Intervention de Stéphane Peu

Réunion du mercredi 27 novembre 2019 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Peu :

À mon tour, je voudrais remercier le groupe socialiste et le rapporteur pour leur proposition de loi. Il me semble que nous avons affaire, depuis plusieurs décennies, à un grand paradoxe. La notion d'écocide est née au début des années 1970, au moment de la guerre du Vietnam, après l'utilisation massive par l'armée américaine de l'Agent orange, un défoliant chimique qui a eu des conséquences dramatiques pour la population et pour l'environnement – conséquences encore visibles aujourd'hui. À la suite du conflit, le droit international a évolué, notamment le droit de la guerre. En 1976, la convention sur l'interdiction d'utiliser des techniques de modification de l'environnement à des fins militaires ou toutes autres fins hostiles (ENMOD) a exclu l'usage de toute arme pouvant avoir des conséquences irréversibles sur l'environnement. Au début des années 2000, le Statut de Rome de la Cour pénale internationale a qualifié de crime de guerre l'utilisation d'armes ayant des conséquences irréversibles sur l'environnement.

Ainsi, les atteintes irréversibles sur l'environnement sont punies en temps de guerre et non en temps de paix, ce qui est paradoxal et contraire même à la hiérarchie existant entre le droit de la guerre et le droit commun. Certains pays se sont dotés, dans leur législation nationale, d'un droit relatif à l'écocide – le Vietnam, entre autres. La proposition de loi vient utilement corriger ce paradoxe ; elle place notre droit à la hauteur des enjeux du XXIe siècle en matière d'environnement.

Nous saluons le fait que la proposition de loi soit plus précise et, partant, moins sujette à caution que celle discutée au Sénat il y a quelques mois. Néanmoins, la notion d'acte intentionnel peut être complexe à définir. Tout en soutenant votre proposition de loi, nous nous interrogeons sur l'intérêt qu'il aurait pu y avoir à dissocier l'écocide de l'écocrime, comme le trafic de déchets ou d'animaux, qui obéissent à des logiques typiquement mafieuses sans relever directement de l'écocide. Toujours est-il que nous pensons que votre proposition de loi représente une formidable avancée. L'écocide doit devenir le cinquième crime contre la paix aux côtés du crime contre l'humanité, du crime de guerre, du génocide et du crime d'agression.

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