Intervention de Jean-Paul Mattei

Séance en hémicycle du mercredi 30 octobre 2019 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2020 — Gestion des finances publiques et des ressources humaines ; action et transformation publiques ; crédits non répartis ; régimes sociaux et de retraite ; remboursements et dégrèvements ; gestion du patrimoine immobilier de l'État ; pensions

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Mattei, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire :

La politique immobilière de l'État paraît désormais en mesure d'atteindre les objectifs initiaux de gouvernance que lui assignait la communication en conseil des ministres du 20 janvier 2016. Cela étant, elle est appelée à se renouveler dans le cadre de la nouvelle feuille de route, fixée par le deuxième comité de la transformation publique, qui s'est réuni le 29 octobre 2018.

Principal vecteur budgétaire de cette politique, le compte d'affectation spéciale que nous examinons ce soir est doté pour 2020 de 428 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 447 millions d'euros en crédits de paiement. Il finance plusieurs types d'opérations d'entretien en fonctionnement, en investissement ou en vue de cession, qui portent sur des biens du patrimoine immobilier de l'État ou qui figurent à son bilan. Il englobe également, jusqu'au 31 décembre 2019, les dépenses d'investissement et d'entretien du propriétaire réalisées par l'État sur les infrastructures de la Défense nationale.

Cette programmation en dépenses est gagée sur un produit de recettes d'un total estimé à 380 millions d'euros. Comparé à l'an dernier, le financement des opérations structurantes et cessions accuse, pour 2020, une baisse de 7,45 %. Seules les ressources allouées à l'action 14 relative aux gros entretiens progressent modérément.

S'agissant des recettes, une nouvelle diminution du produit des cessions immobilières – de 12,5 %, soit 280 millions d'euros, par rapport aux prévisions de 2019 – est anticipée. Dès lors, on se félicitera que le projet de loi de finances porte à 100 millions d'euros le produit des redevances domaniales. L'exécution 2018 et les premiers résultats disponibles pour 2019 démontrent qu'il s'agit d'une ressource solide. Pour autant, le dynamisme des redevances ne saurait corriger un déséquilibre en réalité structurel.

Au total, l'exercice 2020 devrait se solder par un solde déficitaire de 67 millions d'euros ; en recul par rapport aux exercices 2017 et 2018, il augure cependant d'un nouveau fonctionnement de la trésorerie du CAS, laquelle, à la fin de l'exercice 2018, approchait 702 millions d'euros. Compte tenu du rythme annuel, ce montant représente une année et demie de consommation.

À eux seuls, ces chiffres ne peuvent que renforcer les préoccupations que j'exprime depuis plusieurs années quant à la viabilité et à la précarité du financement de la politique immobilière de l'État. En effet, la dynamique intégratrice de la politique immobilière de l'État s'approfondit et emporte avec elle de nouvelles exigences. À l'instar des schémas pluriannuels de stratégie immobilière des ministères qu'il serait important de finaliser concernant les opérateurs de l'État, selon les orientations fixées par la DIE, l'examen et l'adoption des schémas directeurs régionaux progressent. Au 31 juillet 2019, quinze régions sur dix-huit avaient ainsi adressé leurs schémas à la direction de l'immobilier de l'État, en y faisant figurer des projets de rationalisation immobilière et de cessions à conduire. Les diagnostics qu'ils présentent montrent la nécessité de l'entretien du patrimoine de l'État, auquel répond le présent PLF, avec une dotation de 160 millions d'euros, qu'il sera important de maintenir dans le futur car elle constitue un facteur d'économies à moyen et long termes. Si les loyers budgétaires ont été supprimés l'an dernier, il conviendrait d'établir un mécanisme d'intéressement des services de l'État à la rationalisation des surfaces occupées.

Le CAS ne saurait procurer à lui seul les ressources financières indispensables à cette démarche. C'est pourquoi il importe de garantir la bonne mise en oeuvre des projets relevant du programme 348 « Rénovation des cités administratives et autres sites domaniaux multi-occupants », tout comme l'investissement dans les ressources informatiques mises à la disposition des acteurs de la politique immobilière de l'État.

Comme je l'ai déjà affirmé devant vous, il faut aussi sortir de l'impasse liée au fait que le financement de l'entretien du patrimoine est assis sur la cession de ses actifs. Les nouvelles perspectives de la transformation publique incitent à fiabiliser les données afin d'avoir une connaissance exacte du patrimoine de l'État et à développer des modes de valorisation locative de biens devenus inutiles, solutions alternatives intelligentes.

Les trois missions que vous avez commandées, monsieur le ministre, et dont les travaux se poursuivent, devraient en dresser un état des lieux. Mes amendements, adoptés en commission des finances, constituent un complément à ces pistes de réflexion afin notamment d'encourager la créativité contractuelle et d'inciter les services à choisir la valorisation du bien la plus pérenne. J'ai tout de même une doléance à exprimer concernant la décote : nous sommes encore en attente de la publication du décret d'application. En espérant que ce point sera résolu rapidement, j'appelle l'Assemblée à approuver les crédits proposés pour la mission.

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