Madame Genevard, vous proposez d'inscrire dans le code civil le principe d'indisponibilité du corps humain. Je vous ai indiqué en commission que ce principe n'existait pas, mais que d'autres principes l'assuraient : d'une part, le principe d'indisponibilité de l'état des personnes ; d'autre part, des principes relatifs au corps humain.
Le premier implique notamment l'impossibilité de changer son état civil de sa propre volonté. En principe, il faut une décision de l'autorité publique – un juge, le plus souvent – pour permettre la modification d'un élément de l'état civil, qu'il s'agisse du nom, du prénom, de l'état matrimonial ou du sexe.
Concernant le corps humain, comme la rapporteure l'a dit, le code civil consacre quatre principes : le droit au respect du corps humain, qui ne cesse pas avec la mort – c'est l'article 16-2 – , son inviolabilité – c'est l'article 16-1 – , son intégrité – c'est l'article 16-3, qui précise par ailleurs qu'il ne peut être porté atteinte à l'intégrité du corps humain qu'en cas de nécessité médicale, et avec le consentement de l'intéressé – et sa non-patrimonialité – c'est l'article 16-5, qui indique que « les conventions ayant pour effet de conférer une valeur patrimoniale au corps humain, à ses éléments ou à ses produits sont nulles ». J'insiste sur ce point, puisque nous reparlerons de la GPA.
En revanche, la loi ne consacre effectivement pas le principe d'indisponibilité du corps humain ; à vrai dire, je pense qu'il n'est pas souhaitable que ce soit le cas. En effet, je crois que cela entraînerait des difficultés, car, dès lors qu'il n'est pas porté atteinte aux principes fondamentaux que je viens de rappeler, le corps humain reste relativement disponible : il obéit à notre volonté, et c'est d'ailleurs une garantie individuelle pour chacun. Il pourrait en outre être dangereux de porter atteinte à cette disponibilité, qui fonde, par exemple, le droit à l'interruption volontaire de grossesse, l'IVG, c'est-à-dire celui des femmes à disposer de leur corps. Il faut donc mesurer les implications qu'aurait l'inscription d'un tel principe dans le code.
Vous avez cité, madame Genevard, une décision de la Cour de cassation datant de 1991. Celle-ci est intervenue avant les premières lois de bioéthique qui, en 1994, ont précisément consacré les principes que j'ai précédemment indiqués. Le législateur d'alors n'a pas reconnu le principe de l'indisponibilité du corps humain ; il ne l'a pas davantage fait en 2004 ; il ne l'a toujours pas fait en 2011. Aujourd'hui, la Cour de cassation n'y fait plus référence, et distingue bien, conformément à ce qui figure dans le code civil, l'indisponibilité de l'état des personnes, d'une part, et l'ensemble des principes éthiques qui s'attachent au corps humain, d'autre part. Voici les raisons pour lesquelles je ne souhaite pas que ce principe soit inscrit dans le code civil.