L'article 2 porte sur la vitrification des ovocytes. Je rappelle que j'avais âprement défendu, en 2011, un texte visant à l'autoriser pour les femmes françaises, car, jusqu'alors, l'Agence de la biomédecine l'assimilait à une recherche sur l'embryon et l'interdisait. C'était donc assez compliqué à l'époque. Finalement, le recours à cette technique a été autorisé par la loi du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique, sur le fondement suivant : « Toute personne dont la prise en charge médicale est susceptible d'altérer la fertilité, ou dont la fertilité risque d'être prématurément altérée, peut bénéficier du recueil et de la conservation de ses gamètes ou de ses tissus germinaux, en vue de la réalisation ultérieure, à son bénéfice, d'une assistance médicale à la procréation, ou en vue de la préservation ou de la restauration de sa fertilité. » On voit bien qu'il y a, dans ce texte, un lien entre infertilité et bioéthique, et qu'il est question d'actes médicaux.
C'était une avancée, et nous ne comprenons pas ce que vous voulez en faire aujourd'hui, si ce n'est que vous nous livrez aux apprentis sorciers. Nous nous opposons à l'idée qu'une femme doive, avant 35 ans, choisir entre la réussite professionnelle et sa vie de famille. Jusqu'à présent, c'est la société qui s'adaptait à la grossesse des femmes, mais, avec la proposition que vous présentez, c'est l'entreprise ou la société qui programmeront les grossesses et disposeront de l'horloge biologique des femmes.
J'insiste sur un point, dans le temps très bref qui nous est imparti : le Conseil d'État lui-même a relevé que cette mesure risquait de réduire, consciemment ou non, la liberté de la femme de procréer pendant sa période de fertilité – ce qui n'est pas mineur, ajoute-t-il.
La suppression de la barrière de la pathologie permettra des pratiques d'un nouveau type. J'ai défendu âprement la possibilité pour les femmes françaises de congeler leurs ovocytes pour raison médicale, possibilité qui constituait vraiment une avancée, mais l'autorisation de la congélation des ovocytes par convenance dans notre pays aboutirait plus tard à la légalisation de la gestation pour autrui et ouvrirait ainsi la voie à la marchandisation du corps, lequel relève de notre humanité profonde. Je suis favorable à la préservation de la richesse du patrimoine mais le corps doit rester inaliénable.
On fait croire aux femmes qu'elles peuvent avoir un enfant à tout moment de leur vie. Il faut cesser de diffuser ce mensonge institutionnel, qui nuit à la fertilité des femmes et à leurs projets de grossesse. Ce mensonge est très dangereux, sauf, bien évidemment, pour le business procréatif, qui se réjouira de la mesure que vous présentez.
J'y insiste : proposer aux femmes de vitrifier leurs ovocytes par convenance, sans motif médical, c'est s'engager dans une voie très dangereuse. Soyons prudents, mes chers collègues !