Le budget demandé en 2020 pour l'aide publique au développement (APD) suscite des interrogations. Le Président de la République a pourtant pris des engagements, auxquels je souscris pleinement : atteindre 0,55 % du revenu national en 2022 ; relever la part du bilatéral ; donner davantage aux dix-neuf pays considérés comme prioritaires, notamment les cinq pays du Sahel.
Cette trajectoire implique de réaliser un effort supplémentaire de un milliard d'euros chaque année, puisqu'il faut passer de 10 à 15 milliards en cinq ans. Des signes nous laissent craindre que nous ne parviendrons pas à réaliser cet objectif.
L'aide multilatérale monte très puissamment, comme tous les trois ans, lorsque nous renouvelons nos engagements auprès des organisations internationales. Le montant de notre contribution à la Banque mondiale, de 1,4 milliard, est similaire à celui de 2017, tout comme celui de notre contribution aux banques de développement africaine et asiatique. En revanche, la contribution française au Fonds vert pour le climat passe de 700 millions à 1,4 milliard d'euros, ce qui mobilise 700 millions d'autorisations d'engagement supplémentaires – une somme fort conséquente. Par ailleurs, vous avez beaucoup entendu parler de la décision de Lyon sur les crédits du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, mais elle n'aura pas de traduction budgétaire en 2020. Il en sera de même pour l'engagement de notre pays dans le Partenariat mondial pour l'éducation.
L'aide bilatérale baisse de façon très sensible. C'est le cas de la dotation à l'Agence française de développement (AFD), notre bras armé, qui passe de 1,5 milliard à 900 millions. C'est d'autant plus inquiétant que l'objectif était de relever la part bilatérale de l'aide française. Celle-ci est aujourd'hui de 56 %, alors qu'elle est de 76 % en Allemagne et de 89 % aux États-Unis. L'aide bilatérale, c'est évidemment ce que l'on maîtrise, ce qui est identifié à notre politique. Même si nous pouvons être à la proue de certaines actions multilatérales, nous n'en sommes pas les gestionnaires.
Depuis 2018, les crédits de paiement ont augmenté de 652 millions, alors que l'objectif est de parvenir à 5 milliards d'euros en 2022. Alors que nous sommes à mi-échéance, nous n'avons fait que 13 % du chemin. Serons-nous capables de tenir la trajectoire ? Il n'y avait aucune raison d'en douter l'année dernière, nous pouvons nous interroger pour 2020.
Autre mauvais signal, le produit de la taxe Chirac sur les billets d'avion sera désormais affecté, pour plus de la moitié, au financement de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF). On mêle des choses sans rapport.
Certaines perspectives sont néanmoins fort encourageantes. Ce qui est à la main du ministère, comme l'aide humanitaire et l'aide alimentaire, augmente très sensiblement.
Nous pouvons revenir au débat sur les crédits de la mission Immigration, asile et intégration, puisque ce sont les mêmes payeurs et que l'on demande un effort à nos compatriotes. Si l'on considère les taux de délivrance de laissez-passer consulaires des pays les plus concernés, le Mali est à 10,7 %, ce qui signifie que les autorités autorisent le retour de dix de ses ressortissants seulement, sur cent retours demandés par la France. Le Sénégal ou la Mauritanie ne font guère mieux. Le Niger, en revanche, est un bon exemple, puisque le taux atteint 75 %. Cela signifie que ces pays, s'ils s'en donnent les moyens, y compris administratifs, peuvent y parvenir.