Il y a plus de quarante ans, Edgar Pisani publiait son ouvrage Utopie foncière. Dès sa publication, cet essai a été considéré comme révolutionnaire, car il démontrait qu'en France, la propriété telle qu'elle est décrite dans le code civil est le résultat d'un accident historique. Ministre de l'agriculture puis ministre de l'équipement et du logement sous la présidence du général de Gaulle, son auteur a montré que de nombreuses sociétés vivent et s'épanouissent avec une autre définition juridique et économique de l'appropriation du sol. Fruit de notre histoire issu du code napoléonien, la propriété était ainsi, pour la première fois, remise en cause au profit d'un rapport au sol plus collectif et universel.
Avec le recul, cet essai se révèle toujours d'actualité, puisqu'il aborde l'enjeu majeur que représente la maîtrise du foncier rural et urbain et, à travers lui, l'avenir de l'humanité et la fragilité des écosystèmes.
Quarante-deux ans plus tard, nous voici réunis à l'Assemblée pour débattre d'une proposition de loi visant à réduire le coût du foncier et à augmenter l'offre de logements accessibles aux Français.
Quarante-deux ans ont passé, mais les problèmes demeurent et mettent à mal tant la vie quotidienne de nos concitoyens que la viabilité de nos villes et de nos territoires.
Quarante-deux années ont passé, nos villes ont grignoté du terrain, mais nos concitoyens font plus que jamais face à une situation douloureuse en matière de coût du foncier et du logement.
Le prix du foncier a augmenté de 71 % en dix ans, ce qui occasionne pour de nombreux Français des difficultés à se loger dignement et librement, notamment dans les zones tendues de notre pays.
Or, nous l'avons observé à l'occasion du mouvement des gilets jaunes, le coût du foncier grève in fine le pouvoir d'achat des Français et entrave leur qualité de vie. Selon l'INSEE, l'Institut national de la statistique et des études économiques, la part des dépenses contraintes dans le revenu des ménages est passée de 12 % en 1960 à près de 30 % en 2017, et c'est bien le logement et les dépenses qui y sont associées qui, en définitive, plombent leur pouvoir d'achat.