Huit ans se sont écoulés depuis le dernier projet de loi relatif à la bioéthique, huit ans de progrès médicaux, technologiques et biologiques, qui ont infusé dans notre société en élargissant le champ des possibles. Le texte, dont nous entamons l'examen aujourd'hui, vise à prendre en considération ces évolutions et à établir les bornes nécessaires pour parvenir à un équilibre entre ce que la science rend possible et ce qui est souhaitable pour notre société. Trouver un tel équilibre n'est pas chose aisée. Il nous incombe à tous de tout mettre en oeuvre pour nous en rapprocher, en nous appuyant sur les principes d'égalité et de dignité constitutifs de notre droit.
Les nombreux éclairages apportés par les témoins auditionnés et les trois ministres présentes tout au long de la discussion en commission ont été utiles et instructifs. Qu'ils en soient remerciés. Je tiens à saluer, au nom du groupe MODEM, la très grande qualité des débats qui se sont tenus au sein de la commission spéciale il y a deux semaines. Toutes les opinions, tous les doutes et tous les questionnements ont pu être entendus et discutés. Notre assemblée a su se montrer digne des enjeux soulevés par ce texte : il faut savoir le souligner. Gageons donc que les trois semaines d'examen en séance publique perpétuent l'esprit constructif qui s'est dégagé du cycle d'auditions et du travail en commission.
Ce texte est à la fois dense et multiple, en ce qu'il aborde des sujets extrêmement variés. Si l'opinion publique a cristallisé son attention sur l'extension de la PMA à toutes les femmes, bien d'autres sujets paraissent tout aussi importants, à l'instar de ceux relatifs à la conversion des progrès et des découvertes scientifiques – très rapides – dans notre droit.
Parmi les grandes avancées figurant dans ce projet de loi, certaines sont insuffisamment citées. Pour être précis, je pense aux articles devant favoriser les avancées scientifiques relatives aux cellules souches embryonnaires, tout en édictant des limites claires et un encadrement strict. Notre pays dispose de garde-fous suffisamment robustes pour permettre une recherche ambitieuse et éthique.
En partant de ce constat, également établi par notre éminent collègue Philippe Berta, je tiens ici à mettre l'accent sur les questions des dépistages néonataux et du diagnostic préimplantatoire. Le statu quo ne nous semble pas être l'option la plus pertinente en la matière, au regard des potentialités thérapeutiques et médicales – j'insiste sur ces termes – qui sont à la disposition des professionnels de santé. Comme nous l'avons fait en commission, nous défendrons des amendements dont l'objectif est de transmettre une information plus fournie, tant au corps médical qu'aux parents, sans que cela dérive vers un quelconque risque de manipulation. Je le répète, notre ambition tient en deux mots : dépister et diagnostiquer – rien de plus mais rien de moins.
Depuis le début de la législature, le groupe MODEM s'évertue à placer les enjeux de la prévention en santé au coeur du débat public. Or, si ce texte accorde une place de choix au traitement de l'infertilité, il ne propose rien, ou peu de choses, pour la prévenir. Nous savons pourtant que l'âge et de nombreux facteurs environnementaux jouent un rôle majeur dans la baisse de la fertilité, tant féminine que masculine. Les nombreuses auditions ont d'ailleurs démontré le faible degré de connaissance de nos concitoyens – notamment des plus jeunes d'entre eux – sur cet enjeu crucial.
Aussi le sujet de la prévention de l'infertilité a-t-il germé à la faveur d'amendements présentés en commission spéciale et a suscité un très large consensus. Notre groupe se félicite que l'ensemble des groupes politiques aient mis leur intelligence en commun pour parvenir à une proposition transpartisane visant à ce que l'on prenne des mesures relatives à l'information et à la sensibilisation sur l'infertilité. Merci à vous tous !
Enfin, ce texte aborde la question de l'encadrement de l'intelligence artificielle. Il faudra désormais nous habituer à légiférer sur cette technologie, qui se développe rapidement. Si elle suscite beaucoup d'espoir, tant en matière d'épidémiologie que de santé publique, elle peut toutefois se révéler dangereuse, voire intrusive. Mal utilisée, elle conduit inévitablement à des dérives, comme aux États-Unis, où les données de santé deviennent un bien commercial comme un autre, sans que l'intérêt du patient soit pris en considération. Notre pays doit se prémunir dès à présent contre ces risques, en étoffant l'arsenal des garanties offertes à nos concitoyens, afin que l'intelligence artificielle se développe dans le respect des droits de chacun.
Le groupe du Mouvement démocrate et apparentés participera pleinement aux débats qui s'ouvrent aujourd'hui. Nous aurons parfois, sans aucun doute, des avis opposés, mais nous nous devrons de rester dignes. Notre groupe n'aura qu'un seul mot d'ordre : le respect, celui de toutes les opinions, …