Intervention de Olivier Véran

Séance en hémicycle du jeudi 24 octobre 2019 à 21h30
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 — Article 28

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Véran, rapporteur général de la commission des affaires sociales :

Je compléterai ma réponse précédente, qui était déjà assez longue.

Chacun aura compris que la transparence préoccupe l'Assemblée nationale. Si l'on demande à quelqu'un « Voulez-vous la transparence ? », il serait surprenant qu'il réponde non. Toutefois, déterminer les conditions de la transparence, c'est entrer dans le sérieux et le dur du problème, dans un milieu organisé autour du droit et du secret des brevets, ainsi que du secret des affaires et des transactions.

J'ai déposé, en commission et en séance publique, un amendement qui a été retoqué par l'article 45 – comme quoi on peut être rapporteur général et se faire piéger ! Il visait à permettre à un usager du médicament de participer aux négociations entre le CEPS et l'industrie pharmaceutique, avec une voix délibérative, et non simplement consultative. Il y a là un enjeu de transparence. Il a été rejeté au motif qu'il constituait un cavalier social.

J'estime néanmoins que ce sujet est dans l'air du temps et que nous parviendrons à définir des critères, à définir comment penser la transparence dans un milieu industriel reposant en grande partie sur le secret des affaires et des brevets – ce que l'on peut parfaitement comprendre – , et où certaines données seront plus faciles à obtenir que d'autres.

Je donnerai un exemple. Lorsque nous avons appris le prix du traitement de l'hépatite C auquel vous avez fait allusion, monsieur Quatennens, j'ai convoqué à l'Assemblée nationale – j'étais alors simple député – le patron français de l'industrie du laboratoire américain ayant commercialisé le médicament. Je lui ai demandé comment comprendre que l'on exige un tel prix des pouvoirs publics, alors même que le groupe pharmaceutique qui l'employait avait racheté, par une OPA, une start-up américaine du domaine des biotech, ayant elle-même mis au point le médicament et déposé un brevet. Cette start-up prévoyait, dans des documents internes, d'en demander un prix trois fois inférieur. L'écart de prix correspondait en grande partie au surcoût induit par le rachat de cette start-up par le grand groupe.

J'étais scandalisé. J'ai menacé de faire soumettre le médicament au régime de la licence d'office. Avec mon collègue Gérard Bapt, nous avons convoqué le patron du laboratoire pour lui dire que nous ne pouvions pas continuer ainsi. La ministre de la santé d'alors, considérant elle aussi qu'une telle situation n'était pas normale, a provoqué une réunion avec ses homologues européens, afin de mettre au point une stratégie européenne permettant de faire face au problème.

En fin de compte, nous avons trouvé une parade dans le cadre du PLFSS suivant, où nous avons intégré un article spécialement destiné à encadrer l'évolution du marché si un médicament innovant emporte des conséquences financières trop importantes, en fixant un taux d'accroissement du chiffre d'affaires au-delà duquel celui-ci devait être intégralement reversé aux pouvoirs publics.

Ainsi, la question de la transparence du prix des médicaments ne nous a pas attendus, ne vous a pas attendu, cher collègue. La question est de savoir comment assurer une transparence totale dans un milieu qui, par définition, repose sur le secret des affaires.

Comment développer des indicateurs judicieux et pertinents permettant d'avancer ? Par-delà la transparence, ce qui est intéressant, ce n'est pas forcément de savoir, mais d'être capable de déterminer la formation des prix à partir des informations que nous avons obtenues. Nous pouvons travailler ensemble sur ces sujets.

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