J'ai omis de préciser que le Planning compte dans ses membres deux associations qui assurent aussi l'accueil de jour de femmes victimes de violences. Une de ces structures, implantée à Montauban, nous alertait sur les dangers d'accueillir des victimes de violences dans des structures inadaptées où elles ne se sentent pas du tout en sécurité et dorment très mal. Une des professionnelles me le disait récemment : il faut, dans un premier temps, permettre à ces femmes de se reposer car les violences les épuisent. Charge aux professionnels de prendre le relais, notamment avec les enfants. Le sentiment de sécurité est également très important et participe directement de l'accompagnement d'ensemble. Notre responsabilité est de leur garantir cette sécurité dans les moments de violence qu'elles traversent.
J'ai répondu en partie sur la formation : les formations des professionnels de santé sont quasiment inexistantes et reposent sur le seul volontariat. C'est un sujet très peu traité. Nous avons travaillé avec des médecins généralistes : bien qu'ils soient aux premières loges en termes de dépistage, ils ne sont pas du tout formés. Quand elles existent, ils sont très demandeurs de formations ; encore faut-il qu'elles soient proposées à des moments où ils peuvent se rendre disponibles. La formation pluridisciplinaire que j'évoquais se tenait par exemple entre 20 et 22 heures, faute de quoi les médecins généralistes n'auraient pas pu être présents. C'est la même chose pour les travailleurs sociaux. Dans les formations qui leur sont dédiées, on commence à voir apparaître les violences mais cela reste très dépendant des personnes qui mettent ces formations en oeuvre. Il faut pourtant le faire en formation initiale et en formation continue.
Les femmes nous disent avoir besoin d'être prises en charge sur le long terme mais aussi de ne pas être considérées uniquement comme victimes de violences ; ces femmes sont actrices de leur vie et ne veulent pas être seulement des victimes. Elles ont aussi des désirs, des souhaits et des projets.
En tant qu'association d'éducation populaire, il nous semble important d'accompagner les personnes là où elles veulent aller. Dans les formations, il est déterminant d'insister sur ce point : des femmes peuvent en effet décider de retourner chez elles ; elles ne vont pas quitter le foyer ou se séparer définitivement du conjoint violent dès la première fois. Les professionnels doivent vraiment savoir qu'on peut parfois partir cinq ou six fois de chez soi avant de partir définitivement. Il faut donc proposer un accompagnement sans jugement.
Sur la question de l'hébergement d'urgence, j'ai déjà évoqué les difficultés qui se posent aujourd'hui et l'importance de mieux considérer la possibilité de faire partir le conjoint violent, ce qui évite par exemple les changements d'école quand on a des enfants. Il faut plus généralement poser la question de la sécurité : on sait que les moments de rencontre avec les enfants sont des moments d'une très grande vulnérabilité pour les femmes. Nous avons des remises d'enfants qui, après des situations de violence, ne sont pas faites en présence de professionnels alors qu'il s'agit d'un moment de danger imminent et de grande peur pour les femmes. Il faut le prendre en compte pour elles mais aussi pour les enfants qui le vivent de cette façon-là.
Il faut former les professionnels de la police, de la justice, mais aussi ceux de l'éducation qui sont peu formés sur ces sujets et qui ne se rendent pas bien compte de ces situations ou, quand ils s'en rendent compte, ne savent pas comment les traiter. C'est essentiel dans la prise en charge à la fois des femmes victimes de violences mais aussi dans celle des enfants. Si on arrive à intégrer cet enjeu dans la définition des modes de garde des enfants, nous aurons fait un grand pas en avant.