Intervention de Christine Pires Beaune

Réunion du mercredi 23 octobre 2019 à 9h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristine Pires Beaune, rapporteure spéciale :

Cette mission est la plus importante en volume du budget général de l'État : les crédits ouverts s'établiront à 141 milliards d'euros en 2020, soit 33 % des recettes fiscales brutes et près de la moitié des recettes nettes. Elle enregistre une hausse de 6 milliards d'euros par rapport à la loi de finances initiale de 2019, mais un léger recul – de 2 milliards d'euros – par rapport à la prévision révisée. Depuis le début des années 2000, les remboursements et dégrèvements augmentent à un rythme régulier, de 4,6 % par an en moyenne. Ils s'établissaient à 61 milliards d'euros en 2001 ; depuis lors, ils ont plus que doublé.

La mission comporte deux programmes. S'agissant du premier, le programme 200, relatif aux impôts d'État, les dépenses sont en recul de 5,8 milliards d'euros par rapport à la prévision révisée. Trois facteurs permettent d'expliquer cette évolution.

Premièrement, la mise en oeuvre du prélèvement à la source conduira à une hausse de la dépense de 3 milliards d'euros environ, du fait notamment des impacts conjugués de la restitution des trop-perçus – plus 9,6 milliards – et de la non-reconduction du crédit d'impôt de modernisation du recouvrement (CIMR) – moins 6,1 milliards. L'acompte de crédits et de réductions d'impôts sera reconduit en 2020, pour un montant de 5,7 milliards d'euros, soit 200 millions de plus que l'année dernière.

Deuxièmement, la suppression du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) au 1er janvier 2019 conduira à un important dégonflement de la dépense, jusqu'à l'extinction complète des créances. En 2020, cette évolution devrait expliquer pour près de 10 milliards d'euros de baisse.

Troisièmement, les dépenses associées aux contentieux fiscaux devraient également connaître un léger recul, mais cette remarque doit être nuancée à deux égards. D'une part, concernant les contentieux individuels, la baisse attendue de ceux portant sur l'impôt sur les sociétés (IS) ne constituera qu'un retour à la normale. Comme je l'avais relevé à l'occasion des deux derniers rapports de contrôle de l'exécution, les décharges exceptionnelles d'IS se sont établies à des niveaux très élevés en 2017 – 1,2 milliard – et en 2018 – 2 milliards –, et pourraient atteindre 3 milliards en 2019 ; elles devraient retrouver des niveaux plus bas et acceptables en 2020. D'autre part, concernant les contentieux de série, la prévision pour 2020 s'établit à un niveau qui reste élevé : 2,3 milliards d'euros, dont 1,1 milliard d'euros au titre du seul contentieux Accor. Les risques associés aux contentieux fiscaux sont donc toujours très élevés.

À cet égard, la mission d'information sur la gestion du risque budgétaire associé aux contentieux fiscaux et non fiscaux de l'État, présidée par notre collègue Véronique Louwagie, dont le rapporteur était Romain Grau, et dont je faisais partie, avait formulé plusieurs propositions à l'automne dernier. Deux d'entre elles étaient destinées à améliorer l'information du Parlement et de la commission des finances sur ces enjeux. Madame Louwagie a déposé deux amendements traduisant les propositions du rapport. Nous les examinerons tout à l'heure, et j'émettrai un avis favorable.

S'agissant d'une question proche, celle des transactions fiscales, je vous proposerai, pour ma part, un amendement faisant suite aux travaux réalisés lors du printemps de l'évaluation. Nous disposons d'informations intéressantes sur la manière dont l'administration fiscale utilise les outils à sa disposition pour minorer les impositions dues par les contribuables, mais ces informations gagneraient à être complétées. Je vous proposerai donc d'étendre le champ du rapport prévu à l'article L. 251 A du livre des procédures fiscales (LPF), portant sur les remises et transactions en matière fiscale, à d'autres éléments tels que les règlements d'ensemble et les conventions judiciaires d'intérêt public conclues en matière fiscale.

S'agissant du second programme de la mission, le programme 201, relatif aux impôts locaux, le budget 2020 est marqué par la poursuite de la montée en charge du dégrèvement de taxe d'habitation pour 80 % des ménages, en hausse de près de 7 milliards d'euros. Cela portera son coût total à 14 milliards d'euros. J'ai rappelé à de nombreuses reprises ma position concernant la réforme de la taxe d'habitation : l'intention de redonner du pouvoir d'achat est certes louable, mais le faire par la suppression de la taxe d'habitation est, à mon sens, une erreur. Cette mesure aura pour conséquence d'affaiblir massivement le lien entre le citoyen et l'impôt et de déstabiliser les finances de nombreuses collectivités. De plus, les mesures du PLF pour 2020 destinées à compenser cette suppression ne sont pas satisfaisantes.

Enfin, les montants de dégrèvements contentieux et gracieux portant sur la taxe foncière resteront très élevés en 2020 – plus de 1,2 milliard d'euros –, du fait du nombre significatif de transactions immobilières réalisées au cours des dernières années. Les services de la publicité foncière n'étant toujours pas en mesure de régulariser le flux, je vous proposerai d'adopter un amendement demandant un rapport afin d'appeler l'attention du Gouvernement sur le sujet.

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