Intervention de Olivier Véran

Réunion du jeudi 12 septembre 2019 à 14h30
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la bioéthique

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Véran :

Je souhaiterais être certain de bien comprendre le débat, car je vous assure qu'il est complexe pour le béotien que je suis. Le texte garantit le droit à la levée de l'anonymat du donneur pour les enfants à naître, à compter de l'entrée en vigueur de la loi. Auparavant, l'anonymat relevait d'un contrat tacite avec les donneurs. Or, ce droit à l'anonymat vient percuter un autre droit, celui de connaître sa filiation biologique et d'obtenir des éléments d'ordre médical, par exemple, voire l'identité du donneur pour certains enfants devenus adultes. Le régime juridique actuel interdit absolument que ces deux droits se rencontrent. Ce que nous souhaitons – c'est en tout cas l'objet de la réflexion de la rapporteure –, c'est créer au moins les conditions de leur conciliation, sans pour autant remettre en cause ni le droit des donneurs d'avoir la paix ni celui des personnes conçues grâce à un don de connaître leurs origines biologiques. Ne pourrait-on pas imaginer un dispositif en « double aveugle », comme on dit en médecine ? On appellerait l'ancien donneur pour lui demander si, dans l'hypothèse où les gamètes qu'il a donnés ont servi à concevoir un enfant, il serait d'accord pour être contacté.

Certes, ces deux droits se « percutent ». Mais force est de constater que les démarches entreprises par les enfants devenus adultes vont jusqu'à la saisine de la Cour européenne des droits de l'homme et, lorsqu'on regarde des reportages qui leur sont consacrés, on apprend que certains d'entre eux sont parvenus, en recourant au système D ou par internet, via la génétique, à retrouver leurs origines, et on éprouve forcément beaucoup de compassion pour eux. On en aurait tout autant, je suppose, pour quelqu'un qui aurait donné du sperme dans les années 1990 et qui verrait sa vie bouleversée aujourd'hui par les conséquences de ce don. Ne pourrait-on pas créer les conditions qui permettraient que, au moins dans certaines situations, ces deux droits puissent se concilier. Si vous me dites que ce n'est pas possible, soit : je vous en donnerai acte.

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