Je vous remercie pour votre présence, monsieur le ministre, car votre audition est évidemment très attendue. Comme vous le savez, la mission d'information n'a pas l'intention de mettre en cause l'efficacité et la réactivité des secours face à cet incendie d'une exceptionnelle intensité, à commencer par l'action des pompiers et des policiers à propos de laquelle de nombreuses personnes que nous avons auditionnées n'ont pas tari d'éloges. En revanche, le temps d'une réflexion plus générale sur la gestion des accidents industriels est venu : c'est tout l'objet de cette mission ainsi que du rapport que j'aurai à rédiger à l'issue de ses travaux.
L'alerte et l'information de la population sont essentielles. On a beaucoup parlé des sirènes, qui ont fait débat tant au niveau local que national : on peut estimer qu'aujourd'hui ce système est à tout le moins obsolète, ou en tout cas insuffisant pour informer convenablement la population en cas de risque majeur. Selon vous, que convient-il de faire sur ce sujet ? Je sais par ailleurs que l'État met en oeuvre un plan assez conséquent de renouvellement et de rénovation de ces sirènes : un tel investissement est-il le plus judicieux ? Ne vaudrait-il pas mieux s'orienter vers d'autres systèmes, comme le Cell broadcast que le président a évoqué, et qui permet d'envoyer un SMS à toute personne équipée d'un téléphone mobile dans une zone géographique donnée ? Rien n'empêche de coupler cette technologie avec les sirènes en vue d'informer la population, et elle fonctionne en toutes circonstances et en tous lieux. Et contrairement aux sirènes, elle peut être également déclenchée en pleine nuit sans réveiller des personnes qui n'ont pas forcément besoin de l'être. Ce système doit-il selon vous être déployé en France ? Dans l'affirmative, peut-on imaginer un délai de déploiement ?
Je suis par ailleurs aujourd'hui tout à fait convaincu que nous devons travailler sur la culture du risque au sein de la population, particulièrement celle qui est exposée aux risques industriels. Si les choses sont plutôt bien organisées dans notre pays pour ce qui est du risque nucléaire – la population vivant à proximité des centrales est relativement bien informée –, c'est un peu moins le cas pour les sites industriels « Seveso », qu'ils soient classés en « seuil bas » ou « seuil haut ». Nous l'avons vu lors de l'incendie : les populations se sont parfois trouvées démunies face aux événements. Votre ministère a-t-il à ce stade entamé une réflexion à ce sujet ? Avez-vous des propositions dans vos cartons ?
J'en viens à la réglementation applicable aux sites « Seveso » : ne conviendrait-il pas d'accélérer la réflexion sur les établissements industriels classés dans cette catégorie, et plus particulièrement sur ceux qui produisent et stockent des produits dangereux en zone urbanisée ?
Ne pourrait-on pas également imaginer que les sites « non Seveso », mais néanmoins à risque, soient régulièrement inspectés par les services de l'État, et notamment par les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) ? Pour l'heure, ces inspections ne sont pas systématiques.
Par ailleurs, un travail d'actualisation des procédures dans un cadre interministériel est-il en cours notamment avec la direction générale de la santé (DGS) ou avec la Direction générale de la prévention des risques (DGPR) du ministère de la Transition écologique et solidaire ?
Autre point important : le document d'information communal sur les risques majeurs, que notre président a évoqué. Ne conviendrait-il pas tout d'abord que le ministère rappelle aux collectivités locales, y compris les grandes villes et les agglomérations, leur obligation d'actualiser et de réactiver ces documents ? Leur création remonte en effet aux années quatre-vingt-dix, leur objet étant de recenser les risques naturels et technologiques d'un territoire et d'exposer les principaux moyens d'alerte et de sauvegarde des personnes et des biens.
Si les DICRIM sont obligatoires, tout comme leur communication à la population, les voies par lesquelles les collectivités locales doivent les communiquer ne sont pas précisées. Il me semble important d'agir sur ce point afin d'être certain qu'un minimum d'informations est garanti sur l'ensemble du territoire.
Ne conviendrait-il pas non plus de tirer un bilan des commissions de suivi de sites (CSS), qui se sont substituées aux comités locaux d'information et de concertation (CLIC) ? Si elles sont réglementairement tenues de se réunir au moins une fois par an, elles ne fonctionnent cependant pas partout correctement pour informer les populations sur les mesures de maîtrise du risque industriel et des nuisances. Comment s'assurer d'ailleurs d'une meilleure participation des habitants – au-delà des associations qui peuvent les représenter – vivant à proximité de sites industriels potentiellement dangereux ?
Enfin, les maires doivent-ils être, selon vous, davantage associés à l'élaboration des PPI, comme certains le réclament, dans le but de planifier des réponses supposées adaptées aux risques particuliers à chacun des sites industriels concernés ?