Cet article est extrêmement important. Par la confusion qu'il peut susciter, il en devient même dangereux.
Je vous invite d'abord à comparer deux chiffres : la fraude fiscale, estimée à 21 milliards d'euros, et la fraude sociale, évaluée à 672 millions d'euros. Il ne s'agit pas de relativiser ce deuxième montant – nous parlons bien de fraude – , mais juste de rappeler un ordre de grandeur.
J'illustrerai mon propos par l'exemple de la fraude aux prestations familiales. L'escroquerie identifiée par la Caisse nationale des allocations familiales – CNAF – coûte 275 millions d'euros sur un montant total de 88 milliards d'euros. Elle est le fait de gens qui détournent volontairement l'argent public.
Il existe par ailleurs un système alimenté par le dispositif de droits existant en France, caractérisé par la complexité. Des droits sont ouverts à des familles de plus en plus modestes, qui ne parviennent pas toujours à les atteindre. Leur situation change en moyenne vingt-quatre fois par mois et la CNAF gère 20 000 règles de droit ! Ces chiffres montrent la complexité de la situation.
Il en résulte l'existence de sommes indues. En entourant la tricherie d'une sorte de flou, voire en en faisant une course au vol d'argent, on institue une petite musique englobant toutes les familles, y compris celles à qui des sommes sont indûment versées en raison de la complexité du système de droits.
Ainsi, on tend à placer tout le monde dans le même sac et à diffuser cette musique selon laquelle toutes ces familles modestes qui souffrent de la complexité du système de droits seraient composées de tricheurs et de voleurs. Cet article me semble véritablement dangereux et pervers.