Intervention de Anthony Cellier

Réunion du mercredi 27 novembre 2019 à 9h35
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAnthony Cellier :

La rénovation énergétique est un sujet transpartisan, au même titre que la déclaration d'urgence écologique et climatique, qui n'est pas l'apanage du groupe Socialiste mais bien un consensus général accepté dans la loi énergie-climat.

La proposition de loi que vous nous présentez en est la preuve. Je salue le groupe Socialiste pour l'inscription de ce sujet dans sa niche parlementaire. Oui, la rénovation énergétique est une de nos priorités, parce qu'elle touche au quotidien des Françaises et des Français au travers de leur facture d'énergie. Elle représente un levier fort pour atteindre la neutralité carbone en 2050.

Le Gouvernement agit sur tous les plans. Avec la loi ELAN, nous fiabilisons et rendons opposable le diagnostic de performance énergétique ; avec la loi énergie-climat, nous misons sur le triptyque information, obligation de rénovation et sanction, et nous créons les outils pour une véritable lutte contre la fraude aux certificats d'économies d'énergie (CEE). Au sein du projet de loi de finances pour 2020, nous votons la transformation du crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE) en prime, dès 2020 pour les plus modestes et en 2021 pour l'ensemble des ménages : l'avance financière, qui empêchait souvent les travaux de rénovation, n'est plus nécessaire ; la prime est accordée en fonction des revenus et de l'efficacité des gestes ; enfin, cela représente une nouvelle mission pour l'ANAH.

Nous fiabilisons le label « reconnu garant de l'environnement » (RGE) ; nous travaillons sur une ordonnance sur les copropriétés avec un mécanisme de passerelle pour le vote des travaux de rénovation ; nous avons publié le décret relatif aux obligations d'actions de réduction de la consommation d'énergie finale dans des bâtiments à usage tertiaire, décret qui avait été annulé par le Conseil d'État sous le précédent quinquennat ; nous avons nommé une coordinatrice interministérielle du plan de rénovation énergétique des bâtiments.

Nous améliorons, simplifions, rendons les démarches plus lisibles. Beaucoup de nos concitoyens se disent perdus face à la multitude d'aides et agacés par le démarchage agressif. Nous lançons le service d'accompagnement pour la rénovation énergétique (SARE), développé en coopération avec les collectivités territoriales, doté de 200 millions d'euros. Nous poursuivons la restauration de la confiance des ménages avec une campagne de communication pour mieux informer sur les aides et sur les moyens d'éviter les fraudes.

Depuis juin 2017, nous avons avancé, gagné du terrain et agi sur tous les fronts : financement, simplification, lisibilité, confiance, aide accrue aux plus modestes. C'est alors qu'arrive votre proposition de loi, dont le principal défaut est de tout balayer : elle percute la réforme de la prime unifiée, qui n'est pas encore entrée en vigueur et n'a donc pas pu produire ses effets. Vous envoyez un mauvais signal, celui de l'instabilité, aux personnes qui veulent rénover et aux professionnels du secteur.

Autre problème, le titre de votre proposition de loi est trompeur : vous ne créez pas une prime mais une avance, qui devra être remboursée, votre subvention ne dépassant pas 20 à 30 %. Celle-ci risque d'ailleurs de léser nos concitoyens les plus modestes. De plus, vous ne précisez pas l'articulation avec les certificats d'économies d'énergie. Les risques sont grands : doublons, effets d'aubaine, inflation, fraudes.

Le financement par tranche constitue un véritable frein à la rénovation : un propriétaire modeste voulant rénover son logement de classe E en 2021 ne bénéficiera d'aucune avance et devra attendre 2027, soit sept ans, pour en bénéficier ! Par ailleurs, que deviennent les logements classés C ? Vous ne pouvez pas rectifier cet oubli par amendement sous peine d'irrecevabilité.

Vous revenez sur le dispositif de la loi énergie-climat prévoyant la possibilité pour le Parlement de voter des sanctions en 2023 – cette date avait fait consensus dans l'hémicycle –, dont l'interdiction de location et de vente des passoires.

Ainsi, même si vos intentions sont louables, votre texte vient percuter les réformes en cours, présente des incohérences ou des oublis importants et envoie un mauvais signal. Le groupe La République en Marche votera donc contre cette proposition de loi.

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