Intervention de Frédérique Dumas

Séance en hémicycle du mardi 8 octobre 2019 à 15h00
Questions au gouvernement — Sanctions contre l'iran

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrédérique Dumas :

En 2015, à Vienne, un accord historique a été signé avec l'Iran sur le nucléaire. Mais alors que les Iraniens en respectaient les termes, comme l'atteste l'Agence internationale de l'énergie atomique et comme M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères lui-même l'a rappelé à plusieurs reprises, Donald Trump a décidé d'en sortir en mai 2018. J'aurais donc voulu interroger M. Le Drian sur le respect par la France de cet accord dont nous prétendons ne pas être sortis.

À l'ONU, le Président de la République a affirmé que « les conditions d'une reprise rapide des négociations ont été créées », alors que, sur le fond, il est évident que les désaccords demeurent. En effet, les Américains ont décidé de revoir unilatéralement le périmètre même de l'accord en remettant en cause le programme balistique conventionnel de l'Iran et l'influence de ce pays au Moyen-Orient. Or il est évident que les Iraniens ne renonceront jamais à leur programme conventionnel. Chacun peut le comprendre : ne pas se doter de l'arme nucléaire est une chose, ne détenir aucun moyen classique de défense et de dissuasion en est une autre. Quant à l'influence de l'Iran en Syrie, au Liban, en Irak ou encore au Yémen, personne ne peut la nier. Certes, elle peut être contestée dans ses modalités et dans sa forme, mais ne soyons pas naïfs : nous proposer en échange d'un changement de position vis-à-vis de l'Iran de nous en remettre aux Américains, à l'Arabie Saoudite et aux Émirats Arabes Unis pour résoudre les problèmes dans la région, assurer notre sécurité et combattre Daech, ne peut pas être et ne sera jamais une solution.

Il nous appartient de savoir à quelles conditions nous pouvons respecter nos propres engagements. C'est une chose que la France, l'Angleterre et l'Allemagne ne puissent en respecter une partie du fait des sanctions extraterritoriales, mais c'en est une autre que notre pays ne réalise plus aucun échange avec l'Iran, y compris dans les secteurs qui, comme les médicaments, ne sont pas concernés par ces sanctions !

Que pesons-nous, il est vrai, face à la détermination d'un président américain capable, hier encore, de proposer de lâcher les combattants kurdes qui depuis des mois se battent sur le terrain et donnent leurs vies pour assurer notre sécurité et notre liberté ? La France va-t-elle au moins renoncer à tenir le même discours que Mike Pompeo, sachant que cette politique – demander le réexamen d'un accord qui était pourtant respecté avant la pression maximale soit mise sur l'Iran – mène à une véritable impasse ?

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