Il est quand même agréable de voir que l'on s'intéresse à la collectivité de la recherche, cela fait quelques années que nous l'espérions. De ce fait, nous avons aujourd'hui créé une forte attente, à laquelle j'espère que nous serons capables de répondre, en tout ou partie.
Voici quelques années, seulement 7 % des dossiers déposés à l'ANR étaient financés. Cela avait conduit à décourager la quasi-totalité des chercheurs, qui ne répondaient même plus aux appels d'offres, anticipant que le taux de succès était quasiment nul. Aujourd'hui, nous ne sommes plus très loin d'un taux de 16 % et notre objectif est de parvenir progressivement à 25 ou 30 %.
Les sources de financement de la recherche en santé sont multiples, notamment celle venant des acteurs caritatifs tels la Ligue contre le cancer, et avec différentes fondations comme la fondation pour la recherche médicale (FRM), il serait souhaitable de mettre en place un filtre unique confié à l'ANC, donnant lieu au dépôt d'un dossier unique, ce qui permettait de réduire le temps consacré par les chercheurs aux démarches administratives, au bénéfice de leurs activités de recherche, dans des congrès ou dans leurs laboratoires.
Nous avons certainement besoin d'augmenter le nombre de postes de chercheurs. Néanmoins, Je vais citer une réflexion qui m'avait un peu heurté mais qui est légitime, d'un de mes collègues professeur au collège de France qui disait : « Aujourd'hui, si j'étais recruté au CNRS sur un poste de chercheur, dès le lendemain, je ferais un procès à mon établissement. En effet, celui-ci m'a recruté sur un poste de fonctionnaire, mais ne va pas me donner les moyens de faire les travaux pour lesquels il m'a recruté ». Nous avons un problème d'adéquation entre le nombre de postes et l'enveloppe budgétaire alloué au fonctionnement des laboratoires.
Nos propositions ne remplacent pas la précarité, parce que je pense à tous ces CDD qui vont être transformés en CDI, et à tous ces post-doctorants qui vont enfin avoir un statut alors qu'aujourd'hui, ils ne reçoivent que de petites subventions des établissements et ne savent jamais vraiment de quoi demain sera fait.
Nous constatons aujourd'hui un vrai problème sur la thèse, qui est pratiquement devenue un repoussoir, et nous comprenons pourquoi. De moins en moins de jeunes veulent se lancer dans une thèse, car elle va les mobiliser pendant quatre ans en moyenne, et va les « ultra-spécialiser » dans un domaine qui, à l'issue de leurs travaux, ne leur offrira plus nécessairement de débouchés en emplois, dans un monde qui va vite et où il faut être adaptable.
De plus, les salaires des étudiants en thèse sont complètement en inadéquation avec leur niveau de qualification. Le niveau de salaire de mes étudiants en master à leur entrée dans la vie active est bien plus élevé que celui d'un étudiant en thèse. Il faut rééquilibrer cette situation et rendre les thèses plus attractives.
Encore aujourd'hui, dans l'industrie, dans la fonction publique, dans les collectivités territoriales, dans l'administration, les thésards font « peur », du fait de leur spécialisation qui conduit à s'interroger sur leurs capacités d'adaptation et sur leur plus-value. Nous constatons un problème de méconnaissance des thésards à l'égard du secteur privé et, à l'inverse, du secteur privé vis-à-vis de la plus-value de l'étudiant qui a passé sa thèse. Les périodes de rencontre entre ces deux mondes doivent être multipliés, sachant que statistiquement, 80 % des étudiants en thèse travaillant dans le secteur privé. Ils ne seront pas fonctionnaires et il faut les préparer aussi à cela.