Intervention de Caroline Fiat

Séance en hémicycle du jeudi 7 novembre 2019 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2020 — Après l'article 78

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCaroline Fiat, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales :

Les amendements nos 49 , 1727 et 1701 visent à restreindre le panier de soins de l'AME pour la remplacer par une aide médicale d'urgence. Comme je l'ai déjà dit, l'ensemble des parties prenantes, notamment les professionnels de santé, considèrent que limiter ce dispositif serait une catastrophe pour la santé publique et l'organisation de notre système sanitaire, car cela contribuerait à surcharger nos urgences, qui n'en ont pas besoin. Je vous renvoie, sur le sujet, à la récente tribune de plus de 800 médecins et professeurs de médecine parue récemment dans le Journal du dimanche.

Et je citerai aussi l'Espagne, où la mortalité des migrants a augmenté de 15 % après la réduction du panier des soins délivrés aux urgences. Enfin, je vous renvoie au rapport conjoint de l'IGAS et de l'IGF, pour lequel « une réduction du panier de soins de l'AME paraît peu pertinente, y compris dans une perspective de diminution de la dépense publique ». La commission des affaires sociales n'a pas examiné ces amendements, mais vous aurez compris que j'y suis défavorable à titre personnel.

Concernant l'amendement du Gouvernement, il modifie considérablement les conditions d'ouverture du droit à l'AME en termes d'obligation de résidence, et propose de conditionner le bénéfice de certaines prestations par un délai, sans que l'on ait de précision sur la durée de celui-ci, après entente préalable avec l'assurance maladie. Si l'on peut comprendre les motivations du Gouvernement en termes de contrôle et de lutte contre les fraudes ou les abus, l'on ne peut qu'être très fortement préoccupé par les effets à venir de ces dispositions sur le terrain, sachant ce qu'il en est de la réalité de la situation sanitaire des personnes bénéficiaires de l'AME.

De l'avis unanime des acteurs de terrain, y compris des professionnels de santé, les personnes en situation irrégulière vivent dans une extrême précarité. Traiter le problème d'une telle manière ne peut avoir pour effet que d'aggraver considérablement leur situation en complexifiant leur prise en charge, et la lecture de l'alinéa 3 de l'amendement me laisse malheureusement craindre que c'est précisément l'objectif recherché puisque les associations et organismes à but non lucratif sont exclues de la liste des instances pouvant recevoir les demandes d'AME. La commission des affaires sociales n'a pas pu l'examiner étant donné qu'il est arrivé hier à vingt-trois heures, mais j'émets à titre personnel un avis défavorable. Pour ce qui est des sous-amendements, mon avis est favorable.

Quant aux amendements nos 48 et 59 , qui visent à instaurer un droit de timbre pour pouvoir bénéficier de l'AME, je rappelle encore une fois ce que j'ai indiqué dans mon rapport : l'IGAS et l'IGF ont fortement déconseillé une mesure de cette nature dans leur rapport en 2010. Cela n'avait pas empêché le gouvernement d'alors de l'introduire en 2011, pour faire marche arrière très vite car si le nombre de bénéficiaires avait certes diminué, si de nouvelles recettes fiscales avaient été enregistrées, les dépenses de santé avaient explosé du fait du report des soins sur les urgences. La commission n'a pas non plus examiné ces amendements, mais mon avis à titre personnel ne fait donc pas de doute.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.