Intervention de Naïma Moutchou

Séance en hémicycle du mardi 29 octobre 2019 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2020 — Justice

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNaïma Moutchou :

Plus que jamais, les femmes victimes de violences conjugales ont besoin de justice. Elles ont besoin que la justice les accompagne. Elles sont souvent seules et isolées : 81 % de celles qui demandent une ordonnance de protection sont en situation de grande précarité économique. Dans la moitié des cas, cette précarité est liée à l'absence d'emploi, à quoi s'ajoute un quart de travailleuses pauvres.

Ces chiffres doivent nous faire réagir. Ils signifient que ces femmes sont dans une situation de dépendance financière qui rend plus difficile le paiement des frais de justice. En tant que victimes, elles ont le courage d'être à l'initiative d'une procédure et devraient être prises en charge par un avocat capable, dans ces moments de fragilité, de les orienter et de les conseiller. En pratique, néanmoins, elles n'ont droit à cet avocat par le biais de l'aide juridictionnelle que lorsque le parquet a statué sur les suites de la procédure, c'est-à-dire des mois après le début de l'enquête, alors même qu'un individu gardé à vue, quel que soit le motif – pour violences conjugales, par exemple – bénéficie en droit d'une prise en charge dès la première minute de garde à vue.

Dans le cadre de la mission que j'ai conduite avec Philippe Gosselin sur la réforme de l'aide juridictionnelle, et dans le prolongement des travaux de Dimitri Houbron, nous proposons une mesure forte : l'aide juridictionnelle pour les femmes victimes de violences, sans condition de ressources et dès le dépôt de la plainte. Nous connaissons les obstacles constitutionnels : l'aide juridictionnelle est l'égal accès de tous à la justice et cette exception pourrait certes poser problème. En réalité, cependant, il existe déjà des catégories de publics pour lesquels la condition de ressources n'est pas exigée – je pense aux victimes d'actes de torture ou d'actes de barbarie, aux victimes d'actes de terrorisme, etc. Pour contourner l'obstacle juridique, il pourrait être proposé une aide juridictionnelle provisoire comme le font certains barreaux, avec un contrôle des ressources pendant la procédure.

Tel est l'état de nos propositions, madame la garde des sceaux. Y êtes-vous favorable ?

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