Présidence de
M. Éric Woerth,
Président
puis de
Mme Olivia Gregoire,
Vice-présidente
La commission poursuit l'examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2020 (n° 2272
Elle commence par examiner les crédits des missions Gestion des finances publiques et des ressources humaines et Action et transformation publiques.
L'automne dernier, lors de la présentation de mon rapport spécial, je relevai que l'année 2019 serait une année charnière, non seulement pour les administrations du ministère de l'action et des comptes publics, la Direction générale des finances publiques (DGFiP) et la douane, mais aussi pour l'ensemble des administrations concernées par le vaste chantier de la transformation de l'action publique lancé par le Gouvernement et la majorité parlementaire.
Pour les administrations de Bercy, ces dix derniers mois ont été l'occasion de faire des choix structurants, courageux, ambitieux, portant sur l'étendue et le périmètre de leurs missions, sur les outils nécessaires à l'accomplissement de ces missions ainsi que sur l'organisation de leurs réseaux.
Le projet de budget pour 2020 pour les missions Gestion des finances publiques et des ressources humaines et Action et transformation publiques s'inscrit dans la continuité et prolonge cette dynamique. Les grands projets de transformation seront poursuivis et amplifiés.
La direction générale des finances publiques continuera la mise en oeuvre de la réforme territoriale annoncée en juillet dernier, dans une logique de déconcentration de proximité. La phase de concertation avec les usagers et les élus locaux est en cours, et je ne doute pas que la carte à laquelle nous aboutirons permettra d'offrir un service plus agile et plus adapté aux besoins des contribuables comme des collectivités.
Le développement des moyens de paiement dématérialisé et le recul de l'utilisation des espèces permettront de libérer les agents et de leur confier des tâches à plus forte productivité.
L'unification du recouvrement au sein de la sphère fiscale progressera encore, avec le transfert d'une nouvelle série d'impôts et de taxes de la douane vers la DGFiP, tandis que la fiscalité sera encore simplifiée, grâce à la poursuite de la suppression de taxes à faible rendement et de niches fiscales. En ce qui concerne le transfert des taxes vers la DGFiP, j'appelle votre attention sur la nécessité, pour le Gouvernement, de faire oeuvre de pédagogie. En effet, les organisations syndicales de la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) expriment de vives inquiétudes quant à l'efficacité de la collecte et du recouvrement des taxes transférées, et je tenais à m'en faire l'écho.
Enfin, le développement du data mining, de l'intelligence artificielle et du ciblage sera permis par le renforcement des capacités informatiques au sein de chaque direction générale.
Ces choix sont cohérents, assumés, clairs, et se traduisent dans le projet de loi de finances que nous examinons.
Concernant la mission Gestion des finances publiques, le budget proposé pour les trois programmes s'établit à 10,3 milliards d'euros en crédits de paiement. Le schéma d'emploi se traduira par une diminution de près de 1 650 équivalents temps plein (ETP), principalement au sein de la DGFiP, qui permettra une économie de 44 millions d'euros en titre 2, tandis que les dépenses hors titre 2 progresseront légèrement, de 55 millions d'euros.
Je me félicite également du renforcement des budgets informatiques de ces administrations. Lors du dernier printemps de l'évaluation, j'avais en effet appelé le Gouvernement à muscler les budgets informatiques des administrations de Bercy, en particulier ceux de la DGFiP, afin de pouvoir résorber la dette technique et aborder les transformations à venir avec optimisme et sérénité. En 2020, les crédits informatiques de la DGFiP s'établiront à 233 millions d'euros hors titre 2 et hors crédits du Fonds pour la transformation de l'action publique (FTAP). C'est 30 % de plus que la moyenne annuelle constatée depuis 2014, et 45 millions de plus qu'en 2019. Je m'en félicite.
Au sein de la douane, les crédits informatiques sont sanctuarisés, dans un contexte budgétaire contraint, et cette administration a remporté un appel à projets dans le cadre du FTAP : 20 millions d'euros supplémentaires seront consacrés au développement du data mining.
Enfin, le fonds de transformation ministériel créé par le secrétariat général des ministères économiques et financiers sera, quant à lui, doté de 30 millions d'euros en 2020.
Ces évolutions sont bienvenues ; elles le sont d'autant plus qu'elles font suite aux recommandations de notre commission, formulées à l'occasion du printemps de l'évaluation – je sais, monsieur le président, que vous y êtes sensible. Je souhaite néanmoins appeler la vigilance de notre commission sur un point, déjà soulevé l'année dernière : il est crucial de donner davantage de visibilité aux agents publics, à la DGFiP comme à la douane. Ainsi, il me paraît nécessaire de renforcer les outils de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, qui sont aujourd'hui presque inexistants.
Concernant maintenant la mission Action et transformation publiques, l'année 2020 devrait permettre la mise en oeuvre de nombreux projets de transformation.
Sur le programme Rénovation des cités administratives, l'ensemble des crédits a été alloué : trente-neuf cités sur les cinquante et une existantes feront l'objet de travaux. Les dix projets les plus coûteux consisteront en des travaux lourds d'extension-destruction-reconstruction, et amélioreront tant les conditions de travail des agents et d'accueil des usagers que l'empreinte énergétique globale de ces bâtiments.
Le Fonds pour la transformation de l'action publique poursuivra sa montée en charge, avec une ouverture progressive des crédits de paiement. Les résultats sont prometteurs : les 130 millions d'euros qu'apportera le FTAP aux vingt-six projets déjà contractualisés devraient permettre de réaliser près de 230 millions d'euros d'économies pérennes, soit un levier de 1,8. J'appelle néanmoins l'attention de la direction du budget sur la nécessité d'accélérer la phase de contractualisation avec les porteurs de projets, pour éviter des reports de crédits trop importants sur les exercices ultérieurs.
Il me paraît également important de souligner que, si ces deux programmes sont nécessaires et pertinents, les indicateurs de performance retenus apparaissent toutefois inaboutis : ils doivent être retravaillés avec leur rapporteur spécial.
Enfin, quelques mots sur le Fonds d'accélération du financement des start-up d'État (FAST), dont la création a été décidée à l'automne dernier par notre commission, suite, là encore, à une proposition formulée lors du printemps de l'évaluation. Le premier appel à projets de ce fonds est prometteur, et un second est en cours.
Pour ces différentes raisons, j'émets un avis favorable à l'adoption des crédits de ces deux missions.
La commission en vient à l'examen des amendements à la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines.
Article 38 et état B
La commission est saisie de l'amendement II-CF230 de Mme Christine Pires Beaune.
Par cet amendement, nous proposons de revenir sur le schéma d'emplois de la direction générale des finances publiques. Cette direction est, en effet, celle qui a supprimé le plus de postes ces dernières années : 2 300 ETP en 2018, 2 130 ETP en 2019 et 1 500 prévus pour 2020. Or je puis vous dire que, sur le terrain, dans le département du Puy-de-Dôme – mais j'imagine que c'est également le cas ailleurs –, la présentation de ces fameuses cartes ne suscite pas l'adhésion, c'est le moins que l'on puisse dire. De fait, lorsque l'on s'intéresse à l'application de cette réforme, on s'aperçoit que les contribuables ne pourront pas obtenir de rendez-vous, de sorte que la situation risque de ressembler très fortement à celle qu'ont connue La Poste ou France Télécom. Toute relation se fera via internet ou le téléphone. Ce n'est vraiment pas ce que l'on attend dans nos territoires. Du côté des élus, l'incompréhension est totale, puisque la relation de proximité entre les élus locaux et le trésorier n'existera plus.
Monsieur Darmanin, que j'ai rencontré pendant l'examen de la première partie, m'a indiqué que la concertation était en cours et que rien n'était décidé. Il est donc encore temps de recouvrer la raison.
Cet amendement est sous-tendu par l'appréciation que vous portez sur la réorganisation en cours du réseau de la DGFiP. Mais la question qu'il faut se poser, me semble-t-il, est celle de savoir si ces suppressions d'emplois correspondent à une évolution de la pratique des usagers, particuliers, entreprises et, je ne les oublie pas, collectivités.
Je peux vous rejoindre, dans la mesure où le Gouvernement ne veut pas appliquer une politique du rabot. Mais si l'on cumule la suppression progressive de la taxe d'habitation, le prélèvement à la source, la réorganisation du réseau – qui a commencé, je le rappelle, non pas avec ce plan, mais bien avant, notamment avec le rapprochement des réseaux de recouvrement – et la suppression des taxes à faible rendement, force est de constater qu'on aura moins besoin d'agents publics face aux usagers. C'est un fait. La taxe d'habitation, par exemple, représente une part très importante du nombre des recours au guichet. Si, demain, elle est supprimée, il y aura nécessairement moins de monde aux guichets. Ce plan a donc été mûrement réfléchi. La suppression des effectifs et la réorganisation du réseau ont été conçues, non pas pour diminuer la qualité du service public, mais pour adapter celui-ci à l'évolution des usages.
Quant au conseil aux collectivités – c'est, je l'entends, un aspect sensible de la question –, je n'ai pas compris qu'il serait moindre mais qu'il serait organisé différemment. Les collectivités pourront toujours s'adresser à un conseiller. Le comptable public sera peut-être davantage en back office, mais le rôle de conseil aux collectivités sera bien préservé, voire renforcé. En tout cas, c'est ce qui est prévu dans ce projet de transformation.
Dès lors qu'il s'agit de mettre en oeuvre une transformation publique en adaptant les tâches des agents de l'administration, et non de procéder à des coupes budgétaires aveugles, je ne vois pas de raison de donner un avis favorable à votre amendement. La baisse des effectifs est justifiée et, au demeurant, nécessaire. Avis défavorable, donc.
Il est vrai que la suppression de la taxe d'habitation et le prélèvement à la source vont limiter le flux, mais ces effets se feront sentir dans trois ou quatre ans. Pour le moment, ces réformes contribuent plutôt à augmenter ce flux.
Par ailleurs, je ne vois pas ce que l'on va gagner à une réforme qui, à l'échelle de mon département, par exemple, consiste à supprimer un peu plus de vingt points de contact, non seulement pour les usagers, mais aussi pour les élus ou les secrétaires de mairie. Quel est l'intérêt de regrouper et de spécialiser ces points d'accueil pour ne garder que trois points de gestion des flux financiers par département ? Actuellement, dans des départements comme le mien, qui compte encore une trentaine de trésoreries, on a, chaque semaine, des échanges téléphoniques mais aussi physiques avec les agents.
Nous sommes tous favorables, me semble-t-il, à la modernisation et à l'adaptation des services à la numérisation et au changement des usages. Mais, en vérité, cette réforme est motivée par la volonté de diminuer le nombre de postes dans les territoires. Elle a donc un double objectif.
Or, sur le terrain, la situation ne correspond pas aux cartes et aux discours qui nous sont présentés dans le courrier que nous a adressé le ministre. Prenons l'exemple de la Savoie. Il s'agit d'un territoire de montagne, qui comprend une vallée de 130 kilomètres, où l'activité saisonnière, liée aux stations de ski, est très importante. Le nombre des guichets dédiés au service aux entreprises va passer de cinq à deux. Or on a besoin que ce service soit maintenu dans un territoire comme celui-là où, au-delà des activités saisonnières et des activités économiques, le grand chantier de la liaison Lyon-Turin emploie des entreprises particulières. En outre, et c'est paradoxal, on va diminuer les effectifs du pôle chargé du contrôle, donc du recouvrement des impôts ou, du moins, de la lutte contre une partie de la fraude. Il faut pourtant des agents sur le terrain, pour bien connaître le tissu économique. Attention, l'objectif de réduction des effectifs peut aboutir à un effet contraire à celui recherché !
Ce n'est pas parce que ces réformes sont engagées depuis très longtemps qu'elles sont satisfaisantes pour les territoires, notamment ruraux. Les besoins sont moindres, certes, mais certains demeurent et ce sont souvent ceux des populations les plus fragiles et les plus précaires. Par ailleurs, le conseil aux collectivités ne disparaîtra pas, dites-vous, monsieur le rapporteur, car ces dernières pourront s'adresser à des conseillers spécialisés. Soit, mais il leur faudra quatre bras et quatre jambes pour pouvoir répondre à l'ensemble des sollicitations !
En réalité, on poursuit le déménagement du territoire et la diminution des emplois publics, notamment dans les territoires où la densité de population est la moins élevée. On met en avant – j'ai travaillé avec Jean-Paul Mattei sur l'accès aux services publics en milieu rural – les Maisons France Service, et nous y croyons, à condition que le maillage soit suffisamment serré pour que les gens n'aient pas besoin de faire 50 kilomètres pour s'y rendre. Mais, aujourd'hui, dans un département comme le mien, par exemple, la direction générale des finances publiques n'a pris aucun engagement sur l'organisation de sa présence au sein de ces maisons.
On met souvent la charrue avant les boeufs : on a dématérialisé sans disposer des infrastructures nécessaires et, aujourd'hui, on prend des décisions sans en mesurer véritablement toutes les conséquences. Ce sont des lois de régression, notamment pour les territoires et les populations les plus fragiles, qui ont encore besoin d'une présence physique, et pas uniquement numérique, des services publics.
Il ne faut pas être hostile à une réforme parce qu'elle viendrait de la majorité ou parce qu'elle aurait pour ambition de s'adapter au monde moderne. Si je suis méfiant, c'est parce que certaines réformes, notamment des finances publiques, obéissent surtout à une logique d'économies. Là est l'ambiguïté : cette réforme a-t-elle pour objectif de réaliser des économies ou d'adapter les services fiscaux aux données modernes ?
Attention à la numérisation ! On croyait, il y a une dizaine d'années, qu'elle permettrait de réaliser des gains de productivité considérables, notamment à l'ex-DGCP (Direction générale de la comptabilité publique). Or la plupart de ces gains de productivité ont été absorbés par les progrès qualitatifs des administrations, qui répondent désormais très rapidement, par e-mail ou par téléphone. En outre, le territoire est dissymétrique. Par exemple, il arrive que, dans la partie orientale du Vaucluse, où se trouve ma circonscription, le téléphone soit indisponible pendant quinze jours. La numérisation est donc un concept pertinent pour les personnes qui habitent en ville.
Par ailleurs, en matière d'économies, l'approche étant la même dans toutes les administrations, les fermetures de services publics se sont concentrées aux mêmes endroits. Ainsi, on a vu disparaître, dans une même ville, le bureau de poste, la perception…
Enfin, les personnes ne sont pas interchangeables. On va concentrer le service aux entreprises dans une ville et le service aux particuliers dans une autre, mais si les agents doivent faire 30 ou 40 kilomètres pour aller travailler, il peut être difficile pour leurs conjoints de s'adapter au changement. Pour toutes ces raisons, je suis assez réservé sur cette réforme.
Comme vous l'avez vous-même rappelé, monsieur le président, les réformes de la DGFiP ont débuté il y a vingt ans. Un certain nombre de services ont été rationalisés, car la numérisation de cette administration a permis de simplifier, non seulement les obligations déclaratives, mais aussi toute la chaîne chargée de leur traitement. Demain, la suppression de la taxe d'habitation permettra de diminuer le nombre des recours gracieux et contentieux. La baisse des effectifs de la DGFiP correspond ainsi à une gestion beaucoup plus moderne et efficace de l'impôt.
Je suis moi-même élue d'une zone très rurale. Je comprends les arguments de ceux qui plaident pour le maintien des points de contact, mais certaines trésoreries ne comptent plus que deux agents, car il est très difficile de faire venir des personnels dans ces territoires-là. Dès que l'un d'eux est en arrêt maladie, c'est la catastrophe : plus rien ne fonctionne ! Réduire le nombre des points de contact en renforçant les effectifs dans ceux qui subsisteront me paraît donc bien plus intéressant et aller dans le bon sens. On peut tout de même, à l'époque actuelle, communiquer avec sa trésorerie de diverses manières, notamment par e-mail ou par téléphone. Quant au conseil aux collectivités locales, il sera renforcé, il faut le souligner.
En tout cas, cette réforme est actuellement présentée aux élus locaux dans tous les territoires : des réunions sont organisées avec les membres des préfectures et les directeurs départementaux des finances publiques. Les retours que j'en ai sont plutôt positifs. La concertation se passe très bien, des ajustements sont demandés pour améliorer le maillage territorial.
Enfin, la DGFiP comprend bien d'autres métiers que ceux des trésoreries locales. Ainsi, je l'ai dit, la suppression de la taxe d'habitation entraînera une diminution du nombre des recours gracieux, si bien que l'ensemble de la chaîne consacrée au traitement de ces recours peut être revue.
Il s'agit surtout, me semble-t-il, d'une question de méthode. Des Maisons France Service vont être créées, mais encore faut-il savoir où elles seront implantées. La suppression d'une trésorerie peut se comprendre, mais que va-t-on mettre à la place ? Actuellement, il me semble que le tuilage est insuffisant, de même que la pédagogie dans les territoires : il faut expliquer les solutions alternatives qui sont proposées. Les annonces peuvent paraître brutales. On doit donc absolument pouvoir dialoguer dans les territoires et – Julien Aubert évoquait les raisonnements en silos – travailler de manière transversale. Je me félicite, par exemple, de l'action des préfets et des départements dans le cadre de l'installation des Maisons France Service. Il faut donc revoir la méthode.
Je suis, moi aussi, élu d'un département extrêmement rural. Certaines cellules de la DGFiP comptent, en fait, deux ou trois agents. Si l'un d'entre eux est absent, pour cause de maladie par exemple, la structure ne peut pas ouvrir. Dès lors, ne peut-on pas penser que cette réforme permettra d'améliorer la qualité de la réception des usagers ? De fait, le service qui leur est actuellement offert ne répond pas à la demande de la population. Les questions traitées sont parfois d'une complexité telle qu'il peut être nécessaire de faire appel à des agents un peu plus formés, rassemblés au sein de grands pôles. C'est pourquoi, pour ma part, je soutiens cette réforme.
En définitive, l'amendement de madame Pires Beaune a provoqué une sorte de discussion générale sur la réforme de la DGFiP, et cela peut se comprendre. Je vais vous le dire comme je le pense, très sincèrement : si les progrès réalisés en matière de numérisation, le prélèvement à la source et la suppression massive d'impôts, dont la taxe d'habitation, ne nous permettent pas de réorganiser la présence de l'État sur le terrain, c'est à désespérer de la capacité à réformer ! La méthode est bonne, elle donne une place importante à la concertation.
Cela fait maintenant trois ans que je suis rapporteur spécial des crédits de la DGFiP et, chaque année, j'ai répété que nous avions besoin de lisibilité, notamment de cartes géographiques. Cette année, nous les avons. Que chaque territoire ait ses spécificités et nécessite certaines adaptations, c'est un fait. C'est d'ailleurs l'objet de la phase de concertation avec les élus. La méthode est bonne, sur le fond la réforme est justifiée : si nous ne parvenons pas à nous mettre d'accord, c'est un peu désespérant.
Par ailleurs, oui, l'objectif est également de diminuer le nombre des agents publics, et il faut l'assumer. On ne peut pas, d'un côté, reprocher au Gouvernement d'abandonner son ambition de diminuer le nombre des fonctionnaires et, de l'autre, lorsque cette diminution est logique et peut être menée à son terme, lui demander de s'arrêter au milieu du gué. Car, je le rappelle, la DGFiP sera, en définitive, la seule administration à baisser le nombre de ses emplois.
Peut-être, monsieur Aubert. Peut-être aussi, on le dit souvent, parce que c'est l'administration la plus impliquée, le ministre devant montrer l'exemple. Mais c'est également celle dont le service public et les usages évoluent le plus. Cette stratégie obéit donc à une véritable cohérence, et je m'en fais volontiers l'avocat, car je la trouve bien mise en oeuvre. J'ajoute que, dans mon département, le Val-de-Marne, les points d'accueil physique sont plus nombreux après la réforme qu'avant.
Puisque cette question revient de manière récurrente dans nos discussions depuis plusieurs années, je vous propose, en accord avec notre rapporteur spécial, d'auditionner le nouveau directeur de la DGFiP en début d'année prochaine, pour faire le point sur le schéma général de la réorganisation des services et les projections pour les années qui viennent.
Je rappelle que cette direction a aussi été créée pour réaliser des gains de productivité, comme on dit dans les entreprises et, désormais, dans les administrations. Ces gains de productivité sont, c'est vrai, très importants. La DGFiP se réorganise donc progressivement, et cette réorganisation fait fréquemment l'objet d'une concertation : les directeurs départementaux des finances publiques font même souvent le tour des élus pour essayer de leur expliquer les mesures envisagées.
La commission rejette l'amendement II-CF230.
Puis elle examine l'amendement II-CF281 de Mme Christine Pires Beaune.
Pour conclure sur le sujet précédent, j'avais suggéré que, plutôt que de mener cette réforme tambour battant, on réalise, sur un territoire volontaire à l'échelle de chaque département, une expérimentation que l'on l'évalue au bout d'un an afin de déterminer s'il convient de l'étendre à l'ensemble du territoire. Telle serait, me semble-t-il, la bonne méthode.
L'amendement II-CF281 est le pendant du précédent, puisqu'il vise à revenir sur la suppression des postes prévue, cette fois, au sein de la douane, qui a, elle aussi, rendu beaucoup d'effectifs au cours des dernières années. Depuis 2016, aucun poste n'a été supprimé dans cette administration, en raison du contexte lié au terrorisme et au Brexit. Cette année, il est, certes, prévu de créer des postes en prévision du Brexit, mais le solde net est négatif.
La douane est une administration complexe dans la mesure où elle assume – mais c'est ce qui fait sa beauté – des missions très différentes les unes des autres : une mission fiscale, qui va évoluer, comme je l'ai précisé dans mon propos liminaire, une mission de surveillance et de lutte contre les trafics et une mission de dédouanement.
En effet, madame Pires Beaune, si l'on regarde le solde net, comme vous dites, on constate, dans le projet de budget pour 2020, une diminution du nombre des ETP. D'un côté, le nombre de postes augmente en raison du Brexit ; de l'autre, il diminue, du fait notamment de l'évolution de la mission fiscale de la douane. En effet, dès lors que certaines taxes sont transférées de la douane vers la DGFiP, il est normal que les emplois diminuent au sein de la douane.
J'ajoute que, depuis 2016, non seulement la douane n'a pas perdu de postes, comme vous l'avez dit, mais elle a bénéficié de la création de près de 1 000 emplois nets, soit une augmentation de près de 6 % de ses effectifs. Peu d'administrations peuvent se targuer d'un tel renfort, justifié par la lutte contre le terrorisme et la perspective du Brexit. Le suivi du schéma d'emplois de la douane a été exemplaire. Il faut examiner chaque mission, car si l'on fait des additions et des soustractions en mélangeant des missions qui n'ont rien à voir les unes avec les autres, il est un peu difficile de savoir si l'évolution de l'emploi est satisfaisante ou non. J'estime, pour ma part, que le renforcement des effectifs au sein de la DGDDI au cours des quatre dernières années était justifié ; la diminution prévue dans le projet de budget pour 2020 l'est tout autant. Je rappelle, au demeurant, que, pour ce qui est de la mission liée au Brexit, le renforcement des effectifs se poursuit. Avis défavorable.
Je soutiens l'amendement de madame Pires Beaune. Le Gouvernement affiche sa volonté de lutter contre la fraude fiscale – nous célébrons, d'ailleurs, aujourd'hui le premier anniversaire de la loi relative à la lutte contre la fraude. Or ce n'est pas en déshabillant le service des douanes, qui contribue fortement à cette lutte, notamment contre la fraude à la TVA, et en diminuant les moyens de contrôle dans nos ports que le Gouvernement y parviendra. Du reste, les syndicats se sont réunis en intersyndicale – c'est rare – pour demander que l'on ne déshabille pas ce service, qui rapporte plus qu'il ne coûte à l'État.
Monsieur le rapporteur nous indique qu'une partie des missions de la douane sera désormais assumée par la DGFiP, soit. Mais on vient de voir que l'on supprimait également des postes dans cette direction…
Encore une fois, on ne peut pas faire des additions et des soustractions sans tenir compte des missions concernées. Ce n'est pas parce que les effectifs de la DGFiP diminuent – et on a expliqué pourquoi cette baisse était légitime – qu'elle n'est pas capable de récupérer un certain nombre de taxes actuellement recouvrées par la DGDDI. Il ne s'agit pas de vases communicants : il faut raisonner en termes de missions et d'usages si l'on veut réfléchir de manière sérieuse et raisonnable.
On ne peut pas dire, j'y insiste, que la DGDDI soit fragilisée. Monsieur Roussel, la lutte contre la fraude est tout sauf remise en cause : elle prend simplement d'autres formes, elle évolue, je l'ai dit dans mon propos liminaire. L'investissement réalisé dans ce que l'on appelle le data mining et la recherche d'informations en appui aux effectifs engagés dans la lutte contre la fraude est phénoménal. Je ne rappellerai pas les dispositions de la loi à laquelle vous avez fait allusion relatives à la police fiscale, qui ont renforcé, du côté de la DGFiP, ce qui existait déjà du côté de la douane judiciaire. La lutte contre la fraude fiscale est donc bien consolidée, que ce soit à la DGFiP ou à la douane.
La commission rejette l'amendement II-CF281.
Elle en vient à l'amendement II-CF445 de Mme Josette Manin.
Par cet amendement, nous proposons de recruter vingt-deux agents au bénéfice du contingent martiniquais de la direction interrégionale (DI) des douanes Antilles-Guyane. En effet, nous observons, en Martinique, de graves dysfonctionnements dans l'exercice des fonctions régaliennes de l'État en matière de contrôle des personnes et des marchandises aux frontières. Le recrutement de ces agents est donc indispensable si l'on veut juguler ces dérives et préserver la Martinique et la France hexagonale d'un afflux massif de stupéfiants et d'armes.
Je ne peux que vous rejoindre lorsque vous soulignez les problèmes liés aux trafics, qui sont en recrudescence dans la zone couverte par la DI Antilles-Guyane. J'ai moi-même enquêté, en ma qualité de rapporteur spécial, sur le phénomène très particulier des « mules », qui partent la plupart du temps de Guyane et atterrissent à Orly, dont ma circonscription est voisine. Il s'agit d'une véritable catastrophe humanitaire. Ces personnes, qui transportent des capsules de drogue, qu'elles ont très souvent ingérées, sont envoyées en Europe par avion, atterrissent à Orly et, lorsqu'elles se font prendre par la douane, viennent engorger le TGI de Créteil – sans parler de leur situation sanitaire, qui est très difficile à gérer. C'est un problème pour ces pauvres personnes, qui sont exploitées, pour les douaniers, dont la mission n'est pas de les accompagner en voiture à l'Hôtel-Dieu, et pour les tribunaux, qui sont engorgés. Bref, c'est un problème global, contre lequel il faut lutter.
Le Gouvernement a présenté un plan d'action interministériel qui s'applique depuis le 1er avril. Il est évidemment un peu tôt pour en tirer les enseignements. Je crois, pour ma part, que la seule manière de lutter efficacement contre ce phénomène est d'empêcher absolument les « mules » de décoller de Cayenne. C'est l'objet du plan gouvernemental. Je ne suis donc pas certain que le recrutement de vingt-deux agents supplémentaires au sein de la DI Antilles-Guyane soit la solution idoine. En tout état de cause, je vous propose que nous attendions d'avoir un peu de recul sur le plan gouvernemental qui est appliqué depuis maintenant six mois et que nous nous donnions rendez-vous lors du printemps de l'évaluation pour examiner les éventuels gains d'efficacité apportés par ce plan. Je peux m'engager, à titre personnel, à défendre, le cas échéant, votre proposition dans un an, lorsque nous aurons un peu plus de recul sur l'efficacité de ce plan.
J'entends ce que vous dites, monsieur le rapporteur spécial. Je précise cependant que la situation géographique et le contexte ne sont pas les mêmes en Guyane et en Martinique. Il est vrai qu'en Guyane, le problème est particulièrement prégnant, mais, chez nous, le développement des trafics aérien et maritime est tel qu'entrent sur notre territoire beaucoup d'armes et de drogue en provenance d'autres pays de la Caraïbe. Nous avons donc absolument besoin de ces renforts. Cependant, j'accepte votre proposition de rendez-vous pour évaluer dans quelque temps les résultats du plan gouvernemental. Je retire l'amendement.
L'amendement II-CF445 est retiré.
La commission adopte les crédits de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines, non modifiés.
La commission en vient à l'examen des amendements à la mission Action et transformation publiques.
Article 38 et état B
Suivant l'avis défavorable du rapporteur spécial, la commission rejette l'amendement II-CF385 de Mme Marie-Noëlle Battistel.
Puis elle adopte les crédits de la mission Action et transformation publiques, non modifiés.
La commission examine ensuite les crédits de la mission Crédits non répartis.
L'année 2019 a été marquée récemment par le vote de la loi du 6 août de transformation de la fonction publique. L'application de cette loi, qui nécessite une cinquantaine de décrets et quelques ordonnances, offrira de nouveaux outils de gestion des ressources humaines, aussi bien pour l'État que pour les collectivités territoriales et nos hôpitaux publics.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, je rappelle quelques chiffres clés concernant l'évolution des dépenses de personnel de l'État. En 2020, ces dépenses devraient s'élever à 133,8 milliards d'euros, dont 89,8 milliards d'euros hors compte d'affectation spéciale Pensions, les dépenses de retraite des fonctionnaires n'étant pas incluses dans la norme de dépenses pilotables. L'augmentation de la masse salariale de 1,5 milliard d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2019 est liée à l'impact des mesures catégorielles en 2020. Elle finance notamment la mise en oeuvre du protocole « Parcours professionnels, carrières et rémunérations », à hauteur de 500 millions d'euros. Par ailleurs, le solde du glissement vieillesse technicité induit mécaniquement une hausse des rémunérations liée à la progression des carrières, pour plus de 400 millions d'euros.
Le programme 148 ne traduit pas la totalité de l'effort du Gouvernement en matière de gestion des ressources humaines de l'État. Le projet loi de finances pour 2020 consacre néanmoins certaines évolutions importantes pour nos agents publics, que ce soit en matière de formation, d'action sociale ou d'innovation dans le domaine des ressources humaines, avec la création d'un nouveau fonds pour l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, doté de un million d'euros.
Le PLF 2020 prévoit d'allouer à l'École nationale d'administration (ENA) une subvention de 30,6 millions d'euros, en très légère augmentation. La dotation attribuée aux instituts régionaux d'administration (IRA) est, quant à elle, en diminution, de l'ordre de 4 millions d'euros, pour s'établir à 40 millions d'euros en 2020. Cette baisse découle logiquement de l'entrée en vigueur, depuis le 1er septembre, de la réforme de ces instituts, qui réduit de douze à huit mois le temps de scolarité rémunérée. Une nouvelle convention d'objectifs et de performance sera signée au début de l'année 2020 entre l'État et les IRA, afin de mieux prendre en compte les effets de cette réforme.
J'appelle votre attention sur la revalorisation de l'action sociale interministérielle (ASI), qui sert des prestations agissant comme un filet de sécurité à destination des agents publics les moins bien dotés par leur ministère de rattachement. Je me félicite que le Gouvernement ait prévu une hausse de près de 8 millions d'euros répartis entre trois prestations différentes. Outre le triplement de la dotation au logement d'urgence, qui passe de 310 000 euros à un million d'euros, le dispositif de réservation de places en crèche se voit conforté, avec près de 3 millions d'euros supplémentaires en 2020. Plus de 28 millions d'euros seront ainsi consacrés à cette prestation et permettront d'augmenter le parc, qui comptera plus de 3 600 crèches dès l'année prochaine, et d'atteindre l'objectif de 1 000 places supplémentaires à l'horizon 2021. Je me réjouis surtout que des réponses soient enfin apportées à la chute du nombre de bénéficiaires du chèque emploi service universel pour la garde des jeunes enfants jusqu'à 6 ans. Une hausse de 5 millions d'euros est en effet prévue afin de financer le rétablissement d'une tranche d'aide supplémentaire à 200 euros, ainsi qu'une revalorisation des barèmes de plus de 5 %. L'effet combiné de ces deux mesures devrait permettre d'intégrer 36 000 nouveaux bénéficiaires afin de se rapprocher du seuil symbolique des 100 000, contre seulement 63 000 bénéficiaires à l'heure actuelle.
J'en viens à la mission Crédits non répartis. La dotation pour mesures générales en matière de rémunération s'élève à 26 millions d'euros, qui permettront de financer les mesures du dernier rendez-vous salarial. Il s'agit notamment de couvrir la revalorisation du barème de remboursement des frais de repas des agents en mission, ainsi que le déploiement du forfait mobilité durable dans le secteur public, à hauteur de 200 euros par an. J'insiste surtout sur la dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles. À cet égard, je rejoins les recommandations formulées le mois dernier par la mission d'information relative à la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), invitant à accroître et à sincériser cette dotation. En retour, le taux de mise en réserve, qui continue d'être appliqué à des dépenses inéluctables, pourrait être réduit, ce qui libérerait les marges de manoeuvre de nos gestionnaires publics en exécution.
Un mot, enfin, de l'action de la direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP), qualifiée, depuis l'entrée en vigueur du décret du 22 décembre 2016, de directrion des ressources humaines de l'État. Toutefois, les leviers dont elle dispose m'apparaissent trop insuffisants pour qu'elle puisse correctement endosser ce rôle. La DGAFP est la seule direction des ressources humaines de France qui ne nomme personne. J'ai pu constater le cloisonnement excessif de la gestion des ressources humaines de l'État entre chacun des ministères. En dépit des récentes avancées consacrées par le décret de 2016 et par la loi du 6 août dernier, il est plus que temps de définir une politique plus volontariste et plus stratégique pour les agents publics de l'État. À cet égard, je forme le voeu que l'agence de reconversion pour les agents de l'État, qui est en cours de préfiguration, soit dotée de tous les moyens nécessaires à l'exercice de sa mission : favoriser la progression de carrière et la mobilité de nos agents.
La commission en vient à l'examen des amendements à la mission Crédits non répartis.
Article 38 et état B
La commission est saisie de l'amendement II-CF208 de Mme Christine Pires Beaune.
Le forfait mobilités durables prévu de façon fort bienvenue dans la loi d'orientation des mobilités (LOM) s'élève à 400 euros dans le privé, et curieusement à 200 euros dans la fonction publique. L'amendement II-CF208 vise à aligner son montant, pour la fonction publique, sur celui du privé.
Vous formez l'hypothèse que le montant du forfait mobilités durables serait de 400 euros dans le privé. Les choses sont un peu plus complexes et toutes les personnes travaillant dans le privé ne toucheront probablement pas cette somme. D'abord, ce forfait ne concernera que les entreprises de plus de 50 salariés. Ensuite, sa mise en oeuvre sera à la discrétion des dirigeants d'entreprise. Enfin, l'avantage fiscal et social lié au bénéfice de la prise en charge par l'employeur des frais de déplacement est plafonné à 400 euros par an, dont 200 euros au maximum pour les frais de carburant classique. Il s'agit donc d'un plafond et non d'un seuil. L'alignement sur le privé pourrait d'ailleurs se révéler moins intéressant que ce qui a été proposé par Olivier Dussopt lors du dernier rendez-vous salarial.
La commission rejette l'amendement II-CF208.
Elle adopte ensuite les crédits de la mission Crédits non répartis, non modifiés.
La commission en vient à l'examen du compte d'affectation spéciale Gestion du patrimoine immobilier de l'État.
Ce compte d'affection spéciale constitue le vecteur budgétaire principal de la politique immobilière de l'État dans sa dimension interministérielle. Il prend en charge les dépenses relatives à plusieurs types d'opérations – entretien, fonctionnement, investissement ou cession –, qui portent sur des biens de son patrimoine immobilier ou qui figurent à son bilan. Relèvent également de son périmètre, jusqu'au 31 décembre 2019, les dépenses d'investissement ou d'entretien du propriétaire réalisées par l'État sur les infrastructures opérationnelles de la défense nationale.
Le projet de loi de finances pour 2020 propose d'allouer au CAS la somme de 428 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 447 millions d'euros en crédits de paiement. Il gage cette programmation en dépenses sur un produit estimé de recettes d'un total de 380 millions d'euros. À eux seuls, ces chiffres ne peuvent que renforcer les préoccupations que j'ai exprimées quant à la viabilité du financement de la politique immobilière de l'État : comparé à la loi de finances initiale pour 2019, le montant des crédits de paiement demandés pour les opérations structurantes et cessions en 2020 accuse une baisse de 7,45 %. Seule l'action 14 Gros entretien, réhabilitation, mise en conformité et remise en état enregistre une progression, d'ailleurs modérée, de ses ressources.
S'agissant des recettes, le projet de loi de finances pour 2020 anticipe une nouvelle diminution du produit des cessions immobilières. Les ventes réalisées en 2020 ne rapporteraient que 280 millions d'euros, soit une diminution de 12,5 % par rapport aux prévisions de la loi de finances pour 2019. Dès lors, on se félicitera de ce que le projet de loi de finances porte à 100 millions d'euros le produit des redevances domaniales. L'exécution 2018 et les premiers chiffres disponibles pour 2019 démontrent qu'il s'agit d'une ressource solide et qui contribue utilement au financement du CAS. Cela dit, le dynamisme des redevances ne peut corriger un déséquilibre qui revêt un caractère quasi structurel.
Au total, l'exercice 2020 devrait se terminer par un solde déficitaire de 67 millions d'euros. Si ce nouveau déficit apparaît en sensible recul par rapport aux exercices 2017 et 2018, il augure d'un nouveau fonctionnement de la trésorerie du CAS. D'après les chiffres obtenus dans le cadre du printemps de l'évaluation, celle-ci s'élevait, à la fin de l'exercice 2018, à près de 702 millions d'euros. Ce montant représente une année et demie de consommation au regard du rythme annuel. Or la dynamique intégratrice de la politique immobilière de l'État s'approfondit et emporte avec elle de nouvelles exigences.
À l'instar des schémas pluriannuels de stratégie immobilière des ministères, l'examen et l'adoption des schémas directeurs régionaux progressent. Au 31 juillet 2019, quinze régions sur dix-huit avaient ainsi adressé leur projet à la direction de l'immobilier de l'État (DIE). Onze d'entre eux ont fait l'objet d'une présentation et d'un débat devant la Conférence nationale de l'immobilier public. De bonne qualité, ces documents permettent d'identifier des projets de rationalisations immobilières et des projets de cession à conduire. Les diagnostics qu'ils posent soulèvent la nécessité d'un maintien de l'effort en faveur de l'entretien du patrimoine de l'État. Le maintien du niveau des crédits consacrés à ce poste de dépenses – soit 160 millions d'euros en AE et en CP – dans le projet de loi de finances y répond. De fait, si l'entretien constitue une source de dépenses croissantes, en hausse de 5 % par rapport à 2017, il représente aussi un facteur d'économies et de valorisation du patrimoine à moyen et long termes.
Refondée par la communication du conseil des ministres du 20 janvier 2016, la politique immobilière de l'État contribue à un usage plus rationnel d'un patrimoine essentiel des personnes publiques. Le CAS ne saurait procurer seul les ressources financières indispensables à cette démarche. C'est pourquoi il importe de garantir la bonne mise en oeuvre des projets relevant du programme 348 Rénovation des cités administratives et autres sites domaniaux multi-occupant. Mais il s'agit également – comme je l'ai déjà affirmé devant vous – de sortir de l'impasse que représente un financement de l'entretien du patrimoine assis sur la cession de ses actifs. Il nous faut procurer à la politique immobilière de l'État d'autres ressources et renouveler certaines des orientations qui la sous-tendent.
Le deuxième comité interministériel de la transformation publique, qui s'est tenu le 29 octobre 2018, a ouvert de nouvelles perspectives. Je pense ici au développement de modes de valorisation locative de biens devenus inutiles, d'actifs non cessibles dans les conditions actuelles du marché mais pouvant recevoir un autre usage, bref de solutions alternatives intelligentes à la cession pure et simple. Les trois missions commandées par le ministre de l'action et des comptes publics, dont les travaux se poursuivent, devraient en dresser un état des lieux. C'est dans cette perspective que, tout en appelant à approuver les crédits proposés pour le CAS, je défendrai tout à l'heure un amendement qui poursuit deux objectifs : ne pas limiter les ressources du compte aux produits de cession et récompenser les services faisant le choix d'implantations moins coûteuses tout en permettant la conservation de biens immobiliers pouvant être valorisés au bilan de l'État.
Il y a quelques années, le CAS finançait une partie du désendettement de l'État. Ce n'est plus le cas. Est-ce parce que les ressources de vente ont diminué quasiment de moitié ? Il est plutôt sain et de bonne gestion de considérer que le produit de la vente de patrimoine doit aller à l'acquisition de patrimoine, et non à l'entretien. C'est du bon sens – même s'il arrive que le bon sens soit éloigné de la gestion publique. Cela dit, le désendettement était un aspect extrêmement important.
Les bailleurs sociaux ou d'autres organismes ayant une mission dans le domaine du logement s'accordent à dire que la gestion immobilière de l'État est de moins en moins performante. Cela rejoint ce que vous disiez, monsieur le président, à propos des excédents de cessions qui servaient, à une époque, au remboursement de la dette. La gestion immobilière de l'État pose énormément de questions. Comment expliquer, alors que le marché immobilier est loin d'être en pleine chute, que les cessions de l'État ne rapportent plus autant ?
J'ai eu quelques expériences douloureuses en matière d'affaires immobilières de l'État, en particulier à cause du temps incroyable qu'il faut pour vendre un bien appartenant à l'État. Ainsi, à Châlons-en-Champagne, nous avons engagé un contrat de redynamisation de site de défense (CRSD), dont l'État est cosignataire : il a fallu plusieurs années pour vendre une caserne. C'est épouvantable ! N'y aurait-il pas un système permettant d'accélérer les ventes de l'État ?
J'appelle l'attention des commissaires sur la faiblesse d'une doctrine qui, pour bâtir un plan d'entretien ou un plan stratégique de patrimoine, repose sur des cessions. Quand on siège au conseil immobilier de l'État, outre qu'il est parfois difficile de saisir le fond de l'ensemble des projets, on a du mal à voir comment les travaux envisagés s'inscrivent dans un calendrier. On ne peut pas envisager d'entretenir un patrimoine en arbitrant toujours les crédits d'entretien à la baisse. Or telle est la politique qui est conduite – et cela n'est pas propre à ce gouvernement – selon une logique déjà ancienne. Pour boucler un budget, là où il faudrait 80 millions en dépenses de fonctionnement, on n'en met que 60 millions parce qu'on a besoin de 20 millions ailleurs. De la sorte, on entre dans un cercle vicieux, car moins d'entretien, c'est davantage de dégradations et, au bout du compte, on ne peut plus faire autrement que de lancer de grands travaux.
Le CAS ne fait pas apparaître cette pratique des administrations qui, ayant du mal à obtenir des crédits de fonctionnement, préfèrent passer par l'inscription de dépenses obligatoires et par des contrats, notamment des partenariats public-privé (PPP), ce qui leur évite d'avoir à se battre pour obtenir les crédits nécessaires à l'entretien de leur patrimoine. Dans un récent rapport, la Cour des comptes estime que cela coûte beaucoup plus cher qu'une régie directe. Il serait sans doute intéressant de s'interroger sur le coût, à terme, des PPP utilisés pour la gestion du patrimoine immobilier de l'État. La fonction de propriétaire et celle d'occupant doivent pouvoir être distinguées. Les PPP sont des choix stratégiques qui ont été faits dans le passé pour de très grands équipements, mais on pourrait imaginer d'autres modes de financement.
J'aimerais, monsieur le rapporteur spécial, que nous puissions avoir un rapport d'inspection sur la performance de la politique immobilière de l'État. La qualité de leurs logements plonge dans le désarroi les compagnies républicaines de sécurité et les gendarmes ; c'est à peu près pareil pour les militaires, et je ne parle pas des logements détenus par les établissements publics nationaux qui accueillent des fonctionnaires : ils ne peuvent même plus être loués.
S'agissant de la qualité des stocks, force est de constater que les biens les plus intéressants ont déjà été vendus ; ceux qui restent ont du mal à trouver preneur. La décote – une de mes marottes – a posé quelques problèmes du point de vue de la valorisation du patrimoine. Une mission a été lancée pour trouver d'autres méthodes de valorisation du patrimoine de l'État. On a beaucoup parlé de foncières ou d'autres instruments permettant d'avoir une gestion beaucoup plus active de la valorisation et de la cession du patrimoine. En la matière, on peut légitimement s'interroger sur la méthode et les outils dont dispose la DIE. Toutefois, il y a aussi un problème lié au marché : certains biens n'ont pas de valeur ; d'autres représentent même plutôt un coût, et il faudrait s'en débarrasser rapidement. Il est vrai que le compte d'affectation spéciale s'érode à mesure que le nombre des cessions diminue. C'est un véritable problème.
En ce qui concerne les PPP, on évite de plus en plus d'y recourir parce qu'on s'est rendu compte qu'ils entraînaient des coûts très importants pour l'État – d'où, à nouveau, la nécessité d'inventer d'autres moyens de valoriser le patrimoine de l'État. Mais je pense qu'avec une autre dynamique et d'autres méthodes, on arriverait à redynamiser un peu la gestion de ce patrimoine. Dans les régions, les schémas directeurs immobiliers régionaux (SDIR) y contribuent.
La politique immobilière de l'État passe en effet par des étapes. Elle n'a été véritablement créée qu'il y a une dizaine d'années. Auparavant, chaque ministère avait sa propre politique en la matière. Même il y a dix ans, les procédures étaient lourdes. Des normes avaient été fixées, notamment en matière d'occupation administrative. Il y avait alors beaucoup de biens à vendre, dont certains pouvaient être très facilement placés sur le marché. Cette politique était animée par une volonté de désendettement, mais aussi de financement de restructurations immobilières.
Dans le cas particulier des biens immobiliers de l'armée, les nombreuses restructurations que celle-ci a connues ont libéré un patrimoine très important et offert la possibilité de récupérer des fonds. C'est un peu la même chose pour le ministère des affaires étrangères, avec ce problème – on en parle rarement – que la vente des biens immobiliers que nous avons à l'étranger demande en moyenne plus de trente-six mois pour aboutir.
Le contexte actuel est assez différent, avec des biens à vendre moins nombreux et qui trouvent plus difficilement preneur. Les restructurations immobilières ont été faites – plus ou moins bien – en parallèle des restructurations administratives. Le parc immobilier vieillit et l'État fait de plus en plus lourdement appel aux collectivités locales pour l'entretien des bâtiments.
Quant aux mécanismes de PPP, ils atteignent vite leurs limites : à un moment donné, il faut bien payer – c'est juste une affaire de trésorerie.
Pour toutes ces raisons, ce CAS doit être suivi attentivement. Et, comme le suggère notre rapporteur, il doit aussi, probablement, évoluer. Nous pourrions proposer à l'État une autre politique immobilière, si nous décidions de nous saisir de ce sujet particulièrement intéressant.
Article 40 et état D
La commission adopte les crédits du compte d'affectation spéciale Gestion du patrimoine immobilier de l'État, non modifiés.
Articles additionnels après l'article 76 : Dispositions relatives au patrimoine immobilier des personnes publiques
La commission examine les amendements II-CF409, II-CF408 et II-CF410 du rapporteur spécial.
L'amendement II-CF409 est issu des travaux que j'ai menés, dans le cadre du printemps de l'évaluation budgétaire, sur le patrimoine immobilier des universités, et qui ont donné lieu au dépôt d'une proposition de résolution. Il se veut une réponse aux difficultés que j'avais constatées concernant le patrimoine de la chancellerie des universités de Paris. Celui-ci, constitué de biens d'apparat légués à la chancellerie, tels le domaine de Richelieu où la villa Finaly à Florence, très peu utilisés et créant d'importants déficits comblés par des subventions publiques, avait déjà été la cible de sévères critiques de la Cour des comptes en 2014. Ces critiques ont été renouvelées par le Conseil de l'immobilier de l'État en 2015 et en 2018. Cinq ans après le constat de la Cour, la gestion de ces biens pose de façon toujours aussi criante la question de leur devenir et de leur utilité pour les universités parisiennes, sans qu'aucune solution économiquement viable ait encore été trouvée.
Aux termes des dispositions du code général de la propriété des personnes publiques, la vigilance à l'égard de l'utilité de tels biens relève certes de la responsabilité des établissements eux-mêmes et des autorités de tutelle. Toutefois, compte tenu des risques encourus pour les finances publiques, tenues de combler les déficits et charges ainsi générés – près de 200 000 euros de déficit annuel et plus de 400 000 euros de travaux à financer pour la villa Finaly –, il me semble indispensable de durcir le régime en imposant une nouvelle restriction à la liberté d'acceptation de tels dons et legs. L'amendement II-CF409 vise donc à interdire l'intégration dans le patrimoine des universités de biens immobiliers grevés de charges financières et de restrictions d'utilisation qui limiteraient leur libre usage au bénéfice de l'établissement universitaire concerné.
L'amendement II-CF408 est un amendement d'appel qui vise à ouvrir aux universités la possibilité de recourir aux formes de sociétés publiques ou privées pour la gestion et la valorisation de leur patrimoine immobilier – pistes de réflexion qui doivent être approfondies dans le cadre des trois missions engagées par le Gouvernement sur le sujet.
L'amendement II-CF410 vise, quant à lui, à modifier les règles d'affectation du CAS afin que les ministères occupant le patrimoine immobilier de l'État soient incités à privilégier le mode de valorisation de ce patrimoine le plus avantageux pour l'État, en les intéressant aux gains de gestion réalisés.
En ce qui concerne le troisième amendement, je pense que des dispositions ont été déjà prises afin d'inciter certains ministères – notamment la défense et les affaires étrangères – à céder des actifs qu'ils n'utilisaient plus. L'idée de notre rapporteur est donc de généraliser ce système. Pourquoi pas ? Au demeurant, l'amendement II-CF410 n'est pas très impératif puisqu'il renvoie à un arrêté ministériel le soin de fixer le taux, dans la limite de 50 %.
Par dérogation à la règle d'affectation du CAS, je propose en effet, à travers cet amendement, lorsque l'octroi de droits à caractère immobilier sur un immeuble de l'État apparaît susceptible de dégager un produit supérieur à celui de son éventuelle cession, que seuls 50 % des recettes tirées de ces droits soient inscrits au compte d'affectation spéciale. Des crédits supplémentaires correspondant à 50 % du produit de ces droits peuvent être ouverts, par arrêté du ministre chargé des finances, au bénéfice du programme assurant le financement des dépenses immobilières du service administratif ou de l'établissement public auquel l'immeuble était précédemment affecté. Je prévois également un décret précisant les modalités d'application de l'article.
Il est surprenant d'inscrire à la fin de l'alinéa que le produit d'une cession doit tenir compte des prix enregistrés lors du paiement des droits de mutation dans la même commune ou le même arrondissement au cours des deux années précédant l'opération.
Il s'agit seulement d'une précision, pour que l'intention du législateur soit claire. Sont visés les prix constatés soit de la commune, soit dans l'arrondissement dans le cas de Paris, Lyon et Marseille.
L'amendement II-CF408 est un amendement « anti-châteaux », si je comprends bien ! Il s'agit d'éviter l'acceptation de donations entraînant des charges telles qu'elles risquent de ruiner l'établissement bénéficiaire.
On a constaté, notamment pour le domaine de Richelieu, que certaines contraintes liées à l'acte de donation en limitent l'utilisation. Cela pose un réel problème ! Le domaine pourrait accueillir de nombreux projets, de campus universitaire ou d'animation, notamment sportives. L'objectif est d'éviter qu'à long terme une donation ou un legs ne se révèle un piège. Il s'agit donc d'inciter les personnes prêtes à faire ces dons ou legs à ne pas les assortir de trop de limites. En tant qu'élu local, j'ai souvent refusé des donations à ma commune qui auraient entraîné trop de contraintes.
Monsieur le rapporteur spécial, étant notaire de profession, vous savez qu'il est possible de se faire relever d'une partie des charges par une décision du tribunal de grande instance.
Vous avez raison, mais ce n'est pas aussi évident : cela peut donner lieu à des contestations, notamment de la part d'héritiers, visant à remettre en cause le don ou le legs. De ce fait, les services hésitent souvent à entamer la démarche. J'ai bien conscience que ma proposition peut constituer une limitation dans les dons et legs, mais il s'agit de sécuriser les bénéficiaires quant à leur capacité de les recevoir.
La commission adopte successivement les amendements II-CF409 (II-899), II-CF408 (II-901) et II-CF410 (II-902).
Puis elle passe à l'examen des crédits de la mission Remboursements et dégrèvements.
Cette mission est la plus importante en volume du budget général de l'État : les crédits ouverts s'établiront à 141 milliards d'euros en 2020, soit 33 % des recettes fiscales brutes et près de la moitié des recettes nettes. Elle enregistre une hausse de 6 milliards d'euros par rapport à la loi de finances initiale de 2019, mais un léger recul – de 2 milliards d'euros – par rapport à la prévision révisée. Depuis le début des années 2000, les remboursements et dégrèvements augmentent à un rythme régulier, de 4,6 % par an en moyenne. Ils s'établissaient à 61 milliards d'euros en 2001 ; depuis lors, ils ont plus que doublé.
La mission comporte deux programmes. S'agissant du premier, le programme 200, relatif aux impôts d'État, les dépenses sont en recul de 5,8 milliards d'euros par rapport à la prévision révisée. Trois facteurs permettent d'expliquer cette évolution.
Premièrement, la mise en oeuvre du prélèvement à la source conduira à une hausse de la dépense de 3 milliards d'euros environ, du fait notamment des impacts conjugués de la restitution des trop-perçus – plus 9,6 milliards – et de la non-reconduction du crédit d'impôt de modernisation du recouvrement (CIMR) – moins 6,1 milliards. L'acompte de crédits et de réductions d'impôts sera reconduit en 2020, pour un montant de 5,7 milliards d'euros, soit 200 millions de plus que l'année dernière.
Deuxièmement, la suppression du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) au 1er janvier 2019 conduira à un important dégonflement de la dépense, jusqu'à l'extinction complète des créances. En 2020, cette évolution devrait expliquer pour près de 10 milliards d'euros de baisse.
Troisièmement, les dépenses associées aux contentieux fiscaux devraient également connaître un léger recul, mais cette remarque doit être nuancée à deux égards. D'une part, concernant les contentieux individuels, la baisse attendue de ceux portant sur l'impôt sur les sociétés (IS) ne constituera qu'un retour à la normale. Comme je l'avais relevé à l'occasion des deux derniers rapports de contrôle de l'exécution, les décharges exceptionnelles d'IS se sont établies à des niveaux très élevés en 2017 – 1,2 milliard – et en 2018 – 2 milliards –, et pourraient atteindre 3 milliards en 2019 ; elles devraient retrouver des niveaux plus bas et acceptables en 2020. D'autre part, concernant les contentieux de série, la prévision pour 2020 s'établit à un niveau qui reste élevé : 2,3 milliards d'euros, dont 1,1 milliard d'euros au titre du seul contentieux Accor. Les risques associés aux contentieux fiscaux sont donc toujours très élevés.
À cet égard, la mission d'information sur la gestion du risque budgétaire associé aux contentieux fiscaux et non fiscaux de l'État, présidée par notre collègue Véronique Louwagie, dont le rapporteur était Romain Grau, et dont je faisais partie, avait formulé plusieurs propositions à l'automne dernier. Deux d'entre elles étaient destinées à améliorer l'information du Parlement et de la commission des finances sur ces enjeux. Madame Louwagie a déposé deux amendements traduisant les propositions du rapport. Nous les examinerons tout à l'heure, et j'émettrai un avis favorable.
S'agissant d'une question proche, celle des transactions fiscales, je vous proposerai, pour ma part, un amendement faisant suite aux travaux réalisés lors du printemps de l'évaluation. Nous disposons d'informations intéressantes sur la manière dont l'administration fiscale utilise les outils à sa disposition pour minorer les impositions dues par les contribuables, mais ces informations gagneraient à être complétées. Je vous proposerai donc d'étendre le champ du rapport prévu à l'article L. 251 A du livre des procédures fiscales (LPF), portant sur les remises et transactions en matière fiscale, à d'autres éléments tels que les règlements d'ensemble et les conventions judiciaires d'intérêt public conclues en matière fiscale.
S'agissant du second programme de la mission, le programme 201, relatif aux impôts locaux, le budget 2020 est marqué par la poursuite de la montée en charge du dégrèvement de taxe d'habitation pour 80 % des ménages, en hausse de près de 7 milliards d'euros. Cela portera son coût total à 14 milliards d'euros. J'ai rappelé à de nombreuses reprises ma position concernant la réforme de la taxe d'habitation : l'intention de redonner du pouvoir d'achat est certes louable, mais le faire par la suppression de la taxe d'habitation est, à mon sens, une erreur. Cette mesure aura pour conséquence d'affaiblir massivement le lien entre le citoyen et l'impôt et de déstabiliser les finances de nombreuses collectivités. De plus, les mesures du PLF pour 2020 destinées à compenser cette suppression ne sont pas satisfaisantes.
Enfin, les montants de dégrèvements contentieux et gracieux portant sur la taxe foncière resteront très élevés en 2020 – plus de 1,2 milliard d'euros –, du fait du nombre significatif de transactions immobilières réalisées au cours des dernières années. Les services de la publicité foncière n'étant toujours pas en mesure de régulariser le flux, je vous proposerai d'adopter un amendement demandant un rapport afin d'appeler l'attention du Gouvernement sur le sujet.
Les remboursements et dégrèvements représentent, en 2019, plus du tiers des recettes fiscales brutes de l'État, et ils augmentent encore de 4 % cette année à cause de l'élargissement de la suppression de la taxe d'habitation aux 20 % les plus riches. De ce fait, l'action 03 du programme 201 augmente de 28 %. En dix ans, la part des recettes fiscales brutes captées par les remboursements et dégrèvements a crû de 15 points. Pour nous, c'est l'illustration d'une politique fiscale fondée sur la multiplication des dérogations, ce qui témoigne d'un manque total de cohérence globale de la politique, mais aussi de lisibilité pour les citoyens car, bien évidemment, à la fin, c'est autant d'argent qui manque dans les caisses de l'État.
Mme Olivia Gregoire, vice-présidente, remplace M. Éric Woerth pour présider la séance.
J'évoque depuis des années le sujet des dégrèvements mais également celui des exonérations, des abattements, et de leur non-compensation aux collectivités locales. Tous les ans, les ministres nous accordent qu'il s'agit d'un véritable problème mais ne s'en occupent pas beaucoup. Cela représente pourtant des pertes de recettes importantes – 4 à 5 milliards d'euros –, en particulier pour les communes les plus défavorisées, car ce sont elles qui cumulent le plus d'abattements et de dégrèvements de taxe d'habitation et de taxes foncières pour les bailleurs. Les rapports qui sortent tous les ans le soulignent à chaque fois. Il faudra vraiment s'en occuper sérieusement un jour.
Monsieur Coquerel, vous avez raison sur le caractère inflationniste de cette mission tous les ans. Cela n'est guère problématique du point de vue des règles comptables, puisque les crédits sont évaluatifs et non limitatifs. Il n'en demeure pas moins qu'avec le CICE, au cours des dernières années, et maintenant avec la taxe d'habitation, la mission connaît une inflation en volume.
En ce qui concerne la compensation des exonérations d'impôts locaux, je rebondis sur l'intervention de monsieur Pupponi pour dire à madme la présidente, comme je l'ai déjà demandé au ministre la nuit dernière, qu'il serait bon que nous ayons le rapport, qui devait être produit au plus tard le 30 septembre, sur les compensations, d'exonération de fiscalité locale avant d'examiner les crédits de la mission Relations avec les collectivités territoriales, qui nous donnera l'occasion d'en parler.
Article 38 et état B
La commission adopte les crédits de la mission Remboursements et dégrèvements, non modifiés.
Article additionnel après l'article 78 : Rapport sur les remises gracieuses et transactions
La commission examine l'amendement II-CF872 de la rapporteure spéciale.
Il s'agit d'étendre le champ du rapport sur les remises gracieuses et transactions, en y incluant les règlements d'ensemble et les conventions judiciaires d'intérêt public. Il fait suite aux travaux menés au printemps.
La commission adopte l'amendement II-CF872 (II-888
Articles additionnels après l'article 78 : Rapports sur les contentieux fiscaux et non fiscaux de l'État
Elle examine ensuite les amendements II-CF322 et II-CF323 de Mme Véronique Louwagie.
Ces deux amendements font suite à la mission d'information relative à la gestion du risque budgétaire associé aux contentieux fiscaux et non fiscaux de l'État, que nous avons menée avec Romain Grau.
L'amendement II-CF322 reprend la proposition 18, qui recommandait de transmettre chaque semestre, aux présidents et aux rapporteurs généraux des commissions des finances des deux assemblées, un rapport présentant l'état des risques budgétaires associés aux contentieux fiscaux, devant les juridictions nationales et européennes, et de prévoir une information de la commission à huis clos, sous la forme d'une audition du ministre chargé du budget. La mission d'information avait, en effet, constaté le faible niveau d'information du Parlement concernant les dépenses contentieuses, elles-mêmes insuffisamment budgétées.
L'amendement II-CF323 reprend la proposition 7 de la mission, qui recommandait de mieux prendre en compte les risques et leurs éventuelles conséquences budgétaires dès le stade de l'autorisation, en joignant au projet de loi de finances une annexe présentant, de manière synthétique, les éventuelles conséquences budgétaires associées aux procédures contentieuses et quasi contentieuses en cours. L'annexe pourrait prendre la forme d'un jaune budgétaire, et couvrirait l'ensemble des risques contentieux pesant sur le budget de l'État.
Avis favorable à ces deux amendements issus du rapport d'information de madame Louwagie et de monsieur Grau. Cela nous sera très utile.
S'agissant de l'amendement II-CF322, il s'agit d'une information extrêmement utile que nous n'avons pas. En revanche, pour ce qui est du jaune budgétaire, la mesure sera beaucoup plus difficile à mettre en oeuvre, à mon sens.
La commission adopte successivement les amendements II-CF322 (II-889) et II-CF323 (II-890.
Article additionnel après l'article 78 : Rapport sur les difficultés d'enregistrement des transactions immobilières
La commission examine l'amendement II-CF873 de la rapporteure spéciale.
L'amendement vise à demander un rapport sur les difficultés d'enregistrement des transactions immobilières. Les représentants des services fonciers nous ont fait part, en audition, de problèmes pour lesquels il faudrait identifier des solutions.
Nous avons la chance d'avoir un notaire à la commission des finances. Les droits d'enregistrement sur les transactions immobilières, ce sont les notaires qui les perçoivent lors de la vente. Y aurait-il des problèmes de transfert entre les offices et l'administration fiscale ?
Le problème ne porte pas sur les droits d'enregistrement mais sur le délai de publication des mutations, qui conduit à de nombreux dégrèvements de taxes foncières – 1,3 milliard d'euros en 2018 –, les avis d'imposition étant adressés aux anciens propriétaires, qui font ensuite l'objet d'une régularisation.
L'acte de vente doit être publié dans le mois. Il est ensuite traité par le service de la publicité foncière. C'est là qu'il prend un grand retard, que je suis bien en peine d'expliquer, alors même que cela passe par des procédures dématérialisées via Téléactes.
Lors des auditions, des solutions semblaient se profiler, notamment en matière de dématérialisation. La situation devrait s'améliorer.
Au niveau budgétaire, s'agit-il bien d'une opération neutre, dans la mesure où si l'on dégrève un contribuable, on en impose un autre ?
Effectivement, budgétairement, c'est neutre, puisque, à la fin, quelqu'un paiera la taxe foncière. Mais cela crée un flux très important de dégrèvements, et engendre des coûts de gestion importants.
La commission adopte l'amendement II-CF873 (II-891
Puis elle en vient à l'examen des crédits de la mission Justice.
Je ne peux que réitérer les interrogations et les doutes que m'inspire depuis plusieurs exercices la lecture des programmations du ministère de la justice.
Le budget pour 2020 s'inscrit dans la continuité des exercices précédents : il affiche une inflation des moyens et gage l'amélioration des performances de la justice sur des réformes procédurales d'une portée encore très incertaine. Pour être inédit, le niveau des crédits et des emplois n'en laisse pas moins entière une question essentielle : permettent-ils de satisfaire les besoins fondamentaux du service public de la justice et des justiciables ?
En premier lieu, on s'étonnera de ce que le projet de loi de finances pour 2020 tende à s'affranchir de la trajectoire budgétaire approuvée dans la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice. Alors que nous avons voté ce texte il y a sept mois à peine, nous ne sommes qu'à la moitié des 400 millions d'euros supplémentaires prévus ! La ministre de la justice nous a expliqué hier, en commission des lois, que l'écart est lié à des problèmes dans le déroulement des opérations. Mais, dans ce cas, on peut s'interroger sur la sincérité même de la loi de programmation ! Ce n'est pas dans l'intervalle des sept mois que la ministre a découvert ces éléments.
En second lieu, nous constatons que la maquette de performance pour 2020 marque peu d'inflexions significatives du point de vue des indicateurs censés évaluer le fonctionnement de la justice. Leur amélioration se révèle souvent conditionnée par les réalisations attendues de la loi de programmation. D'ailleurs, l'adaptation de la maquette de performance aux nouveaux objectifs rend parfois difficile toute prévision, faute d'outils capables de consolider des données jusque-là inexistantes ou peu exploitées. On nous renvoie à la loi de programmation, sans se doter des moyens qu'elle avait prévus…
En ce qui concerne la justice judiciaire, les délais moyens de traitement des procédures civiles reculent de manière très limitée. En fait, il n'y a pas vraiment d'amélioration. Le projet annuel de performance se révèle très prudent quant à l'impact de trois mesures touchant à l'organisation judiciaire : la constitution des pôles sociaux des tribunaux de grande instance au 1er janvier 2020, qui affecte directement la charge de travail des cours d'appel ; la création des tribunaux judiciaires ; l'organisation d'un contentieux de la protection.
Pour ce qui est de l'administration pénitentiaire, on peut sans doute se féliciter de la volonté affichée de maintenir la qualité de la prise en charge des personnes placées sous main de justice. Néanmoins, le projet annuel de performance n'offre la perspective que d'une réduction relativement limitée de la surpopulation carcérale. On est bien loin des 15 000 places promises par le candidat Macron. Sans doute espère-t-il un deuxième mandat pour réaliser sa promesse ! La volonté d'atteindre de tels objectifs était-elle réelle ou la ministre de la justice ne respecte-t-elle pas les objectifs fixés par le Président de la République ?
En dernier lieu, je ne peux qu'appeler à la nécessaire vigilance quant à l'évolution des dépenses exposées pour l'aide juridictionnelle. Certes, l'augmentation des autorisations d'engagement et des crédits de paiement du programme 101 découle essentiellement de l'affectation au budget général de deux ressources attribuées jusque-là au Conseil national des barreaux (CNB), à savoir le prélèvement sur la taxe spéciale sur les conventions d'assurance et le produit de certaines amendes pénales. En outre, à périmètre constant, le montant des crédits recule de 13 millions d'euros, compte tenu de deux facteurs : une hausse moins importante que prévu de la dépense tendancielle ; une ressource exceptionnelle de 9 millions d'euros. Cela étant, là aussi, les effets potentiellement inflationnistes de la réforme menée entre 2015 et 2017 demeurent. Je dois dire que la garde des sceaux n'a pas vraiment apporté d'éléments de réponse aux questions que j'ai posées hier.
Du fait de plusieurs doutes qui subsistent, je préconise l'abstention dans le vote sur les crédits de la mission. Il n'est pas normal que six mois après la promulgation de la loi de programmation, le Gouvernement ne respecte pas ce que le Parlement a voté. Cela pose la question de la crédibilité de la parole gouvernementale. Je tiens à alerter l'ensemble des commissaires sur cette situation anormale et sur le fait que le Gouvernement ne respecte pas ses engagements.
Hier, nous avons en effet auditionné la ministre en commission des lois. À entendre monsieur Hetzel, j'ai le sentiment que nous n'avons pas assisté à la même réunion ! Madame la garde des sceaux a expliqué que la baisse du budget de 200 millions d'euros faisait suite à l'annulation par des municipalités de trois projets d'implantation d'établissements pénitentiaires en raison de problèmes d'ordre foncier. Pour le reste, les débats feront leur oeuvre dans l'hémicycle.
Tout comme Bruno Questel, je pense que nous n'avons pas assisté à la même audition ! Le budget relatif à mon programme est en augmentation. L'accès au droit et la justice de proximité seront garantis. J'invite tous mes collègues à voter le budget.
La commission en vient à l'examen des amendements à la mission Justice.
Article 38 et État B
La commission est saisie de l'amendement II-CF461 de Mme Sabine Rubin.
L'amendement vise à transférer 53,3 millions d'euros du programme 166 à une mission d'intérêt général, à savoir l'accès au droit. On voit ici concrètement le manque à gagner pour l'accès au droit du fait du recours inconsidéré aux partenariats public-privé.
Je note votre argument et votre volonté de redéployer des crédits. Néanmoins, il s'agit de dépenses réelles qui sont budgétées. Les transférer reviendrait à priver les juridictions judiciaires de ressources. Retrait ou avis défavorable.
Le transfert des crédits relève uniquement du titre 5 et n'affecte donc en aucun cas les moyens humains et financiers.
La commission rejette l'amendement II-CF461.
Puis elle passe à l'examen de l'amendement II-CF254 de M. Philippe Dunoyer.
Le centre pénitentiaire de Nouméa, dénommé Camp Est, héberge actuellement 580 détenus pour une capacité de 314 places, soit une surpopulation de 144 %. En l'absence du nouveau schéma directeur immobilier qui devait être défini pour préciser les travaux de réhabilitation, d'agrandissement et de réorganisation de la prison, il convient d'augmenter l'enveloppe de maintenance annuelle de 110 millions d'euros de crédits de paiement pour l'année 2020, parce qu'elle est insuffisante pour mettre en place un programme ambitieux de rénovation du Camp Est.
J'entends bien vos arguments, qui sont tout à fait légitimes. Cela étant, le budget est en augmentation et, surtout, on peut considérer qu'un fléchage se fera à l'intérieur de l'enveloppe. Je vous propose d'avoir cet échange dans l'hémicycle avec la garde des sceaux. Avis défavorable à ce stade.
La commission rejette l'amendement II-CF254.
Elle examine l'amendement II-CF685 de Mme Sabine Rubin.
L'amendement vise à transférer une partie des crédits dus au titre de cette gabegie que sont les partenariats public-privé pour compenser la diminution brutale de 7 millions d'euros entre le 1er janvier 2019 et le 1er janvier 2021 des fonds alloués aux associations intervenant en milieu carcéral et aidant à la réinsertion. Nous sommes surpris et inquiets de la baisse brutale de 24,2 % du budget consacré à la prévention de la récidive et à la réinsertion. Les subventions aux associations culturelles et sportives pour les personnes détenues subissent une baisse de près de 32 % ! Quelle est la raison d'une coupe aussi subite et drastique ?
Monsieur Coquerel, vous l'expliquez vous-même dans votre exposé des motifs : la baisse des crédits a eu lieu l'année dernière. Une partie des crédits a été intégrée aux dépenses de réinsertion couvertes par des crédits du titre 3. Le mouvement de crédits que vous proposez reviendrait à amputer les ressources programmées pour permettre à l'administration centrale de réaliser certains projets essentiels, comme le plan de transformation numérique ou la modernisation.
La commission rejette l'amendement II-CF685.
Puis elle étudie l'amendement II-CF589 de M. Michel Castellani.
L'amendement vise à augmenter de un million d'euros les charges de personnel de l'action 04 Soutien et formation par une diminution équivalente des crédits de l'action 04 Gestion de l'administration centrale du programme 310. Tout le monde connaît le surpeuplement des prisons, l'ancienneté du parc et la nécessité d'accompagner davantage le personnel pénitentiaire dans la politique de formation. D'une façon générale, il convient d'engager une politique volontariste en faveur des prisons.
Votre amendement rejoint l'amendement II-CF254. La question devant être envisagée de manière globale, je vous invite à interroger directement la garde des sceaux. Retrait ou avis défavorable.
Je maintiens mon amendement et vous précise que nous avons eu l'occasion de discuter bien des fois avec madame la garde des sceaux.
La commission rejette l'amendement II-CF589.
Elle examine l'amendement II-CF255 de M. Philippe Dunoyer.
L'amendement vise à traduire l'engagement pris de généraliser le bracelet anti-rapprochement dans le cadre de la lutte contre les violences faites aux femmes. Le Gouvernement avait annoncé qu'un budget de 5,6 millions d'euros serait nécessaire la première année pour mettre en oeuvre cet outil.
Madame Magnier, vous avez raison sur le fond. Alors que le texte de loi, qui a été débattu il y a quelques jours dans l'hémicycle, n'est pas encore adopté, la garde des sceaux a communiqué sur le sujet et annoncé que des moyens spécifiques seraient dégagés. Comme vous, j'ai regardé le bleu budgétaire pour voir si un montant avait été spécifiquement fléché : ce n'est pas le cas. Nous en discuterons avec la garde des sceaux. Sagesse et, à titre personnel, avis favorable.
Ce ne serait pas mal que la commission adopte cet amendement, afin d'obtenir une réponse très précise de madame la garde des sceaux en séance publique.
La commission rejette l'amendement II-CF255.
Elle passe à l'examen de l'amendement II-CF384 de M. Philippe Dunoyer.
L'amendement vise à mettre en oeuvre l'une des préconisations du rapport d'information de la délégation sénatoriale aux droits des femmes sur l'évaluation des dispositifs de lutte contre les violences au sein des couples. L'objectif est de généraliser la convocation de l'auteur de violences par voie d'huissier, pour réduire les délais. Actuellement, le code civil permet l'envoi de la convocation devant le juge aux affaires familiales (JAF) par tout moyen. Or l'auteur présumé des violences peut tout à fait ne pas aller chercher son recommandé, ce qui prolonge d'autant le délai de délivrance de l'ordonnance. C'est pourquoi nous proposons un budget de 50 000 euros, afin de couvrir les coûts de convocation par huissier de justice. L'amendement ne coûte pas très cher et pourrait vraiment réduire les délais de convocation. C'est une mesure de bon sens.
J'approuve cet amendement. Le délai moyen de traitement des procédures civiles n'est d'ailleurs pas disponible. De la même façon, une demande de tutelle ou de curatelle pour des personnes âgées prend un temps considérable. J'ai appelé un président de tribunal qui m'a répondu que, de fait, ce n'était pas là que les moyens étaient mis en priorité et qu'il fallait des mois pour obtenir une décision toute simple. Monsieur le rapporteur spécial, ne pourrait-on pas adopter l'amendement et demander à madame la ministre des chiffres sur le délai moyen de traitement des procédures, qui n'est pas renseigné depuis 2017 ?
Je suis très sensible aux arguments développés par madame Magnier et par monsieur de Courson. C'est un vrai sujet. Le fait que l'administration ne renseigne pas le bleu sur cette question montre bien qu'elle n'est pas suffisamment pilotée. C'est un amendement de bon sens auquel je suis extrêmement favorable. D'un point de vue budgétaire, on ne fait que déplacer l'épaisseur du trait, tout en demandant à l'administration judiciaire et à la Place Vendôme de piloter le système judiciaire et d'améliorer son efficacité. Monsieur Questel nous disait plus tôt que la différence de 200 millions d'euros dans le budget se justifiait par un problème de terrains qui n'ont pas été obtenus. Je peux vous citer des endroits où les terrains sont disponibles, sans que cela avance plus. Ce sont des arguments de façade. Nous sommes dans notre rôle quand nous disons que le système n'est pas suffisamment piloté. Nous devons nous assurer que les deniers publics permettent une amélioration du pilotage.
La commission rejette l'amendement II-CF384.
Je ne reviendrai pas sur ce qu'ont dit les rapporteurs pour avis, qui exprimaient la position de notre groupe. Avec le rapporteur spécial Hetzel, ainsi que les rapporteurs spéciaux de la mission Sécurités, nous avons demandé à la Cour des comptes un rapport sur la consolidation des moyens liés à la lutte contre le terrorisme. Il me semblait important de rappeler que les rapporteurs spéciaux ne travaillent pas seulement sur leur mission, mais également entre eux, pour disposer d'une vision plus transversale de l'utilisation des crédits.
Au risque de paraître redondant avec le rapporteur spécial, je crois qu'il faut vraiment souligner la double insincérité du budget de la mission Justice. Elle est d'abord politique, parce que la loi de programmation pour la justice a été votée il y a six mois et que des engagements très forts avaient été pris par la ministre devant la représentation nationale. Or, dans le budget 2020, la justice est la sacrifiée des économies budgétaires. La hausse est en trompe-l'oeil.
L'insincérité est aussi budgétaire. S'agissant des places de prison, par exemple, le taux de suroccupation continue d'augmenter. Les 15 000 places ne sont évidemment pas atteintes et même les 7 000 places promises dans le quinquennat ne seront probablement pas livrées. Je veux bien que l'on fasse peser la faute sur les collectivités territoriales, mais il faut voir comment l'État se comporte lorsqu'il vient les démarcher pour des terrains, souvent à la hussarde. Je crains que les crédits inscrits pour les établissements pénitentiaires ne soient pas consommés. De même, pour ce qui est des recrutements d'agents pénitentiaires, on n'arrive pas à remplir les concours pour les surveillants de prison, et les promotions sont en général de 20 % à 30 % insuffisantes pour pourvoir tous les postes. L'augmentation des crédits ne sert à rien, si l'on ne renforce pas l'attractivité du métier. Malheureusement, hier, en commission des lois, la garde des sceaux ne nous a pas rassurés. L'augmentation des crédits de la justice restera des chiffres écrits sur du papier, sans traduction dans les faits.
Si la surpopulation carcérale existe depuis longtemps, elle ne cesse de s'aggraver. Dans un centre pénitentiaire neuf, livré il y a à peine deux ans, doté de quelque 566 places, on commence à installer dans des cellules prévues pour un seul prisonnier des lits par terre pour en doubler la capacité. Pour cette raison en particulier, ainsi que pour d'autres tenant à la faiblesse globale du budget de la justice au regard de ce que lui consacrent les autres pays européens, le groupe Socialistes et apparentés s'abstiendra.
J'entends que la majorité est très satisfaite de ce budget, pourtant insincère à plus d'un titre. Sur les 7,7 milliards d'euros annoncés, il manque 100 millions d'euros, si l'on veut bien tenir compte qu'il est augmenté de ressources extrabudgétaires auparavant affectées au Conseil national des barreaux. Cette technique d'un budget affiché ne correspondant pas au budget réel est malheureusement souvent utilisée. Qui plus est, la loi du 23 mars prévoyait la création de 1 620 ETP, alors que le budget n'en permet que 1 520. Enfin, le coût caché des partenariats public-privé est très important – la Cour des comptes l'a d'ailleurs relevé. Par exemple, dans le budget 2018, les dépenses s'élevaient à 169 millions d'euros en AE et 251 millions d'euros en CP, alors que le montant réel des dépenses, au titre de ces partenariats, a progressé de 28 % en AE et de 35 % en CP. Cela représente environ un milliard d'euros d'investissements, ce qui nous semble particulièrement problématique.
Nous prenons acte de la hausse des crédits. Mais un point plus particulier attire notre attention, celui de l'administration pénitentiaire. Nous savons que les conditions de travail nécessitent un engagement de la part de l'État. La copie semble globalement correcte, mais il faudra veiller à ce que ces intentions se prolongent dans la durée. Un immense travail, notamment, reste à accomplir dans les centres pénitentiaires. La réforme a mobilisé contre elle des milliers de professionnels, qui l'accusaient de rendre la justice moins accessible, plus chère et plus répressive, et de ne pas prendre en compte la fracture numérique. Nous ne pouvons qu'encourager la hausse du budget, en rappelant qu'elle doit se faire au service des citoyens et des territoires.
Les crédits de la mission sont en augmentation de 200 millions d'euros ; 1 520 ETP sont créés ; les crédits sont fléchés vers la création de 7 000 places de prison. Je ne peux pas laisser dire que le budget serait insincère ! Il marque bien la volonté de l'État d'assumer son rôle régalien et répond à une demande de justice de proximité de qualité.
Dans le domaine majeur de la justice, nous partageons les priorités du Gouvernement, qui consistent à mettre en application la nouvelle organisation des juridictions, à réduire les délais de jugement, à endiguer la surpopulation carcérale et à mener à bien la transformation numérique de la justice. Conformément à l'ambition traduite dans la loi de programmation des finances publiques et dans la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, les moyens du ministère de la justice augmenteront de près de 3 % en 2020. Le budget total de la mission s'élève à 9 milliards d'euros en autorisations d'engagement et à 9,3 milliards d'euros en crédits de paiement.
Cette trajectoire permettra, en particulier, d'assurer le financement d'une première vague d'établissements pénitentiaires, dans le cadre du programme immobilier visant à livrer 15 000 nouvelles places de prison à l'horizon 2027. Seront également financées la poursuite des opérations immobilières judiciaires en cours et programmées, la construction de nouveaux centres éducatifs fermés et la poursuite du plan de transformation numérique.
Nous sommes inquiets du niveau de financement du programme 166, relatif à la justice judiciaire, qui regroupe les crédits alloués aux juridictions, à leur fonctionnement et à l'enregistrement des décisions judiciaires. Si l'on peut noter la poursuite du comblement de vacances des postes de magistrats, le nombre de postes nouvellement créés demeure trop faible. Sur le plan pénal, la nouvelle politique des peines doit être mise en oeuvre et un plan de lutte contre la criminalité organisée et la délinquance économique et financière est annoncé. Pourtant, l'action 02 sur la conduite de la politique pénale est en baisse de 27 millions d'euros en CP.
Tout comme lors de l'examen de la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, le groupe UDI, Agir et Indépendants soutient l'effort budgétaire fait en faveur de la justice en votant ces crédits, qui restent cependant insuffisants pour endiguer une sous-budgétisation chronique.
Je remercie le rapporteur spécial pour son travail. Le budget de la justice est en augmentation. Notre gouvernement ne peut pas rattraper tout le retard accumulé depuis des années. La feuille de route de la ministre de la justice est bien respectée. Notre groupe votera les crédits.
La commission adopte les crédits de la mission Justice, non modifiés.
Après l'article 76
La commission examine l'amendement II-CF908 de la commission des lois.
L'amendement vise à prolonger d'une année l'expérimentation relative à la tentative de médiation familiale préalable obligatoire, laquelle n'a été réellement lancée qu'en 2018, alors que son terme est prévu pour la fin de l'année 2019. Compte tenu de ses premiers résultats encourageants et de la demande unanimement exprimée par les expérimentateurs, il convient de la prolonger d'une année, afin de pouvoir disposer du recul nécessaire pour tirer les conclusions sur une éventuelle généralisation à toutes les juridictions, avec comme objectif de favoriser la diffusion de la médiation familiale et de diminuer le nombre de saisines contentieuses.
Vous avez raison de vouloir étendre la durée de l'expérimentation, pour toutes les raisons avancées dans votre exposé sommaire. Avis favorable.
La commission adopte l'amendement II-CF908 (II-728
Je regrette un peu que l'amendement II-CF384 n'ait pas été adopté. Il ne s'agissait que d'une enveloppe de 50 000 euros qui aurait permis de répondre à une véritable attente. Il est dommage de ne pas avoir réussi à se mettre d'accord pour si peu, alors que l'efficacité de notre système judiciaire était en jeu. Notre Parlement s'honorerait d'avoir, sur de tels sujets, une approche consensuelle plutôt que dogmatique.
La commission en vient à l'examen des crédits de la mission Immigration, asile et intégration.
La mission Immigration, asile et intégration recouvre deux programmes : le 104 Intégration et accès à la nationalité française et le 303 Immigration et asile. Le montant cumulé des crédits de paiement de cette mission s'établit à 1,818 milliard d'euros et celui des autorisations d'engagement à 1,933 milliard d'euros. Comme cela a été rappelé dans la récente déclaration du Gouvernement sur la politique migratoire de la France et de l'Europe, ce budget s'inscrit dans un contexte marqué par une demande d'asile soutenue et une demande d'immigration légale en légère progression. Les moyens accordés tiennent compte de ce contexte, puisqu'ils sont en croissance de presque 8 % en crédits de paiement et de 4,5 % en autorisations d'engagement.
Dans un environnement budgétaire contraint et dans un contexte migratoire sous tension, le budget de cette mission traduit des choix forts que Jean-Noël Barrot et moi-même soutenons, en dépit de quelques réserves.
Le premier choix est de réduire la durée du traitement de la demande d'asile. Cette orientation se manifeste par la création de 200 postes au sein de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). Cet effort sans précédent correspond à une augmentation conséquente d'un quart des effectifs de cet opérateur.
Actuellement, le temps de traitement complet d'une demande d'asile par l'OFPRA et, en cas de contestation, par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) est d'environ un an. Cette durée est trop longue et pèse financièrement sur toute la chaîne de l'asile, qu'il s'agisse de l'hébergement ou du versement de l'allocation pour demandeur d'asile (ADA). Les recrutements projetés doivent inverser cette tendance.
Le deuxième choix est de prolonger les efforts entrepris en matière d'éloignement des étrangers en situation irrégulière. Hors dépenses d'investissement, les crédits dédiés au fonctionnement des centres de rétention administrative (CRA) et à l'éloignement des personnes en situation irrégulière progressent. Le programme tendant à créer 480 places nouvelles en rétention est confirmé. Au 15 septembre 2019, 389 places supplémentaires avaient été créées ; le PLF prévoit les crédits pour ouvrir 91 autres places et lancer une étude sur la création de places supplémentaires.
Le troisième choix est de poursuivre la politique d'intégration. En 2018, des orientations fortes ont été arrêtées ; le contrat d'intégration républicaine a été rénové en profondeur et un effort important a été accompli en matière de formation linguistique. On le sait, la maîtrise de la langue est la première clé de l'intégration. Le PLF confirme cette orientation en dotant le programme de 437 millions d'euros, soit 30 millions supplémentaires par rapport à la loi de finances pour 2019.
Jean-Noël Barrot et moi-même soutenons ces choix forts, non sans nuance. Nous n'ignorons pas que l'hébergement des demandeurs d'asile est sous tension mais nous notons que les engagements pris ont été tenus : en 2020, le dispositif national d'accueil atteindra près de 100 000 places, soit un pic historique. Ces deux dernières années, près de 16 500 places d'hébergement ont été créées.
En 2020, l'accent sera mis sur l'amélioration du fonctionnement du dispositif national d'accueil et la poursuite de sa restructuration. Nous notons avec satisfaction que le Gouvernement a choisi d'étendre le conventionnement pluriannuel des centres d'hébergement d'urgence (CHU), expérimenté avec succès en 2019, en mettant en oeuvre une proposition formulée par le Parlement lors du printemps de l'évaluation.
Nous observons que le PLF repose cependant sur une hypothèse favorable d'évolution de la demande d'asile. En 2020, le Gouvernement table sur une stabilisation de la demande d'asile et sur une baisse de 10 % des demandeurs d'asile sous procédure Dublin. Cette hypothèse nous paraît optimiste – trop peut-être. Depuis le début de l'année 2019, la demande d'asile a crû de 6,5 % auprès de l'OFPRA et de 12 % en préfecture. Les signes d'un tassement soudain de la demande asile nous paraissant incertains, nous émettons une réserve sur la prévision d'évolution de la demande d'asile retenue dans le PLF.
Le thème de mon avis budgétaire s'inscrit dans la continuité de l'excellent travail mené par les rapporteurs spéciaux lors du précédent printemps de l'évaluation. Si la commission a réfléchi aux mesures d'éloignement des étrangers sans titre de séjour, j'ai souhaité travailler sur la procédure en amont, afin de mieux comprendre la situation de ces personnes. L'objectif est de lutter de manière plus ciblée contre l'immigration irrégulière, tout en favorisant l'admission des personnes durablement intégrées dans notre pays.
Si l'on s'interroge sur les voies illégales de l'immigration en France, on observe tout d'abord que le franchissement de la frontière s'opère le plus souvent de manière légale, avec ou sans visa. C'est souvent le prolongement du séjour qui est irrégulier. Seul le système de contrôle des entrées et des sorties des frontières extérieures de l'Union (système EES) permettra à partir de 2022 de contrôler que la personne détentrice d'un visa a bien regagné son pays d'origine dans le délai prévu.
Les déboutés de la demande d'asile, environ deux tiers des demandeurs, représentent une proportion croissante des étrangers en situation irrégulière. Certains d'entre eux, notamment en provenance des pays d'origine sûre – 23 % de la demande actuelle – utilisent cette procédure comme une stratégie détournée de maintien provisoire et infondé sur notre territoire. Nombre de dispositifs se trouvent aujourd'hui saturés du fait de la non-anticipation des flux migratoires, notamment irréguliers. La procédure d'asile est menacée, alors même qu'elle devrait être sanctuarisée.
L'hébergement des personnes migrantes n'est pas satisfaisant et les conditions de rétention se dégradent, notamment d'un point de vue sanitaire. J'ai donc souhaité faire le point sur les outils qui doivent nous permettre de définir une politique migratoire plus circonstanciée. L'admission exceptionnelle au séjour est un outil intéressant en ce qu'il permet un traitement des demandes de régularisation au fil de l'eau. Il est cependant limité et hypocrite puisqu'il exige des personnes étrangères de fournir des preuves légales d'une présence irrégulière dont, en toute logique, elles ne devraient pas disposer.
Face à l'essor du travail clandestin dans beaucoup de secteurs sous tension, il est temps d'organiser la migration économique et de mettre cette question, sur laquelle nous avons d'importantes marges de progression, au coeur de notre projet migratoire. L'essor du dispositif Passeport talent doit nous inciter à aller plus loin.
La commission en vient à l'examen des amendements à la mission Immigration, asile et intégration.
Article 38 et état B
La commission est saisie de l'amendement II-CF46 du rapporteur spécial Jean-Noël Barrot.
Il s'agit de revaloriser de 200 000 euros la dépense affectée au financement de vacations de psychologues intervenant dans les centres de rétention administrative. Le projet annuel de performances joint au PLF indique qu'un crédit de 200 000 euros est prévu pour poursuivre le déploiement progressif de vacations de psychologues. Nous sommes également favorables à ce que les psychologues intervenant dans les CRA puissent également rencontrer des demandeurs d'asile ou des réfugiés hébergés dans le dispositif national d'accueil.
La commission adopte l'amendement II-CF46 (II-730
Le Président de la République s'est exprimé récemment, et à plusieurs reprises, sur ces questions – peut-être le fera-t-il encore dans les territoires ultramarins où il se trouve actuellement –, laissant paraître une évolution sensible de la politique migratoire de notre pays, assumée et courageuse. Or je n'en vois pas la traduction dans ce budget.
Il me semble, au contraire, que ce budget met en oeuvre une évolution très sensible de la politique en matière d'asile. L'augmentation des crédits de l'OFPRA est de 108 millions – 25 % du budget –, ce qui permet de créer 200 ETP, soit un quart des effectifs. Dans les conditions budgétaires que vous savez, il est rare que des opérateurs voient leurs effectifs croître à ce point ! Que ce soit en autorisations d'engagement ou en crédits de paiement, ce budget augmente nettement plus que la moyenne. Cela permet à la fois d'intensifier l'intégration, d'accélérer le traitement de la demande d'asile et de financer les CRA. Ce budget traduit des choix très forts et permet de soutenir concrètement les administrations concernées.
Ce n'est pas seulement la procédure de demande d'asile qui pose problème, mais le fait que la très grande majorité des demandeurs d'asile – les quatre cinquièmes – qui sont déboutés demeurent, semble-t-il, sur notre territoire, sans se voir appliquer les mesures d'éloignement.
On a le sentiment, effectivement, que le droit d'asile est détourné de sa mission première par des demandeurs qui ne sont pas issus de pays dans lesquels ils encourent un danger pour leur vie. Certains d'entre eux viennent profiter des lenteurs actuelles du système qui leur donne droit à un hébergement et à une allocation. Pour limiter ce type d'incitation, il convient de renforcer les effectifs de l'OFPRA et de ramener au minimum le délai de traitement des demandes des personnes originaires de pays sûrs.
S'agissant de la politique de reconduite aux frontières, il y a eu un effort d'investissement important l'année dernière pour les CRA. Toute une partie de cette politique ne transparaît pas dans le budget : il s'agit des discussions, en cours, avec les pays tiers. En effet, la faiblesse du taux de reconduite aux frontières s'explique par le fait que les pays européens où les migrants ont déposé une première demande d'asile, ou les pays dont ils sont originaires refusent – ou ont refusé – le retour de ces personnes. Il convient de signer des accords de réadmission avec les pays hors Union européenne, voire, le cas échéant, de les aider à se doter d'un système d'état civil. En Europe, un accord a été trouvé avec l'Allemagne pour que la réadmission des personnes « dublinées » se fasse dans de meilleures conditions : on se retrouvait dans une situation absurde où même le droit européen n'était pas respecté, les « dublinés » qui avaient vocation à retourner en Allemagne restaient en France et inversement. Suite à cet accord, les reconduites à la frontière ont nettement augmenté. Cela n'apparaît pas dans le budget mais l'intention est de préserver le droit d'asile, en évitant les contournements.
Je vous renvoie au rapport que Jean-Noël Barrot et moi-même avons écrit sur les mesures d'éloignement et sur l'aide au retour volontaire (ARV) dans le cadre du printemps de l'évaluation. L'année dernière, les éloignements aidés ont été plus nombreux que sur la décennie qui vient de s'écouler. Cette année, les chiffres prévisionnels jusqu'en septembre 2019 montrent une augmentation de près de 21 % par rapport à la même période l'an dernier. Il existe des marges d'amélioration, mais c'est une politique en évolution, qui traduit la volonté du Président de la République.
Le budget de la mission progresse de 8 %. La principale augmentation concerne le programme Asile et immigration, avec une hausse de 101 millions d'euros, principalement pour faire face à la dynamique constatée et prévisionnelle de la demande d'asile – plus 22 % en 2018, plus 12 % en 2019. La prise en charge des demandeurs d'asile en instance représente près des deux tiers des crédits de la mission.
L'évolution des crédits a aussi pour objectif d'accompagner la mise en oeuvre des orientations de la loi pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie, selon trois axes stratégiques : améliorer le traitement des demandes d'asile et les conditions d'accueil, mener une politique d'intégration ambitieuse, conduire une politique efficace et crédible de lutte contre l'immigration irrégulière et d'éloignement.
Le groupe UDI, Agir et Indépendants salue l'augmentation des crédits de cette mission et la volonté de faire un effort significatif sur l'intégration. Toutefois, nous nous interrogeons sur la forte baisse du budget alloué à l'investissement immobilier au sein de l'action Lutte contre l'immigration irrégulière, en baisse de 10 % en crédits de paiement. Enfin, nous sommes satisfaits de voir les moyens de l'OFPRA nettement renforcés, avec 200 ETP supplémentaires, pour renforcer le droit d'asile et améliorer le délai de traitement des demandes, alors même que l'indicateur prouve une nouvelle dégradation du délai moyen en 2019, qui atteint 190 jours.
Nous sommes convaincus que le budget de la mission Immigration, asile et intégration doit refléter l'équilibre nécessaire entre accueil, intégration et lutte contre l'immigration irrégulière. Les efforts sont engagés et devront être accentués. Nous voterons donc pour les crédits de cette mission.
Prenons l'indicateur Délai de l'examen d'une demande d'asile par l'OFPRA : alors que la prévision PAP (projet annuel de performance) pour 2019 était de 60 jours, la prévision actualisée est trois fois supérieure, à 190 jours ! Malgré la création de 200 postes, et alors que la cible reste inchangée en 2020, à 60 jours, la prévision pour 2020 est de 150 jours. Ces délais, astronomiques, font que l'examen du droit d'asile ne sert plus à grand-chose : les personnes déboutées – 80 % des demandeurs – restent sur place.
D'ailleurs, pour l'objectif Améliorer l'efficacité de la lutte contre l'immigration irrégulière, l'indicateur Nombre de retours forcés exécutés montre une réalisation de 7 105 retours vers un pays tiers en 2018. On voit bien que le système est complètement poreux !
Quant à l'objectif Optimiser la prise en charge des demandeurs d'asile, l'indicateur Part des demandeurs d'asile hébergés montre une réalisation de 48 % en 2018, une prévision actualisée en 2019 de 52 %. Cela signifie que la moitié des demandeurs d'asile sont dans la rue. Il n'y a qu'à aller porte de la Chapelle. Quels commentaires pouvez-vous faire sur ces chiffres ?
Tout le monde sait que la demande d'asile, en dehors des quelques avantages qu'elle procure, est surtout le moyen pour certains de rentrer sur le territoire national. Ensuite, ils se débrouillent. Porte de la Chapelle, on retrouve ces déboutés de la demande d'asile, qui vivent parmi les toxicomanes et les réseaux de drogue, mis en coupe réglée par des Afghans en situation irrégulière.
Je ne dis pas que les efforts ne sont pas faits, mais ce qui me gêne dans ce budget, c'est que l'on ne consacre pas de moyens financiers pour accueillir et loger dignement ces populations, qu'elles soient ou non en situation régulière. Il est tout simplement honteux que la France laisse des gens à la rue, au coeur d'une des capitales les plus riches du monde ! Parfois, on les emmène dans des centres d'accueil provisoires, où ils ne souhaitent pas rester et dont ils repartent quinze minutes plus tard. Par ailleurs, nous dépensons des sommes importantes en nuits d'hôtel. Il faut lancer un plan d'accueil et de logements décents pour ces populations !
Le groupe La République en marche se satisfait de la progression de ce budget, des efforts déployés en matière d'intégration et des moyens alloués à l'OFPRA. Je voudrais souligner la cohérence de notre politique : dans la mesure où 90 % des décisions de l'OFPRA font l'objet d'un appel auprès de la CNDA, les moyens alloués à la Cour ont, eux aussi, augmenté de manière très significative, avec plus de 120 ETP supplémentaires en 2019. Cette politique vise à plus d'humanité pour mieux intégrer les personnes ayant obtenu le statut de réfugié et, en même temps, à renforcer les dispositifs de jugement et d'éloignement des personnes déboutées.
La commission adopte les crédits de la mission de la mission Immigration, asile et intégration ainsi modifiés.
Article additionnel après l'article 76 : Suppression de dispositions caduques du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
La commission examine l'amendement II-CF45 du rapporteur spécial Jean-Noël Barrot.
Il s'agit de toiletter le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le CESEDA, en supprimant le titre III du livre III, qui contient des articles qui n'ont pas d'application concrète depuis plus de vingt ans.
La commission adopte l'amendement II-CF45 (II-731
Je souhaite répondre aux questions qui nous ont été posées.
Sur l'immobilier, de nombreuses places ont été créées en 2018, et malgré une baisse en 2019, le rythme est cinq fois plus élevé qu'en 2017.
Le taux d'admission au statut de réfugié est de 35 % : les déboutés représentent donc 65 % des demandeurs d'asile.
Vous avez parfaitement raison, il est possible de progresser encore pour réduire le délai de traitement. Le recrutement de nouveaux agents de l'OFPRA prendra du temps et cet effort ne portera ses fruits que dans deux ans : c'est la raison pour laquelle les prévisions pour 2020 sont en deçà de la cible.
De la même manière, malgré l'augmentation très conséquente des mesures d'éloignement, il reste des marges d'amélioration, que nous avons identifiées dans notre rapport d'évaluation.
Enfin, monsieur Pupponi, on compte aujourd'hui deux fois plus de places d'hébergement qu'en 2015. Avec la création de 16 500 places supplémentaires, cette année la capacité du parc est d'environ 100 000 places. Certes, les tensions restent considérables. Une partie importante du budget repose sur une hypothèse d'évolution de la demande d'asile, très difficile à calculer, qui a des répercussions, entre autres sur l'ADA et l'hébergement. La réalité, c'est que la demande d'asile a progressé nettement plus vite que la capacité du dispositif national d'accueil, laquelle a cependant augmenté de façon sensible.
La commission en vient à l'examen des crédits de la mission Aide publique au développement et des crédits du compte de concours financier Prêts à des États étrangers.
Le budget demandé en 2020 pour l'aide publique au développement (APD) suscite des interrogations. Le Président de la République a pourtant pris des engagements, auxquels je souscris pleinement : atteindre 0,55 % du revenu national en 2022 ; relever la part du bilatéral ; donner davantage aux dix-neuf pays considérés comme prioritaires, notamment les cinq pays du Sahel.
Cette trajectoire implique de réaliser un effort supplémentaire de un milliard d'euros chaque année, puisqu'il faut passer de 10 à 15 milliards en cinq ans. Des signes nous laissent craindre que nous ne parviendrons pas à réaliser cet objectif.
L'aide multilatérale monte très puissamment, comme tous les trois ans, lorsque nous renouvelons nos engagements auprès des organisations internationales. Le montant de notre contribution à la Banque mondiale, de 1,4 milliard, est similaire à celui de 2017, tout comme celui de notre contribution aux banques de développement africaine et asiatique. En revanche, la contribution française au Fonds vert pour le climat passe de 700 millions à 1,4 milliard d'euros, ce qui mobilise 700 millions d'autorisations d'engagement supplémentaires – une somme fort conséquente. Par ailleurs, vous avez beaucoup entendu parler de la décision de Lyon sur les crédits du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, mais elle n'aura pas de traduction budgétaire en 2020. Il en sera de même pour l'engagement de notre pays dans le Partenariat mondial pour l'éducation.
L'aide bilatérale baisse de façon très sensible. C'est le cas de la dotation à l'Agence française de développement (AFD), notre bras armé, qui passe de 1,5 milliard à 900 millions. C'est d'autant plus inquiétant que l'objectif était de relever la part bilatérale de l'aide française. Celle-ci est aujourd'hui de 56 %, alors qu'elle est de 76 % en Allemagne et de 89 % aux États-Unis. L'aide bilatérale, c'est évidemment ce que l'on maîtrise, ce qui est identifié à notre politique. Même si nous pouvons être à la proue de certaines actions multilatérales, nous n'en sommes pas les gestionnaires.
Depuis 2018, les crédits de paiement ont augmenté de 652 millions, alors que l'objectif est de parvenir à 5 milliards d'euros en 2022. Alors que nous sommes à mi-échéance, nous n'avons fait que 13 % du chemin. Serons-nous capables de tenir la trajectoire ? Il n'y avait aucune raison d'en douter l'année dernière, nous pouvons nous interroger pour 2020.
Autre mauvais signal, le produit de la taxe Chirac sur les billets d'avion sera désormais affecté, pour plus de la moitié, au financement de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF). On mêle des choses sans rapport.
Certaines perspectives sont néanmoins fort encourageantes. Ce qui est à la main du ministère, comme l'aide humanitaire et l'aide alimentaire, augmente très sensiblement.
Nous pouvons revenir au débat sur les crédits de la mission Immigration, asile et intégration, puisque ce sont les mêmes payeurs et que l'on demande un effort à nos compatriotes. Si l'on considère les taux de délivrance de laissez-passer consulaires des pays les plus concernés, le Mali est à 10,7 %, ce qui signifie que les autorités autorisent le retour de dix de ses ressortissants seulement, sur cent retours demandés par la France. Le Sénégal ou la Mauritanie ne font guère mieux. Le Niger, en revanche, est un bon exemple, puisque le taux atteint 75 %. Cela signifie que ces pays, s'ils s'en donnent les moyens, y compris administratifs, peuvent y parvenir.
La commission en vient à l'examen des amendements à la mission Aide publique au développement.
Article 38 et état B
La commission est saisie de l'amendement II-CF276 de M. Alain David.
Il convient de rétablir à son niveau de 2019 l'aide projet en affectant 100 millions d'euros, initialement prévus pour la mission Aide économique et financière au développement dont les principaux bénéficiaires sont les grands bailleurs internationaux, à la mission Solidarité à l'égard des pays en développement, qui dispense les dons projet, notamment par le biais de l'AFD.
Vous l'aurez compris, je suis tout à fait d'accord, puisque je regrette la diminution des crédits de paiement pour l'aide bilatérale – les crédits affectés à l'AFD baissent de 600 millions d'euros – et que l'effort que vous proposez, de 100 millions d'euros, est somme toute raisonnable.
Cependant, le Président de la République a pris des engagements de nature politique, dans des enceintes internationales, et nous sommes tenus de les respecter. Certaines contributions sont tout simplement reconduites, c'est le cas pour la Banque mondiale et pour les banques de développement africaine et asiatique. La contribution augmente néanmoins de façon sensible pour le Fonds vert pour le climat, et ce sera le cas l'année prochaine pour le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme. Je ne vois pas très bien comment l'on pourrait déjuger un Président de la République qui s'est exprimé publiquement, d'autant que, dès que l'on touche au multilatéral, les pressions s'exercent, y compris dans la presse, et sont reprises par certains d'entre nous.
Pour autant, j'adhère à votre objectif, qui est de relever la part de l'aide bilatérale. Les pays comparables à la France et qui accordent beaucoup plus d'aides bilatérales renforcent leur influence directe. Si cette évolution au détriment du bilatéral doit se poursuivre l'an prochain, je serai favorable à l'adoption de votre amendement. De fait, le budget pour 2019 était beaucoup plus respectueux des engagements politiques qui avaient été pris. Mais par responsabilité, j'émettrai un avis défavorable.
La commission rejette l'amendement II-CF276.
Puis elle examine l'amendement II-CF277 de M. Alain David.
Cet amendement flèche 10 millions d'euros de crédits de paiement supplémentaires vers l'action Coopération bilatérale, au sein du programme Solidarité à l'égard des pays en développement, et réduit de 10 millions d'euros les crédits de paiement de l'action Aide économique et financière multilatérale, au sein du programme Aide économique et financière au développement.
Les ONG, qu'elles soient françaises, internationales ou originaires des pays concernés, jouent un rôle majeur et il convient de les soutenir. Pour autant, je n'émettrai pas un avis favorable à cet amendement, car la part gérée par les ONG a déjà été portée de 169 millions d'euros en 2015 à 371 millions en 2019. On assiste donc à une montée en charge, qu'il ne convient pas de renforcer davantage. Les ONG, ce n'est plus directement nous : il faut quand même être vigilant et attentif.
La commission rejette l'amendement II-CF277.
Dans le programme Solidarité à l'égard des pays en développement, l'enveloppe attribuée à la délégation pour l'action extérieure des collectivités territoriales s'élève à 11,5 millions d'euros. Il est louable d'inciter les collectivités à s'engager davantage mais cela n'est pas un objectif prioritaire : privées d'une partie de leurs ressources par la réforme de la fiscalité locale, les collectivités vont devoir trouver les moyens d'assurer des services publics. Certes, l'aide publique au développement ne doit pas être remise en question, mais elle ne relève qu'indirectement de la responsabilité des collectivités territoriales.
Seule la politique de codéveloppement est capable d'apporter une réponse au problème migratoire. C'est la baisse de la natalité qui réduira le réservoir démographique, donc les flux à destination des pays du Nord. Or la natalité ne baisse que dans les pays qui connaissent un développement économique. Nous prenons le problème migratoire, comme tout à l'heure, par le petit bout de la lorgnette, alors que nous savons que tant que le réservoir d'amont gonflera, et il le fait dans des proportions considérables, le problème ne fera que s'amplifier.
Le groupe La République en marche se félicite de l'augmentation des crédits de cette mission, traduction des engagements internationaux du Président de la République. Nous notons le doublement de la contribution au Fonds vert pour le climat et les engagements à venir sur la lutte contre le sida. Monsieur le rapporteur spécial, nous avons bien noté vos inquiétudes s'agissant des crédits alloués à l'AFD et de l'affectation du produit de la taxe Chirac. Nous serons vigilants sur ces deux points.
L'essentiel de l'augmentation, de près de 3 milliards d'euros, des autorisations d'engagement n'est pas consacré à des projets d'aide bilatérale mais à l'aide économique et financière, c'est-à-dire à des prêts. Or la logique veut que ces prêts bénéficient à des pays émergents, plus rentables et plus sûrs que les pays pauvres très endettés. Il semble qu'un effort ait été consenti sur la concentration des aides aux pays les moins avancés, puisque la moitié de l'effort en subventions de l'État et les deux tiers des subventions de l'AFD bénéficieront à une liste de dix-neuf pays prioritaires. Précisons, néanmoins, que les subventions ne constituent qu'une part de l'APD.
Par ailleurs, la part des crédits du programme 209 destinés aux pays prioritaires baisse. Il conviendrait de demander au Gouvernement quelle est, pour l'ensemble de l'aide bilatérale française, la part de l'aide consacrée aux pays prioritaires. Rappelons que la part de l'aide bilatérale destinée aux pays les moins avancés, dans les programmes 110 et 209, ne représente que 30 % du montant total, quand elle est de 37 % dans les pays de l'OCDE.
Enfin, les crédits transitant par les ONG par le biais du guichet dédié de l'AFD dépassent le palier des 100 millions d'euros. Selon l'un des indicateurs du projet annuel de performances, la part de l'APD bilatérale française transitant par la société civile dans l'APD bilatérale française totale est de 6,7 % pour 2019 alors que près de 16 % de l'aide bilatérale et multilatérale transitent par les ONG dans les pays de l'OCDE. Si l'évolution est positive, la tendance n'est pas encore satisfaisante.
La commission adopte les crédits de la mission Aide publique au développement, non modifiés.
La commission en vient à l'examen du compte de concours financier Prêts à des états étrangers.
Comme l'a expliqué Alain David, la tendance consistait jusqu'à présent à favoriser des prêts en direction des pays émergents. Les premiers bénéficiaires de l'aide française sont le Maroc, la Turquie, le Brésil, la Colombie, certainement pas les dix-neuf pays considérés comme prioritaires. Une façon de compenser cette tendance aurait été d'augmenter les dons et l'aide bilatérale, comme cela a été fait dans la loi de finances pour 2019. Je regrette que cela n'ait pas été prévu pour l'exercice 2020.
La part de l'aide multilatérale est très importante, sans doute pour des raisons légitimes, mais cela va à l'encontre de la logique que nous nous étions fixée. Je crains de voir encore la part de l'aide bilatérale diminuer et qu'un certain nombre de créances soient abandonnées, puisque nous allons vers des crises de la dette très conséquentes, notamment dans des pays où la France a des engagements importants, comme le Soudan. La dépense de l'aide publique au développement augmentera, mais sa nature ne sera pas celle initialement envisagée – don, aide bilatérale, majoritairement en direction de l'Afrique et des dix-neuf pays prioritaires.
Notre rôle est d'alerter le Gouvernement afin que ces objectifs, auxquels nous avons tous adhéré, soient respectés. Le projet de loi de programmation de l'aide publique au développement doit être examiné rapidement, quand nous pouvons encore faire évoluer les choses. L'adopter à la fin du mandat serait vain, voire ridicule, et reviendrait à constater le passé.
Article 40 et état D
La commission adopte les crédits du compte de concours financier Prêts à des États étrangers, non modifiés.
Membres présents ou excusés
Réunion du mercredi 23 octobre 2019 à 9 heures 30
Présents. - M. Saïd Ahamada, M. François André, M. Julien Aubert, M. Jean-Noël Barrot, Mme Émilie Bonnivard, M. Fabrice Brun, Mme Émilie Cariou, M. Gilles Carrez, M. Michel Castellani, M. Jean-René Cazeneuve, M. Philippe Chassaing, M. Francis Chouat, M. Éric Coquerel, M. François Cornut-Gentille, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Olivier Damaisin, Mme Dominique David, M. Benjamin Dirx, M. Jean-Paul Dufrègne, Mme Stella Dupont, M. Bruno Duvergé, M. Nicolas Forissier, M. Olivier Gaillard, M. Joël Giraud, M. Romain Grau, Mme Olivia Gregoire, M. Patrick Hetzel, M. Alexandre Holroyd, M. Christophe Jerretie, M. François Jolivet, M. Daniel Labaronne, M. Mohamed Laqhila, M. Jean Lassalle, M. Michel Lauzzana, M. Vincent Ledoux, M. Marc Le Fur, Mme Patricia Lemoine, M. Fabrice Le Vigoureux, Mme Véronique Louwagie, Mme Marie-Ange Magne, Mme Lise Magnier, M. Jean-Paul Mattei, Mme Cendra Motin, Mme Catherine Osson, M. Xavier Paluszkiewicz, M. Hervé Pellois, Mme Valérie Petit, Mme Bénédicte Peyrol, Mme Christine Pires Beaune, M. François Pupponi, M. Robin Reda, M. Xavier Roseren, M. Fabien Roussel, M. Laurent Saint-Martin, M. Jacques Savatier, M. Éric Woerth
Excusés. - M. David Habib, Mme Marine Le Pen, Mme Valérie Rabault, M. Olivier Serva
Assistaient également à la réunion. - M. Alain David, M. Dimitri Houbron, Mme Élodie Jacquier-Laforge, Mme Josette Manin, Mme George Pau-Langevin, M. Bruno Questel
———–——