L'examen des amendements permettra à chacun de s'exprimer sur des sujets qui suscitent des interrogations, comme le prêt à taux zéro – PTZ – et l'aide personnalisée au logement pour l'accession à la propriété – APL accession.
Ma mission de parlementaire est aussi celle d'un chasseur ou d'un « leveur de lièvres », si je puis me permettre cette comparaison. Monsieur le ministre, les auditions menées dans le cadre de mon travail de rapporteur spécial ont révélé une fragilité dans le modèle français de financement du logement social. On nous alerte sur un phénomène préoccupant : les taux négatifs sur les marchés internationaux, que l'on pensait passagers, semblent appelés à persister. Plusieurs institutions font ce diagnostic : l'Organisation de coopération et de développement économiques – OCDE – , France Stratégie, la Banque publique d'investissement – Bpifrance – ainsi que l'Union européenne, dans une note récente.
Ce qui est une bonne nouvelle pour l'État du point de vue des charges d'intérêt de la dette peut devenir une impasse à moyen ou long terme en matière de financement du logement social. Quelque 290 milliards d'euros sont conservés par la Caisse des dépôts et consignations, et 140 milliards par les banques de détail. Je remercie mon collègue Jacques Savatier pour sa vigilance sur ce dossier.
Le recours au secteur privé pour financer les opérations HLM – habitation à loyer modéré – n'est plus un tabou, mais je pense qu'il n'est pas compatible avec le principe d'universalité des prêts consentis par la Caisse des dépôts. Le bailleur de Châteauroux ou de Béziers doit se voir proposer les mêmes conditions financières que celui de Paris ou de Laon. C'est le corollaire du principe d'égalité, et donc du principe de péréquation.
Il faut trouver un modèle qui permette à la Caisse des dépôts et consignations – CDC – de continuer à financer sereinement le secteur du logement social, tout en garantissant une rémunération des épargnants supérieure à l'inflation.
Il semble incontournable d'autoriser la CDC à utiliser l'épargne réglementée pour effectuer d'autres placements à long terme et sans risques que le logement social, sous le contrôle du Parlement, afin d'augmenter sa marge.
Nous devons repenser la doctrine d'emploi des fonds d'épargne. L'entretien du patrimoine immobilier de l'État en est l'illustration : il souffre de notre myopie collective, selon l'analyse de notre collègue Jean-Paul Mattei, président du Conseil immobilier de l'État. Le constat est que l'État ne sait pas assumer ses responsabilités de propriétaire. Casernements de gendarmerie, de CRS et campus universitaires, par exemple, montrent que l'État porte parfois les habits d'un mauvais propriétaire, voire d'un marchand de sommeil, pour les fonctionnaires et militaires logés, ainsi que pour les étudiants. Si j'en crois les rapports d'Aude Bono-Vandorme et de Fabrice Le Vigoureux, ces affirmations sont véridiques.
Pourquoi, monsieur le ministre, ne pas envisager la création d'une foncière publique ? Ce nouveau « métier » permettrait de recouvrer des marges – et pas à deux chiffres comme celles des fameux partenariats public-privé – PPP. Un symbole fort s'exprimerait : celui d'une reprise de la maîtrise de leurs équipements publics par les Français, sous le contrôle du Parlement. C'est un choix de société.
Pour préserver le modèle du logement social, il faut d'abord préserver son modèle de financement. Notre rôle politique est de maintenir l'attractivité des placements réglementés, en servant aux épargnants modestes une rémunération supérieure à l'inflation.
S'agissant du projet du projet de loi de finances pour 2020, je propose aux parlementaires d'adopter les crédits de la mission « Cohésion des territoires ».