L'article 50 ne vise pas à remettre en cause le mécénat d'entreprise. Il s'agit d'une dépense fiscale très dynamique, dont le coût a décuplé depuis sa création et qui frôle désormais le milliard d'euros. Encadrer le mécanisme est donc non seulement légitime, mais aussi responsable.
En lisant les exposés sommaires des amendements, j'ai l'impression que cela va tarir tous les dons et donc supprimer le mécénat. Tel n'est pas le cas ! On ne change rien jusqu'à 2 millions d'euros de dons par entreprise – et non par groupe –, ce qui correspond à la quasi-totalité des dons. Au-delà de ce plafond, on ne supprime pas l'avantage, mais on en réduit simplement l'intensité, qui restera tout de même de 40 %.
En outre, les dons relevant du « périmètre Coluche » ne sont pas concernés par ce plafond, et continueront à ouvrir droit à une réduction d'impôt de 60 %, quel que soit leur montant. Dans ces conditions, on ne peut pas dire que le mécénat est sur la sellette.
L'impact budgétaire maximal est évalué entre 100 et 130 millions d'euros. Cela revient à maîtriser le coût du mécénat à son niveau de 2015. Or, en 2015, on ne disait pas que le mécénat était en danger !
Concernant l'impact du dispositif, moins de cent entreprises seront concernées –soixante-dix-huit d'après l'évaluation préalable –, soit un millième des entreprises mécènes. Toutes les très petites (TPE) et petites et moyennes entreprises (PME) continueront à bénéficier d'un avantage fiscal de 60 %. Seules certaines grandes entreprises seront concernées par le plafond. En outre, parmi ces dernières, celles qui font des dons à des organismes aidant des personnes en difficulté bénéficieront toujours de l'avantage de 60 %, même si ces dons dépassent 2 millions d'euros, selon la « logique Coluche ». Il faut donc vraiment relativiser l'impact !
J'ajoute – et je cite les documents des organismes actifs dans le mécénat – que l'avantage fiscal n'est pas la principale motivation des entreprises mécènes, surtout pour les plus grandes. Je vous renvoie au baromètre de l'Association pour le développement du mécénat industriel et commercial (Admical) : ce qui compte avant tout, c'est l'image de l'entreprise, ainsi que d'autres éléments comme la contribution à l'intérêt général ou l'ancrage territorial. L'avantage fiscal n'est donc pas la première raison du mécénat et beaucoup d'entreprises n'y ont pas recours sur tout ou partie de leurs dons. En 2017, sur 3,6 milliards de dons, seuls 2 milliards ont été déclarés au titre du mécénat. Autrement dit, certaines entreprises ne demandent pas l'avantage fiscal.
Quant aux inquiétudes exprimées pour les associations d'aide aux personnes en difficulté, je rappelle que les dons qui sont destinés à ces dernières ne sont pas plafonnés. Je proposerai d'ailleurs un amendement qui étend raisonnablement le champ des dons aux organismes aidant les personnes en difficulté. Je pense que nous serons nombreux à nous retrouver sur cette proposition.
À toutes fins utiles, je rappelle également que le taux de l'impôt sur les sociétés (IS) diminue. En conséquence, il n'est pas absurde que les avantages fiscaux qui permettaient d'une certaine façon de compenser un taux élevé diminuent aussi. Ainsi, une entreprise qui a payé 33,3 millions d'euros d'IS en 2019 et se voit appliquer une réduction d'impôt de 6 millions – payant in fine 27,3 millions d'euros –, sera toujours gagnante de 700 000 euros en 2020 avec le même niveau de dons, même si la réduction passe à 40 %.
Le dispositif français de mécénat est le plus généreux au monde. Même en réduisant le taux à 40 %, nous sommes toujours devant l'Espagne et bien loin devant les autres pays d'Europe. Ainsi, en Italie, le dispositif fiscal du mécénat ne prévoit qu'une déduction de 2 % de l'assiette imposable. Pourtant, les entreprises italiennes sont parmi celles qui donnent le plus !
La réforme est donc équilibrée et utile, au moment où le rapport de la Cour des comptes démontre les abus liés au mécénat. Il s'agit de moraliser le système.