. Lors des débats précédents, nous avons proposé que le conjoint du donneur soit consentant en cas de don de gamètes. Cela a été refusé car il s'agit du droit de l'individu à disposer de son propre corps. Ce que vous proposez relève d'une logique différente, il faut en avoir conscience. Aucune solution n'est parfaite mais je tiens à vous alerter. Si l'on se replace sur le terrain juridique, vous avez une vision très romaine des choses car cela revient à considérer que le mari doit absolument être informé : c'est très différent de ce que vous avez défendu par ailleurs. Le sujet est délicat et la question de la cohérence est posée.

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Je retire mon amendement et vous propose de revoir la rédaction pour la séance afin de prendre en compte les différentes propositions qui ont été faites.

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Je maintiens mon amendement. Vous pourrez le corriger en séance. Il est en effet très important car il vise à ne pas enlever des droits aux femmes enceintes et à simplifier leur parcours.

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Ces deux amendements sont complémentaires car ils ont tous deux pour objectif de laisser la femme décider seule, et si elle le souhaite, d'inclure dans cette démarche son ou sa partenaire. Cela est cohérent avec l'esprit de ce projet de loi, qui vise à donner plus de liberté aux femmes. Vous visez deux alinéas différents parce que cela concerne deux moments différents du parcours médical. Je soutiens donc ces deux amendements.

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Je suis très partagée : si je comprends la défense du droit des femmes, nous sommes aussi en train de défendre la notion de projet parental partagé. Il est bon que chacun assume sa part de responsabilité : la femme ne doit pas être la seule destinataire des nouvelles qui doivent être annoncées, qu'elles soient bonnes ou non. Lorsqu'il s'agit d'un projet de couple, il est bien que les deux membres du couple assument cette charge mentale et émotionnelle.

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Bravo, cher collègue Bazin : vous êtes le pivot de la majorité avec cet amendement ! (Sourires.) Je pense que celui-ci est particulièrement bienvenu : laisser à la femme la capacité de choisir lui donne plus de liberté dans la conduite de sa grossesse. Je comprends la logique du projet parental partagé mais il n'est absolument pas question, avec cette rédaction, d'exclure l'autre membre du couple du processus. Je soutiens donc cet amendement.

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Je ne suis pas du tout d'accord car cela ne correspond pas du tout à ce qui se passe dans les cabinets. Quand une femme enceinte vient consulter avec son compagnon, le médecin ne demande pas à celui-ci de rester dans la salle d'attente parce que sa femme ne serait pas d'accord pour lui donner l'information. Cette situation n'est pas souhaitable ; elle est même absurde : dès lors qu'une femme vient accompagnée pour son diagnostic prénatal, cet amendement obligerait le médecin à demander au conjoint de rester dans la salle d'attente si la femme ne souhaite pas lui donner l'information. Cela serait de plus inutile : comment la femme accueille-t-elle l'information, comment réagit-elle immédiatement si son compagnon veut absolument un garçon et qu'elle découvre que c'est une fille ? Et encore, il n'est pas obligatoire de révéler le sexe, mais cela peut être bien plus grave : si l'annonce concerne des affections nécessitant des décisions thérapeutiques importantes, il ne me paraît pas du tout naturel que la femme fasse dire à son compagnon présent qu'elle ne veut pas qu'il soit informé. C'est une fausse liberté, qui aurait des effets néfastes sur le projet parental.

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Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

La difficulté, c'est que nous cherchons à couvrir par la loi des situations qui sont extrêmement diverses. Or cela est différent du don de gamètes, qui est individuel. La grossesse implique une tierce personne et concerne les deux membres du couple. On peut comprendre la nécessité d'informer les deux que la grossesse se déroule dans des conditions compliquées et qu'il y a un problème. Toutefois, nous connaissons des situations dans lesquelles les femmes sont très seules pendant leur grossesse, le mari n'est pas là, parfois même il pourrait prendre des décisions très différentes concernant une interruption médicale de grossesse : c'est le problème fondamental.

Faut-il, pour une interruption médicale de grossesse, que la décision de l'un prime sur celle de l'autre ? L'un doit-il empêcher l'autre de faire une IMG ? Tel est le fond du problème. Une femme informée d'une anomalie pendant la grossesse et désirant recourir à une IMG ne souhaitera peut-être pas que cette information soit partagée si elle sait que son mari s'y opposera formellement. Nous devons trouver un modus vivendi permettant à l'équipe médicale d'apprécier les différents cas de figure, mais il ne s'agit certainement pas de faire sortir le mari pendant la consultation, ni d'imposer systématiquement la présence du mari. Je vous propose d'y retravailler en vue de la séance et vous demande de bien vouloir retirer ces amendements.

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Quand on envisage de modifier la loi, il est toujours intéressant de voir quelles sont les dispositions en vigueur. Selon l'article L. 2131-1, « Toute femme enceinte reçoit, lors d'une consultation médicale, une information loyale, claire et adaptée (…) » Pourquoi modifier cet article en créant une communication automatique à l'autre membre du couple ? Pourquoi réduire les droits de la femme enceinte ? Je maintiens mon amendement et j'espère qu'il sera adopté mais, si ce n'est pas le cas, je suis d'accord pour travailler à une version commune préservant les droits de la femme enceinte.

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Selon l'article L. 1110-4 du code de la santé publique, « En cas de diagnostic ou de pronostic grave, le secret médical ne s'oppose pas à ce que la famille, les proches de la personne malade ou la personne de confiance (…) reçoivent les informations nécessaires destinées à leur permettre d'apporter un soutien direct à celle-ci, sauf opposition de sa part. » Tout est résumé dans cet article : la disposition envisagée réduira les droits définis dans cet article du code de la santé publique.

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Systématiser l'information à l'autre membre du couple pose problème car celui-ci peut être temporairement injoignable. Que fait-on dans ce cas ? Cela empêcherait-il de communiquer l'information à la femme enceinte ?

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Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

Monsieur Hammouche, vous évoquez la pathologie d'une personne protégée par le secret médical : elle n'est pas obligée de la révéler à l'autre. Mais en l'occurrence, il s'agit de la pathologie d'un foetus : c'est donc plus compliqué d'un point de vue déontologique car le foetus est issu de deux personnes. Je pense en fait qu'il ne faut pas toucher à la loi actuelle. Je suis donc favorable à l'adoption de l'amendement de M. Bazin.

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J'insiste sur le fait que nous sommes au moment de l'annonce d'un problème. S'il n'y a pas une information complète du couple, nous risquons de rencontrer des soucis de non-présence du conjoint dans la suite du processus. Je précise en outre à Mme Bergé que nous en sommes à l'alinéa portant sur la communication des résultats.

Cela étant, je retire l'amendement n° 2214. Il faut une rédaction concertée pour la séance qui tendra à satisfaire toutes les possibilités générales.

L'amendement n° 2214 est retiré.

La commission adopte l'amendement n° 950.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements n° 2430 du rapporteur et n° 951 de M. Thibault Bazin.

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L'amendement n° 2430 porte sur l'alinéa 8. Il vise à établir, dans le projet de loi, la pratique actuelle de laisser la femme enceinte choisir si l'autre membre de son couple doit également être informé et pris en charge par le médecin. Il permet aussi de ne pas imposer au corps médical l'obligation de transmission de l'information au partenaire de la femme enceinte. Nous sommes donc plus loin dans le processus.

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Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

Je suis favorable à l'amendement de M. Eliaou.

La commission adopte l'amendement n° 2430.

En conséquence, l'amendement n° 951 tombe.

La commission en vient à l'examen, en discussion commune, des amendements n° 297 de M. Patrick Hetzel et n° 824 de M. Thibault Bazin.

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Avis défavorable car ces amendements, qui visent à remplacer le mot « suspectée » par le mot « recherchée », ne correspondent pas à la réalité : dans le processus de diagnostic, on suspecte d'abord et on recherche ensuite.

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L'amendement n° 824 ne propose pas le mot « recherchée » mais le mot « présumée » : je trouve cela plus respectueux.

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Je préfère également « suspectée » à « présumée ».

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Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

C'est vraiment le terme médical, qui traite de « suspicion de pathologie ».

Les amendements n° 297 et n° 824 sont retirés.

La commission examine ensuite, en discussion commune, l'amendement n° 825 de M. Thibault Bazin ainsi que les amendements identiques n° 112 de M. Xavier Breton et n° 298 de M. Patrick Hetzel.

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Avant de prendre quelque décision que ce soit, la femme enceinte doit pouvoir être conseillée par le médecin. L'amendement n° 825 a donc pour objet de compléter la dernière phrase de l'alinéa 8 par les mots « et remise, si la personne le souhaite, par le médecin. »

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Je propose la formulation « remise par le médecin » plutôt que « proposée ».

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La documentation existante est remise à la patiente par le centre. Ce n'est pas nécessairement le médecin qui en dispose. La documentation doit donc aussi pouvoir être disponible ailleurs que chez le médecin. Pour fluidifier le processus, il ne faut pas forcément que le médecin donne de la main à la main cette documentation. Ce n'est pas d'ordre législatif ni même réglementaire : cela relève de bonnes pratiques. Il est important que la loi dispose que la personne est informée, sans entrer dans les détails. Avis défavorable.

La commission rejette successivement l'amendement n° 825 et les amendements identiques n° 112 et 298.

Puis elle examine les amendements identiques n° 171 de M. Xavier Breton, n° 359 de M. Patrick Hetzel et n° 923 de M. Thibault Bazin.

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Lorsque les femmes enceintes apprennent que le foetus est potentiellement porteur d'une maladie grave, elles sont alors confrontées à un choix extrêmement douloureux. L'amendement n° 171 vise donc à leur fournir systématiquement une liste des associations de leur département qui pourraient les aider dans ce cas de figure.

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Avis défavorable car ces amendements sont satisfaits par l'alinéa 8.

La commission rejette les amendements n° 171, n° 359 et n° 923.

Elle est ensuite saisie des amendements identiques n° 113 de M. Xavier Breton, n° 300 de M. Patrick Hetzel et n° 826 de M. Thibault Bazin.

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Avis défavorable car cela relève des bonnes pratiques, qui sont déjà prévues à l'alinéa 8.

La commission rejette les amendements n° 113, n° 300 et n° 826.

Elle adopte ensuite l'amendement rédactionnel n° 2429 du rapporteur.

Puis elle examine les amendements identiques n° 115 de M. Xavier Breton, n° 302 de M. Patrick Hetzel et n° 829 de M. Thibault Bazin

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L'alinéa 3 de l'article L. 1111-4 du code de la santé publique dispose qu'aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne. L'amendement n° 302 a pour objet d'assurer une information tout au long des différentes étapes du dépistage prénatal, afin que la femme enceinte y consente en toute connaissance de cause.

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Ces amendements sont déjà satisfaits dans le droit actuel. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements n° 115, n° 302 et n° 829.

Elle examine ensuite les amendements identiques n° 114 de M. Xavier Breton, n° 301 de M. Patrick Hetzel et n° 828 de M. Thibault Bazin

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Il est nécessaire de laisser un temps de réflexion à la femme enceinte après l'annonce des résultats.

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Cela concerne le fameux délai de réflexion d'une semaine, évoqué lors des auditions : il est préconisé en pareille situation et il serait préférable de l'inscrire dans la loi.

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Avis défavorable. Au cours de ce long processus, la femme enceinte et, le cas échéant, le couple, réfléchit. La femme voit le clinicien, l'échographiste, l'imageur et, à chaque étape, il y a une annonce. La femme peut à tout moment interrompre ce processus et dire stop ; cela existe déjà dans le droit actuel. Un délai de réflexion risquerait d'entraîner un stress supplémentaire pour la femme enceinte parce qu'elle devra réfléchir, seule ou avec son ou sa partenaire. Cela créerait de plus un risque d'infantilisation. Enfin, quel serait le point de départ de ce délai de réflexion ? Pour toutes ces raisons, et contrairement à ce qui avait été préconisé par le Conseil d'État, je suis d'accord avec la rédaction actuelle du projet de loi. J'émets donc un avis défavorable.

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J'avais proposé un amendement similaire à l'article 20. Une fois le diagnostic posé, il s'agit simplement de proposer un délai.

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Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

L'interruption médicale de grossesse est un acte médical qui se fait sous anesthésie générale. Je ne connais pas une situation où la femme va au bloc une heure après avoir reçu son diagnostic : comme pour tout acte chirurgical, la femme aura un rendez-vous quelques jours après, elle aura un bilan pré-anesthésique et elle obtiendra évidemment un délai de réflexion si elle le demande. Le délai existe donc : l'inscrire dans la loi provoquerait une souffrance. Pour les femmes, qui savent qu'elles vont subir une IMG, qui peuvent en être au sixième ou au septième mois de grossesse et dont le bébé peut déjà bouger, c'est insoutenable ! Pour en avoir été témoin, je sais que les huit jours qu'elles passent à attendre sont une torture ! Le processus est déjà très long et aucune équipe médicale ne saute sur une femme pour l'emmener au bloc opératoire. Laissons donc les choses se faire : les équipes sont capables de juger d'un doute. Supprimons ce délai dans la loi.

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Merci pour votre réponse, madame la ministre : c'est évidemment la médecin qui s'exprime. Pour ma part, j'ai été sensible à un autre argument avancé par le Conseil d'État : celui-ci s'est posé la question légitime du droit des femmes en pareille situation et a considéré que ce délai était un droit important. Comment concilier les pratiques médicales avec les droits des femmes ? Ce délai est conçu comme étant protecteur. Cette question mérite que nous l'examinions car le Conseil d'État y avait explicitement fait référence.

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Pouvez-vous nous préciser si ce délai est systématiquement supprimé ou si la femme peut demander un délai de réflexion ? Ce n'est pas très clair.

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Initialement, quand le délai a été inscrit dans la loi, cela répondait à une logique d'accompagnement de la femme, afin de lui présenter toutes les options. Mais peut-être cela a-t-il été fait en méconnaissance de l'acte, qui n'a rien à voir avec une interruption volontaire de grossesse. Il s'agit d'une interruption médicale, pour des raisons tenant à la santé de la femme ou pour toutes les raisons prévues et encadrées par la loi. Ces situations sont toujours vécues de manière dramatique. Si dans le cadre d'une IVG, ce délai permet vraiment une réflexion, le processus conduisant à l'IMG se déroule pendant de très nombreuses semaines, qui sont vécues comme une souffrance. Si, à la fin du énième entretien, on répète à la femme qu'elle a encore la possibilité de réfléchir pendant une semaine, cela revient à lui imposer de le faire. Or ce n'est pas tenable pour elle et c'est probablement inconfortable pour les médecins. Dans l'intérêt de la femme, qui ne choisit pas de subir cette souffrance, nous devons supprimer ce délai.

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Le processus est suffisamment long pour prendre conscience de ce qu'il y a à faire. La prise de conscience naît de la durée de ce parcours : ajouter un délai créerait de l'ambiguïté ou du doute là où il faut assumer et prendre ses responsabilités. Le professionnel porte également avec lui un sentiment de culpabilité : allonger le délai ajouterait une forme de culpabilité, consciente ou inconsciente.

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Ces situations sont extrêmement douloureuses et à aucun moment nous n'avons eu en tête de rallonger les souffrances. Ce n'était absolument pas notre volonté. Nous retirons donc nos amendements car ils ont été mal compris : l'objectif était d'accorder un droit à la femme, dont elle pourrait disposer si elle le souhaite, afin qu'elle ne ressente pas une pression pour se décider rapidement – nous avons eu des témoignages en ce sens. Je tenais à le préciser pour que cela ne soit pas mal compris.

Les amendements n° 114, n° 301 et n° 828 sont retirés.

La commission examine ensuite l'amendement n° 2255 du rapporteur.

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Cet amendement vise à prévoir, dans le cadre de l'AMP, un dispositif d'information du tiers donneur si les examens révèlent des caractéristiques génétiques foetales sans relation avec l'indication de l'examen, c'est-à-dire des données incidentes. Par cohérence avec l'article 9, l'information du tiers donneur ne constitue pas une obligation.

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Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

Il nous semblait que cet amendement était satisfait : l'article 19 prévoit déjà un dispositif d'information du tiers donneur. Avis de sagesse.

La commission adopte l'amendement n° 2255.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels n° 2215 et n° 2216 du rapporteur.

La commission examine l'amendement n° 812 de M. Fabien Di Filippo.

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Les recommandations existent déjà, comme je l'ai expliqué dans mon commentaire de l'article. Le législateur fixe les principes, le pouvoir exécutif exécute et prévoit les modalités d'application : ainsi s'énonce le principe de séparation des pouvoirs. J'émets donc un avis défavorable.

La commission rejette l'amendement n° 812.

Elle adopte ensuite l'amendement rédactionnel n° 2257 du rapporteur.

La commission en vient alors aux amendements identiques n° 116 de M. Xavier Breton, n° 303 de M. Patrick Hetzel et n° 830 de M. Thibault Bazin.

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Je m'inquiète qu'il soit prévu à l'alinéa 16 de l'article 19 de déterminer par arrêté sur proposition de l'Agence de la biomédecine les recommandations de bonnes pratiques relatives au diagnostic préimplantatoire (DPI). Pour ma part, je ne suis pas favorable à ce qu'on élargisse le recours à cette pratique. Insérer les mots « tel que défini à l'article L.2131-4 » permettrait de rester dans l'esprit de la loi.

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Cette précision ne me paraissant pas utile, j'émets un avis défavorable. J'ai d'ailleurs déposé voilà quelques instants un amendement rédactionnel qui allait dans ce sens et qui a été adopté.

La commission rejette les amendements n° 116, n° 303 et n° 830.

Elle est ensuite saisie de l'amendement n° 2256 du rapporteur.

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Cet amendement de précision vise à mettre en cohérence l'alinéa 16 avec le reste de l'article 19, conformément au débat que nous avons depuis plusieurs minutes sur le fait d'étendre l'information à l'autre membre du couple.

La commission adopte l'amendement n° 2256.

Elle en vient aux amendements identiques n° 117 de M. Xavier Breton, n° 304 de M. Patrick Hetzel et n° 831 de M. Thibault Bazin.

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Il ne peut être laissé à l'appréciation des seules autorités administratives la responsabilité de mettre en place de nouvelles techniques de diagnostic en population générale. Nous souhaitons que la représentation nationale y soit associée dans le cadre d'un débat public.

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Prévoir que toute nouvelle technique d'examen de biologie médicale en vue d'établir un diagnostic prénatal fasse l'objet d'une autorisation législative me paraît une mesure compliquée à mettre en oeuvre : la recherche médicale, les techniques d'exploration avancent. Imposer un visa législatif pour chaque nouveau moyen de diagnostic biologique, paraclinique validé me paraît hors de propos et non réaliste. L'avis est par conséquent défavorable.

La commission rejette les amendements n° 117, n° 304 et n° 831.

Puis elle adopte l'article 19 modifié.

Après l'article 19

La commission examine l'amendement n° 2052 de M. Thibault Bazin.

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Je propose par cet amendement que toute femme enceinte soit informée dès le début de sa grossesse de la possibilité de donner son cordon ombilical et, si elle le souhaite, de se voir transmettre la liste des vingt-huit maternités impliquées dans la collecte. Par ce simple don altruiste, une femme peut contribuer aux soins d'enfants atteints d'une maladie du sang.

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Le don est-il altruiste ou à visée autologue, c'est-à-dire pour soi-même ?

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M. Bazin a bien précisé qu'il s'agissait d'un don altruiste.

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Plusieurs précisions sur le sujet. Premièrement, les banques de sang placentaire nécessitent une prise en charge du cordon ombilical relativement complexe à mettre en oeuvre : les maternités, publiques ou privées, doivent en effet créer un environnement permettant de récupérer le sang placentaire, de le stocker et d'en disposer pour les patients qui en ont besoin. Deuxièmement, il y a une corrélation entre le nombre de cellules récupérées dans le sang placentaire et l'efficacité de ce sang pour traiter les patients, notamment dans le cadre d'une greffe de cellules souches hématopoïétiques pour le traitement de la leucémie. Troisièmement, le prélèvement nécessite une autorisation. Bref, ce que vous proposez est extrêmement généreux, mais difficilement réalisable sur le plan technique. Enfin, quatrièmement, les allogreffes de cellules souches hématopoïétiques à partir de sang de cordon ont de moins en moins d'indications. Pour toutes ces raisons, j'émets un avis défavorable.

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Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

Je suis vraiment défavorable à ce que la liste des vingt-huit maternités soit diffusée auprès de toutes les femmes enceintes qui le souhaiteraient. Ces maternités ont été choisies en raison des caractéristiques du bassin de population qu'elles drainent, pour refléter la diversité des groupes tissulaires de la population française. La technique de la greffe placentaire est utilisée lorsqu'on ne trouve pas de donneur dans le fichier compte tenu de la rareté du groupe tissulaire du malade. Orienter les femmes enceintes vers ces maternités, si c'est bien là ce que vous proposez, créerait un afflux trop important de dons de cordons.

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Il est aussi proposé d'ouvrir d'autres maternités de ce type.

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Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

Ce n'est vraiment pas souhaitable, car l'organisation actuelle fonctionne et les dons suffisent à alimenter les banques placentaires.

La commission rejette l'amendement n° 2052.

Elle est ensuite saisie de l'amendement n° 929 de M. Thibault Bazin.

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Cet amendement vise à préciser que lorsque le placenta est prélevé, sans incitation d'aucune sorte, en vue de l'éventuelle utilisation ultérieure au bénéfice de l'enfant des cellules du sang de cordon ombilical, le consentement préalable de la donneuse est requis, après qu'elle a été informée des modalités de sa conservation.

S'agissant de l'amendement précédent, son objet n'était pas de créer un afflux indésirable. Ma préoccupation était plutôt que les femmes soient informées de la possibilité de donner leur cordon, mais j'ai bien compris que ce n'était pas souhaitable. Le sont-elles dans les bassins de vie où sont situées les maternités impliquées dans la collecte ? Il m'a semblé en travaillant sur le texte que ce n'était pas le cas, mais il se peut aussi qu'il n'y en ait pas au sein de ma circonscription.

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Pour compléter les éléments de réponse déjà apportés, je préciserai que tout est organisé sous l'égide de l'Agence de la biomédecine, et que des campagnes de communication sont lancées quand les dons sont insuffisants, ce qui n'est pas le cas actuellement. À nouveau, cette collecte nécessite un encadrement. M'en étant occupé dans le cadre des fonctions que j'exerçais avant mon mandat de député, je sais qu'un afflux trop important présente deux risques : celui d'un défaut de prise en charge, et celui de la frustration des personnes qui souhaitent donner.

L'amendement n° 929 est retiré.

L'amendement n° 930 de M. Thibault Bazin est également retiré.

La commission en vient ensuite à l'examen, en discussion commune, de deux amendements n° 571 de Mme Annie Genevard et n° 2259 du rapporteur.

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Nous abordons ici un sujet un peu complexe, le DPI-HLA, c'est-à-dire le couplage de la technique du diagnostic préimplantatoire et du typage HLA des embryons, de l'anglais human leukocyte antigens pour antigènes des leucocytes humains. On l'appelle également la technique du bébé médicament.

Je présenterai dans un premier temps un amendement de suppression de l'article L.2131-4-1 du code de la santé publique. Depuis quatre ans, en effet, cette pratique n'est plus utilisée en France, et un seul centre la proposait alors, à Paris. Je peux vous dire, en outre, pour l'avoir pratiqué, qu'il s'agit d'un dispositif très complexe techniquement parlant. Dans le cadre du rapport de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) sur l'évaluation de l'application de la loi bioéthique de 2011, j'en étais donc arrivé à la conclusion qu'il fallait supprimer la pratique du DPI-HLA, notamment pour des raisons d'ordre éthique.

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Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

Le questionnement est en effet éminemment éthique. Sont concernées par cette technique des familles dont l'enfant est atteint d'une maladie génétique rarissime – l'anémie de Fanconi a une incidence inférieure à dix cas par an – et peut être sauvé par une greffe compatible d'un frère ou d'une soeur. En l'absence d'autre enfant, un dépistage préimplantatoire est réalisé au cours duquel on vérifie si certains embryons sont compatibles avec l'enfant malade. Le sang du cordon ombilical est ainsi recueilli à la naissance du deuxième enfant en vue de sauver le premier. La probabilité d'avoir un enfant non atteint de cette maladie monogénique récessive est de trois sur quatre, et la probabilité que l'embryon soit HLA compatible est d'un sur quatre : seul un embryon sur seize sera à la fois indemne et susceptible de permettre une greffe de sang de cordon ombilical. Il faut tenir compte en outre de la probabilité de réussite de la fécondation in vitro (FIV), qui est de 20 %. La probabilité de réussite du DPI-HLA est donc d'un sur quatre-vingt. Il s'agit par conséquent d'un dispositif lourd qui n'est aujourd'hui plus pratiqué en France, mais pour lequel des familles se rendent en Belgique ou en Espagne. Le nombre de cas est très faible. Pour ces maladies, on obtient avec une greffe réalisée à partir d'un donneur volontaire des résultats beaucoup moins bons qu'avec une greffe réalisée à partir du sang de cordon ombilical.

Supprimer la possibilité de réaliser cette pratique, c'est supprimer pour quelques enfants par an l'accès à une technique certes très lourde et très complexe, car plusieurs FIV sont parfois nécessaires, mais susceptible de leur sauver la vie. Savoir s'il faut ou non maintenir cette pratique dans la loi est une question difficile qui nécessite un débat parlementaire, et qui ne saurait être tranchée par une ministre ou un rapporteur.

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Je souhaiterais que le rapporteur nous éclaire un peu plus précisément sur la technique qui fait l'objet de son amendement, car l'appellation « bébé médicament » est assez inquiétante.

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Cette technique concerne les familles dont l'enfant est atteint d'une maladie génétique rare qui nécessite une allogreffe et qui n'ont pas d'autre enfant, ou pas d'enfant HLA compatible avec l'enfant malade. En l'absence de donneur ou de sang placentaire compatibles au sein des banques, en France ou dans le monde, la seule possibilité de soigner l'enfant malade est pour le couple de mettre au monde un autre enfant sain et HLA compatible. Même si ce terme peut paraître choquant, on effectue bien un tri des embryons pour implanter ceux qui sont indemnes de la tare génétique et HLA compatibles. La probabilité de réussite du processus est donc très faible.

Quelle que soit la décision qui sera prise sur le sujet, il faudra réfléchir au point suivant : à l'article L.2141-3 du code de la santé publique, il est précisé qu'un couple ne peut recourir à une nouvelle stimulation ovarienne tant que tous les embryons sains de la première série n'ont pas été transférés, même si ces embryons ne sont pas HLA compatibles. Si l'amendement de suppression de l'article L.2131-4-1 n'est pas adopté, il faudra prévoir une dérogation à l'article L.2141-3 pour la mise en oeuvre du DPI-HLA, ce cas de figure n'ayant pas été prévu. Il s'agit en effet d'un tri génétique, et non pas d'un tri qualitatif.

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Je m'interroge pour ma part sur la place de l'enfant nouvellement né dans la fratrie en cas d'échec du processus : celui-ci portera la culpabilité de n'avoir pas guéri le frère ou la soeur malade.

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Je voudrais vous rassurer, chère collègue : à mon sens, la question de la culpabilité du nouvel enfant n'est pas liée à l'assistance médicale à la procréation (AMP) et le DPI-HLA. La conception d'un second enfant est pratiquée sous la couette depuis des années par toutes les familles qui se sont retrouvées face à ce cas de conscience : avoir un autre bébé pour permettre de soigner un enfant malade grâce à une greffe de cellules souches réalisées à partir du sang de cordon ombilical. Le DPI-HLA sécurise le parcours mais ne change rien à la volonté farouche des familles concernées de sauver leur enfant. Je peux en témoigner pour les avoir suivies pendant plusieurs années.

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Je suis loin de saisir tous les enjeux que soulève ce sujet, mais je vous sais gré, madame la ministre, de souligner la nécessité de débattre au Parlement de cette question éminemment éthique. J'aurai donc, en tant que néophyte, quelques questions.

Vous avez dit que très peu de cas étaient recensés : pour ceux-ci, y a-t-il un suivi des enfants concernés, tant des malades que des soignants ? A-t-on un peu de recul sur l'évolution de la situation au sein des familles ?

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Je suis heureuse que ce débat ait lieu, mais celui-ci me rend très mal à l'aise. Je comprends bien qu'une famille puisse souhaiter tout mettre en oeuvre pour sauver son enfant, mais qu'on mette au monde un autre enfant avec cette seule visée me gêne profondément, à plus forte raison si les chances de réussite de la technique utilisée sont très minces. Je m'interroge sur le désir de parentalité pour l'enfant à naître et la façon dont celui-ci pourra se construire dans ces conditions. Nous nous sommes posé mille questions sur l'ensemble des articles de ce projet de loi à l'aune de l'intérêt de l'enfant : il y a ici deux intérêts qui entrent en conflit, celui de l'enfant à sauver et celui de l'enfant à naître conçu pour sauver le premier. Ce n'est pas parce que la pratique avait cours en dehors de tout cadre médical qu'il faudrait l'institutionnaliser, l'encourager ou à tout le moins l'accompagner par les nouvelles techniques disponibles. Personnellement, et vous constatez à quel point je suis mal à l'aise avec ce débat, il ne me paraît pas éthique d'autoriser cette technique visant à mettre au monde un enfant uniquement pour en sauver un autre.

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Si, dans ces cas de figure, les parents ont la tentation d'avoir un nouvel enfant pour soigner le premier, un diagnostic prénatal est de toute façon pratiqué compte tenu du risque de mettre au monde un enfant atteint de la tare génétique. Nous avons donc tout intérêt à autoriser le diagnostic préimplantatoire pour éviter les grossesses à répétition susceptibles de conduire à des avortements à répétition.

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Je précise qu'il y a dans ces cas une urgence vitale : il n'est pas question d'attendre plusieurs grossesses, la greffe doit être réalisée rapidement.

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Il faut tout d'abord que le parcours de la FIV, qui est douloureux pour un couple, arrive à son terme, ce qui n'a rien d'évident.

Concernant votre remarque, Madame Mauborgne, rien ne garantit que l'enfant fait sous la couette ne sera pas atteint de la tare génétique. Il n'est d'ailleurs pas recommandé aux familles concernées, qui souvent ont recours au conseil génétique, de faire un enfant de cette façon. Le bébé sous la couette n'est pas une solution.

Pour répondre à votre question, Madame Dubost, je ne dispose pas des chiffres exacts, mais l'Agence de la biomédecine publie régulièrement un rapport d'excellente facture sur le sujet, et notre collègue Jean-Louis Touraine a également publié un tel document dans le cadre de la mission d'information menée en amont de nos travaux. Compte tenu du nombre infime de cas recensés, les chiffres ne peuvent de toute façon pas être très significatifs sur le plan statistique.

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Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

Depuis neuf ans que cette technique est inscrite dans la loi, vingt-cinq couples ont été pris en charge, neuf enfants sont nés à l'issue de son application, cinq enfants étaient HLA compatibles et trois greffes ont été pratiquées. En somme, nous discutons d'une technique presque plus employée, très lourde, autorisée au cas par cas, exceptionnellement. Si le DPI-HLA est supprimé de la loi, les familles qui auront recours à cette technique en Belgique ou ailleurs ne pourront plus être remboursées.

Très peu d'enfants sont concernés. J'ai été témoin une fois de l'aboutissement du processus : l'enfant qui naît est pleinement investi, il n'est pas que l'outil de la guérison du malade, si c'est ce qui vous préoccupe, Madame Bergé. Certes, l'appellation « bébé médicament » peut correspondre à la démarche initiale, mais les familles concernées peuvent aussi tout simplement désirer un autre enfant.

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Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

Quand on a un enfant de quatre, cinq ou six ans hospitalisé en hématologie parce qu'il est atteint d'une maladie gravissime, on peut souhaiter agrandir la famille, avoir d'autres enfants. Le premier étant atteint d'une maladie génétique, un DPI est nécessairement proposé dans le cadre du conseil génétique, et une démarche d'AMP s'enclenche obligatoirement.

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Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

Interdire alors aux parents qui souhaitent simplement avoir un autre enfant de vérifier si les embryons sont compatibles pour une greffe éventuelle revient à supprimer la possibilité de recourir à cette technique. Pour la poignée de familles concernées, soit moins de cinq par an, qui de toute façon y auront recours ailleurs, c'est la double peine.

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Le sujet me paraît d'autant plus sensible au plan éthique que l'application de la technique a peu de probabilité d'aboutir.

J'aimerais revenir à la proposition du rapporteur : s'agirait-il de permettre, dans le cas où les embryons sains du couple ne seraient pas compatibles pour une greffe, d'en créer de nouveaux sans avoir à passer par une grossesse ?

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Il s'agit non pas de grossesse mais de tentative de FIV.

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Aux termes de l'article L.2141-3, on ne peut aujourd'hui fabriquer une nouvelle série d'embryons sans implantation des précédents que si les premiers présentent une anomalie qualitative, ce qui ne correspond pas au cas où, après le tri, aucun embryon ne serait à la fois sain et compatible. J'ai donc déposé un amendement de repli qui vise à prévoir dans l'article une dérogation à cette limitation pour le seul cas du DPI-HLA. En d'autres termes, on autoriserait la fabrication d'embryons jusqu'à en obtenir un qui aurait les caractéristiques recherchées.

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Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

Je comprends que le fait de fabriquer plus d'embryons que nécessaire puisse être source d'inquiétude pour certains d'entre vous, mais il s'agit de le faire pour tout au plus une dizaine de familles. En outre, le recours à cette pratique est encadré par l'Agence de la biomédecine et soumis à son conseil d'orientation. Je le répète, les familles n'ont pour ainsi dire aucune autre possibilité, les greffes réalisées avec d'autres types de donneurs ayant très peu de chance de réussir.

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Quel est donc l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements en discussion commune, madame la ministre ?

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Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

L'avis est défavorable sur l'amendement n° 571, et je m'en remets à la sagesse de la commission s'agissant de l'amendement n° 2259.

La commission rejette successivement les amendements n° 571 et n° 2259.

Elle en vient ensuite à l'amendement n° 514 de M. Patrick Hetzel.

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Dans le même esprit que celui du rapporteur, cet amendement vise à supprimer du code de la santé publique la référence au dispositif de double DPI.

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Mon amendement ayant été rejeté, je ne peux que m'en remettre à la sagesse de la commission.

La commission rejette l'amendement n° 514.

Puis elle examine l'amendement n° 1547 de M. Bruno Fuchs.

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Cet amendement vise à permettre le dépistage des embryons aneuploïdes, c'est-à-dire dont les cellules ne posséderaient pas le nombre normal de chromosomes. Parce que leur dépistage est aujourd'hui interdit, ces embryons peuvent être transférés aux femmes en parcours d'AMP et le faire échouer. Les embryons ne sont évalués qu'au moyen des embryoscopes et par les biologistes. Il s'agirait de faire évoluer la pratique, d'utiliser les nouveaux moyens techniques à notre disposition pour augmenter les chances de réussite de l'AMP et en limiter le coût psychique.

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L'avis est défavorable, car l'amendement est mal placé : il vise l'article L.2131-4-1, qui concerne le DPI-HLA, alors qu'il aurait fallu viser l'article L. 2131-4.

La commission rejette l'amendement n° 1547.

Elle se saisit ensuite de l'amendement n° 1749 de M. Jean-Louis Touraine.

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Je reviens au DPI-HLA, dont nous venons de voter le maintien dans la loi. En pratique, la technique a été très rarement utilisée ; le Conseil d'État a d'ailleurs pointé du doigt l'encadrement juridique qui en serait la cause. Il ne peut en effet y avoir de nouvelles tentatives de fécondation in vitro si tous les embryons conservés à l'issue de la première tentative n'ont pas été utilisés. Or il se peut que, parmi ceux-ci, aucun ne soit à la fois sain et HLA compatible. Il est donc nécessaire de permettre de déroger à la règle limitative en vigueur. Certes, quatre ou cinq embryons viendront s'ajouter aux 200 000 déjà conservés, mais c'est la seule façon de permettre l'aboutissement du dispositif. Comme l'a dit le rapporteur, il s'agit bien d'une dérogation pour ce seul cas spécifique.

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En supprimant le dernier alinéa de l'article L. 2141-3, vous annulez la limitation pour toute situation, sans préciser qu'une telle annulation ne vaut qu'en cas de DPI-HLA. Dans l'amendement de repli que je présenterai dans quelques instants, la dérogation est au contraire autorisée pour la seule indication dont nous avons longuement débattu. Je vous demande donc de retirer votre amendement. À défaut, l'avis sera défavorable.

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Je ne comprends pas votre objection : l'amendement vise bien le seul cas de DPI-HLA, il ne s'agit pas d'ouvrir cette possibilité à tous les couples.

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Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

Tel qu'il est rédigé, votre amendement vise à supprimer l'alinéa suivant : « Un couple dont des embryons ont été conservés ne peut bénéficier d'une nouvelle tentative de fécondation in vitro avant le transfert de ceux-ci sauf si un problème de qualité affecte ces embryons. » Vous feriez ainsi tomber complètement la restriction. C'est la raison pour laquelle nous vous demandons de retirer cet amendement. À défaut, l'avis sera défavorable.

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Monsieur le rapporteur, pourriez-vous simplement m'éclaircir sur la place de votre amendement dans la discussion ?

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L'amendement qui vient immédiatement en discussion porte sur le même article, mais tend à introduire une indication précisant que l'alinéa en cause n'est pas opposable en cas de DPI-HLA. De la sorte, cette possibilité ne serait pas ouverte à tous les couples.

L'amendement n° 1749 est retiré.

La commission en vient à l'amendement n° 2258 du rapporteur.

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Il s'agit de l'amendement de repli évoqué à l'instant.

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Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

Nous proposons de rediscuter de cette dérogation afin de sécuriser le dispositif. Dans l'attente de cette nouvelle rédaction, nous demandons le retrait de l'amendement.

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J'accepte de retirer cet amendement et d'en retravailler la rédaction avec le ministère de la santé.

L'amendement n° 2258 est retiré.

La commission examine l'amendement n° 1632 de M. Philippe Berta.

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Le diagnostic préimplantatoire a pour objet la recherche d'une anomalie génétique pouvant être responsable d'une affection grave reconnue comme incurable au moment du diagnostic ainsi que les moyens de la prévenir et de la traiter.

Le présent amendement vise, à titre expérimental et pour une durée de trois ans, à étendre le champ de ce diagnostic à la numération des autosomes, c'est-à-dire des chromosomes non sexuels, afin d'éviter tout risque de dérive discriminatoire. Cet examen appelé diagnostic préimplantatoire des aneuploïdies (DPI-A) n'implique aucun acte supplémentaire dans le cadre du DPI.

La vérification du nombre d'autosomes est centrale à plusieurs niveaux. Elle est importante tout d'abord pour le taux de réussite des fécondations in vitro, lesquelles sont déjà considérées à risque puisqu'elles font l'objet d'un DPI. Une mauvaise numération des autosomes – aneuploïdie autosomique – aboutit en effet très majoritairement à des embryons non viables et à des fausses couches. Elle permet également d'éviter les grossesses multiples, car on ne transfère pas d'embryons nécessitant une interruption de grossesse. Le nombre d'embryons congelés est en outre diminué, car seuls les embryons haploïdes sont conservés, et les embryons aneuploïdes ne sont pas implantés en cas de don. Le parcours est simplifié pour les femmes, et on réduit à la fois le taux d'échec et les dépenses de santé.

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Nous avons procédé à plusieurs auditions sur ce sujet complexe. Le DPI-A peut se justifier, car le taux de succès des FIV, qui n'est pas mauvais, pourrait néanmoins être amélioré. Au cours de la rédaction du rapport de l'OPECST, nous nous sommes interrogés sur l'opportunité de ce diagnostic et avons ouvert une porte. Au cours des auditions menées dans le cadre du projet de loi, j'ai toutefois perçu que les professionnels n'étaient pas disposés à pratiquer le DPI-A comme un soin, car la technique est encore considérée comme une activité de recherche clinique. Notre rôle n'est pas d'accéder aux demandes des professionnels, mais il est important de les entendre : or, ceux-ci souhaitent faire de la recherche clinique, notamment dans le cadre du programme hospitalier de recherche clinique (PHRC).

La technique ne me paraît pas suffisamment maîtrisée à ce jour pour être inscrite dans la loi comme examen de soin courant, même à titre expérimental. En outre, les DPI pratiqués concernent le plus souvent des femmes jeunes, qui sont moins sujettes aux aneuploïdies. Il faudrait cibler une population spécifique, ce qui n'est pas possible dans le cadre de la loi. Enfin, nous risquons d'avoir à faire face à un nombre de demandes considérables, dont certaines seraient infondées, et donc d'être débordés. Pour toutes ces raisons, j'émets un avis défavorable.

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Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

Nous sommes, là encore, au coeur des questions éthiques. Vous proposez une expérimentation, ce qui implique que l'on cherche un résultat. En réalité, vous disposez déjà de nombreux arguments pour proposer d'ores et déjà le DPI-A. Votre proposition peut donc se résumer ainsi : rechercher les aneuploïdies, c'est-à-dire essentiellement les trisomies, mais pas seulement, car elle porterait également sur celles qui provoquent des fausses couches chez des femmes chez qui l'on mène un diagnostic préimplantatoire en raison d'une maladie génétique. Tel est le sens de votre amendement.

S'agissant de la partie portant sur la recherche d'anomalies chromosomiques qui aboutirait à des fausses couches, le rapporteur l'a dit : nous n'avons aucune certitude sur celles qui provoquent réellement des fausses couches. En tout état de cause, un projet de recherche national va répondre à cette question. Même s'il existe en la matière des suspicions, la sécurité n'est pas garantie.

En recherchant des anomalies chromosomiques, on va donc découvrir des trisomies 21, mais également des trisomies 18 et des trisomies 13. L'argument est d'éviter à des familles ayant déjà un enfant souffrant d'une maladie génétique de courir un risque d'anomalie génétique supplémentaire.

C'est sur ce point que nous touchons à une question d'éthique, car nous n'avons pas besoin d'une expérimentation pour répondre à cette question : nous savons en effet que la technique est opérationnelle. Nous savons que si un DPI est en cours, il n'est pas très compliqué de mener une recherche de trisomie 21. Dans ce cas, on aboutira effectivement à un tri d'embryons. Ce tri s'effectuera en fonction du critère suivant : l'élimination d'une pathologie qui n'est pas la pathologie initialement recherchée et pour laquelle le DPI avait initialement été proposé. On va donc éliminer des embryons porteurs, notamment, de trisomie.

Le mot expérimentation ne me convient pas, car en réalité vos arguments montrent que nous avons déjà la réponse : nous savons en effet que nous sommes capables d'éliminer les embryons porteurs de la trisomie 21 en plus de la maladie génétique recherchée. Dans ce cas, le mot expérimentation signifie que l'on contourne, quelque part, la loi pour aller au-delà. En fait, vous voulez ouvrir le DPI-A.

Ce point mérite discussion, et le législateur doit faire son travail. Je ne suis d'ailleurs même pas certaine d'ailleurs qu'une telle décision puisse relever uniquement d'un gouvernement.

Nous nous trouvons en l'espèce face à des familles qui vivent des drames et qui accompagnent des enfants souffrant parfois de très graves handicaps. À l'échelon individuel, pour les équipes, pour les soignants, pour les gynécologues-obstétriciens et pour les généticiens, il est tellement simple de dire qu'on ne leur rajoutera pas ainsi le risque d'avoir un autre enfant souffrant d'une pathologie.

C'est à ce stade que je ne suis pas à l'aise, car une telle évolution signifie qu'à l'échelon collectif, on dit à la société que l'on est effectivement d'accord pour éliminer, en le sachant, un certain nombre de pathologies, essentiellement celles que l'on sait trouver le plus facilement, c'est-à-dire les trisomies. Mais, à la limite, pourquoi s'en tenir à celles-ci ? Pourquoi ne pas dire à ces parents que, dans la mesure où il existe d'autres maladies génétiques graves, on peut également procéder à d'autres recherches ? Pourquoi les laisser avoir un enfant atteint, par exemple, d'une amyotrophie spinale ? Nous allons mettre la main dans un engrenage : si on autorise le dépistage des trisomies parce qu'il est simple, qu'est-ce qui nous empêchera de subir une pression visant à aller chercher par la même occasion d'autres gènes de pathologie ?

Une telle décision est lourde à l'échelon collectif. Je suis par conséquent très mal à l'aise, même si je comprends bien entendu le drame vécu par les familles, comme l'avis des équipes qui les suivent. Mais quel message allons-nous ainsi envoyer à la population ? Aujourd'hui, la trisomie fait l'objet d'un diagnostic prénatal, ce qui signifie que ces familles bénéficieront de toute façon de la recherche de la trisomie 21 dans ce cadre. Il est vrai cependant, vous avez raison, que le processus est plus lourd car il oblige à un avortement. Elles pourront également bénéficier bientôt d'un diagnostic de trisomie 13 et de trisomie 18, puisqu'il va être inclus dans le DPN. Décider collectivement de l'ouvrir dans le cadre des examens préimplantatoires est d'une nature différente.

Je vous livre la difficulté que me pose cette proposition, qui mérite d'être discutée.

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Merci, madame la ministre, d'avoir exposé les choses avec une très grande sensibilité. En prenant connaissance de cet amendement de notre collègue Philippe Berta, j'ai en effet considéré qu'il s'agissait d'un détournement de procédure car il n'est pas nécessaire d'avoir recours à une expérimentation pour vérifier si l'on maîtrise la technique. La question de fond est bien celle du tri que l'on va opérer dans le cadre du diagnostic, et du choix du moment pour y procéder. Certes, nous sommes dans notre rôle de législateur, mais il n'est pas facile de répondre à cette difficile question au détour d'un simple amendement.

Les conséquences d'une telle proposition seront extrêmement lourdes pour la société, et la mettre en oeuvre sans étude d'impact serait assez dangereux. La sagesse voudrait que l'on ne s'engage pas aujourd'hui dans cette direction qui traduit également une vision de la société. Il faut être sensible à cet aspect. Ce changement de paradigme aura des conséquences. Mais nous n'ignorons pas non plus les problèmes qui peuvent survenir après l'implantation.

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Je souscris aux arguments de la ministre et m'oppose à cet amendement, même si je comprends que l'on puisse souhaiter son adoption lorsqu'on est confronté à certaines problématiques.

Je ne suis donc pas favorable à cette extension du DPI qui, certes, est présentée comme une expérimentation. Mais peut-on parler d'expérimentation alors que la mesure s'appliquera dans deux des quatre centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal, c'est-à-dire d'ores déjà sur 50 % des établissements hospitaliers concernés ?

Cet amendement comme d'autres qui vont dans le même sens pose une vraie question de société car on y sent la tentation d'aller plus loin dans la sélection, souvent d'ailleurs sous couvert de bons arguments. Or à quel moment dit-on stop ? À quel moment s'écarte-t-on du simple tri pour en arriver à la question, qui comporte un risque, de l'adéquation entre un enfant à naître et un projet parental ?

Ce qui me gêne, dans vos propos, madame la ministre, c'est qu'on n'est pas sûr des priorités qui seront données. Certains éléments ne sont pas probants, en l'état des connaissances. Si on ouvre la porte aux aneuploïdies, on pourra le faire pour d'autres choses, qu'on est capable de détecter, en étendant le DPI.

Il faut se garder de glisser vers ce que j'appelle de l'eugénisme – chacun peut le nommer comme il l'entend. Il faut s'arrêter là et s'opposer à cet amendement.

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Le DPI-A est une question importante. J'avais proposé un amendement qui concernait tous les cas de FIV s'étant soldées par un échec, mais il a été déclaré irrecevable au titre de l'article 40 de la Constitution. Je comprends donc que mon collègue l'ait présenté sous la forme d'une expérimentation, ce qui l'a mis à l'abri de cette épée de Damoclès.

Comme le rapporteur vient de le dire, nous nous trouvons placés, en quelque sorte, sous le contrôle des praticiens concernés par ces activités, qu'on a auditionnés en assez grand nombre, et qui s'inquiètent que nous puissions stagner ou reculer.

Aujourd'hui même, dans une tribune dans Le Monde, le professeur René Frydman et des représentants de toutes les sociétés savantes – citons la société de médecine de la reproduction, les cytogénéticiens, la société de gynécologie, la société de la fécondation in vitro, la fédération des biologistes – nous demandent, unanimement, de prendre connaissance de la réalité médicale. Permettez-moi de vous lire leurs conclusions :

« Oui, les aneuploïdies conduisent à des pertes foetales, qui représentent 50 à 60 % des fausses couches précoces. » Grâce au dispositif proposé, on pourrait donc multiplier par deux le taux de succès des fécondations in vitro, ce qui n'est pas négligeable, surtout pour ceux qui ont déjà rencontré plusieurs échecs.

« Oui, il peut être réalisé un DPI-A sans étudier les chromosomes X et Y. » On ne connaîtra donc pas le sexe, et les anomalies de ces chromosomes seront maintenues, puisqu'on n'y touchera pas. Ce ne serait donc en aucune façon de l'eugénisme, mais plutôt l'inverse, puisqu'on ne ferait qu'écarter les embryons non viables.

« Non, l'analyse des mutations – « le screening de gènes » – ne fait en aucun cas l'objet du DPI-A. »

« Oui, ce diagnostic doit être réservé à des indications médicales et ne doit pas être systématique en fécondation in vitro ni pour des couples fertiles. »

« Oui, il doit y avoir un encadrement. »

En définitive, cette proposition me paraît très raisonnable et modérée, et permettrait de résoudre des difficultés concrètes dans la pratique des fécondations in vitro.

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Sur cet amendement proposé par des sachants, je m'exprime en tant que simple citoyenne, sans expertise professionnelle, comme plusieurs de mes collègues. J'ai été, comme beaucoup d'autres membres de la commission spéciale, extrêmement sollicitée sur ce sujet, en particulier par des praticiens et des parents qui ont connu une expérience douloureuse ; ils m'ont demandé d'y prêter une attention particulière. Je voulais témoigner de leurs attentes.

Cela étant, j'entends les risques, les réticences, les enjeux, l'immense complexité du débat, qui est proprement vertigineux, l'éternel problème – qui se reposera à l'avenir – consistant à déterminer où l'on place le curseur et comment on s'assure qu'il demeurera stable alors que la science ne cesse d'évoluer.

J'ai deux interrogations. D'une part, si cette mesure était mise en place, le choix serait-il laissé aux parents ? Le positionnement du curseur, le choix éthique leur reviendrait-il ? Je m'interroge car, depuis le début du débat, on parle de « tri ». Si tel est le cas, pourquoi y a-t-il une différence aussi notable à l'échelle individuelle entre le DPN et le DPI ?

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Je ne prétends pas davantage être une spécialiste du sujet, la génétique ne faisant pas partie de ma formation de base. Ayons en tout cas à l'esprit que nous sommes de passage, que la loi bioéthique nous survivra et que nous agissons pour l'avenir. M. Philippe Berta propose de nous permettre d'évaluer le dispositif et de faire évoluer nos pratiques grâce à l'expérimentation. C'est se donner une chance de légiférer, dans cinq ans, sur le fondement de données objectives en matière de quantité, de qualité, en prenant en considération le vécu des soignants – ce qui me paraît important, à l'instar de Mme la ministre, lorsqu'une nouvelle pratique est mise en oeuvre – et celui des parents – car il faut toujours avoir à l'esprit qu'une fausse couche, c'est un grand espoir suivi d'un immense chagrin.

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Je suis placé devant un cas de conscience.

Je soutiens vos propos, madame la ministre. Pendant plus de 26 ans, j'ai été médecin de famille et j'ai soigné des trisomiques, beaucoup… Il y a trois ou quatre jours, j'ai revu une petite que j'avais suivie. Je suis très ému et je m'en excuse… Elle s'appelle Lorraine. Elle était heureuse de me voir… Elle m'a dit : « Je suis en CDI ! ».

Dans quelle société vit-on ? Où est la dignité ? Voilà mon sentiment.

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Il est très difficile d'intervenir après le témoignage que nous venons d'entendre. Je suis également très partagée et je ne suis pas très loin de revenir à ma position initiale.

Ce débat est certes très difficile mais il ne faut pas se cacher derrière le principe d'expérimentation. Nous devons débattre et trancher : ou c'est oui, ou c'est non, mais le principe d'expérimentation me paraît très compliqué. Si l'on répond par l'affirmative, il sera impossible d'imaginer un retour en arrière dans cinq ou sept ans. Une fois que la pratique du tri des embryons avant implantation aura été lancée comment expliquer ensuite à des couples que ce sera impossible pour eux parce que la loi finalement l'interdit ?

Le débat est complexe mais ne nous abritons pas derrière le principe de l'expérimentation pour ne pas prendre de décision. Si c'est oui, c'est oui. Un retour en arrière après deux ans d'expérimentation serait vraiment très difficile.

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Le DPI-A s'adresse à des familles qui ont déjà vécu des naissances compliquées, qui gèrent au quotidien la maladie d'un enfant. Est-il possible que ce diagnostic soit réalisé à l'étranger si la famille souhaite en faire un pour un deuxième ou un troisième enfant ? Dispose-t-on d'éléments pour savoir si des parents se déplacent effectivement ? Pour que l'on puisse avancer, il me semblerait important de prendre en compte leur situation, la manière dont ils agissent. Nous pourrions ainsi intégrer cette expérience car nous avons besoin de toutes ces informations pour prendre la bonne décision.

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En tant que clinicien, je sais que pas un enfant trisomique ne ressemble à un autre. Il s'agit en effet d'une anomalie polymorphe. La vie de tous ces enfants doit être respectée bien entendu mais, pour ceux qui sont à naître, la réflexion est complexe.

Aujourd'hui, que fait-on ? L'échographie et la prise de sang permettent de détecter la nuque épaisse, le fémur court, les bêta-HCG. Nous dialoguons ensuite avec les familles pour qu'elles prennent leur décision. Nous sommes engagés depuis longtemps dans une politique publique de dépistage des signes de la trisomie qui entraîne des décisions thérapeutiques importantes. Elles appartiennent d'abord aux parents mais elles sont éclairées par les médecins, leurs connaissances… et leur expérience, car ils en ont besoin, ne l'oublions pas.

J'ai fait de la radiologie et j'ai toujours tiré tous les enseignements possibles des clichés, de l'imagerie. Il faut tout chercher. En l'occurrence, nous disons qu'il ne faut pas tout regarder : une anomalie génétique spécifique est recherchée suite à la pathologie grave dont souffre un enfant ; l'embryon n'en est pas atteint mais, dans un certain nombre de cas, toujours trop nombreux, il est trisomique. Le choc est évidemment grand pour la famille et pour l'équipe soignante qui se consacre au dépistage de maladies mais qui n'a pas le droit de regarder en dehors de son cahier des charges. Je considère que nous avons le droit de regarder, d'informer, et c'est à la famille de prendre une décision qui est lourde, difficile. Le témoignage de notre collègue qui a suivi des trisomiques pendant sa carrière professionnelle est très émouvant. Il n'y a aucun systématisme, aucun eugénisme. Ce sont des décisions difficiles mais il faut pouvoir les prendre, et se donner les moyens de savoir avant de décider.

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Si cet amendement soulève un vrai problème, la formule « à titre expérimental » me gêne particulièrement. Nous sommes vendredi soir, cette question est très difficile et il me semble que l'évoquer ainsi, entre nous, qui sommes une vingtaine, c'est limiter un peu notre capacité à peser l'ensemble des enjeux.

En tant que citoyenne et députée, je considère au final que c'est aussi aux parents d'exprimer leurs choix.

Si la formule « à titre expérimental », à ce stade, me gêne, je pense que nous devons avancer ensemble sur ces questions mais, peut-être, à un autre moment.

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La présentation par M. Frydman d'une succession de FIV infructueuses pour une même femme m'a laissée mal à l'aise. Je me suis alors demandé pourquoi ne pas trier pour éviter toutes ces souffrances.

En prenant un peu de recul par rapport à ce témoignage, en dialoguant avec les collègues et en tenant compte de notre discussion en ce moment même, j'ai tendance à penser qu'il ne faut pas aller jusque-là.

Même si cela ne relève pas directement de la loi sur la bioéthique, je pense que l'on ne fait pas tout en faveur des enfants porteurs de handicap, loin s'en faut.

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Ce débat est en effet extrêmement intéressant mais je partage le sentiment de ma collègue Florence Provendier.

Même si mon point de vue a un peu varié depuis le début de notre discussion, ma conviction est arrêtée. Il n'en demeure pas moins que je suis confronté à un vrai cas de conscience lorsque je me dis que nous allons trancher dans le cadre de cette commission alors que, manifestement, les positions sont encore un peu flottantes.

Sur une question pareille, nous ne pouvons pas faire l'économie d'un débat en séance publique de manière que toutes les sensibilités soient représentées. Je sors de mon rôle mais je considère qu'il serait juste que chacun puisse s'exprimer sur un sujet pareil. Personnellement, je me sens très mal à l'aise à l'idée de devoir trancher ici, un vendredi soir, à vingt-et-une heures trente, alors que toutes les sensibilités de notre assemblée n'ont pas pu s'exprimer. Je recommande donc de différer un peu cette discussion et de la renvoyer à la séance publique.

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Je souscris également aux propos de Mme la ministre de la santé mais, bizarrement, je ne pense pas être vraiment d'accord avec MM. Bazin et Hetzel. En effet, madame la ministre, vous me semblez plutôt incertaine, comme nous le sommes, et votre discours peut laisser entendre les deux options.

Cela soulève une question sociétale, étant entendu que la société est composée d'individus et que, aujourd'hui, elle n'accepte plus une certaine fatalité. Le monde a changé !

De quoi parle-t-on ? Du handicap. Ces enfants sont bien sûr acceptés – nous parlons beaucoup d'inclusion – mais faut-il se demander si ces naissances doivent être évitées ? Je rappelle que, dans leur majorité, les handicaps ne sont pas de naissance. Nous menons certes de nombreuses actions de prévention des risques, sur la route, etc., mais comment se comporter vis-à-vis du handicap ? Nous devons savoir quelle société nous voulons. En 2019, quelle société va-t-on construire à cet égard ?

On fait déjà une sélection pour la trisomie 21. Vous dites que l'on va trier mais l'exemple de M. Martin était très éclairant. Le parcours de la PMA est long et douloureux et s'il se termine par une interruption médicale de grossesse (IMG), il l'est tout autant.

Un dernier mot : vous avez tous évoqué un curseur mais je crois que celui-ci, c'est la loi bioéthique.

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Je ne reviendrai pas sur toutes les dimensions de ce problème. En l'occurrence, nous devons faire des allers-retours avec notre conscience, notre morale, notre éthique, notre pratique. Ce débat est à la fois riche émotionnellement et en termes de perspective.

Un pays comme le Danemark est chef de file en matière d'inclusion sociale, notamment vis-à-vis des personnes en situation de handicap, or, le DPI s'y pratique à 100 %. Il convient donc de distinguer DPI et projet d'inclusion ou d'accueil du handicap : l'un n'empêche pas l'autre.

Puisque le terme d'eugénisme a été prononcé, je tiens à dire que nul, dans cette maison, n'est eugéniste ou n'a d'intentions eugéniques, personne, dans aucun rang. Il n'y a nulle arrière-pensée, ni d'avant-garde, ni d'arrière-garde, motivée par des considérations eugénistes. Simplement, un certain nombre de procédés sont possibles et nous les avons à disposition.

Toutes les avancées scientifiques, toute notre morale, toute notre éthique font que l'on ne peut s'en remettre au sort et se voir ainsi réduit à un éventuel « mauvais sort ». Nous sommes dans un processus de désacralisation et c'est ainsi que nous avançons, avec les données de la science et de la conscience.

Nous devons cheminer munis d'un certain nombre de boussoles et de repères cardinaux, particulièrement sur ce point singulier de la loi.

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Je souhaite repositionner le débat un peu plus techniquement et prosaïquement, ce dont je vous prie de m'excuser.

Le DPI revient bien à sélectionner des embryons : on cherche un embryon qui ne soit pas malade pour le réimplanter dans le ventre de sa mère. J'ai l'impression que l'on feint d'ignorer que, depuis décembre 2018, un DPNI, un dépistage prénatal non-invasif, a été introduit – il suppose bien entendu un consentement, nul ne forçant quiconque à quoi que ce soit dans notre pays. Chaque femme peut ainsi, en donnant trois ou quatre millilitres de sang au début de sa grossesse, procéder au dépistage d'une trisomie et, si elle, le désire, se voir proposer une IVG.

Des collègues ont vécu à Strasbourg, il n'y a pas très longtemps, une situation où l'on a dit à la mère que, super ! un embryon sélectionné ne portait pas la mutation génique de la mucoviscidose mais que, désolé ! il était trisomique. Imaginez-vous un peu ? Nous nous retrouverons dans des cursus de FIV avec DPI, puis, DPNI et IVG ! Je ne vois pas bien l'intérêt. J'ai du mal à saisir quelle femme les supportera.

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Finalement, si je puis me permettre, nos débats sur la PMA étaient beaucoup plus simples ! Sans doute pointaient-ils moins les tensions entre ce qui est possible et ce qui est souhaitable.

Je remercie mon collègue Marc Delatte pour son témoignage, pour avoir parlé de ces enfants et de la façon dont ils peuvent grandir et vivre.

Voilà deux ans que nous parlons de société inclusive, laquelle est pour moi substantiellement liée à cette question dont je pense, contrairement à M. Berta, qu'elle est très différente de celle du DPNI et du diagnostic prénatal. Avant même l'implantation, nous déciderions donc de ce qui est ou non acceptable au sein d'une société ? Lorsque les parents seront confrontés à ce choix : « Voulez-vous un embryon sain ou un embryon qui l'est moins ? », j'imagine que la décision ira dans un sens plutôt que dans l'autre.

Cela n'a rien à voir avec le fait d'être enceinte, d'être déjà dans un processus de grossesse ! Les sensations ne sont pas les mêmes, ni la réalité. En l'occurrence, nous déciderions des maladies acceptables et de celles qui ne le sont pas ce qui, comme disait ma collègue Coralie Dubost, nous place face à deux questions fondamentales : jusqu'où va-t-on, quelles sont les maladies acceptables ou pas ? Par principe, la trisomie doit-elle être refusée ? Que dire, dès lors, à ces enfants et à ces adultes trisomiques qui vivent et grandissent ? Quel message leur envoie-t-on, ainsi qu'à leur famille ? J'en suis profondément inquiète. Quelles autres maladies devraient-elles être éliminées a priori au lieu de les combattre et d'imaginer leurs impacts sur des programmes de recherche ?

À mes yeux, c'est la question du curseur et de qui est habilité à le placer qui est donc fondamentale. En tant que législateur, je ne me sens pas habilité à le faire, ni à dire aujourd'hui, en commission, ou demain, dans l'hémicycle, quelles sont les maladies acceptables et celles qui ne le sont pas.

Serait-ce à la Haute autorité de santé de le dire ? Vous nous avez dit vous-même, madame la ministre de la santé, qu'en tant que présidente vous n'auriez pas accepté de prendre cette responsabilité-là, que vous estimiez bien trop lourde.

Qui peut donc décider ? Aujourd'hui, nous n'avons pas la réponse, elle n'est pas suffisamment étayée pour que nous puissions la donner ici. J'invite donc à faire preuve de la plus grande prudence en la matière et je pense que ce serait l'honneur de notre loi bioéthique, en 2019, de poser un interdit plutôt que d'accepter et d'encourager cette nouvelle pratique.

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Nos débats sont extrêmement intéressants et émouvants mais j'ai l'impression d'une dérive. Il me semble que ce texte vise à ce que la décision revienne aux parents, or, nous sommes en train de nous demander si nous avons le droit d'autoriser plus ou moins ou pas du tout la naissance d'enfants trisomiques.

Cette question, aujourd'hui, fait déjà l'objet d'une réglementation. D'ores et déjà, une femme enceinte a le droit de choisir si elle veut ou non accueillir et élever un enfant trisomique. Nous nous posons la question, mais des règles de droit existent.

Le choix que l'on nous propose à travers le DPI s'explique par la démarche de personnes souhaitant recourir à une fécondation. Nous n'allons pas leur donner un élément d'appréciation : c'est à eux de savoir s'ils gardent leur enfant tel qu'il est !

La trisomie n'est pas en cause puisque la possibilité de procéder à une interruption volontaire de grossesse est inscrite dans la loi.

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Avant de donner mon avis, je souhaite préalablement souligner trois points.

Tout d'abord, la rupture d'égalité : ouvrir ce dispositif impliquera forcément que des couples dont les enfants ne sont pas atteints de maladies génétiques demandent un DPI-A et il sera très difficile de le leur refuser.

L'expérimentation, ensuite : l'alinéa 2 de l'article 14 prévoit déjà la possibilité de réaliser une expérimentation de recherche clinique, comme le demandent les investigateurs cliniques – j'insiste : ils sont au plus près du soin -, qui sont soucieux d'une telle ouverture.

Enfin, nous avons évoqué le choix des parents mais, comme l'a dit Mme Aurore Bergé, imaginons-nous que des parents auxquels on va annoncer que leur embryon présente des anomalies chromosomiques autoriseront, ensuite, la réimplantation ? Je ne le crois pas.

La situation est très différente par rapport au DPNI : la famille, les parents, la femme enceinte acceptent ou refusent ensuite ; ce n'est pas la même chose que d'accepter ou de refuser que l'embryon soit implanté.

Pour toutes ces raisons, je demande à notre collègue Philippe Berta de bien vouloir retirer son amendement, sinon, je donnerai un avis défavorable.

La commission rejette l'amendement n° 1632

Elle est ensuite saisie, en discussion commune, des amendements identiques n° 172 de M. Xavier Breton, n° 360 de M. Patrick Hetzel, n° 924 de M. Thibault Bazin ainsi que de l'amendement n° 2260 du rapporteur

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Les amendements identiques relevant plutôt de l'Agence de la biomédecine que du Comité consultatif national d'éthique, l'amendement n° 2260 préconise que l'Agence réalise une étude telle que celle de 2007, qui a permis de faire un état des lieux précis et de travailler ainsi sur cette question.

Je rejoins par ailleurs les propos qui ont été tenus tout à l'heure : ce travail pourrait intégrer un état des lieux sur le DPI et le DPN.

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Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

Avis de sagesse sur l'amendement du rapporteur.

La commission rejette les amendements identiques n° 173, n° 360 et n° 924, puis, elle adopte l'amendement n° 2260

La séance est levée à vingt et une heure quinze.

Membres présents ou excusés

Réunion du vendredi 13 septembre à 14 heures 30

Présents. - M. Thibault Bazin, Mme Aurore Bergé, M. Philippe Berta, M. Pascal Brindeau, M. Guillaume Chiche, M. Marc Delatte, M. Pierre Dharréville, Mme Coralie Dubost, M. Jean-François Eliaou, Mme Agnès Firmin Le Bodo, Mme Emmanuelle Fontaine-Domeizel, M. Bruno Fuchs, M. Raphaël Gérard, M. Guillaume Gouffier-Cha, M. Brahim Hammouche, M. Patrick Hetzel, Mme Anne-Christine Lang, Mme Monique Limon, Mme Brigitte Liso, M. Didier Martin, Mme Sereine Mauborgne, Mme George Pau-Langevin, Mme Bénédicte Pételle, Mme Sylvia Pinel, Mme Florence Provendier, M. Alain Ramadier, M. Pierre-Alain Raphan, Mme Laëtitia Romeiro Dias, Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe, M. Jean-Louis Touraine, Mme Laurence Vanceunebrock-Mialon, Mme Michèle de Vaucouleurs, Mme Martine Wonner

Excusé. - M. Jacques Marilossian

Assistaient également à la réunion. - M. Yannick Favennec Becot, Mme Agnès Thill