Intervention de Bastien Lachaud

Réunion du mardi 5 novembre 2019 à 14h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBastien Lachaud :

La France insoumise se réjouit que notre commission se soit saisie pour avis de ce texte. Pour le reste, mes propos seront peut-être un peu discordants. Ce projet n'est pas le premier du genre : la coopération avec l'Allemagne est déjà ancienne et relativement profonde. De ce fait, l'accord que nous examinons ne suscite pas une grande inquiétude. Je voudrais néanmoins le remettre dans son contexte. Contrairement à ce qui a été dit, il n'est pas question pour l'Allemagne d'avancer sérieusement dans la coopération militaire. Après trente ans d'existence, la brigade franco-allemande se cherche encore – chacun le sait et d'aucuns le disent publiquement. Il n'y a, d'ailleurs, pas vraiment lieu de regretter cette situation : une remontée en puissance de l'Allemagne dans le domaine militaire ne serait pas de nature à nous réjouir. L'hégémonie économique que ce pays a conquise sur l'Europe ces dernières années ne doit pas se doubler de la reprise de son statut de puissance militaire. Je le dis sans volonté polémique ni agressivité, cela va de soi. Il faut simplement veiller à ce qu'il y ait un équilibre des puissances sur le continent.

Certaines velléités outre-Rhin et une forme de désinvolture chez nous doivent nous inciter à la prudence. La paix est un bien trop précieux pour qu'on puisse se contenter de le considérer comme acquis. La bonne volonté n'est pas une garantie ultime contre les dynamiques profondes qui sont susceptibles de travailler le continent européen. On me répondra que cette coopération en matière de transport tactique est un moyen d'assurer une nouvelle interdépendance qui est garante de paix et servira à rendre effective la souveraineté européenne. Nous n'en croyons rien. Tout d'abord, l'idée de la souveraineté européenne est une chimère : la souveraineté appartient au peuple, et il n'y a pas un peuple européen, mais des peuples. En outre, les motivations de cet accord sont bien plus prosaïques : il s'agit seulement de mutualiser les dépenses et de réduire les coûts. C'est la stratégie préconisée par l'OTAN sous l'appellation de Smart Defence. Sa mise en oeuvre profite d'ailleurs très opportunément à l'industriel américain Lockheed Martin, qui fournit les avions de transport. Les intérêts économiques et stratégiques des États-Unis ne sont guère ébranlés : la coopération européenne n'est nullement une alternative. Pour conclure, je voudrais souligner que nous n'avons évidemment pas d'hostilité de principe à la coopération bilatérale. Mais encore faut-il qu'elle soit sincère et qu'elle n'obère pas notre souveraineté.

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