J'appelle votre attention sur la disparition annoncée du baliseur de Morlaix, le bien nommé Charles-Cornic.
En mars 2018, un rapport du Conseil général de l'environnement et du développement durable a préconisé un plan national d'optimisation et de renouvellement de la flotte de l'armement des phares et balises. Dans ce cadre, le retrait de certains navires est à l'étude.
Les équipages de ces bateaux sont chargés de la pose et de l'entretien du balisage côtier dans leur secteur d'intervention. Les quatre marins du baliseur de Morlaix entretiennent ainsi 180 édifices – tourelles en mer, ouvrages à terre de type croix ou bouées flottantes – qui sont autant de repères essentiels à la navigation dans la zone maritime allant des Côtes-d'Armor à Brignogan, très fréquentée des plaisanciers, et où les côtes et les marées peuvent souvent se révéler dangereuses.
La baie de Morlaix, en particulier, est une échancrure qui se caractérise par son étroitesse et sa faible profondeur. Les outils de type GPS n'y remplaceront jamais la lecture visuelle du balisage, dont la qualité est indispensable pour arriver à bon port.
Si, demain, les baliseurs de Morlaix et de Brest sont remplacés par un seul baliseur océanique basé à Brest, nous avons tout lieu de craindre que cette qualité s'en ressente. La zone d'intervention et le nombre d'édifices à prendre en charge seront doublés ; même un navire plus puissant que les baliseurs actuels mettra la journée à aller, par exemple, d'Audierne à Locquirec. Les délais d'intervention s'en trouveront considérablement rallongés : en cas de bouée éteinte ou de pollution, il faudra attendre plusieurs heures !
Bien sûr, un objectif d'optimisation du balisage peut se concevoir. Permettez-moi toutefois de vous indiquer, madame la secrétaire d'État, que la modernisation de la flotte n'améliore en rien le balisage. L'entretien des établissements de signalisation maritime sur support fixe repose avant tout sur des travaux de maçonnerie et de peinture. C'est l'intervention humaine, le savoir-faire qui assure la qualité du balisage, et non le bateau. Il faut d'ailleurs noter qu'en France, le nord du Finistère compte un nombre particulièrement élevé de tourelles.
Marin avisé, corsaire audacieux, Charles Cornic s'est employé pendant la Révolution à établir un plan de la baie de Morlaix, effectuant le balisage à ses frais. Comment imaginer le baliseur qui porte son nom, non pas même retiré, mais transféré en Normandie, à Granville ? La remarque n'a rien d'anecdotique : outre l'importance de la référence historique, elle fait ressortir le caractère incompréhensible de cette décision. Celle-ci donne l'impression que l'on redistribue la flotte selon des critères avant tout budgétaires, et non opérationnels. Je ne peux admettre que le littoral de ma circonscription soit une variable d'ajustement.
En outre, ce sont quatre marins qui devront s'adapter et changer de port d'attache. Que répondre à leur inquiétude ?
De manière plus générale, le retrait de navires fait craindre à terme une externalisation de ce service à des prestataires privés. Je souhaiterais au passage que le ministère clarifie sa position et ses intentions sur ce point. Je vous demande, madame la secrétaire d'État, de prendre la mesure de cette question et de bien vouloir réfléchir à une réorganisation de la flotte qui maintienne un baliseur dédié à la baie de Morlaix.