Intervention de Paul Christophe

Séance en hémicycle du jeudi 7 novembre 2019 à 9h00
Projet de loi de finances pour 2020 — Santé ; solidarité insertion et égalité des chances

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Christophe :

Nous examinons ce matin les crédits des missions « Santé » et « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

La mission « Santé », parce qu'y sont inscrits les crédits liés à l'AME, cristallise chaque année les oppositions. Le rapport des inspections rendu cette semaine reprend même l'expression de « milliard le plus scruté de la République ».

La réalité oblige à dire que si le dispositif de l'AME répond à un devoir d'humanité, il répond surtout à une logique de maîtrise de la dépense publique. L'alternative est en effet simple. Nous pourrions trier les patients à l'entrée des hôpitaux suivant la profondeur de leur portefeuille et leur carte d'identité – d'autres pays ont choisi ce chemin – ou, parce que nous savons que les maladies ne discriminent pas en fonction de la nationalité, nous pouvons faire le choix rationnel d'y consacrer un budget spécifique. Cela évite les surcoûts en permettant à ses bénéficiaires un accès aux soins de ville. Cela évite également de transférer le coût de ces prises en charge aux hôpitaux. Ils n'en ont nul besoin.

L'enjeu est ailleurs. Il réside dans l'accroissement des contrôles et l'amélioration des procédures d'éloignement. C'est le chemin emprunté, en responsabilité, par le Gouvernement pour lutter contre le dévoiement de l'AME et le tourisme médical. Ce sont ces stratégies, en filières organisées, qui sapent la confiance dans l'équité de notre système de soins et contre lesquelles il faut lutter. Nous y souscrivons pleinement.

Je note également, dans la mission « Santé », la suppression de l'indicateur des délais de traitement des autorisations de mise sur le marché, en raison du transfert de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé – ANSM – au budget de la sécurité sociale en 2020. Le maintien de ce délai autour des 500 jours est un sujet d'importance pour notre pays, et vous connaissez mon attachement à le voir se réduire. Il est significatif de la baisse d'attractivité de notre pays pour les fabricants et représente une perte de chance pour les patients. Les dispositifs d'autorisations temporaires d'utilisation – ATU – ne parviennent qu'imparfaitement à compenser cette situation.

J'en viens aux moyens de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ». Les crédits pour 2020 sont en augmentation de 6,8 % par rapport à l'an dernier. Cette hausse trouve en particulier son origine dans l'accélération de la revalorisation de la prime d'activité, portée à 100 euros par mois au niveau du SMIC, en raison de la crise des gilets jaunes.

Il faut se féliciter du succès de la prime d'activité. Elle encourage à la reprise d'emploi et représente un véritable gain de pouvoir d'achat pour nos concitoyens modestes. Elle traduit l'exigence, sans cesse renouvelée, d'accroître le recours aux droits, dans un souci de juste prestation. L'inscription en lois de finances des crédits nécessaires au service de cette prestation constitue, par ailleurs, un gage de sérieux et de sincérité budgétaires. Il faut le saluer, d'autant plus que cela n'a pas toujours été le cas lors d'autres quinquennats, en particulier concernant cette prestation.

La hausse du recours à la prime d'activité, avec une augmentation de 52 % en un an, est une bonne chose ; elle soulève cependant une interrogation, dans la perspective d'une refonte de nos minima sociaux. En effet, le futur revenu universel d'activité – RUA – vise notamment l'objectif légitime de diminuer le non-recours occasionné par la trop grande complexité du système actuel. Il est, par ailleurs, supposé se faire à enveloppe constante. Cette hypothèse d'une refonte de nos minima sociaux à enveloppe constante est-elle crédible si elle s'accompagne d'une augmentation du taux de recours ? Avez-vous procédé à des estimations ? En particulier, avez-vous déterminé le coût brut d'une augmentation massive du taux de recours, sachant qu'une meilleure protection des plus vulnérables aurait, sur un plan strictement comptable, des répercussions bénéfiques sur d'autres secteurs de dépenses. Nous serons particulièrement vigilants : cette évolution ne doit pas se traduire par un transfert de charges en direction des départements.

Nous saluons également la politique volontariste menée par le Gouvernement concernant l'allocation aux adultes handicapés, la revalorisation de cette prestation la portant à 900 euros ce mois-ci. Vous connaissez nos réticences sur le rapprochement de l'AAH avec les autres minima sociaux, en particulier sur la prise en compte des revenus du conjoint ; nous aurons l'occasion d'y revenir. La concertation en cours sur le RUA devra prendre en considération la situation spécifique des personnes en situation de handicap.

Notre groupe se prononcera favorablement sur les crédits de ces deux missions, qui traduisent l'effort particulier de l'État pour soutenir l'activité comme les plus vulnérables.

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