Intervention de Jacqueline Gourault

Séance en hémicycle du vendredi 8 novembre 2019 à 9h00
Projet de loi de finances pour 2020 — Relations avec les collectivités territoriales

Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales :

La contribution des collectivités territoriales à la trajectoire des finances publiques est désormais assurée par le pacte financier dit dispositif de Cahors, qui porte sur les dépenses de fonctionnement des 322 collectivités aux budgets les plus importants. Ce dispositif a produit ses premiers résultats en 2018 : c'est un succès. La cible ayant été largement atteinte, la plupart des collectivités disposent de marges de manoeuvre pour l'avenir.

L'effort de solidarité au profit des collectivités les moins bien dotées poursuit, quant à lui, sa hausse : le projet de loi de finances pour 2020 propose une augmentation de 220 millions d'euros des montants consacrés à la péréquation verticale, soit un ordre de grandeur comparable à 2019 – l'augmentation avait alors été de 255 millions d'euros. Cette progression resterait intégralement financée par redéploiement au sein de la DGF. Dans l'ancien système, il est vrai, cette péréquation reposait pour moitié sur la DGF et pour moitié sur une minoration des variables d'ajustement, mais c'était toujours au sein du budget des collectivités territoriales. Avec l'augmentation proposée, près de 30 % de la DGF seront consacrés à la péréquation, soit 7,7 milliards d'euros.

En revanche, le montant et les règles de calcul de la péréquation horizontale, en particulier le FPIC, sont stables. La question de la trajectoire de la péréquation sera liée à la manière dont sera mesurée la richesse des collectivités après la réforme fiscale. Des travaux sur les critères et les indicateurs financiers en 2020 et, je suppose, en 2021, sont donc indispensables.

J'insiste sur ce point : la question des indicateurs financiers, c'est-à-dire du potentiel financier et fiscal, et celle des critères retenus pour la péréquation seront à l'ordre du jour des travaux du comité des finances locales, le CFL, en 2020 ainsi que, sûrement, en 2021. Je l'ai annoncé dès ma rencontre, il y a quelques semaines, avec ses membres.

Ce point est important, car le Gouvernement a indiqué clairement que les indicateurs financiers des communes, des EPCI et des départements devront être revus après la réforme fiscale pour neutraliser les effets de bords liés aux nouvelles ressources attribuées à compter de 2021.

Lors du Printemps de l'évaluation, certains d'entre vous ont insisté sur la nécessité de mieux évaluer les conséquences de la péréquation. Ce travail d'évaluation pourra rejoindre dès 2020 les travaux du CFL et du Gouvernement sur les critères et les indicateurs financiers. Je veillerai à ce que le Parlement et ses délégations aux collectivités territoriales et à la décentralisation soient associés en amont à ce travail et aux simulations qui seront faites. Lors de la réforme de la taxe professionnelle en 2010, la nouvelle carte de la richesse issue de celle-ci avait conduit le Gouvernement à approfondir la péréquation en créant le FPIC.

Les conséquences pour la taxe d'habitation ne seront effectives qu'en 2022, pour la première répartition après l'entrée en vigueur du nouveau panier de ressources en 2021 : nous aurons évidemment pour objectif de rechercher à tout prix la stabilité.

Revenons au projet de loi de finances pour 2020. Deux mesures spécifiques complètent le volet consacré à la DGF.

La première est l'accompagnement financier de la création de communes nouvelles. Depuis 2015, le pacte de stabilité de la DGF pour les communes nouvelles a facilité un nombre important de regroupements communaux. Néanmoins, les critères d'éligibilité aux avantages du pacte ont fait l'objet d'une grande instabilité, empêchant les élus de préparer sereinement leurs projets de fusion.

Le Gouvernement pérennise le soutien aux regroupements, dont l'arrêt était prévu au 1er janvier 2021, et propose de poser un cadre unique et simple pour toutes les fusions qui suivront les élections municipales. Les communes nouvelles qui se créeront alors bénéficieront donc, avec les mêmes seuils qu'aujourd'hui, de garanties sur le montant de leurs attributions au titre de la dotation forfaitaire et des dotations de péréquation, pendant les trois années suivant leur création.

Deuxièmement, nous avons inscrit dans le projet de loi une mesure donnant aux EPCI la capacité de décider localement de sa répartition. Cette mesure tendant à renforcer la responsabilité locale souligne notre souhait de développer une gestion locale des collectivités territoriales. Le constat est simple : la DGF est répartie selon des critères nationaux, qui ne peuvent pas toujours traduire l'ensemble des caractéristiques locales et des spécificités de chaque territoire. La nouvelle carte intercommunale, décidée en 2017, a eu des effets de bords importants sur les indicateurs financiers et la DGF. Ils n'avaient pas été anticipés, en particulier pour les communes rurales entrées dans de grandes agglomérations.

Or, à l'heure actuelle, les communes membres d'un même EPCI ne disposent pas de levier efficace pour procéder à une répartition différente de la DGF, quand bien même elles seraient d'accord pour le faire. À l'instar de ce qui existe pour le FPIC, nous proposons donc un système simple et facultatif – j'insiste sur ce point – de répartition dérogatoire de la DGF des communes au sein d'un EPCI, sous réserve de l'accord de toutes les communes et selon les critères qu'elles estimeront les plus adaptés à leurs caractéristiques.

J'en viens maintenant aux dotations d'investissement. Entre 2015 et 2017, l'État a accru son soutien à l'investissement des collectivités territoriales, afin de compenser une partie de la contrainte budgétaire liée à la baisse des dotations. Ce soutien s'est ensuite maintenu à un niveau élevé et avec une grande stabilité.

Le projet de loi de finances pour 2020 reconduit au niveau de 2019 les montants de la DETR, de la DSIL et de la DPV. La dotation de soutien à l'investissement des départements, la DSID, issue de la réforme de la dotation globale d'équipement des départements, la DGE, intervenue en 2019, est également reconduite à hauteur de 212 millions d'euros pour 2020. Au total, l'État a engagé 2 milliards d'euros en 2018, 2019 et 2020 sur la mission RCT pour soutenir l'investissement local.

Les modalités de gestion de ces concours ont beaucoup évolué au cours des deux dernières années en direction, comme M. Jerretie l'a souligné, d'une association beaucoup plus étroite des élus locaux et des parlementaires – qui siègent dans les commissions DETR – , ainsi que d'une plus grande transparence concernant l'utilisation des crédits. Les listes des projets financés par la DSIL et la DETR sont désormais publiques ; des bilans d'utilisation et des analyses ont été publiés en septembre dernier sur le site internet du ministère. Comme l'a souligné M. Jerretie, les dotations ont un puissant effet de levier sur l'investissement local. Je tiens en outre à préciser qu'une partie des dotations – la DSIL en particulier – est fléchée vers la transition écologique.

Le projet de loi de finances pour 2020 ne modifie pas les règles qui encadrent la gestion des dotations : il faut laisser vivre le cadre juridique, encore récent, quitte à en améliorer la pratique quand cela sera nécessaire.

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