Intervention de Didier Guillaume

Réunion du mardi 3 septembre 2019 à 17h00
Commission d'enquête sur la situation et les pratiques de la grande distribution et de ses groupements dans leurs relations commerciales avec les fournisseurs

Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation :

Merci, monsieur le député, de vos questions très précises.

Le Gouvernement dans son ensemble, M. Bruno Le Maire et moi-même, relayés par le ministère de l'agriculture et de l'alimentation en particulier, serons très sévères dans les semaines qui viennent. Je l'ai dit publiquement, je le répète aujourd'hui car si nous voulons que les choses changent, il faut faire comprendre aux acteurs la nécessité d'évoluer. Dans un premier temps, il faut leur signifier clairement les choses pour que la situation change, et si elle ne changeait pas, peut-être faudrait-il faire appel au législateur et aller plus loin. Je n'en dis pas davantage aujourd'hui. Nous disposons des outils nécessaires, dont il faut se saisir pour un bon fonctionnement du secteur.

Votre question portant sur la viande bovine est essentielle. La filière bovine est déséquilibrée. L'amont n'a pas la force de l'aval et l'amont n'a pas la force des trois ou quatre entreprises du secteur de la viande, la plus importante occupant 75 % du secteur. Je reçois ses représentants prochainement et je me rendrai au Sommet de l'élevage à Clermont-Ferrand. Nous travaillons activement avec Interbev et son président, Dominique Langlois, comme avec le président Bruno Dufayet de la Fédération nationale bovine, avec lesquels j'entretiens les meilleurs rapports. Il est absolument nécessaire de faire évoluer la situation et qu'ils deviennent partenaires, ce qu'ils ne sont pas aujourd'hui.

L'élevage est un élément positif pour le captage du carbone, la lutte contre le changement climatique, l'entretien du paysage, la filière économique qu'il représente et l'alimentation tracée que nous demandons. Des centaines de personnes travaillent sur le sujet. Encore faut-il se mettre d'accord sur ce que nous voulons. Si le produit que fournit la filière bovine n'est pas exactement celui souhaité, s'il faut que la viande soit un peu plus persillée, par exemple, la filière est en mesure de s'adapter. Mais la contractualisation doit lui offrir une visibilité, car l'absence de visibilité conduirait à donner des coups de volant en tous sens.

La visibilité est possible. Nous l'avons évoquée à propos de l'export, nous pouvons l'évoquer au sujet du marché intérieur. Et je reviens à votre question : comment rendre les consommateurs « accrocs » à la viande française ? Tout simplement en leur disant que la viande est française. Ainsi que je l'ai indiqué en évoquant l'étiquetage, je souhaite que le consommateur sache ce qu'il achète. Je ne dis pas que la viande allemande n'est pas bonne. Tel n'est pas le sujet. Mais je sais que pour rendre les gens accrocs à la viande française, il faut que l'on sache qu'elle est française. Il ne faut pas non plus qu'elle coûte x pour cent de plus que d'autres viandes, sans quoi nous n'atteindrons pas notre objectif. Nous revenons là à l'essence même de votre commission, à savoir la répartition de la valeur.

Tout cela passe par la communication. Les filières doivent y travailler. Créé par mes prédécesseurs, notamment par M. Guillaume Garot, alors ministre de l'alimentation et de l'agroalimentaire, le logo bleu-blanc-rouge « Viandes de France », « Viande d'agneau français » marque les esprits. Bien que, je vous l'accorde, je ne me rende pas tous les jours dans les rayons de supermarché – j'ai juré de dire la vérité, toute la vérité, je vous dis la vérité ! –, il m'est arrivé de faire les courses cet été pendant mes quelques jours de vacances. Je n'ai pas pris de photos comme le Président Benoit, mais j'ai vu certaines choses. Lorsque le logo bleu-blanc-rouge est affiché sur le produit, on en est fier et on achète ! Lorsque je peux acheter des fruits de France, je suis heureux. Mais quand je vois le prix auquel le producteur vend son kilo de pêches ou d'abricots et que je le compare à celui il est vendu en grande surface ou sur les marchés, je me dis qu'il y a un dysfonctionnement et qu'il est nécessaire d'y mettre un terme.

Nous sommes confrontés à une difficulté. La PAC n'est pas seule concernée ; est également en cause le rééquilibrage social et fiscal de l'Union européenne. Les fruits et légumes produits en Espagne sont vendus moins cher sur les étals du nord de la France que les légumes issus de l'agriculture locale. Il convient par conséquent de se pencher sur le sujet.

Votre troisième question portait sur les conditions générales de vente et les pénalités de retard. Je ne peux vous répondre, il appartient à M. Le Maire et à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes de s'en préoccuper. M. Garot a évoqué l'amende assez lourde infligée à un distributeur. La DGCCRF a pour objectif d'effectuer 6 000 contrôles annuels, dont 2 000 ont d'ores et déjà été réalisés sur l'ensemble du territoire national.

J'ai bien indiqué aux industriels alimentaires et aux producteurs en amont qu'il fallait dénoncer les dysfonctionnements s'ils en constataient car c'est bien grâce à la transparence que le système fonctionnera.

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