Je voudrais me réjouir du consensus que nous avons pu obtenir. Je me permets de souligner certains points clés qui ont émergé au cours des discussions.
On a fait remarquer que l'agriculture, c'est le temps long. L'agriculture est une activité hautement stratégique et je regrette que l'Union européenne n'en ait plus suffisamment conscience : alors que l'Inde, le Brésil, les États-Unis augmentent les concours publics à l'agriculture, nous les baissons de façon bientôt irréversible. La PAC est donc une politique à la fois ancienne et moderne.
Pour ce qui est de la recherche et développement, un motif de satisfaction : 10 milliards d'euros devraient être consacrés à la recherche en matière agricole. Il n'en faut pas moins être attentif, car si « les OGM c'est du passé », en revanche les « New Breeding Techniques » (NBT) co-inventées par une Française, Emmanuelle Charpentier, ont fait l'objet d'une décision défavorable de la part de la Cour de Justice de l'Union européenne. Cette nouvelle technologie a l'intérêt d'être rapide, peu onéreuse et indétectable. Vous imaginez bien que les États tiers ne vont pas s'en priver… si nous n'y avons pas recours nous aussi, c'est autant de distorsions de concurrence potentielles dont on aura du mal à se relever à l'avenir. Un autre enjeu technologique : la chimie végétale ; mais là encore nous manquons, singulièrement en France, de politiques publiques suffisamment proactives !
En ce qui concerne les convergences, il serait réducteur de ne parler que de celles qui ont trait aux aspects budgétaires. Il y a beaucoup d'autres facteurs sur lesquels nos amis des pays d'Europe centrale et orientale ont des avantages. S'en tenir aux convergences sur les droits à paiements de base fragiliserait la France.
En matière de concurrence, je reviens sur l'avantage que nous aurions à nous inspirer des pratiques américaines. Je relève aussi le sujet de la concurrence intra-européenne qui est un vieux serpent de mer.
Je pense enfin qu'il ne faut pas opposer agriculture et environnement. J'ai interpellé le représentant de l'OCDE qui a évoqué les émissions de méthane de l'élevage bovin. J'ai souligné, sans contredire les chiffres, qu'on ne parlait jamais des conséquences positives de la culture des céréales. De mémoire, ce sont 14 millions d'hectares en France qui, par le cycle du végétal, captent 250 millions de tonnes de CO2. Si l'on compare à la forêt, qui fait 16 millions d'hectares, elle ne capte que 135 millions de tonnes. Arrêtons de regarder les bovins et de ne pas regarder la culture. C'est ainsi qu'on alimente l'agri-bashing dont nous souffrons.